fes facultés & fes organes , & par conféquent les
.mêmes droits primitifs & les mêmes devoirs impérieux
, veut le falut de tous également , &
veille également fur tous; mais s'il n'eft point de
vice plus déteftable que l'impiété , il n'eft point
d'impiété plus horrible que l'hypocrifie. Combien
cette hypocrifie perfide n 'a - t-e lle pas abufé du
principe que nous venons de citer en parodiant
fyncoper la loi qui l'établit , & créer une loi fur
prême deftinée dans les cas majeurs & les occasions
preffantes à écrafer l'intérêt particulier fous
le Spécieux prétexte de l'intérêt public. D'après
les trompeul es infinuations on fit un public idéal ,
au nom duquel s'exercèrent tous les monopoles ,
toutes les vexations de la tyrannie fubminiftrante ;
& dans bien des pays encore , dès qu'il ne s'agit
plus que de trouver des cas majeurs , de fuppofer
des occafions preffantes , dont le pauvre le
foible ne fauroient être les juges & feront toujours
les victimes, la brèche eft faite à la loi de la
nature & de l'ordre Social ; la voie eft ouverte à
toutes les vexations publiques , & déformais rien
n'eft défendu que pour inftituer un privilège , rien
n'eft libre qu'en payant.
Dans une république fameufe , quelquefois
l'allarme publique , ou l'excès de l'anarchie populaire,
forcèrent un peuple ennemLdu pouvoir
d'un feul , à créer paffagèrement un magiftrat
fuprême & abfolu. Sa création même étoit le
triomphe de cet axiome; & comme cet a été en
fo i , contradictoire au préjugé général, étoit l'effet
de la loi fuprême , la nêcejjîté , quiforçoit toutes
les loix de l'état, alors tous les aCtes émanés
de cette autorité Sommaire & rapide , fe reflen-
toient de leur origine & devenoient arbitraires au
temps du filence de la loi. C e t exemple a , plus que
tout autre, autorifé l'abus impie qu’on a fait de
cet axiome vénérable dans fon principe & dans fa
fimplicité 5 mais cette nécejjité même , & le remède
qu'on y apportoit, provenoient d'un défordre
primitif & fondamental, & d'une conftftution
d'état contradictoire à l'ordre naturel.
La conftitution de Rome fous les rois, fut à la
fois & concurremment agricole & militaire. Ces
deux chofes s'accordent > car l'agriculture eft la
pépinière des hommes forts & braves; mais il
ia\it un gardien & un mejfier aux fruits de l'agriculture;
il faut un chef à l’attaque & à la défenfe
militaire. Un peuple, un fénat voulurent remplacer
ces deux fondions , & la nature ne le vouloit
pas 5 de-là le peuple toujours injufte & ennemi au-
dehors , toujours turbulent & Séditieux au-de-
dans, & ce mal interne qui fu t , par l'adion continuelle
, la caufe de fa durée paffagère , le dévoua
au pillage fucceffif & général fous le nom d'empire
de conquête , lui donna la foree de remplir
fes deftins, d'ordonner & d'exécuter enfin lui-
même fa ruine & fon Supplice , & de couvrir la
furface de la terre de Ses débris.
C e t exemple donc,. qui peut paroitre impofant [
à l'éducation non encore réfléchie , donneroit une
leçon contraire à la fai^e politique y fi elle en avoit
befoin.
Anciennement, dit un empereur de la Chine
dans le Chouking : dans les temps de la grande lo i,
le bon gouvernement confifloit a prévenir les troubles
& a conserver l'empire fans danger ,• c'eft en effet
tout ce que veut la nature organe de cette grande
loi ; c'eft tout ce qu'elle demande du gouvernement
j c'eft en cela que confifte le bien public.
A l'égard des moyens d'exécuter cette lo i, on
pourroit differter long - temps fans toucher même
aux détails qui, dans la fuite , viendront d'eux-
mêmes chacun dans fon lieu ; mais pour téfumer
le tout, & le réduire à un point principal qui laifle
des idées claires & applicables en résultats à tous
ces objets ; difons que le principal moyen du bien
public , ce font les moeursI par lefquelles le gouvernement,
qui en cela ne peut guères par la
force , confervera le royaume Jans danger.
La queftion paroîtra peut-être aufli embarraf-
fante à réfumer en la réduifant à celle de Savoir ,
quel eft le moyen des moeurs ? Mais j'en trouverai
la folution en ramenant le tout au phyfique ,
& je dirai que le principal moyen des moeurs c'eft
qu'on ne foudoye, au nom du public, que pour
le néceffaire, & qu'on ne gratifie que pour le né-
celfaire aufli.
Outre que la réunion & l'entaflement fur une
même tê te , d'emplois, qui n'ont d'effets que leurs
émolumens, la profufion des bienfaits , des pen-
fiorts, des grâces, & c . q ui. Suivant la coutume
des abus croiffent toujours jufqu'à l'entier épuife-
ment, & que toutes ces chofes ne font en quelque
forte que des modifications du pillage, autorifé
& comme civilisé ; c'eft que ces exemples
multipliés tournent la mafîe des moeurs vers la
corruption , l'intrigue & l'aventure. Chacun veut
faire fortuné, c’e ft-à-d ire obtenir une part, la
meilleure & la plus grande poflible, à la Spoliation
publique. Comme le moyen le plus Sûr d’arriver
à cette fortune eft de fe concilier la. connivence
& la prévarication , ( ce qu'on appelle dans le
monde avoir des amis & des patrons ) il faut être
adfcif, intriguant, facile, complaifanr; il faut, fi
l'on n'eft vicieux, vivre du moins dans la foule
de ceux de qui l'on peut dire fui profufus , aliéné,
appetens.
Au lieu de cela, fi on enlève, fi on détruit tous.
ces appâts de déprédation & de défordre, opération
toujours approuvée du peuple, qui fait que
l'on n'eft prodigue qu'à fes dépens, les fantômes
d'efpoir & de fortune difparoîtront , & feront
place à l'économie naturelle , fille de la prévoyance.
Les hommes endurcis dans leur corruption
tomberont dans le mépris, les autres rentreront
infenfiblement dans la règ le , qui rappelle èc re-
lève les autorités domeftiques, les anciens ufages ,
les dépenfes folides, les travaux réglés , enfin tout
ce qui compofe les bonnes moeurs , lefquelles.
ne font févères qu’en perfpe&ive & dans l'éloignement
, & qui deviennent douces & paifibles en
fe rapprochant. Tout concourt à la fois au bon
ordre , & le gouvernement n'a prefque rien à
faire qui ne fe fafle de foi - même, rien à ordonner
que ce qu'ordonne la raifon, à quoi applaudit
le fens commun, qui fent fort bien alors en
quoi confifte le bien public. Lorfque les peuples
font bien nourris bien vêtus 3 la vertu régné, difoit
K h in -N on g , c'eft en cela que confifte le bien
public.
( Cet article efl de M. G r i v e l . )
. B IE N N E , ville & république de Suifle, aux
environs de Neufchâtel. Foyq; fa pofition & fon
étendue dans le. Dictionnaire de Géographie.
Hijloire politique de Bienne. Après l’extindion
qu troifiême royaume de Bourgogne , Frédéric I ,
inféoda Bienne à U lric , troifiême comte de Neufchâtel....
Les enfans d'Ulric IV furent forcés de
céder cette ville à Henri leur frère, chanoine de
Baie. Celui - ci parvenu à l'évêché, en fit donation
à fon.églife.
Les libertés de cette ville durent fe conferver.
ou s'accroître avec celles des autres' villes de
l'Helvétie. Au commencement du quatorzième
fiècle , elle réunifloit, fous fa bannière , la milice
de plufieurs voifins. Vers la même époque elle
étoit alliée de Soleure & de Fribourg. Ses premières
alliances avec Berne furent fignées en
1279 : elles devinrent perpétuelles en 13/25 elles
le devinrent également avec Soleure en 1382 ,
& avec Fribourg en 1496.
En 1468: l'évêque Jean V I , accorda à la ville
de Bienne la jnftic e criminelle : en 1559 l'évêque
Melchior hypothéqua aux habitans la jurifdi&ion ,
les droits &. reftes du liège & du chapitre, tant
dans la ville que dans le diftrid de l'Erguel. Mais
les obftacles qui fe préfentèrent dans l’exécution
de ce dernier a&e le firent annuller. I l en fut de
meme d'un projet d’échange entre l'évêque Chrif-
tophe & l'état de Berne , par lequel le premier
cédoit à cette république tous fes droits fur Bienne
& l'Erguel. La bourgeoifie de Bienne , que Berne
leuroit de l’efpoir du re tra it, paroifloit difpofée
à confentir à cet arrangement 5 mais dès que les
Cantons fuifles eurent déclaré qu'en pafiant fous
la domination de Berne, Bienne n'avoit plus de
voix aux diètes, le parti de l'oppofition devint le
plus fort , & un décret des douze Cantons
rem it, en 1608 , les chofes dans leur premier état.
Fribourg & Soleure ménagèrent la même année
une pacification, entre la ville & l'évêque de
Bienne : la ville ne voulut point s'y foumettre ;
&lesCantons nommèrent en 1610 huit arbitres,
qui réglèrent de force toutes les conteftations.
Cet a été, & un autre drefle en 1731 parla médiation
de Berne , font les fondemens des droits
réciproques entre l'évêque de Bâle & les fujets
de Bienne*
Gouvernement de Bienne. Cette ville envoie
! depuis long-temps fon fuffrage aux diètes des
Gantons par un député. L'évêque de Bâle y jouit
du titre de fouverairt, mais ce n'eft qu'un vain
! titre, & la ville eft une république ariftocratique.
Si l’évêque de Bâle reçoit apres fofi élection les
1 hommages des citoyens & de la milice de Bienne ,
! fi ces hommages font accompagnés de toutes les
cérémonies extérieures du vaflelage, il eft obligé
en même-temps de confirmer, de la manière la
plus authentique & la plus folemnelle , les privilèges
& les franchifes de cette ville. Il a droit de
nommer le maire, mais les fonctions du maire fe
réduifent à convoquer & préfider le petit confeil,
& à rendre compte des fuffrages fans avoir de
voix ï & quoique la juftice foit rendue au nom de
l'évêque , ni lui ni l'évêque ne peuvent faire
grâce , ou commuer la peine. Le maire doit être ,
fuivant les capitulations , ou un gentilhomme habile
à entrer au chapitre de l’é v êché, ou un
confeiller de Bienne. L'évêque de Bâle ne retire
pas annuellement plus de fept à huit mille livres
de cette principauté nominale.
La ville jouit, dans fon intérieur & dans fon
diftriét, delà juftice criminelle, du port d'armes,
de la légiilation, du droit de former des alliances,
p : de beaucoup d’autres prérogatives d’une nation
libre.
L'autorité & la puîffance effective réfident dans
le grand & le petit confeil Le petit confeil eft com-
pofé de; vingt- quatre membres, & le grand de
quarante. Les deux confeils aflemblés , ont le titre
de confeils & bourgeois. Autrefois le petit confeil,
divifé en deux claffes, dont l'une fupplée à l'autre ,
exerçoit un pouvoir à peu près abfolu. Adhielle-
ment il eft juge civil en première inftance, juge
criminel & de police dans tous les cas qui ne forte
pas évoqués au tribunal fupérieur ; il difpofe des
emplois civils, à l ’exception de ceux de bourg-
meftre & de banneret ; il exerce la police ecclé-
fiaftique , & il a le département militaire.
Le grand confeil juge en dernier refloit des cau-
fes majeures ; il connoît des objets d'économie
publique importans 5 il donne des inftruélions aux
députés à la diète , fe fait rendre compte de leurs
commiflions, & fait les' édits qui doivent avoiir
force de loi. L'éledion du bourgmeftre, des paf-
teurs & régens lui eft réfervée : mais il ne s'afiem-
ble qu'avec les membres du petit confeil.* -
Le bourgmefire eft à v ie , mais fujet à être
confirmé tous les a n s a in fi que tous les membres
des deux confeils. Il les préfide & garde les fceaux.
Le banneret avoit autrefois le premier rang , &
n'a plus que le fécond. II garde une c le f de la
caille publique & celle de l ’arfenal. Il reçoit le
ferment de tous les miliciens aflemblés , après
avoir prêté le lien en leur préfence.
Avocats. Dans Iescaufes portées, foit au petit,'
foit au grand confeil, chacune des parties chaifis