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autres clafîes d’hommes , pour le gain des cultivateurs,
pour le revenu des propriétaires -, pour l'impôt,
pour la profpérité de l’état ; car alors le produit
des terres dédommage largement du furcroît
des frais de falaire & de nourriture. Il eft aifé de
s’en convaincre par le calcul des dépenfes & des
accroiffemens des produits.
C’eft le renchériflemënt des* denrées qui eft dé-
favantageux au petit peuple, fur-tout lorfqu’il eft
fubit-î parce que les falaires ne montent pas en
proportion.
Voyei Varticle S a l a i r e .
X X.
Q u'on ne diminue pas l ’aifance des dernières claf-
fes de citoyens ; car elles ne pourroient pas aflez
contribuer à la confommation des denréès qui ne
peuvent être confommées que dans le pays, ce
qui feroit diminuer la reproduction & le revenu
de la nation.
N O T E .
( Qu'on ne diminue p as Vaifance du menu peuple. )
Pour autorifer les vexations fur les habitans de
la campagne , les éxa£teurs-ont avancé pour maxime
, qu’il faut que les payfans fo ien t pauvres , pour
le s empêcher d’ être parejfeux. Les bourgeois dédaigneux
ont adopté volontiers cette maxime barbare ,
parce qu’ils font moins attentifs à d’autres maximes
plus déçilives , qui font : que l ’homme qui ne
peut rien conferver ne travaille précifément que pour
gagner de quoi 'fe nourrir ; & qu en général tout homme
qui peut conferver eft la b o r ieu x , parce que tout
homme eft avide de richejfes. La véritable caufe de
la parefle du payfan opprimé , eft le trop bas prix
du falaire & le peu d’emploi dans les pays , où la
gêne du commerce des productions fait tomber les
denrées en non-valeur, & ou d’autres càufes ont
ruiné l’agriculture. Les vexations , le bas prix des
denrées, & un gain infuffiant pour les exciter au
travail, les rendent parefîeux, braconniers, vagabonds
& pillards. La pauvreté forcée n’eft donc
pas le moyen de rendre les payfans laborieux : il
n’y a que la propriété & la jouiflance afîurée de
leur gain, qui puiflent leur donner du courage &
de TaCtivité.
Les^ miniftres , dirigés par des fentimens d’humanité
, par une éducation fupérieure-, & par des
vues plus étendues, rejettent avec indignation les
maximes odieufes & deitruCtivés qui ne tendent
qu’à la dévaftation des campagnes ; car ils n’ignorent
pas que ce font les^ richeffes des habitans de
la campagne qui font naître les richefîes de la nation:
Pauvres p a y s a n s , p a u v r e
O Y A U M E.
A G R
X X I .
Q ue le s propriétaires , G' ceux qui exercent des
projetions lu c r a t iv e s n e fe liv ren t pas a des épargnes
ft é r ile s , qui retrancheroient de la circulation
& de la diftribution une portion de leurs revenus
ou de leurs gains.
X X I I .
Q u o n ne provoque p oint le luxe de décoration an
préjudice des dépenfes d’exploitation & d’amélioration
d’agriculture, & des dépenfes en con-
fommation de fublîftance , qui entretiennent le
bon prix & le débit des denrées du crû , & la
réprodu<ftion des revenus de la nation/
N O T E .
( L e s grandes dépenfes en confommation de fu b ftf
tances entretiennent te bon p r ix des denrées & lai
reproauSion des revenus, j
Ce que l’on remarque ici, à l’égard des grandes
dépenfes de confommation des denrées du crû J
fe rapporte aux nations agricoles. Mais on doit'
penfer autrement des petites nations commerçantes
qui n’ont pas de territoire y car leur intérêt les]
oblige d’épargner en tout genre de dépenfes pour
conferver & accroître le fond desrichefles necef-
faires à leur commerce & pour commercer il
moins de frais que les autres nations , afin de poiH
voir s’affurer les avantages de la concurrence dans!
les achats & dans les ventes chez l’étranger. Cesl
petites nations commerçantes doivent être regar-|
dées comme les agens du commerce des grands!
états, parce qu’il eft plus avantageux à ceux - cil
de commercer par leur- entremife, que de fe char*!
ger eux-mêmes de différentes parties de commerce
qu’ils exerceroient avec plus de dépenfes , & dont J
ils retïreroient moins de profit, qu’en fe procu-l
rant chez eux une grande concurrence de cbm*|
merçans étrangers , car ce n’eft que par la plus!
grande concurrence poflible, permife à tous les!
négocians de l’univers, qu’une nation peut s’aflu-l
rer le meilleur prix & le débit le plus avantageux;^
poflible des productions de fon territoire, &fe|
préferver du monopole des commerçans du pays.
X X I I I .
Q u e la nation ne foujfre p as de perte dans foui
commerce réciproque avec L’étranger ; quand même!
ce commerce feroit profitable aux commerçans,!
qui gagneroient fur leurs concitoyens dans kl
vente des marchandifes qu’il rapporteroit. Car |
alors l’accroiflement de fortune de-ces commet-e
çans ferait dans la circulation des revenus »nrô*|
•franchement préjudiciable à la diftribution & à la
.féproduCtion.
X X I V .
Q u’on ne foie pas trompé par un avantage appâtent
du commerce réciproque avec. Cétranger , en jugeant
Amplement par la balance des fournies en
argent, fans examiner le plus ou le moins de profit
qui réfulte des marchandifes mêmes que l’on
a vendues, & de celles que l’on a achetées'. Car
fouvent la perte eft pour la nation qui reçoit un
furplus en argent > & cette perte fe trouve au
préjudice de la diftribution & de la reproduction
■ des revenus.
X X V.
• . Q u o n maintienne ten tie r e l ib e r t é d u commerce ;
C A R L A POLICE DU COMMERCE IN T E R IE U R '
ET EXTÉR IEUR L A .PLUS SURE , L A PLUS
E X A C T E , L A PLUS PRO F ITAB LE A L A -N A T IO N
ET A L’É T A T , CONSISTE DANS l a p l e i n e L I BERTÉ
DE L A CONCURRENCE.
X X V I .
Q u’ on f o i t moins a t ten t if a l'augmentation de
la population qu’a l ’accroijfentent des revenus ,* car
plus d’aifance que procurent de grands revenus ,
eft préférable à plus de befoins preflans de fub-
fiftance qu’exige une population qui excède les
reyenus j & il y a plus de-refîources pour les befoins
de l’état quand le peuple eft dans l’aifance,
.& aufli plus de moyens pour faire profpérer l’agriculture.
N O T E.
( Etre moins a t ten t if a l ’accroijfement de la popula-
iion qu'a celui des revenus, j
Le defir qu’ont toutes les nations d'être puiffan-
•tis à la guerre, & l'ignorance des moyens de faire .
la guerre, parmi lefquels le vulgaire, n'envifage
que les hommes ,. ont fait penfer que la force des
états confifte dans une grande population. On n'a
point allez vu que pour foutenir la guerre, il ne
-falloit pas à beaucoup près une fi. grande quantité
d'hommes qu'on le croit au prgmier coup d'oeil ;
que les armées très - nombreufes doivent être &
font ordinairement bien plus funeiles à la nation ,
qui s’épuife pour les employer ., qu'à l'ennemi
quelles combattent ; & que la partie militaire
d'une nation ne peut ni fubfîfter., ni, agir que par
la. partie contribuable.
-t." .Quelques efprits fuperficiels fuppofent que les
grandes richeffes d’un état s’obtiennent par l'abondance
des hommes : mais leur opinion vient de ce
qu ils oublient que les hommes ne peuvent perpétuer
les richeffes que pat les richeffes, & qu’autant
qu’il y a une proportion convenable entre les
hommes & les richeffes.
Une nation croit toujours qu’elle n’a pas aflez
d’hommes s & on ne s'apperçoit pas qu’il 11’y- a
pas aflez de falaire pour foutenir une plus grande
population & que les hommes fans fortune ne
font profitables dans un pays qu’autant qu’ils y
trouvent des gains aflurés pour y fubfifter par leur
travail. Au défaut de gains ou de falaire , une
partie du peuple des campagnes peut à la vérité
faire naître, pour fe nourrir, quelques productif118
de vil prix , qui n’exigent pas de grandes
depenfes ni de longs travaux , & dont la récolte
ne fe fait pas; attendre long-temps : mais ces
hommes-, ces productions & la terre où elles
naiflent*, font huis pour l’état. 11 faut, pour tirer
de la terre un revenu, que les travaux de la
campagne rendent un produit net au-dela des falaires
payés aux ouvriers j car c’eft ce; produit
net qui fait fubfifter des:autres clafles d’hommes
nécefiaires dans-un état..C’eft ce qu’on ne doit
pas attendre des’hommes pauvres qui labourent
la terre avec leurs bras ou avec d’autres moyens
: infuffifans- j car ils ne peuvent que fe procurer à
eux feuls leur fubfiftance , en renonçant à la culture
du bled qui exige trop de temps , trop de
travaux, trop de dépenfes , pour être exécutée
par des hommes dénués de facultés, & réduits à
tirer leur nourriture de la terre parle feul travail
de leurs bras.
Ce n eft donc pas à de pauvres payfans que
vous devez confier la culture de vos terres. Ce
font les animaux qui doivent labourer & fettiliier
vos champs : c’eft la confommation, le débit, la
facilite & la liberté du commerce intérieur &
extérieur, qui afîiirent la valeur vénale qui for-
me vos revenus. Ce font .donc des hommes riches
que vous devez charger des entreprifes de
la culture des terres, & du commerce rural, pour
V0USA enrichir, pour .enrichir l’état , pour faire
renaître, des richeffes in.tariffables 3 par lefquelies
vous puifliez jouir largement des produits de la
•terre & dès arts , _ entretenir • une riche- ééfenfe
contre vos ennemis , ëz fubvenir avec opulence
aux depenfes des travaux publics pour les commodités
de la nation ., pour la facilité du corn-
merce de vos denrees., pour les fortifications de
-vos frontières , pour l’entretien d’une marine redoutable
, pour la décoration, du royaume , &
pour procurer aux hommes de travail des falaires
& des gains qui les attirent & qui Jes retiennent
dans le royaume. Ainfi le gouvernement politique
de 1 agriculture & du commerce de fes productions
eft la bafe du miniftère des finances, & de
-toutes les autres parties de l’adminiftration d’une
nation ,agricole
Les grandes armées ne fuffifent pas pour former
une riche défenfe ; il faut que le foldat foit
bien paye (sour qu'il puiffe être bien difeipliné -,
bien exerce , vigoureux , content & courageux*