
ne lui ôte point de force ce qu’on veut qu’il abandonne
: c’eft lui qui en fait le facrifice.
Les communes ne fe font pas repofées uniquement
fur la prérogative dont nous parlons ici.
Quoiqu’elle foit indeftruétible , en quelque façon
, les communes mettent en ufage tout ce
qu’il faut pour la maintenir. Jamais elles n’ont
fouffert ., comme nous l’avons déjà dit, qu’un bill
de fublïdes vînt de la chambre des pairs 3 &
tput changement que les lords veulent y faire '
eft furement rejetté. Si elles ne s’étoient pas
réfervé foigneufement l’exercice d’un droit, auquel
ïeiir exiftence eft attachée , la chambre haute 3
qui n’eft-déjà que trop portée à favorifer le roi ,
auroit pu ufurper cette prérogative. Enfin , fi
d’autres que les repréfentans du peuple offroient
Je produit des fueurs & des travaux du peuple , le
pouvoir exécutif oublieroit bien-tôt qu’il n’ekifte
que pour l’avantage du public.
D’un autre côté , quoique cette même prérogative
foit d’un effet pour ainfi dire irréfiftible * le
..parlement n’a rien négligé de ce qui pouvoit l’accroître
, ou du moins en faciliter l’exercice : il a
«nis par-tout des entraves à la puiffance royale ,
& il l’a environnée de barrières très-fortes.
Le roi eft le chef de l’églife : njais il ne peut
ni changer la religion établie 3 ni exiger des particuliers
qu’ils lui rendent compte de leur foi ( i ) 3
51 ne peut même profeffer la religion catholique
que l’état a défendu ; s’il enfreint cet article 3 il
eft déclaré'incapable d’hériter, ou de jouir de la
couronne de la Grande-Bretagne (2).
Le roi eft le chef des tribunaux : mais il ne peut
rien changer aux maximes & aux formes que. la
loi ou l’ufage ont confacrées : il ne peut même
influer fur la décifion des affaires particulières 3
& Jacques I ayant voulu afïifter au jugement
d’une caufe, fut averti par le juge qu’il ne pou-
voit opiner ( 3 ),. Enfin , quoique les crimes fe
pourfuivent en fon nom, il ne peut refufer fon fe-
cours aux particuliers qui ont des plaintes à former.
Le roi a le droit de battre inonnoie , mais il ne
peut en altérer le titré.
Il a le droit de faire grâce ; mais il ne peut
difpenfer de la réparation d’une offenfe. Bien plus,
la loi permet à la veuve ^ ou au plus proche
héritier, de pourfuivre le meurtrier 5 & le pardon
du roi , foit qu’il ait précédé le jugement ,
foit qu’il ait été accordé enfuite, eft abfolument
fans effet.
Le roi a la puiffance militaire : mais fur cet article
encôre, il n’eft point abfolu. Il eft vrai que
par rapport aux forces de mer, comme elles ont
î’ineftimable avantage de ne pouvoir être tournées
contre la liberté de la nation, en même
temps qu’ elles font le boulevard le plus fur des
trois royaumes, il peut les entretenir fuivant qu il
le juge à propos 3 & il n’e ft, à cet égard, que
fous la reftriétion générale de recourir au parlement
, pour obtenir des fubfides. Mais comme
les forces de terre fourniffent un moyen immédiat
de renverfer toutes les barrières, le roi ne
peut en avoir fur pied, fans la permiffion expreffe
du parlement : la garde de Charles II fut déclarée
anti-conflitutionnelle (4) 3 & l’armée de Jacques
fut une des caufes de fon détrônement (y).
Aujourd’hui, que les princes entretiennent en
temps de paix de fi nombreufes armées, un état
qui veut fe maintenir eft obligé , jufqu’à un certain
point, de fuivre le même ufage, & le parlement
a cru devoir établir un corps fubfiftarvt de
troupes qu’on à porté à environ 30 mille hommes,
& dont le roi a la difpofition.
Mais ce corps n’eft établi que pour une année :
au bout de ce terme il fe trouve licentié ; on l’établit
alors de nouveau comme s’il n’eût jamais
exift&3 & l’oppofition de l’ une ou de l’autre chambre
, fu-ffit pour empêcher cette opération.
C e n’eft pas tout 3 les fonds pour l’entretien de
ces troupes , font affignés fur des impôts qui ne
font jamais établis que pour une année (6) , & au
bout de ce temps , il faut également les rétablir de
nouveau (7). En un mot, ce moyen de garantir
VAngleterre d’une invafion étrangère , .pouvant devenir
fatale à la liberté de la nation ; on ne le
confie au roi qu’avec des précautions, qui laiffent
au parlement ie pouvoir de l’ôter à la couronne à
Ja première apparence de danger (8).
{1 ) L’aflemblée Ha clergé , dont le roi eft le chef, ne doit régler que les chofes de difcipline eccléfiaftique ; elle ne
peu: toucher aux lo ix , coutumes & ftatuts du royaume. 5 r. a y. Henri F U I . c4 ip.
( 2 ) A . î . Guil. & Marie. Stcit. z . ch. 2.
' (3) On a fait de ce point un arttcle exprès du ftatut de la fcixièmeannée de Charles premier , le même qui fupprima
la chambre etoilee. Soit femblable ment déclaré que ni fa ma je fié ni fon confeit privé nont jurifdiclion, pouvoir ou autorité
if examiner ou mettre en queflion, déterminer ou difpofàr des biens des fujets de ce royaume. Stat. A. 1 <5. c .\ i . cap. 10. 5.
(4) 11 l’avoit portée jufqu’à 4000 hommes.
15) Une armée fubjijlante fans le confentement du parlement y efi contre la loi , a dit depuis l’article <5 du bill des
•droits.
( 6 ) La taxe fur les terres & fur la drèche.
(7 ) Il faut que le parlement renouvelle aufli chaque année l*aâe qu’on appelle mutiny aSl, qui autorîfe lès eonfeilj
de guerre a punir la défobéiffaqce & la défcrtion : il peut donc ôter au roi jufqu’aux moyens d’entretenir, la difcipline
militaire.
(8) J’ajouterai à ces diverfes_reftri&ions mifes au pouvoir-du ro i, celle du ferment qu’il prête à f*"n- couronnement1
Si cette reftrîéxion ne peut avoir la précilîon d’une loi proprement dite, elle, a d’un autre côté l’avantage d’être déclare*.
d’une manière plus folemnelle, & fur-tout’ de plus influer ftir l'opinion publique. Voici la traduction de la formule
qui a été établie lors de la »évolution ;
Ge$ loix prefcrïtes à l’autorité du ro i, ne font
au fond que des barrières morales qu il pourroit
ne pas toujours refpe&er, & on ne les a pas
jugé ïuffifantes. Le refus des fubfides elt un re-
mede trop violent pour l’appliquer à toutes les
infractions particulières & à tous les details de
l’àdminiftration : ce moyen lui-même pourroit
être éludé jufqu’ à un certain point, fi le roi man-
quoit aux promeffes d’ après lefquelles on lui a
accordé des fubfides, s’il employoit les fublïdes
à d’autres ufages que ceux auxquels ils font def-
tinéss & la conftitution.a fourni aux communes
tin moyen d’arrêter les malverfations du gouvernement
, en leur donnant le droit d en pourfuivre
Jes miniftres. • #
• Leroi luwnêmefe trouve, il eft vrai, hors,de 1 atteinte
des tribunaux, parce que le tribunal dont
il dépendroit auroit le-pouvoir executif 3 mais ,
d’ un autre c ô té , il ne fauroit gouverner fans miniftres
, & ce font ces miniftres que les loix permettent
d’attaquer. ! , ,
S i , par exemple, les deniers publics ont ete
employés d’une manière contraire aux intentions
de la chambre des communes, on pourfuit ceux
qui en avoient le maniement 5 s’il s’elt commis
quelque abus d’autorité ( 1 ) , ou en general quelque
chofe de contraire au bien de l’état, on pourfuit
ceux qui en ont été ou les inftrumens ou les
auteurs (2).
Mais devant quels juges inftruira-t-on cette
affaire ? devant quel tribunal verra-t-on fe pré-
fenter le gouvernement lui-même comme accufe,
& les repréfentans du peuple comme accufateurs i
C ’eft devant la chambre des pairs que la loi
ordonne aux communes' de porter leur accusation
, c’eft-à-dire, devant des juges qui font m-
dépendans par leur dignité , & qui d ailleurs
doivent craindre de s’avilir aux^yeux de toute la
nation , qui examine avec intérêt ce grand fpec-
tade. eM B hm BHbH , ,
Lorfque l’accufation (3) a ete portée devant
les pairs, ils ordonnent pour l’ordinaire l’empn-
fonnement de l’accufé. Au jçur defigne, il comparaît,
ainfi que les députés de la chambre des
communes ; le bill d’accufation eft lu en fa pré-
fence ; on lui accorde un confeil & du temps pour
travailler à fa défenfe 5 & à l ’expiration du terme, —
on procède à l’information de la procédure , qui
fe fait à huis ouverts, & tout eft rendu public
par la voie de l’impreflion.
C ’eft du fond même de la chofe que l’accufé
doit tirer fes moyens de défenfe. Il ne lui fer-
viroit de rien, pour juftifier une conduite criminelle
, d’alléguer les ordres du fouverain 3 ou ,
convenant des griefs "qu’on lui impute , de pro- •
duire un pardon du roi. C ’eft contre l’admi-
niftration elle-même que la procédure s’inftruit;
elle ne doit y avoir aucune part : le roi ne peut
-ni en arrêter ni en fufpendre le cours 5 il voit ,
fpe&ateur immobile, dévoiler la part qu’ il a eu
aux abus d’autorité de fes ferviteurs, & il entend
fon arrêt daijs la condamnation de fes miniftres
Toutes ces précautions pour affurer-les droits
du parlement & ceux de la nation contre les
efforts du pouvoir exécutif, feroient inutiles, fi
le roi avoit un moyen de perdre ceux des pairs
ou des membres des communes qui défendent
les. privilèges du peuple avec le plus de violence.
Il a des moyens de récompenfer ceux qui lui
font dévoués 5 mais il ne peut punir lesj autres
qu’en leur ôtant des placés lucratives qui font à
fa nomination : encore voyonsrnous que lorfqu’ ils
ont un parti dans la nation, le roi eft pour ainfi
dire forcé de leur donner fa confiance , & de les
faire fes miniftres.
Les lo ix , qui pourvoient d’une manière fi efficace
à la*fureté du peuple , pourvoient également
à celle de la chambre des pairs & de la ‘chambre
des communes. L * Angleterre a fupprimé dès longtemps
ces commifiions vénales , qui déclarent
coupables toutes les viéHmes qu’on leur défigne;
elle- ne connoît point çes emprifonnemens qu’emploient
les adminiftrateurs en d’autres pays'. La
forme & les maximes des tribunaux ne changent
pas au gré du roi; & comme on les obferve à
„ V a& u hm ou hime iivra dire : promettn-veus & jutez-vous folemncHcmenc ie gouverner le peuple du royaume
SAnglmrriU i i fes diverfes polTeflions,, conformément auu ftatuts fans en parlement, üeà.leurs lPrx & coutumes!
£ l |J S B 8 B i6 g H P î'J jl$ ¥ & î» Ifm ¥«“ c!cêcut&
” '-otre pouvoir, les loix de Dieu, la vkitaWe .ptofeffion de
» l’ivlnuîlé & la religion proteftame, telle qu’elle, eft établie par la lou Et voulez-vous confetvet aux évoqués & au
! d a S Bde ce royaume, Sc aux égllfes qui leur font confiées, tous les droits & pnv.lèges qu. leur appartiennent ou.
» aùoartiendronc,7 ou à chacun d’eux ? Le roi ou reine : je promets de faire toutes ces chofes.
M M i ou U reine , mmv U main fur les fainee HanpUs, èra : es choft. que , a. te. pconufes, ,= les
M fera[ & obferverai : ainfi Dieu m’aflïfte. Et enfuite ils batferont le livre ». I. Gu i. & M. ft. 1. c. 6.
t T ) Ou’on ne croie pas que les tribunaux foienc prévenus en faveur, des miniftres ; on les a toujours vu interpréter
les lo x contre^ eux dans le fens le plus ftrîa. Qn les a puni Couvent 4’avoir ordonne des emprifonnemens <juon auro.c
«ouv? iX s en roue autre pays 3 les dédommagerons Sc les amendes qu’on leur a impofé ont toujours ete confidc-
rables J’en citerai des exemples dans une note de la feéhon onzième. . . .
( a l c-eft ainfi qu’au commencémcn. de ce fiècle.les communes accusent 1= comte d’Orford, qui avo.t çonfeille le
traité de partage, Sc le chanceiiet lotd Sommets, qui ayoit aypofe B P“4 HR à
( j ) Qn lui ^onne en anglojs le nçmd'impeachmçntp
«M