
de laudibus legiàn angliae , où il Te propofe d etâ- I
blir la fupériorité des loix angloifes fui' les loix
romaines : ce qui peut fe foutenir ; mais ce qui eft
étrange , il leur donne l’avantage de l’anciennete,
& il en fait remonter l’origine bien avant la fondation
de rome. C e t efprit s’ eft confervé jufqu à
des temps très-pollérieurs ; & à voir le nombre
des paragraphes que Haie- employa ( i ) , fur la fin
du dernier fièçle , pour prouver que dans le peu
de cas où la loi civile eft admife en Angleterre,
elle n’y eft point fuivie par déférence aux ordres
de Juftinien (chofe qui fûrement n’ avoit pas be-
foin de preuves), on s’apperçoit q u e , maigre
fes lumières fur la jurifprudence , il avoit confervé
à cet égard une forte de chaleur de
parti.
On fuit deux efpèces de loix en Angleterre , la
loi non écrite, nommée aufli la commune loi
.( common Law ) , & la loi ftatuee , ( ftatute Law ).
La loi non écrite eft ainfi appellée 3 non qu elle
ait été tranfmife uniquement de bouche 3 mais
parce qu’ elle n’ eft fondée fur aucun a£le connu
de la puifïance légiflative. C ’eft de la coutume
immémoriale quelle tire toute fa force , & elle
a fon origine , foit dans les anciennes loix faxon-
nesij foit dans les a&es du parlement 3 poftérieurs
à la conquête , fur-tout dans ceux qui précédent
Je règne de Richard I er , & dont les originaux
font perdus.
Les principaux articles de la commune loi regardent
l’ordre des fucceflions , les differentes
manières d’acquérir une propriété ,^& les diverfes
.conditions requifes pour la validité des contrats :
en chacun de ces points elle diffère du droit
civil. Ainfi, par la commune lo i, tes terres paflent
à l’aîné, à l’exclufion des autres enfansj ainfi
encore, un titre fuffit pour revendiquer une prop
r ié té , au lieu que le droit civil exige quelquefois
la tradition y &c.
On va chercher les décifions de la commune
loi dans ce qu’on appelle PrAteritorum memona
rventorum , 8ç elles fe trouvent dans la collection
des jugemens qui ont été rendus de temps immémorial
, & qui fe confervent foigneufement
fous le titre de Records. Afin que les principes
établis par cette fuite de jugemens foient connus,
on en donne des extraits au public, fous le nom
de Reports ; & ces reports remontent fans lacune
jufqu’au règne d’Edouard II inclufivement.
Outre cette colleétion , qui eft volumineufe,
il y a d’anciens auteurs dont l’autorité eft fort
grande parmi les jurifconfultes $ tels font Glanyil,
qui écrivoit fous Henri I I } Bracton , qui ecriyoit
fous Henri III ; Fleta, Littleton. Parmi les écrivains
plus modernes , il ne faut pas oublier fir
Edward Coke , premier des grands juges fous
Jacques I er; il a écrit quatre livres d’inftituts, &
il eft aujourd’hui l’oracle de la loi commùne. *
La loi non écrite renferme de plus quelques coutumes
particulières, qui font un relie des anciennes
loix faxonnes, 8e qui fe font maintenues
malgré la conquête. Telle eft celle qu’on nomme
Gavelkind, dans le comté de K en t, par laquelle
les terres fe .partagent entre les fils également :
telle eft encore celle qui eft appellée Borough Eh-
glish y 8c qui a lieu dans quelques diflriéts : fuivant
celle-ci, les terres palfent au cadet.
Le droit civil eft aufli compris dans la loi non
écrite, parce qu’on ne l’obferve qu’en vertu d’une
coutume immémoriale ; on le fuit dans les cours
eccléfiaftiques, dans la cour de l’amirauté, 8c
dans les cours des deux univerfités 5 mais il n’y
eft que lex fub lege graviori, & ces différentes
cours doivent fe conformer aux aétes du parlement
8c au fens donné par les cours de la commune
loi. , : ... .
La loi écrite eft la colleétion des divers aétes
du parlement, dont les originaux font confer-r
vés avec fo in , fur - tout depuis le règne d’Edouard
III. Les jurifconfultes diftinguent les aétes
publics ou particuliers ,* les a été S abrogatoires ou
déclaratoires ; les aétes extenfifs ou reftriftifs de la
commune loi 5 mais il fuffit de dire ici que tous
ces aétes étant l’effet de la réunion des trois orp
dres du corps légillatif, ils réduifent au filence ,
! dans tous les cas où ils prononcent, & la commune
loi y & les loix particulières ; que les juges
j doivent les fuivre , lors même que les parties né-
gligeroient de les alléguer.
La jurifprudence civile de Y Angleterre eft beaucoup
plus défeétueufe que la jurifprudence criminelle
5 mais fes défauts ne portent pas fur les
droits effentiels des citoyens, 8c on ne çoqnoît
pas encore de nation qui en ait une meilleure.
Je parlerai de la jurifprudence criminelle dans
les ferions peuvième 8c dixième.
S e c t i o n V I I I e,
Des dijférens tribunaux de 1‘Angleterre,
Les différens tribunaux pour l’admipiftratiqn delà
juftice font :
I. La cour des plaids commpns , common pleas.
Elle faift ■ . anciennement partie de ïaula regis $
mais ce tribunal fuivant toujours la perfonne du
ro i, les particuliers avoient beaucoup de peine à
faire inftruire leurs caufes j un des:- articles de
la grande charte décida que la cour des communs
plaids, auroit déformais un lieu fixe (2) 5 8c depuis
ce temps elle a fiégé à Weftminfter. Elle eft com-
pofée du lord premier juge des plaids communs,
8c de trois autres juges : elle juge en première inf-
( 1 ) Dans fon biftoire de la commune loi.
£ 2, ) Communia placita non fequanpir cufiam npftram , fed tene^ntur îjj âliquo loco certo, -Matpiaçharta, cap, xx?
tance les' procès entre particuliers ; les appels, 1
ou writs y ( écrits d erreur, ) font portés à la cour
du banc du roi.
IL La cour de téchiquier. C ’étoit originairement
un tribunal établi pour juger les caufes qui
intérefloient le roi ou fes ferviteurs : elle connoit de
tout ce qui regarde les revenus de l’ état. Elle eft
compofé du chef- baron de l’échiquier 8c de trois
autres juges. Les writs d'erreur font portés à 1^
cour de la chambre de l’échiquier, dont nous parlerons
tout - à - l’heure. .
III. Le tribunal dubancduroi3 kings-bench3 forme
la partie de ïaula regis 3 qui fubfifta après le démembrement
de la cour des plaids communs. C ’eft
le tribunal dont l’autorité eft la plus étendue : il
a la furintendance des divers corps de l’Angleterre;
& il retient les diverfes jurifdiélions dans
leurs bornes refpeélives. Il connoit, fuivant le
but de fa-première inftitution, de toutes les cau-
-fes criminelles, 8c même de plufieurs caufes purement
civiles. Il eft compofé du lord premier juge
du banc du ro i, 8c de trois autres juges. Les
writs d’erreur en font portés à là cour de la chambre
de i’ëchiquier, ou , daqs le plus grand nombre
de cas , à la chambre des pairs.
Le banc du roi exerce ïhabeas corpus Ci ) ,
c’ eft-à-dire, que fi un particulier en fait arrêter un
autre, le prifonnier peut exiger qu’on le transfère
dans'la'prifon du banc du roi : on y eft mieux
lo gé, 8c on y a plus de liberté que dans les autres
(2) , mais ib%n coûte plus cher , 8c ce privilège
n’ eft guère réclamé que par les banqueroutiers
8c les débiteurs de mauvaife fo i, qui n’ayant que
des rentes viagères ou du papier , aiment mieux
manger leurs revenus dans cette prifon , que
payer leurs dettes. Au relie, la loi en Angleterre
défend de faifir les biens lorfqu’on a le corps & fie
vic-e- verfâ.
Chacun de ces trois tribunaux a quatre juges,
dont le préfident eft appell é lord ^premier-juge 3
en y ajoutant le nom de fon tribunal. Ces douze
magiftrats , qu’on appelle aufli les douze grands juges
font obligés., deux fois par an, à Noël 8c à la
Pentecôte, de faire le tour de Y Angleterre 3 fuivant
les départemens qui leurfont aflignés , pour y juger
les caufes civiles 8c criminelles. Us tiennent alors
les cours d’aflife dont je parlerai bien-tôt.
IV . La cour de la chambre de l'échiquier. Cette"
cour, fuivant qu*elle eft formée , reçoit les writs
d’erreur ou de l’échiquier, ou du banc du foi.
Lorfqu’ elle eft formée des douze juges, qui
-compofent les tribunaux dont on vient de parle
r , elle délibère fur des caufes importantes Sc
difficiles, avant que le jugement en foit prononcé
dans les cours où elles font pendantes. Le chancelier
y aflifte quelquefois.
V . La cour du chancelier. Indépendamment des
pouvoirs qui font attachés à peu près par-tout à
cet officier, cette cour eft de plus e t que les Jurifconfultes
anglois appellent ojpcina juflitis. Pour
expliquer ces mots, je dois faire remarquer une
nouvelle différence entre les loix angloifes 8c les
loix romaines.
Par celles-ci, un homme avoit droit d’en citer
un autre devant le préteur , ou même de l’y mener
de force , manus injiciendo ; mais 'en Angleterre
, la feule manière d’obliger un homme à
comparoître pardevant un tribunal , c’eft d’obtenir
de la chancelerie un writ au nom du r o i ,
qui lui en donne l’ordre. Ces writs, qui ne peuvent
fe refufer fans contrevenir à la grande charte
(3 ), font des formules toutes préparées, 8c
femblables en cela aux anciennes aftiones legis ;
elles font tellement adaptées, chacune à un certain
genre d’aétion, que lorfqu’il fe préfente un
nouveau cas pour lequel il n’exifte aucun -writ
connu, 8c que les officiers de la. chancellerie af-
femblés ne s’accordent point à en former un ,
le parlement lui-même , en vertu d’un flatut d’Edouard
I , doit y pourvoir (4).
La cour de chancellerie a une autre fonction;
elle eft une des deux cours d’équité ; 8c la cour
de l’échiquier, formée d’une certaine manière ,
eft l’autre cour d’équité. C e mot de cour d’é-
quité ne fignifie pas au refte que les juges peuvent
s’écarter du difpofitif de la lo i , 8c fous
prétexte d'éviter les 'inconvéniens paffagers d’une
application littérale , introduire une adminiftration
arbitraire de la juftice. Quel qu’ait été dans l’origine
le but de l’inftitution de ces deux cours ,
elles ne diffèrent aujourd’hui des cours de la commune
lo i, qp’ en ce quelles offrent des remèdes ou
des moyens légaux, dans des cas où celles-ci
perfiftant opiniâtrément à ne juger que fur le fond
même des writs, n’en peuvent fournir aucun. C ’eft
i ainfi que les cours d’équité peuvent, lorfqu’011
( 1 ) Nous dirons plus bas ce que c’èft que Vhabeas corpus, '
( a )'.Le$ étrangers qui n’ont pas été en Angleterre , ne peuvent fç former une idée de la beauté de la prifon du roi.
11 y a plufieurs billards , des cafés & des falles très-propres; les chambres y font fort ornées. La porte de la prifon eft
çuyerte 4. tout le_naop.de î les piifonniers.y. jouiflent de la plus grande liberté.
( 3 ) Nulli difFeremus aut negabimus jufHtiam vel reâum. Cap. ap.
( 4 J Ces Writs règlent tellement toute la procédure , qu’ils donnent leurs noms à prefque tous les divers aétes ; çfr
•nom fe tirant ordinairement du ‘premier met'de l’ancien Writ latin, & étant purement technique, leur titre fuffit foa-
venc pour en fentir la fignifiçation. Ainfi un^ pont eft una'ete qui oblige à donner caution celui qui refufe de paioître
jen jugement : Pone per- vadiumJalvos plegios. ■ Celui-qui a dénoncé un délit’ , & qui demande fa portion de l’amende
fixée par un ftatut pénal, obtient un afte de qui tara, parce que le Writ commence par ces mots : qui tjm pro
domino rege , quàm pro fcipfo in hac parte ftqwtur: Orr demande un Writ de fub poena pour faire comparoître des témoins,.
& celui qui l’a reçu eft dit être/fub pasna > &c.