
ceux qu’on dépofe des premières.charges de l’empire.
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Lès béglers doivent obéir au bêglerbeg, Sc exécuter
Tes ordres en ce qui regarde TadminiUra-
tion de la juftice.
Ils portent une plume de héron au turban, 8c
ils arborent une queue de cheval. Cependant au
Caire ils peuvent en arborer deux.
Leur revenu , qui fë prend fur les dixmes des
ferres , excepté dans la Natolie 3 ou il eft fixé à
quatre mille rixdales,, va de cinq cens à lïx mille
rixdales > ils font-obligés d’armer un foldat fur
çhaquecinq mille afpres de revenu.
Lorfqu’il meurt un bégler, on récompenfe-fix
de fes domeftiques avec le revenu courant. Ils
çnt , comme les béglerbegs 3 des furnoms qui les
ftiftinguent ; les uns font appelles Kugiumets 3 d’autres
Juruks y d’autres fylujfelimlers 3 d’autres Juja-
fyéglers.
Les Kugiumets font ceux qui fuccèdent aux
héglats de père en fils. Lorfqu’on les dépofe pour
n’avoir pas fait leur fervice militaire , la charge
pafie au plus proche parent.
On donne le nom de Juruks aux gouverneurs des
peuplades errantes. Il y en à fur-tout aux environs
du Mont - Hémus , 8c en d’autres endroits de la
Grèce , où la népeflité de trouver des -.pâturages
pour lés troupeaux, oblige les habitans à changer
de demeure > chaque juruk eft obligé d’entretenir
fa milice fur le pied marqué dans Jes regiftres
de l’empire.
Les béglerbegs feuîs ont le droit de publier,
dans leurs départemens, les ordonnances impériales
, & de les faire exécuter dans tout l’empire
hors de 1? enceinte de Conftantinople : ils peuvent
faire décapiter ou punir, de tel autre genre de
mort, les coupables qu’on leur amènej le bacha
du lieu ne doit pas s’ y oppofer : il a feulement lar
liberté de fe plaindre à la porte s’ils abufent de
leur autorité.
Il n’y avoit que deux béglerbegs dans tout l’empire
, celui d’Europe ou de Romélie, & celui de
jMatclie 5 mais l’empire s’étant accru ,1 e nombre-
des béglerbegs s’eft auflî augmenté en A fiej celui
de Romélie e(L relié feul en Europe, 8c femble
repréfepter l’empereur grec. Il eft le premier des béglerbegs 5 il eft gouverneur général de toutçs les
provinces européennes dépendantes dù grand-
feigneur : le bêglerbeg de Natolie fait fa réfiderice
à Damas. Le gouverneur de l’Arabie pétrée por-
toit autrefois ce titre > d’autres bachas le prennent
aujourd’hui, mais faps l’avey jŸloeurs & Ufâges des Turcs , tomd. e1 .la Porte* Guer.
B ENG A LE (.royaume ou province d e ) . Voye%
fa pofition & fon étendue dans le Dictionnaire
Géographique»
Le Bengale a prefque .qu itfg cens milles d’étendue
en longueur de l’eit à l’oueft, & environ
jrois cens milles de largeur du nord au fud. Tous
ans il £& inondé par le Gange, qui déborde
comme le N il en Egypte j .& c’eft une des plus
riches. 8c des plus fertiles provinces de toute
l’Inde.
Nous donnerons, i° . un précis de Thiftoire
politique du Bengale ; i° . nous parlerons de l’état
où fe trouve le pays, 8c dés revenus qu’il produit
depuis que-la compagnie angloife en a fait la conquête.
30. Nous ferons quelques obfervations fur
l’admimftration tyrannique des anglois, 8c fur les
moyens qu’on vient d’imaginer en Angleterre pour
la réformer. 40. Nous traiterons des tribunaux du Bengale. j ° . De la navigation du Bengale. 6°. De
fon commerce.
S e Ç T I nON P R E M I E R E .
Prcçis de l'hifioire politique du Bengale.
L ’hiftoire des révolutions dont le Bengale à. été
le théâtre , eft mêlée de fables. On y entrevoit
feulement que cet empire a été tantôt plus , tantôt
moins étendu j qu’il a eu des périodes heureux
3e des périodes malheureux > qu’il fut alternativement
partagé bn plufieurs-états , 8c réunis
dans un feul. Un feul maître lui donnoit des
loix , lorfque Egbar, grand-père d’Aurengzeb ,
en entreprit la conquête. Il la commença en 1 ^90,
& elle étoit finie en 159f. Depuis cette époque,
le Bengale a reconnu les mogols pour fes Xouve-
rains. Le gouverneur de ce pays tenoit d’aboid
fa cour à Raja-Mahol : il la transféra dans la
fuite à Daca. Elle étoit depuis 1718 à Maxou-
. dabat, grande ville iïtuée dans les terres, à deux
lieues de Çaflîmba^ar , Jorfqpe les anglois s’emparèrent
du Bengale 5 plufieurs nababs 8ç rajahs
étoient fubordonnés à v ic e - ro i , nommé
. fouba,
Ç e furent long-temps les fils du grand-mogol
qui occupèrent ce pofte important. Us abufèrent
fi fouvent, pour trobblçr l’empire , des forces
& des richelles dont ils difpofoient, qu’on crut
devoir les confier à des hommes moins accrédités
8c plus dépendans. Les nouveaux gouverneurs
ne firent pas à la vérité trembler la cour
de Delhi ; mais ils fe montrèrent peu exaéls à
renvoyer au tréfor royal les tributs qu’ils recueih-
loîent, C e défordre augmenta encore après l ’expédition
de Kouli-kan , & les chofes furent portées
li loin , que l’empereur , qui étoit hors d’état
de payer aux marates ce qu’ il leur devoir , les
autoiifa en 1740 à l’aller chercher £ux- mêmes
dans le Bengale. Ces brigands , au nombre de
deux cens mille hommes , partagés en trois armées
, ravagèrent çe beau pays pendant dix ans ,
& n’en fortirent qu’après s’être fait donner des
fommes immenfes.
Il n’eft pas befoin de dire ici à quelle époque
les anglois obtinrent des comptoirs 8c des éta?-
bii(femçî)S 4ap$ le Bengale ; on prouve ces détails
par-tout,
par-tout. Nous nous bornerons à parler de la conquête
qu’en a fait la compagnie.
Cette révolution prodigieufe, qui a influé d’une
manière fi fenfible, & fur la deftinée des habitans
de cette partie de l’Afie , 8c fur le commerce
que les nations européennes font dans ces climats
, a-t-elle été l’efret 8c le réfultat d’une fuite
de combinaifons politiques ? Eft-ce encore un de
ces événemens dont la prudence ait droit de s'en-
norgueillir ? Non, le hafard feul en a décidé ; &
les circonftances qui ont ouvert aux anglois cette
carrière de gloire 8c de puiflance, loin de leur
promettre les fuccès qu’ils ont eu, fembloient au
contraire leur annoncer les revers les plus fu-
neftes.
Depuis quelque temps il s’étoit introduit, dans
ces contrées, un ufage pernicieux. Tout gouverneur
de quelque établinement européen fe permettait
de donner afyle aux naturels du pays-, qui
craignaient des vexations ou- des châtimens. Les
fommes fouvent très-confidérables qu’il recevoit
pour prix de fa protection, lui faifoient fermer
les yeux fur le danger auquel il expofoit les intérêts
de fes commettans. Un des principaux officiers
du Bengale, qui connoifloit cette reflour-
ce , fe réfugia chez les anglois à Calcuta, pour
fe fouftraire aux peines que fes infidélités avoient
méritées > il fut accueilli. Le fouba oflfenfé, comme
il devoit l’être, fe mit à la tête de fon armée
, attaqua la place 8c s’en empara. Il fit jetter
la garnifon dans un cachot étroit, où elle fut
étouffée en douze heures ; il n’en refta que vingt
trois hommes. Ces malheureux offrirent de grandes
fommes à la garde qui étoit à la porte de
leur prifon, pour qu’on fît avertir le prince de
leur lîtuation. Leurs cris, leurs gémiffemdns l’àp-
prenoient au peuple qui en étoit touché j mais
perfonne ne vouloit aller parler au defpote. Il
d o r t , difoit-on aux anglois mûurans j 8c il n’y
avoit pas peut-être un feul homme dans Je Bengale
qui penfât que, pour fauver la vie à cent
cinquante infortunés, il fallût ôter un moment
de fo.mmeil au tyran.
L’amiral Watfon , qui étoit arrivé depuis peu
dans l’Inde avec une efeadre , & le colonel Clive
qui s’étoit fi fort diftingué dans la guerre du
Çarnate, ne tardèrent pas à venger leur nation.
Ils ramaflerent les anglois difperfés 8c fugitifs ;
ils remontèrent le Gange, dans le mois de décembre
1 7 5 6 , reprirent Calcuta 3 s'emparèrent
de plufieurs autres places, 8c remportèrent enfin
une viCloire complette fur le fouba.
Un fuccès fi étendu & fi rapide devient en
quelque forte inconcevable , lorfqu’on penfe que
c’étoit avec un corps de cinq cens hommes que
les anglojs lottoient ainfi contre toutes les forces
du Bengale : mais, s’ils durent en partie leurs
avantages à la fupériorité de leur difeipline 8c à
Fafcendant marqué que les européens'ont dans
les combats fur les nations indiennes, ils furent
(Scon. polit, & diplomatique. Tom. J.
encore ferais phis utilement par l’ambition des
chefs, par la cupidité des miniftres , Sc par la.
nature d'un gouvernement qui n'a d'autres ref-
forts que l'intérêt du moment & la crainte. C ’efl:
du concours de ces diverfes circonftances, qu'ils
furent profiter dans cette première entreprife, 8e
dans toutes celles qui la fuivirent. Le fouba écoit
détefté de fes peuples 3 comme le font prefque
toujours les defpotes $ fes principaux officiers ven-
doient leur crédit aux anglois ; il fut trahi à la
tete de fon armée, dont la plus grande partie re-
fula de combattre, 8e il tomba lui-même au pouvoir
de fes ennemis, qui le firent étrangler en
prifon.
Ils difpofèrent de la foubabie en faveur de
Jaffier-Alikan, chef de la confpiration. Il céda à
la compagnie quelques provinces, 8e il lui accorda
tous les privilèges, toutes les exemptions,
toutes les faveurs auxquelles elle\ pouvoit prétendre.
Mais bientôt las du joug qu'il s'étoi-t im-
pofé, il chercha fourdement les moyens de s'ea
affranchir. Ses déffeins furent pénétrés, 8e il fut
arrêté au milieu de fa propre capitale.
Koffim-Alikan, fon gendre, fut proclamé à
fa place. Il avoit acheté cette ufurpation par des
fommes immenfes ; mais il n'en jouit pas longtemps.
Impatient du joug, comme l’avoit été fon
prédécefleur, il fe montra indocile 8e refufa de
recevoir la loi. Auffi-tôt la guerre fe rallume. C e
même Jaffier-Alikan, que les anglois tenoient
prifonnier, eft proclamé de nouveau fouba du Bengale; on marche centre Koffim-Alikan; on
parvient à corrompre fes généraux, il eft trahi
8e entièrement défait ; trop heureux j en perdant
fes états, de .fauver les immenfes richelles qu'il
avoit accumulées.
Au milieu de cette révolution , Koffim-Alikan
ne perdit pas l'efpoir de la vengeance. Il alla
porter fon refïentiment & fes' tréfors chez le
nabab de Bénarès, premier vifir de l'empire
Mogol. C e nabab, & tous les princes voifins fe
réunirent contre l'ennemi commun : mais ce
n'étoit plus à une poignée d’européens, venue
de la côte de Coromandel, qu’ils avoient à faire ;
c'étoit à tontes les forces du Bengale qHe les
anglois tenoient fous leur puiflance. Fiers de leurs
fuccès, ils n'attendirent point qu’on vint les attaquer;
ils marchèrent les premiers,au-devant de
cette ligue formidable, & ils marchèrent avec
la confiance que leur infpiroit C liv e , ce général
dont le nom fembloit être devenu le garant de 1a
viétoire. Cependant Clive ne voulut rien hafarder.
Une partie de la campagne fe pafla en négociations
: mais enfin les richeffes que les anglois
avoient déjà tirées dit Bengale, fervirent à leur
affurer encore de nouvelles conquêtes. Les chefs
de l ’armée indienne furent corrompus, & lorfque
le nabab de Bénarès voulut engager une aâion
il fut entraîné par la fuite des Cens , fans même
avoir pii çombattfe.
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