
& le roi'de Candi eft maître de l'intérieur du pays :
mais les1 bedas, peuples fauvages-, ne reçonnoif-
fént l’autorité ni du roi de Candi ni des hollandois.
Le diilriét qu’ils habitent^ eft au nord de l’ifie; &
ils font établis fur les côtes du nord-oueft.
Les états du roi de Candi s’étendent du nôrd-
oueft au fud-oueft, & fes poffeftîons touchent à
la merde deux côtés. Les hollandois lefefferrent
du côté du nord j de l’eft & du fud-oueft ; & parla
ils font maîtres de la plus grande partie des côtes.
Le royaume de Candi & la principauté d’Ouva
font divifés en grandes parties, qui répondent à
nos provinces , & en petites parties appellées cdr-
las , qui répondent à nos bailliages. De grands
bois leur fervent à,la fois de fortifications Sé de limites.
On compte jufqu’à trente-deux principales
provinces , dans chacune defqueltes il y a des
villes, des châteaux, des bourgs & des villages. .
Tout ce pays eft habité par-les chingulais, peuplade
indigène. -
• Les hollandois commandent au relie de l’ille,
mais leurs poffeflions ne font pas continues. L’ancien
royaume de Cota , qit’ils ont appellé le pays
de la canelle , eft au fud-oueft. Il leur donne plus
de foixante-dix lieues de côtes, & ils ont fournis
Iqs chingulais jufqu’aü centre du pays. Ils occupent
ici vingt-fept-provinces oucorks, ils ont des
places fortes fur le rivage, & dés'tMteaux dans
l’intérieur de l’ifle. Ils ont à l’eft de fille trois provinces
maritimes, qui touchent' à la principauté
d’Ouva & au pays des bedas. Enfin les malabarès
font leurs vaffaux chez, les yanians, dans le royaume
de Jafanapatam, au nord de l’ifle, & fur les
illes à l’eft, voilines delà côte de Coromandel.
. Les villes maritimes ont été placées dans les
lieux les plus commodes à l’abord des vaiffeaux. '
On ne peut dire cependant que les côtes de Ceylan
foient bonnes. Celles de l’eft font d’ordinaire
baffes, & les navires n’y ont point d’abri. Celles
du midi font hériffées de rochers. La mer des environs
eft.femée de bancs., qui rendent difficile
l’entrée de la rade ,- & le mouillage peu Sûr. Les
gros bâtimens courent rifqùe de ne point trouver
de fond. En général, cette ifle a peu de bons
ports.
Les chingulais ayant toujours conlerve leurs
loix anciennes, on leur a laiffé prefque toute?leurs
formes d’adminiftration ; mais lorfqü’ils obéif-
foient aux portugais, il falloit que leur bandiga-
j-alla, ou chef de juftiee, fût portugais. ' . Hiftoire de P établijfement des hollandois à- Ceylan.
Il eft inutile de parler des établiffemens qu’eurent
autrefois les portugais dans cette ifle. Le leéleur
trouvera ces détails dans l’Hiftoire générale des voyages,
8c dans l’Hiftoire pkilofophique çommerce des Européens dans les deux &In pdoelsi:tique du
Vers le milieu du fiècle dernier, tandis que les
hollandois s’aggrandiffoient- & s’affermiffoient à
l’eft de l’Afie, ils fongêrent à enlever l’ifle de Cey-
fan aux portugais. On peut remarquer que cette
nation , fi éclairée fur le commerce, â d'abord
penfé à fie rendre maitreffe des productions de première
& de fécondé néceflîté , avant de fonger aux
marchandifes de luxe; c'eft fur la pofleffion des
épiceries quelle a fondé fa grandeur en Alie ,
comme elle Ta fondée en Europe fur la pêche du
hareng. Les moluques lui fournilToient la mufeade
& le girofle : Ceylan devoit lui donner- la canelle. '
Les peuples de Ceylan ne. virent dans les hollandois
que les ennemis de leurs tyrans ; & ils fe joignirent
à eux. Par ces deux forces réunies , les
portugais furent entièrement cliaffés en i6j 8 ,
après, une guerre longue , fanglante, opiniâtre.
Leurs établiffemens tombèrent tous entre les.mains
de la compagnie, qui les poffede encore. A l'exception
d'un. efpace affez borné fur la côte orien-
taler où l'on ne troüve point de port, & dont le
fouvèrain du pays tiroitfon fel, ils formèrent autour
de l'ifle un cordon régulier, qui s'étendoit
depuis deux jufqu'à douze lieues dans les terres.
Le'fort dé Jaffanapatam , & ceux des ifles de
Manar & de Calpentin, ont pour but d'empêcher
toute liaifon avec les peuples du continent vôifin.
Negumbo, deftiné à contenir le diftrid qui produit
la meilleure canelle , a un port qui eftfuffifant pour
les chaloupes , mkis qui n'eft pas fréquenté, parce
qu'il y a une riviere navigable qui conduit à C07
lumbo. Cette placé, que'les portugais avoient fortifiée
avec un foin extrême, comme le centre des
richeffes, eft devenu le chef-lieu dé la colonie. Il
| eft vraifemblable que, fans les dépenfes qui y
avoient été" faites, les vices de fa rade auroient
déterminé les hollandois à établir leur gouvernement
& leurs forces à Pointe-de-Gale. On y trouve
un port, dont â la vérité 1,'entrée eft difficile ,
& le baffin fort' refferré, mais qui réunit d'aii-
leurs tous les avantages qu'on peut defîrer. C'eft*
là que la compagnie fait fes chargement pour l'Europe.
m , .
Mature lui fournit du caffé. & du poivre, dont
elle a introduit l'a culture. Ses fortifications fe ré-
duifent a, une redoute ^ fituée fur une rivière qui ne
pçut ’reçevoir qüe des Bateaux. Le plus beau, le
meilleur port dès Indes , c'eft .Trinquemale. Il eft
compofé. de plufieurs baies qui offrent un afyle sûr
aux plus nômbreufes flottes : on n'y fait point de
commerce. Ce diftriél, où il n'y a point de manu-
faàures , &'où l'on fe procure peu de vivres, eft
gardé par fa ftérilité. D'autres établiffemens moins
cônfiderablés , répandus fur la cote,... fervent à
faciliter les communications, & a ecarter les etrangers.
■ Détails far le commerce & V admimfti ation des
hollandois h Ceylan. Ces précautions ons mis dans
les mains de la compagnie toutes les produftions
de l'ifle. Celles q u i entrent dans le commerce,
font i°. lés amétiftes , les faphirs, les topazes &
des rubis très-petits & très-imparfaits. Ce font des
maures venus de la côte de Coromandel, qui eu
payant un modique droit, les achètent, îes^taillent
, & les font vendre à bas prix dans les différentes
contrées de l'Inde.
2°. Le poivre, que la compagnie achetée 0 fols
la livré; le caffé quelle ne paye que 4 ; & le cardamome
qui n'a point de prix fixe. Les naturels
du pays font trop indolens, pour que ces cultures
d'une qualité très-inférieure, puiffent jamais devenir.
*fort confîdérables.
30. Une centaine de balles de mouchoirs, de pagnes
& deGingavnps, d'un très-beau rouge, que
les malabarès fabriquent à Jaffanapatan où ils font
établis depuis long-temps.
40. Quelque peu d'ivoire, & environ cinquante
éléphans. On les porte à la côte de Coromandel ;
& cet-animal doux & pacifique, mais trop utile a
l'homme, pour refter libre dans une ifle, va fur
le continent augmenter & partager les périls & les
maux de la guerre.
f°. L'areque, que la compagnie acheté à raifon
de 10 liv. l'ammonan, & quelle vend 36 0U 40I.
fur les lieux même, aux vaiïfeaux de Bengale, de
Coromandel & des maldives, qui le payent avec
du riz, de greffes toiles & des cauris.
6°. La peche des perles eft encore un des revenus
de Ceylan. C'eft dans le détroit qu'elle fe fait :
Elle fut autrefois d'un grand rapport : mais on a
tellement épuisé cette fource de richeffes , qu'on
n'y peut revenir que rarement. On vifite, à la vérité
tous les ans le banc , pour favoir à quel point
il eft fourni d'huîtres : mais communément il ne
s'y en trouve affez que tous les cinq ou f1x an?*
Alors la pêche eft affermée ; & tout calculé, on
peut la faire entrer dans les revenus de la compagnie
pour 20Q,ogo liv. Il fe trouve fur les mêmes
côtes une coquille , appellée Xauxus, dont les
indiens . du Bengale font des .bracelets. La pêche
en eft libre ; mais le commerce en eft exclufir.
70.,Le grand objet de la compagnie, c'eft la
canelle. La compagnie a des poffeffions où cet arbre
ne. croît point. On n'en voit que dans le territoire
de Negombo, de Colombo & de Pointe-
de-Gale. Les forêts du prince rempliffent le vuide
qui fe trouve quelquefois dans les magafins. Les
montagnes occupées par les bedas en font remplies :
mais ni les européens, ni les chingulais n'y font
admis ; & pour partager les richeffes des bedas ,
il faudroit leur déclarer la guerre.
. Les hollandois achètent la plus grande partie
de la canelle des indiens qui leur font fournis. Ils
fe font engagés à en recevoir une quantité limitée
du roi de Candi, à un prix plus confidérable.
L’une compenfée par l'autre, elle ne leur revient
pas à 12 fols la livre. Il ne feroit pas impoffible aux
vaiffeaux qui fréquentent les ports de Ceylan 5 de
fe procurer l'arbre qui produit la canelle : mais cet
arbre a dégénéré au Malabar, à Batavia,, à l'ifle
de France, par-tout où il a été tranfplanté.
La compagnie croyoit avoir befoin autrefois de
quatre mille foldats blancs ou noirs, pour s'affurer
les avantages qu'elle tire de Ceylan. Ce nombre eft
(Mcon. polit. & diplomatique, Tom, L
réduit à quinze ou feize cents. Ses dépenfes annuelles
montent cependant à 2,200,000 liv. : fes
revenus, fes douanes & fes petites branches de.
commerce, ne rendent pas plus dq^2,000,000 liv.
Ce qui manque, eft pris fur les bénéfices que donne
la canelle. Elle doit fournir encore aux frais
qu'occafionnent les guerres qu'on a de temps en
temps avec le roi de Candi.
Les hollandois ne fe diffimulent pas que ces di-
vifîons leur font funeftes. Dès qu'elles commencent,
les peuples qui habitent les côtes , fe retirent
la plupart dans l'intérieur des terres. Malgré
le defpotifme des chefs du- pays , ils^ trouvent encore
plus infuportable le joug européen. Les cha-
lias n’attendent pas toujours les hoftilités pour s’éloigner
: ils prennent quelquefois cette réfolution
extrême , à la moindre méfîntelligence qu'on remarque
entre le roi & les hollandois. La perte
d'une récolte eft alors fuivie des dépenfes qu'il faut
faire, des fatigues qu'il faut effuyer, pour pénétrer
, . les armes à la main, dans une contrée coupée
de tous côtés par des rivières, des bois, des
ravins & des montagnes.
Des confédérations fî puifTantes avoient déterminé
les hollandois à gagner le roi de Candi par
toutes fortes de complaifances. Ils lui envoyoienc .
tous les ans un ambaffadeur chargé de riches pré-
féns. Ils tranfportoient fur leurs vaiffeaux fes prêtres
à Siam, pour y étudier la religion, qui eft la.
même que la fienne. Quoiqu'ils eufifent conquis fur
les portugais5, les fortereffes, & les terres qu'ils 00
cupoient , ils ne prenoient que le titre de gardiens
des rivages du prince : ils lui faifoient encore d'aur*
très facrifices.
Cependant des ménagemens fî marqués n'ont
pas toujours été fuffifans pour maintenir la paix r
elle a été troublée à plufieurs reprifes. La guerr©
qui a fini le 14 février 1766, a été la plus longue,
la plus vive de celles que la défiance, & des intérêts
oppofés ont pxcitées. Comme la compagnie
donnoit la loi à un monarque chaffé de fa capital©
& errant dans les forêts, elle a fait un traité très-
. avantageux. On reconnoît fa -fouveraineté fur tou--
tes les contrées dont elle étoit en poffeffion avant
les troubles. La partie des côtes qui étoit reftée
aux naturels du pays, lui eft abandonnée. Il lut
. fera permis de peler la canelle dans toutes les plai-,
hes , & la cour lui livrera la meilleure des montagnes
, fur le pied de 41 liv. f f. pour dix-huit livres-«.
Ses commis font autorifés à étendre le commerce,,
par-tout où ils croiront pouvoir le faire avantageux
fement. Le gouvernement s'engage à ne point former
de liaifons avec les puiffances étrangères, â
livrer même tous les européens qui pourroient s’êtr©
Igliffés dans l'ifle. Pour prix de tant de facrifices „
le roi reçoit a&uellement la valeur de ce que les
rivages cédés lui produifoient ; & fes fujets peuvent
y aller prendre, fans rien payer, le fel néeek
faire à leur confommatioo. La compagnie pourroit»
p p p