
» X L IX . Nous ne vendrons , ne refuferons,
u ou ne différerons la jultice à perfonne.
» L. Nos marchands, s'ils ne foftt publique-
99 ment prohibés, pourront publiquement aller &
99 venir dans le royaume, en fortir, y demeurer,
99 le traverfer par terre ou par eau, acheter, ven-
99 dre, félon les anciennes coutumes, fans qu'on
s» puiffe impofer fur eux aucune maltote, excepté
99 en temps de guerre, ou quand ils feront d'une
» nation en guerre avec nous.
99 LI. S'il fe trouve de tels marchands dans le
»? royaume au commencement d'une guerre , ils
99 feront mis en sûreté fans aucun dommage de
» leurs perfonnes, ni de leurs effets, jufqu'à ce
99 que nous ou notre grand jufticier, foyons infor-
99 més de la manière dont nos marchands font trai-
« tés chez les ennemisj & fi les nôtres font bien
99 traités, ceux-ci le feront auffi parmi nous.
>9 LII. Il fera permis à l’avenir à toutes perfon-
»9 nés de fortir du royaume 8c d'y retourner en
»9 toute sûreté, fauf le droit de fidélité qui nous
" eft due, excepté toutefois en temps de guerre,
99 & pour peu de temps, quand il fera néceffaire
»9 pour le bien commun du royaume } exceptés
9î encore les prifonniers & les .profcrits félon les
*9 •• loix du pays, 8c les peuples qui feront en guerre
»9 avec nous, aufli bien que les marchands d'une
•9 nation ennemie, comme en l'article précédent.
»9 LUI. Si quelqu'un relève d'une terre qui
*» vienne à nous échoir, foit par confifcation ou
*9 autrement, comme deWallingford, deBoulo-
»» gne, de Nottingham, de Lancafter, qui font
»9 en notre poffeflion, 8c qui font des baronnies,
» & qu'il vienne à mourir, fon héritier né donnera
» rien, & ne fera tenu de faire aucun autre fer-
»> vice que celui auquel il feroit obligé, fi la ba-
»» ronnie étoit en la poffeflion de l'ancien baron &
» non de la nôtre. Nous tiendrons ladite baronnie
9» de la même maniéré que les anciens barons la te-
?» noient avant nous. Nous ne prétendons point
99 pour raifon de ladite baronnie tombée entre nos
99 mains , avoir la garde-noble d'aucun des vaf-
i» faux, à moins que celui qui pofféde un fief,
»9 relevant de cette baronnie, ne relevât auffi de
»s nous pour un autre fie f, fous l'obligation d'un
»9 fervice militaire.
»9 L IV . Ceux qui ont leur habitation hors de
»» nos forêts, ne feront point obligés de compa-
»9 roître devant nos juges des forêts, fur des fom-
99 mations générales, mais feulement ceux qui font
»9 intéreffés dans le procès, ou qui font cautions
a» de ceux qui ont été arrêtés pour malverfations,
99 concernant nos forêts.
»9 L V . Tous les bois qui ont été réduits en fo*
99 rets par le roi Richard notre frere, feront réta-
*» blis en leur premier état, les bois de notre pro*
99 pre domaine exceptés.
»» LV I . Perfonne ne pourra vendre ou donner
9» aucune partie de fa terre, au préjudice de fori
t» Seigneur > ç eft-à-dire, à moins qu'il ne lui en
» relie a fiez pour pouvoir faire le fervice dû au
»» Seigneur.
99 LV II. Tous patrons d'abbayes qui ont des
99 chartes de quelqu'un des rois d'Angleterre, conte-
99 nant droit de patronat, ou qui poffèdent ce droit
99 de temps immémorial, auront la garde de ces
»9 abbayes pendant la vacance, comme ils doivent
99 l'avoir félon ce qui a été déclaré.
99 LV III. Perfonne ne fera mis en prifon fur
» l'appel d'une femme, pour la mort d'aucun au-
99 tire nomme, que du propre mari de la femme.
>» L IX. On ne tiendra le shire-gemot ou la cour
9» du comté qu'une fois par mois, à moins que ce
»9 ne foit dans les lieux où la coutume eft de met-
99 tre un plus grand intervalle entre les feflions,
99 ou l'on continuera de même félon l'ancienne
>9 coutume.
99 LX . Aucun shérif ou bailli ne tiendra fa cour
99 que deux fois l'an j favoir, la première après les
99 fêtes de Pâques j la fécondé après la faint Michel
99 & dans les lieux accoutumés. Alors Einfpe&ion
99 ou examen des cautions ou sûretés, dont les
99 hommes libres de notre royaume fe fervent mu-
99 tuellement, fe fera au terme de faint Michel >
99 fans aucune oppreflion ; de telle manière que
99 chacun ait les mêmes libertés dont il jouiffoit
99 fous le régné d'Henri I , & de celles qu'il peut
99 avoir obtenues depuis.
»9 LX I. Que ladite infpe&ion fe faffe de telle
99 forte qu'elle ne porte aucun préjudice à la paix,
99 8c que la dixaine foit remplie comme elle le doit
99 être.
99 LX II. Que le shérif n'opprime 8c ne vexe
»9 perfonne, mais qu'il fe contente des droits que
99 les shérifs avoient accoutumé de prendre fous le
» régné d'Henri I.
99 LX III. Qu'à l'avenir il ne foit permis à qui que
>9 ce foit de donner fa terre à une maifon religieu-
99 f e , pour la tenir enfuite en fief de cette maifon.
99 LX IV . Il ne fera point- permis aux maifons
99 religieufes de recevoir des terres de cette ma*
99 nière, pour les rendre enfiiite aux-propriétaires,
99 8c à condition de relever des monaftères. Si à
99 l'avenir quelqu'un entreprend de donner fa terre
99 à un monaftére, 8c qu'il en foit convaincu, le
>9 don fera nul, & la terre donnée fera confifquée
»9 au profit du feigneur.
99 LX V . Le droit de fcutage fera perçu à l'a-
99 venir félon la coutume pratiquée fous Henri L
99 Que les shérifs n'entreprennent point de vexer
&»9 qui que ce foit, mais qu'ils fe contentent de
»9 leurs droits.
99 LX V I . Toutes les libertés 8c privilèges que
»> nous accordons par cette préfente charte, à l'é-
»9 gard de ce qui nous eft du par nos vaffaux, fe*
99 ront pbfervés de même par les clercs 8c par les
»9 laïcs, à l'égard de leurs tenanciers.
99 LX V II. Sauf le droit des archevêques, ab-
»9 bés , prieurs, templiers, hofpitaliers, comtes , 9» baronschevaliers, 8c de tous les autres tant
» laïcs qu'eccléfiaftiques dont ils jouifloient avant
99 cette charte : témoins , 8cc.
On voit que cette grande charte fi célèbre fut
publiée dans des temps de barbarie, & que la plu-
art des articles contiennent des difpofitions ou
ifarres ou comipunes , qui ne méritent aucune
eftime, qu'il y en a même d'injuftes & d’atroces,
telles que celles qui regardent les Juifs. Si elle a
fervi de première bafe à la conftitution britannique
& à la liberté des anglois, il faut convenir que ce
premier ouvrage a eu befoin long-temps d’être perfectionné
, 8c qu'elle ne préfente prefque rien oui
puiffe donner une idée du gouvernement d'Angleterre.
On y retrouve, il eft vrai, les principaux
privilèges des anglois i le droit de confentir aux
impofitions dont l'état a befoin j le jugement par
fes pairs ; la liberté d'aller & venir dans le royaume
, d'en fortir 8c d'y rentrer fans paffeport &
fans obftaclej la propriété & la liberté des fujetS
affurées par les précautions qu’on exige pour les
emprifonnemens : mais les articles de la grande
charte n'étoient ni affez précis, ni affez détaillés j
on en rencontre de pareils dans quelques pays,
qui affurément n'ont pas de liberté j 8c on peut
Vbir à l'article A n g l e t e r r e tout ce que les anglois
ont fait depuis pour affurer la leur.
C H A S S E , f. f. Quête & pourfuite des animaux
faite par l'homme pour les prendre : ou pour
les abattre fous fes coups, 8c en faire fa proie. Elle
s'exerce contre des animaux féroces 8c carnaciers,
comrqgfc les lions, les tigres, les panthères, ou
contre les bêtes noires, tels que les cerfs, daims,
chevreuils, 8cc. ou contre le menu gibier, tant
quadrupèdes que volatiles, comme lièvres, lapins,
perdrix, bécaffes, 8cc.
La chajfe, eft un des plus anciens exercices. Les
fables des poètes qui nous peignent l'homme en
troupeau, avant que de nous le repréfenter en fo-
c ié te , lui mettent les armes à la main, & ne lui
fuppofent d'occupation journalière que la chajfe.
L'écriture feinte, qui nous tranfmet l'hiftoire réelle
du genre humain, s'accorde avec la fable pour
nous conftater l'ancienneté de la chajfe. Elle dit que
Nemrod fut un grand chaffeur aux yeux du feigneur
qui le reietta. C'eft une occupation prof-
crite dans le livre de Moyfe j c'eft une occupation
divinifée dans la théologie payenne. Diane etoit la
patrone des chaffeurs j Apollon partageoit leur encens
avec. elle.
Voici ce que lè bon fens îuggère fur l'origine de
la chajfe. Il fallut garantir les troupeaux des animaux
carnaciers j il fallut empêcher tous les animaux
fauvages de ravager les moiffons : on trouva
dans la chair de quelques-uns un aliment fain, dans
les peaux de prefque tous une reffource très-
prompte pour le vêtement ; on fut intéreffé de plus
d ’une manière à la deftruétion des bêtes malfai-
fantes. On n’examina guères quel droit on avoit
fur les autres, 8c on les tua toutesindiftinttement,
excepté celles dont onefpéra de grands fervices en
les confervant.
L'homme devint donc un animal très-redoutable
pour tous les autres animaux. Les efpèces fe dévorèrent
les unes les autres, après que le pèche
d'Adam eut répandu entre elles les femences de la
deftruétion. L'nomme les dévora toutes. Il étudia
leur manière de vivre pour les furprendre plus facilement.
Il varia fes embûches félon la variété de
leur caractère 8c de leurs allures j il inftruifit le
chien, il monta fur le cheval : il s'arma du dard,
il aiguifa la flèchej 8c bientôt il fit tomber fous fes
coups le lion, le tigre, l'ours, le léopard : il perça
de fa main depuis l’animal terrible qui rugit dans
les forêts, jufqu’à celui qui fait retentir les airs de
fes chants innocens 5 8c l’art de les détruire , fut
un art très étendu, très-exercé, très-utile, & par
conféquent fort honoré.
Nous ne fuivrons pas les progrès de cet art depuis
les premiers temps jufqu'aux nôtres. Les mémoires
nous manquent j 8c ce qu'ils nous apprendraient,
quand nous en aurions, ne feroit pas affez
d'honneur au genre humain pour le regretter.
On voit en général que l'exercice de la chajfe a
été dans tous les fiècles, & chez toutes les nations
d'autant plus commun, qu'elles étoient moins civi-
lifées. Nos pères, beaucoup plus ignorans que
nous, étoient beaucoup plus grands chaffeurs.
Nous ne chaffons plus guères que des animaux innocens
, fi l'on en excepte l'ours, le fanglier & le
loup : on chaffoit autrefois le lion, le tigre, la
panthère, 8cc.
Il y avoit autrefois peut-être de ces animaux terribles
en Europe. On les chaffe encore en Afrique
8c en Afie dans les contrées habitées où elles fe
trouvent.
Obfervons ici qu'il eft venu des temps où la
chajfe a été réfervée à certaines claffes d'hommes,
8c qu'on en a fait un appanage fi particulier à la
nobleffe, qu'ayant négligé toute autre étude, elle
ne s’eft plus connue qu'en chevaux, en chiens 8c
en oifeaux.
C e droit, ou pour mieux dire, cet abus, a été
la fource d'une infinité de jaloufies 8c de diffen-
fions même entre les nobles, & d'une. infinité de
léfions envers leurs vaffaux, dont les champs ont
été abandonnés au ravage des animaux réfervés
pour la chajfe. L'agriculteur a vu fes moiffons con-
fommées par des cerfs, des fangliers, des daims,
des oifeaux de toute efpèce j le fruit de fes travaux
perdu, fans qu'il lui fût permis d'y obvier, 8c
fans qu'on lui accordât un dédommagement. L ’in-
juftice a été portée dans certains pays, au point
de forcer le payfan à chaffer, & à acheter enfuite
de fon argent le gibier qu'il avoit pris. C'eft dans
la même contrée qu'un homme fut condamné à
être attaché v if fur un ce r f, pour avoir chaffé un
de ces animaux. Si c'eft une chofe fi précieufe que
la vie d'un cerf, pourquoi en tuer ? Si ce n'eft
rien, fi la vie dJua homme vaut mieux que tous les