
des fours communs , où chacun porte fon fagot
de broufl'ailles.
Les moeurs doivent être pures parmi quinze
cens habitans qui fe trouvent dans l'ignorance &
la misère , dont les femmes ne voient point d'hommes
pendant les trois quarts de l'année 3 & qui
n'ont nulle propriété > elles le font en effet. Gènes
y entretient un commiffaire génois , qui y commande
& y rend la juftice. Le commiffaire a, fous
4ui un préfident r & quatre confeillers choifis parmi
les viellards de l'ifle » qui jugent les petits débats
& lui en rendent compte. La même forme
du gouvernement fubfiftoit fous la domination
françoife , lorfque le roi de France y tenoit gar-
jiifon ( i) .
L e commandant militaire y faifoit les fondions
.du commiffaire génois. Dans les cas graves , il
en înftruifoit le confeil fupérieur de C o r fe , ainfi
que le commiffaire génois en informe le fénat.
L e château bâti dans le bourg de Capraya eft
?ffez fort > il domine un petit havre 3 qui peut recevoir
des tartanes. C e port eft encore protégé
par une bonne tour j on en trouve deux autres
aux extrémités de l'ifle 3 moins pour fa défenfe
que pour la découverte des barbares, qui ont
toujours fait des defeentes fur la côte.
C A R A C T È R E N A T IO N A L . Le caraftére
d ’une nation conlïfte dans une certaine difpofîtion
habituelle de l'ame 3 qui eft plus commune chez,
un peuple que chez un autre 3 quoique cette dif-
pofition ne fe rencontre pas dans tous les individus.
Le caraftere des françois 3 par exemple 3 eft
la légèreté 3 la gaieté 3 la fociabilité 3 l'amour de
leur roi & delà monarchie, &c.
Les divers peuples confervent long - temps leur
caraftere national. Ainfi , les athéniens du temps
de Démofthène, aimoient beaucoup les nouvelles
: ils les aimoient du temps de S. Paul} & ils
les aiment encore aujourd'hui. Les traits diftinétifs
du caraftere des Germains , dont parle T acite, fe
retrouvent parmi leurs defcendans.
Des caufes du caractère national. On explique
par les caufes morales & par les caufes phyfiques
l'origine du caraftere national. J'appelle caufe morale
tout ce qui peut opérer fur l'efprit, & le façonner
à certaines habitudes : tels font la nature
du gouvernement , les révolutions qu'il a ' lubies
, l’abondance ou la difette qui règne dans
la nation 5 le rôle qu'elle -joue parmi les corps
politiques« Je donne le nom de caufe phyfique à
l'air qu'on refpire, au climat qu'on habite , en un
mot à tout ce qui influe fur le tempéramment.
En traverfant une rivière, en paffant une montagne,
on trouve, avec un nouveau gouvernement,
de nouvelles moeurs. Les languedociens & les 1
gafcons font les fujets de la France dont la vivacité
eft la plus gaie & la plus faillante ; il n'y a que
les Pyrénées entre eux & les graves efpagnols :•
ainfi les caufes phyfiques ne fuffifent pas pour rendre
compte du caraftere national.
Lorfque deux nations, habitant la même çon-,
tree, ne fe mêlent point, foit par principe de religion,
foit à caufe de la différence des langues,
chacune conferve, durant plufieurs- fiècles, fes
moeurs propres, qui font fouvent oppofées- Les
turcs font intègres, courageux & graves : la lé-
gerete , la duplicité & la poltronnerie font le
caractère des grecs modernes.
Prefque tou^ les conquérans ont porté leurs
armes viCtorieufes du feptentrion au midi, & on
a cru que les peuples du nord étoient les plus courageux
& les plus féroces. On auroit mieux fait de
dire que prefque toujours la pauvreté & l'indigence
font des conquêtes fur le luxe & les richef-
les. Les farrafins qui abandonnèrent les déferts de
1 Arabie , & marchèrent vers le nord , inondèrent
les provinces les plus fertiles de l'empire romain ;
ils rencontrèrent les turcs, qui venant des défers
de la tarartie , alloient vers le fud.
Un illuftre écrivain a remarqué que tous les
animaux courageux font carnaciers, & il obferve
que les anglois, dont la nourriture eft forte &
fucculente , doivent furpaffer de beaucoup en
valeur ces autres nations, chez qui le bas peuple
meurt prefque de faim Cependant la frugalité
n empêche pas les fuédois d'être braves : & c'eft
une nouvelle raifon de ne pas tout expliquer paf
les caufes phyfiques. Des changemens fur-venus dansât caraCtère des
nations. Les françois n'ont pas toujours eu cette
gaieté qui paroît être aujourd’hui leur caractère
diftin&if. L'empereur Julien dit les aime des parifiens .* Je rieux com, mpaer lcee mqiuene .leur caraftere eft auftere G* fé-
Le caraftere des peuples change au milieu de
ces révolutions, oui les font paffer tout à coup
de l'état de liberté à celui de l'efclavaçe. Alors de
fiers & d'audacieux qu'ils étoient, ils deviennent
foibles & pufillanimes > ils, n'ofent lever les yeux
fur l'homme en place : ils font gouvernés, & peu
leur importe qui les gouverne. Ils difent, dans leur
qduéec foouirta mgeomn emnta,î trceo m3 jme en le'ânn ep odrtee rlaai fpaabsl eu :n Qpluuesl
lourd fardeau. Si un citoyen libre eft gaffionné pour
la gloire de fa nation, un efclave eft indiffèrent
au bien public : fon coeur qui n'a plus ni a&ivité
ni énergie , eft fans vertu , fans talens : les facultés
de fon ame font engourdies : il néglige -les
arts, le commerce, l'agriculture, &c. Ce n'eft
point à des mains ferviles qu'il appartient, difent
(1) En,ti7$7 le célèbre Paoli, général de l’ifle de Corfe , enleva Capraya aux génois, qui firent d’inutiles efforts
pour la reprendre. En 1769, elle pafla Tous Ta domination frasçoife avec la Corfe. La France l’a rendue depuis à la
jépublique de Gênes, en vertu de i'arçide VI du traité fait entre ces deux puifiances pour la cçffiçn de la Corfe*
les angloîs, de travailler & de fertilifer la terre.
L'hiftoire romaine nous offre un tableau remarquable
des changemens fubits qu'éprouve le caractère
d’une nation. Quel peuple, avant le règne
des Céfars, montra plus de force , plus de vertu,
plus d'amour pour la liberté, plus d'horreur pour
l'efclavage? Et quel peuple montra plus de foi-
bleffe & de lâcheté fous fes empereurs ? Sa baf-
feffe fatiguoit Tibère.
Veut - on un exemple plus moderne d'un pareil
changement ? Comparons les anglois d'aujourd'hui
aux anglois du temps d'Henri V I I I , d'Edouard
V I , de Marie & d'Elifabeth. C e peuple, aujourd'hui
fi humain, fi tolérant , fi éclairé , fi
libre, fi induftrieux, fi ami des arts & de la phi-
lofophie , n'étoit alors qu'un peuple efclave,
inhumain , fuperftitieux, fans arts & fans in-
duftrie. • . / 1
Dès qu’ un prince ufurpe une autorité fans bornes
, il eft fur de changer le caraftere de fes peuples
, d'énerver leur ame, de la rendre craintive
& baffe. Dès ce moment, fes fujets indifferens
à la gloire , perdent cette noble fermete qui
fupporte tous les travaux , qui brave tous les
dangers. Le jpoids du defpotifme brife en eux le ’
reffort de l'émulation.
Si un prince, impatient de la contradiction,
donne le nom de factieux à l'homme vrai , | il
fubftitue dans fa nation le caraftere de la fauffete a
celui de la franchife. S i , dans les momens critiques
, ce prince, livré à fes flatteurs, ne trouve
enfuite auprès de lui que des gens fans mérité,
il ne doit s'en prendre qu'a lui, c'eft lui-meme
qui les a r.endus tels.
Le defpotifme eft le plus redoutable ennemi du
'bien public. Il change le caraftere d'une nation 3
& toujours en mal ; il le dégrade & il le corrompt.
Quelle que foit la puiflance d’un fultan des
Indes, il ne verra jamais de citoyens magnanimes.
Jamais il ne trouvera dans fes efclaves les
vertus des hommes libres.
Combien le caractère d‘un fouverain influe fur le
fort d'une nation. Que la conftitution d'un pays
foit bonne ou mauvaife., le bonheur ou ljnfor-
tune des peuples dépend principalement du caractère
perfonnel du fouverain. Le plus bel édifice
tombe en ruine , quand il appartient à un maître
indolent qui le néglige , & un défert devient un
jardin riant entre les mains d’un propriétaire vigilant
& fage. Voyez ce que la Ruflxe eft devenue
par les foins de Pierre - le - grand > voyez ce qu'eft
devenu le royaume de Pruffe fous l'adminiftration
du dernier roi & du roi a&uel. Si on examine , d'un
autre cô té , des pays très-favorifés de la nature, &
mal gouvernés j fi on compare ce qu’ils fontavec
l'état floriffant, dans lequel ils pourroient e tr e ,
le coeur eft ému d’indignation & de pitié.
Des rapports politiques qui réfultent de la différence
des caractères nationaux. Celles des nations de
l ’Europe qui jouent le plus grand rôle 4 opt toutes
des caractères d'efprit différens. Elles font plus ou
moins difficiles à émouvoir, à perfuader, à déterminer.
Les unes font plus acceffibles a la gloire &
à la célébrité > les autres ne confultent que leurs
intérêts, & la renommée n'eft pour elles qu un
objet fécondaire.
Le négociateur doit étudier avec foin ces diffe-
rens carafteres $ il doit, félon les circonftances ,
brufquer ou-rallentir les évênemens, & toujours
fuivre la méthode que lui indique fa pofition. Dans
la conduite des affaires publiques , les mauvais
fuccès proviennent fouvent de la mauvaife manière
de les traiter. Un homme réuffit où un autre
plus éclairé & plus habile a échoué, parce que
l'un a compté avec le caraftere de fes compatriotes
ou des étrangers, & que l’autre n'a compte
qu'avec le fîen< Combien l'homme d'état doit avoir egard au caractère
ou génie national. La faine politique ne permet
jamais de forcer le caraftere national. On peut bien
exiger des facrifices d'obéiffance , mais ils font de
peu de durée, & les évênemens qui en réfultent
font peu favorables.
C'eft donc en chaque pays une connoiffancc
bien effentielle à l'homme public, que celle dugenie
de fa nation, & c'eft pourtant une des études que
l'on approfondit le moins j parce que, faute de
réfléchir, on n'en Cent pas l'importance, parce
que ceux qui font en place imaginent que tout le
monde doit penfer & être affeCté comme eux.
L'homme public s'agite en vain ; il peut imaginer,
tant qu'il le voudra, que fes volontés détruiront
les obftacles, il ne changera pas l'ordre de la
nature. C'eft une loi de la nature que les effets
foient proportionnés aux moyens*; & s’il s'en
écarte, fes réfolutions n'auront aucun fuccès.
Ainfi, pour citer des exemples, il faut redouter
la guerre dans fes pays où dominent le goût des
études tranquilles, la frivolité , la molleffe & le
luxe. Ceux, au contraire, où la majeure partie de
la jeuneffe s'adonne à la navigation & au commerce
, ne manqueront pas de marins, & les
entreprifes de mer y feront plus heureufes.
CARDINAL. Vqyc^ le Dictionnaire de Jurif-
prudence.
CARINTHIE , province d'Allemagne, avec
titre de duché, borné par l'Autriche, la Styrie,
la Carniole & le Frioul, le Tyrol, &c. Clagen*-
furt en eft la capitale.
Ce duché renferme 11 villes & 21 bourgs. Les
états font à peu près les mêmes que dans l’archi-
duché d’Autriche, & ils fe tiennent à Qagenfurt.
Les principales fabriques font celles d'açier &
de fer ; elles font des exportations confidérables
à l’étranger j les anglois même emploient l'acier
de la Carinthie pour leurs plus beaux ouvrages. Il
y a une chambre de commerce.
La Çmnthic reffortit à h régence ^'Autriche
Kkk 2