ne s’oppofent pas au développement des fubftances
ligneufes, & à TaCcrôiffement des arbres ; parce que
dans rétac naturel des plantés, les plus fortes é tou f-.
faut celles qui peuvent être lèurs rivales , & *fe
multipliant enfuite’ félon l'ordre général de la régénération,
elles occupent infenfiblement, & de
près à près, toute h furfacc de la terre qui peut les
nourrir; Il arrive delà que les bois attirant par leurs
branches les influences de l'a ir , comme.par leurs
racines ils pompent les fitics de la terre ; Tnumidité !
eft naturelle dans les ^ow on le foleil ne peut pénétrer,
& la terre y deviehtfpongieufe.C’eft ce
qu'on peut voir en au tom n e a tf pied des arbres
même ifolés. En effet, on remarque alors que le
loi y eft humide comme fl on l'iivoit arrbfé.
Quand la furface de la terre eft sèche , cette hu—.
mi dite élevée dans l'airoù elle nagé difperféè, eft
attirée par le faîte & le feuillage des; arbres",
tombe fut les bois , puis jointe aux fources & ‘aux
ruiffeaux, qui fortent du bas des coteaux & des
montagnes, fe raffemblé au tour des obftacîés qui
■ s’oppofent à leur écoulement, & fait de leur arqas .
des lacs & des fondrières. Confervée par les bois
dans les pays inhabités , elle forme des marais impénétrables
, & fouvent mal fains, des contrées
où les eaux ne reçoivent point affez de force de
leur quantité ou de. la pente du terrein, pour fe ;
fraver elles-mêmes une. foute à travers ces obfta-
cles j & pour former des fleuves.
L'homme, deftiné par TEternel à faire regner
Tordre fur la terre qu'il lui a donnée pour fon habitation,
peut, feul par fon travail mèttre chaque ;
chofe à fa place , c'eft-à-dire, à fon rang d'utilité
qui lui eft perfonnellement relative; il peut feul j
l'y maintenir & Tÿ perpétuer, & cet ordre eft.
comme le fubftitüt & le complément de là créa- j
tion , puifqu'il en maintient tous les dons dans le
plus jufte équilibre. -
Le bois eft à l'homme de première néceffité,
pour fon chauffage , pour la fabrication des outils j
de fes travaux, pour les conftru&ioris de toute';
efpèce'i & comme tel. de voit lui: être très-précieux
, & Téhgager à la confervation & à Terkrer
tien'desforêts*, mais l'homme émigrant à la fuite •
de fes troupeaux, peu. inquiet fur des befoins
qu’il pouvoit aifément fatisfaire, négligea & laiffa
perdre infenfiblement à fa poftérité , les lumières j
qu'il avo.it jeçüés de l'expérience dans fon ori-.
gine 5 il ne vit plus la terre & fes dons« que comme ;
des biens deftmés à celui qui pourroit s’en empa- !
rer; il oublia l'ordre qui lui preferivoit • de lés
gouverner, de les perfectionner, de les faire re- ■
renaître, & fe vit bientôt réduit au.brigandage
contre fa propre efpèce, pour s'être éloigné du
grand ordre en tenonçant-à fa deftination.
Des loix divines régénérées^ dés hommes
grands & favorables la-hécèffitéi, la râifon enfin,
ont rappelle félon les temps & les lieux les hommes
à leùrê hautes* dèftinées. L'agriculture s'eft;
relevée fous les débris de la barbarie j elle a tranfplanté,
multiplié-, foigné dans quelques contrée^
des arbres fruitiers , enfans naturels d’autres cHy
mats ; lirais a Tégard des bois proprement dits, qui
font detix dont nous parions, dans la plupart des
pay s , Thomme en a ufé long-temps, & en ufe
encore comme dans l'enfance du monde, où Ton
croyoit ces dons fpontanés de la terre-'fans' bornes
, où Ton fe regardoit foi - même comme fur
un lieu de paffage que l'efpéce humaine devoit
bientôt' abandonner.
Les in'convéniens & les dommages réfultans
de cette opinion , devenus palpables par le ïté*
quent abtts qiTellé entraînoit en toùS lieux, 'par
par l’influence de T exemple, & par la compa-
raifon qu’on ne pouvoit s’empêcher de faire du
grand nombre d ’années que là nature demande
pour élever à leur dernière croiffance ces belles
plantes, avec.Tinftant paffager qui fuffit pour les
abattrè les cônfumer y obligèrent des gouverne-
meiis fbigneùx &. reglérrientaires affaire des loix
très-détaillées pour la confervation’& la vnanütén-
-tion des bois t & àprépofer même des jurifdiCticms
particulières à cet objet.
' O11 voit en effet chez diverfes nations de l’antiquité
, des perfonnes prépofées pour veiller à ja
confervation clés bois.
On. lit dans la Bible , que Salomon voulant,
faire bâtir lé; temple de Jerulalem avec là plus
grande magnificence, & n’ayant pas dans fes états
d’affez beaux arbres pour cette conftruClion, en
demanda à Hiram, roi de T ÿ r , qui lui accorda la
•permiffion de faire coupër des cedres Çz des fa.-
pins du Liban.
" Néhémie ayant obtenu d’Artaxéréês longue-
main la liberté de rebâtir Jerufalem , ce roi de
Perfe lui donna des lettres pour Afaph, conferva-
teur des forêts royales , afin qu’il lui f ît délivrer
les bois nécelfaires pour le rétabliffement de cette
ville.
Les Amphidions veilloient à là confervatiot*
des forêts & des bois facrés de la Grèce.
Parmi lés. loix des douze tables apportées d’A thènes
à Rome, & traduites du grec en latin >
il y en avoit une qui trakoit de glande 3 arbori-
bus y : &c.
Ancus Martius, quatrième roi des romains
réunit les forêts au domaine public. Rome établk
ériluite des magiftrafs pour veiller à leur eonfer-
v a t io n , - c e t t e cômmiffion fut fouvent donnée
aux confüîs, comme on lé fit à T égard de Bibulus
& *de Jules C é fa r , qui étant confiais, eurent le
gouvernement général dés forêts : ce que Ton dé-
fignoit par- les termes de provinciam ad fylvam &
colles. Le fénat & lés empereurs dé-; Rome firent
plufieurs loix relatives; à Tentretien dss bois ; ils
nommèrent dès gouverneurs particuliers, pour en-
avoir Tinfpeéto’on dans chaque prôvince de Tèm’-
pire ; 'dés receveurs , pour percevoir lès revenus
des forêts ; enfin des prépofés à là garde & à la
confervation des bois nécelfaires au publiée
Quand l'empire romain fut démembré par les
peuples du> nord, les francs qui fournirent les
Gaules, leÿ trouvèrent couvertes en grande partie
de vaftes forêts , dofitils ne remirent pas toute la
valeur. L'abondance des bois en fit négliger la
confervation , établit-à cet égard une opinion
défavorable. On faifoit alors fi peu de cas dés
bois & des forêts, qu'on ne les confidéroit que
relativement- à la confervation du gibier, & que
les premiers officiers foreftiers nommés par- nos
rois ^ n’avoient dans leurs fonéfions d'autre- objet
que les chafies. On penfa enfin dans le treizième
fiecle.y qu'une meilleure adminiftration des bois
pouvoit augmenter les revenus des domaines de
la couronne & contribuer à l'utilité de la nation ;
& Philippe le Bel en conféquence créa" des officiers
pour Tadminiftration des bois fous le nom de
Maîtres des eaux & forées.
• C e t établifïement qui fubfifte" encore, a reçu
depuis'différentes modifications ; & ce n'eft pas
faute de réglemens & de prépofés à leur obfer-
vance que nos bois diminuent, que nos forêts dé-
periflent. Nous n'entrerons pas ici dans le détail
des loix promulguées à ce fuist: nous nous contenterons
de dire d’après le peu d'effet qu’elles
ont produit, qu’elles n’étoient pas conçues fuivant
le plan de la nature. Une entière-négligence a pu
nuire attrefois à l’entretien des‘forêts, une attention
trop minutieufë & trop réglementaire peut leur
etre encore plus nuifible ; & fi le.monde gouvernant
multiplie encore de nos jours ces'loix en certains
lieux-, nous pouvons remarquer qüe le monde
gouverné s’étudie à les éluder, à leur donner une
explication forcée, à lès acheter; quelles hommes
allez généralement infirmes, commencent à favoir’
que les bonnes loix fe font comme d’elles-mêmes,
& que celles qui ne fie font pas de la forte font
prefque toujoiirsillufoires & vexàtoires.
Le gouvernement ou le régime peut & doit ordonner
le redrelfement des aétes qui interceptent
& anihilent îà[ propriété; mais quant à la manière
d’en ufer, de la conferver & de l’améliorer, il
peut & doit s’en rapporter à l’intérêt même des
propriétaires. Le tout eft de le faire naître & de
l ’accroître : Hoc opus , hic labôr efi.
De tous les fonds fufceptibles de dégradation
par l’empiétement & les entreprilès d’autrui, les
bois ont étéjes propriétés les plus fujettes aux attentats
publics, chez les nations , qui dans leur
origine n’avoient rien moins que Tefprit agricole.
Cës attentats furent par-tout communs dans
les temps de barbariè ; les^ow & les forêts s’ôf-
froient par-tout. Comme perfonne ne les .avoit
femés, nul n’acquit d’abord un vrai titre de propriété
fur le fonds ; mais reconnus dangereux,
parte qu’ils étoient le repaire des bêtes féroces &
des brigands, ils purent appartenir à celui qui fût y
maintenir Tordre & la fureté, d’abord à titre de
fauvegarde , titre fu(filant pour pciféder , mais
qui n’eft pas celui de la propriété foncière. Les
■ premiers bois n’eurent donc qu'un maître & fioii
pas un propriétaire.
Comme tous' les hommes & tous les travaux
ont befoin de bois 3 quand ce maître voulut pour
compagnie d’autres voifins que les loups , il fut
obligé d’accorder aux hommes qui voulurent s'approcher
de lui desufages qui lui coûtèrent peu d'a-
bhrd, attendu la non-valeur des bois qu'il falloir
intéhdiêr quelquefois pour défricher là
terre;; delà tant d'ufages mal conçus , .mal réglés
, deftruâeurs par eflence , & dans lefquels
la civilifation a du trouver une infinité d’abus à
réformer..
Mais il eft impoffible de faire des loix générales
pour la manutention des fonds* nécefiaire-
ment variée par-tout. Tout gouvernement ; toute
autorité ne peut avoir pour cela qu’un objet,
qu’un point, là propriété, & qu'un feul moyen,
l’intérêt du propriétaire. C e qu'il y a donc à faire
fur les bois comme fur toute autre production
c'eft de fe rappeller & d'obferver ce proverbe ,
qui dit que cherté foifonne ,* le bon prix appelle
toujours la denrée. Ayez des débouchés bien libres
, des propriétaires aifés, & ne forcez pas par
des furcharges le peuple des campagnes de mang
e r , comme on dit,, fon bled en herbe, c'eft-à-
dire de tout couper, de tout effruiter pour payer
les impôts, & vous verrez les bois prifés ; & par
conféquent bien entretenus, bien eonfervés , &
cultivés même : car la fueur de Thomme double
les bois comme tout le refte.
Dans ce-cas-là même pourtant, fi Ton furcharge
la confommation du bois 3 par des droits onéreux ,
pris fur le revenu du propriétaire comme tous
autres , il n’y aura plus de bois que pour les riches.
Qui eft-ce qui voudroit de la richefie fans la vanité
? Là vanité prend le fuperflu pour le nécef-
faire, dès-lors la confommation tourne en dégât *
& bientôt le fonds manque.
Cependant le bois a l’avantage d’être le produit
des fonds les. moins propres à toute autre production
; ce qui dans un grand territoire, eft un objet
bien confidérable. Il eft d’ailleurs un moyen précieux
de conferver les terreins ardus, pendants ,
& fur-tout celui des montagnes, qui une fois défrichés
, ne montrent bientôt plus que les oiiè-
mens de notre nourrice , les rochers.
C ’eft une pitié, c’eft une défolation de voir à
quel point le fein de cette bonne mère eft négligé,
meurtri, déchiré même par-tout dans notre
Europe j & chez les nations les plus civilifées (1 ).
Les terreins s’écoulent des montagnes & des co.f-
• » ( î ■ ) Le bois, qui étoit autrefois irès-.commun en France , maintenant fuffit à peine aux ufages inâifjer.Oblçs, Sc ne
foinmes menacés pour l’avenir d’en manquer absolument »>.