
jéunit, dans frais , les productions des contrées
voifînes , depuis que la compagnie angloife , revêtue
de la dignité d’amiral du grand-mogol ,. ,eft
obligée d’avoir une marine & une marine affez
nombreufe dans ces pârages.
C’étoit une néceflité que, dans un pareil entrepôt
, les chantiers / les navires & les négo-
fians fe multipliaffent. Auffi l’ille s’eft-elle affez
rapidement emparée de toute la navigation &
d’une .grande partie du comnterce que Surate
& les autres marchés voifins avoient fait
jufqu’alors ; dans les mers d’Afie.
Il falloit donner de la Habilité à ces avantages.
Pour y parvenir , on a entouré de fortifications
le port qui eft le mobile de tant d’opérations
, & ou. doivent fe radouber les. efcadres
envoyées par la Grande-Bretagne fur l’océan indien.
Ces ouvrages font folidement conftruits ,
& n’ont j dit-on ■> d’autre défaut que d: être, trop
étendus. Ils ont pour-défenfeurs douze cens européens
, &‘uri beaucoup plus grand:nombre de
troupes afiatiques*
En 1773, le revenu de toütes les dépendances
de Bombay mon toit à 13,, 607,212 liv. 10 f
& leurs dépenfes à 12,71t,150 -livres. Lafitua-
tion de ces -trop nombreufes colonies a été fû-
jrement améliorée depuis cette époque $ mais nous
ne faurioris aligner la valeur de ces économies.
Les poffeflions des anglois & des marattes dans
le Malabar font, trop mêlées » leurs intérêts trop
oppofés & leurs prétentions trop vaftes , pour
qu’un peu plus plutôt ; un-peu plus tard ' les
deux nations ne niefurent leurs forces.* On ne
peut, pas dire à laquelle ides deux .puiffances la
victoire reftera. Get événement dépendra, des
circonftances où elles fe trouveront-^^des alliances
qu’elles auront formées, principalement des
•hommes d’état qui dirigeront leur politique, & des
généraux qui commanderont leurs armées, ci
• Indépendamment des cau.fes générales qui. entretiennent
la guerre , parmi le§ établiffëmens des
anglois dans l’Inde „ il y en a dç particulières jà
B o m b a y :
La compagnie angloife , revêtue de la dignité
d’amiral du grand-mogol, eft obligée d’avoir une
marine affez nombreufe, comme on vient de le
dire ; elle eft d’ailleurs protectrice de .la citadelle
de Surate. Çes deux places la mettent en état de
chaffer tous les européens? du Malabar ; mais auffi
elles ont extrêmement aigri contre eqx les marattes
-, qui font à portée de .leur, nuire de plur;
fieurs manières. , ,
Ces barbares ont .pris, fur les portugais. J’iile.
de Salcete , qui a: vingt-fix milles de long & huit
ou neuf de larges elle, eft d’une abondance, extrême
, & avfc peu.de culture relle,fournit tout
ce que peut produire la terre entre les tropiques.
On la vegardoit comme le. grenier deGoa;elle n’eft
féparée de Bombay que par un canal étroit &
guéable dans les eaux baffes. Les. poffeffeurs actuels
étoient fi convaincus , il y a quelques années
, de la facilité qu’ils* trouveroient à s’emparer
de Bombay , qu’en voyant entourer les fortifications
de foffés, ils difôient avec—arrogance:
la fions Les fa ir e , nous ne fommes p as a préfent dans
le cas de rompre avec les anglois »,• mais f i cela
arrivoit , nous remplirions dans une nuit leurs fo fié s
avec nos pantoufles. Cette plaifanterie s qui pou-
voit avoir alors quelque fondement \ nJen a plus
depuis; que 1 importance de liomba y a détermine
fes poliedeurs a _y ajouter beaucoup d'ouvrages 3
&. à y jetter une i garnifon nombreufe. Les marattes
eux-mêmes ; en; font .përüuadés •, mais ils
croient _ pouvoir ruiner cet établilfcment , fans
meme l'attaquer; ils n'ont pour"cela , difent-ils,
qu'à lui refufer des vivres à Salcete. & à l'empêcher
dlen tirer du: continent. Ceux qui con-
noiffent bien la difpofition des lieux , trouvent
la chofe. très-praticable ; fur-tout dans la mauvaife
mouçcm. '
.0 Enfin 3 depuis , que la compagnie s'eft vue forcée
de remettre aux marattes tous les ports des
angrias , ces barbares augmentent fous les jours
leur marine; déjà ils ont réduit les hollandois à
ne naviguer qu'avec: leurs paffe-parts qu'ils font
payer fort cher. Leur ambition augmentera avèé
leur puilfancé , & il . n'elt. pas poffible qu'à'la
longue leurs prétentions 80 les prétentions des
anglois ne fe* choquent.
Si nous ofions hafarder une conjecture * nous
ne craindrions pas de prédire que les agens de la
compagniepontribueront eux-mêmes à la rupture.
Indépendamment de la paffion commune a tous
leurs pareils d’exciter des troubles-;,, parce que-la
confufioji eft favorable à leur cupidité’, ils éprouvent
un dépit, fecretj de n’avoir eu aucune parc
aux fortunes immenfes qui fe font faites au Coromandel
, & fur-tout dans le Bengale. Leur avarice,
leur jaloufie , leur orgueil même les porteront
à peindre les marattes comme, des voifins
inquiets“,; toujours prêts à fondre fur Bombay 3
à exagérer les moyens-de difliper ces aventuriers,
à : vanter la .richeffe du butin qü’on feroit dans
leurs mbntagnes remplies des tréforsJde l’Indofs
tan qu’ils y accumulent depuis un .fiècle. 4
BÔNHFTJJt DES ETATS ; mot formé de
plufieurs, dont l’acception générale n'eft pas difficile
à faifir. J] fignifie ce qui contribue* à ta.profe
périté & à la félicité: des hommes vivans fous la
protection d’uné autorité fouveraihe..
Qet article fembleroit pouvoir, être rapporté à
ce que nous avons dit dans la ; définition du bien
public ; mais le. fujet qui en fait la matière peut
être confidéré fous un point de. yue qui paroît
d’abord offrir;plus dfétendue , quoiqu’ici [j comme
dans l’artiëk que nous venons de citer,; tout doive
être fégalemént. ramené au fimple i au fimple 3
dis - je, dans lequel feulement fe trouve l’efficace
&le vyai.
Si le bien public s’établit de lui-même par le
bien particulier, qui confilte dans la liberté & les
bonnes moeurs; fi le gouvernement paroît n’ avoir
à faire en cela qu’à donner force à la juftice, protection
au droit d’un chacun, & ne devoir opérer
fur les moeurs que par l’exemple & la rigide économie
, il femble que le bonheur des états lui demande
plus d’aCtion, & foit plus directement
fous fa main. Toutefois notre imagination eft un
mauvais guide dans les chofes de fait ; & ces idées,
grandes & compliquées, qui toutes ou en grande
partie, font de notre création, doivent être dé-
compofées ; & je le répète , réduites au fimple fi
l ’on veut trouver le vrai, & ne point s’en écarter.
Des auteurs chinois, écrivâihs révérés chez un
peuple qu’on ne .fauroit trop citer en cette matière,
puifqu’il a toujours fait fa principale & pref-
que fon unique étude de l’économie politique,
c ’eft- à- dire , de la fcience du bonheur des fo-
ciétés ; des auteurs chinois rois fans feeptre & fans courondniefent : Les anciens , gouvernoient l’univers
fans le gouverner : ils lé portoient |i c’eft-à-
dire , qu’ils uniffoient tous les hommes par les
) iehs de la bonté 3 de la droiture, & par des moeurs
ftiemndpsles formées fur l’exemple du fouverain. T enter
le. -m boiennd |e ddiatn Os fuoann gc oe- Turfe , ce que ceft que por
, mais je n entends pas
ce que ceft que gouverner le monde. Belles paroles
d ’un grand & fage empereur ; belles leçons pour
Jes gouvernemens inquiets & novateurs, quipen-
fent que tout doit fe faire par ordonnance, qui
prennent le pouvoir de détruire pour .celui de
créer ; heureux f i , comme dans plufieurs , leur
plein pouvoir s’évapore en feuilles volantes qui ne
produifent aucun effet ; car fans cela il leur arri-
veroit prefque toujours d’attenter, de leurs propres
mains, -à la durée de la fociété,/ qui doit être
l ’objet principal & fommaire du pouvoir prépofé
au bonheur des états.
Le meilleur des gouvernemens eft celui qui ref-
femble le plus au gouvernement du c ie l, qui ne
fe montre .que dans fes effets, tous tendans à la
perpétuité & à la durée par l’aftion régulière &
confiante de fes grands refforts. ;
Dire que le bonheur des états dépend du bonheur
du peuple, comme on a dit que le bien public
n’étoit que le bien particulier., paroitroit s’en
tenir à généralifer les chofes , tandis qu il faut les
ramener au fimple, pour ne pas fe;perdre dans
les details. Quelles font, les conditions qui doivent
procurer l’avancement, les fuccès & la du-
rèe: d’une affociation ?. C ’eft que tous & chacun
des affociés fâchent, puiffent veuillent bien
faire la portion de la chofe qui leur eft dévolue ,
& qui les concerne. Les états ne font qu’une âffo-
ciation plus étendue : c’eft le cas.de leur appliquer
cette règle Nous avons vu que l’objet de la première
fociété , & par une fuite naturelle, que
celui dé toute autre fut l’avantage des affociés.
On peut donc encore le dire ici de tous les états;
nous avons yu que ie bien des affodés faifoit le
bien public, &Ie bonheur des états par conféquent.
Le gouvernement donc , qui paroît plus fpéciale-
iement chargé du bonheur des états , ne peut neanmoins
opérer ce bonheur que par les mêmes conditions
qui firent le fuccès de la première fociéte,
je veux dire par le concours des co- affociés.
Cette importante vérité étoit vivement fentie
dans les premiers temps, parce que les conditions
de leur réunion récente , étoient plus préfentes à
leur efprit, que la néeeftïté.eft le principal aiguillon
de notre intelligence , & qu'ils étoient plus
près du befoin & de la nature. Les hommes con-
noiffoient ce qu’ils avoient à faire pour opérer le
bien ; ils favoient ce qu’ils pouvoient oppofer au
mal, ils pouvoient faire le bien à leur portée ; ils
pouvoient éviter ou réprimer le mal préfent : les
hommes enfin vouloient faire le bien, fi l’on peut
parler ainfi, attenant leur propre bien : ils vou-
loient obvier au malvifible, & qui les menaçoit
de près : mais à mefure que la fociété s’eft étendue
, elle s’ell compliquée d’une multitude de
refforts trop diftans de leur premier mobile. L’arbre
politique, parvenu à fa pleine hauteur, s’eft
charge d’un grand nombre d’excroiffances parafâtes
, qui ne reconnoiffent plus ni la tige ni le tronc,
& qui, à plus forte raifon , ignorent abfolument
les racines. La confufion des intérêts a entrainé la
çonfufion-des idees ; la cupidité s’eft armée de la
violence , l’erreur s’eft affociée à la fraude , & le
bien ü t le mal politique fe font féparés du bien &
du mal moral & naturel.
. Cependant la nature ne prend point le change ;
elle permet aux hommes de fe faire des fimulacres
de puiffance, des fantômes de profpérité , de fe
laifler féduire par l’efpoir trompeur de jouiffances
paffagères , de s’égarer enfin dans la pourfuite de
ces objets dont l’afpeft les éblouit , & qui n’ont
pourtant que des bafes dé fpoliation & de ruine.
Mais tout cela paffe comme une nuée orageufe ,
que quelques rayons d’un jour baiffant parent de
couleurs menfongères,. & qui ne laiftent après
elles que fange , dommage & défolation.
Le vrai bonheur ne fe trouve que fur la voie de
l’ordre ; il embraffe le jour comme la veille, &
le lendemain comme le jour. Cette voie demande
qu’on rappelle tous les hommes à connoitre , à
pouvoir, & à vouloir le bien des fociétés, 1e
bonheur des états. Je l’ai dit, & je le répète : les
premiers inftituteurs jetèrent de grandes; bafes,
parce qu’éprouvés déjà par ^expérience des calami-*
tés, ils trouvoient dans le concours focial,lcs lumières
& les forces qui leur étoient néceflaires pour
fonder. Si leurs fucceffeurs n’ont fait fouvent que
pallier les inconvéniens de détail, méthode infaillible
de les multiplier, c’ell que leurs erreurs &:
leur impuiffance, ont été eaufées par la privation
d*e ces fecours. effentiéls. où les mettoit le défaut
du concours focial, & que leurs courtifàns inté-
reffés n-e leur ont offert que des pièges.
Quand donc il feroit poffble de faire une conf»