
w cents toi Tes de longueur, (i) & de cent cinquante
” de largeur, revêtu de pierre de taille. C'eft-là
» le point de partage d'où les eaux fe diftribuent
33 à droite & à -gauche dans un carial de foixante-
» onze lieues de long , où fe jettent plulieurs
v perces rivières foutenues d efpace en elpace de
” ip?eclufes. Les 8 éclufesqui font voifines de Be-
” zie« * forment un très-beau fpeétecle : c'eft une
” cafcade de 156 toifes de long fur i i de pente.
” canal eft conduit en plufieurs endroits fur
** des aqifeducs & fur des ponts d'une' hauteur
33 incroyable , qui donnent palfage entre leurs ar-
33 ches a d autres rivières. Ailleurs il eft coupé
33 dans le roc ; tantôt à découvert, tantôt en
33 voûte , fut la longueur de plus de mille pas. Il
33 fe joint d'un bout à la Garonne près de Totx-
33 loufe ; de l'autre , traverfant deux fois l'Aude 3
33 il pafle entre Agde & Beziers, & va finir augrand
33 lac de Tau , qui s'étend jufqu au port de Cette *>.
Ajoutons, quelques détails à cette defcription. j
Cet ouvrage, comparable ou même fupérieur à
tout ce que les romains ont fait de plus grand ,
fut commencé en 1666 parM. Riquet, & achevé
en 1680. Il coûta 13 ^millions dont le roi donna
0,920,818 livres , & la province de Languedoc
0,079,082 liv,, en y comprenant la dépenfe du
port de Cette, montant à deux millions. Le droit
perçu fur ce canal eft de quatre deniers par lieue i
fur chaque quintal poids de marc, pour quelque ;
efpèce de. maichandile que ce foit. Il y a des ta- i
rits qui fixent les diftances par eau d'un lieu à I
un autre. Ces droit« furent cédés par le roi à !
M.j Riquet & à fa famille qui en jouît encore, j
; « Ce canal, ( dit l'auteur des Ephémérides du
çitoyen, tom. 3, de 1769 , p- 98, ) a deux cent
33 mille deux cens foixante - fept toifes, qui font
33 plus de foixante - onze lieues de longueur......
*3 II a cinquante - quatre pieds de largeur moyen-
33 ne.... On a pris les précautions les plus ingénieu-
33 fes , les plus hardies , & les plus étonnante^
33 pour en écarter les rivières qui auroient pu y
a charrier du fable. A l'endroit qu'on nomme Ceffe\
33 une rivière confidérable pafle fous un pont fu-
33 perbe ; ce même pont porte le canal de neuf
33 pieds de profondeur, fes eaux & les barques
33 chargées qui le remontent ou le defcendent.
33 Des batteàux pourraient pafler fous le pont &
33 s'y rencontrer précisément eif même temps que
33 les barques qui Je craiferôient, en flottant per-
pendiculairement à trente pieds au- deflus,...:.
33 On a tiré du haut de cette même rivière un petit
33 bras qu’on a foutenu de niveau avec le canal, &
33 qui fert à lui fournir de l'eau quand on veut lever
33 une double v^nne, pour la laifler entrer. D'au-
33 très vannes fervent à vuider le canal dans la
33 rivière quand il a trop d'eau. Cf eft ainfi qu'on
33 peut l'emplir ou le défemplir à volonté avec
v cette rivière qu'on lui a’ aflujettie , & qui
33 ne fauroît y 'apporter un grain de fable.
33 A Befiérs, où le terrein ne rendoit pas pof-
33 fible de faire pafler la rivière d'Ofbe ni def-
33 fous ni deflus le canal, ils fe croifent j mais on
33 n'a permis à la rivière de traverfer le canal,
» qu'après avoir détourné fon cours, & l'avoir
33 forcé de dépofer fes fables dans une efpèce de
33 cul-de-fac, formé par une forte digue qui barre
33 le lit naturel de la rivière. On nettoie ce lit & le
33 canal tous les ans, & l'on y entretient fans
33 cefle la profondeur qui fuffit à la navigation.
33 Le canal a été perfectionné en plufieurs en-
33 droits, par exemple au pont d'Ibron. L'Ibron
33 eft un torrent qui traverfe le canal à deux
» petites lieues d'Agde. Habituellement il n'y a
33 pas une goûte d'eau dans ce torrent } mais dès
» qu'il arrive un orage , les eaux pluviales qui tom-
33 bent fur plufieurs montagnes Voifines , s'y reu-
33 niflent avec impétuofité, & charrient beaucoup
| 33 de gravier. Une heure après que l’orage eft
33 pafle les eaux font écoulées, & le lit. de l'Ibron
33 fe trouve à fec. On étoit obljgé, après chaque
» orage , de nettoyer le canal en cet endroit : la
33 navigation en fouffroit. M. le comte de C a -~
33 r a m a n a fait faire un fort radeau, couvert de
33 planches épaifles & ferrées , & de la largeur du
33 canal, qu il ferme exactement au moyen de
33 deux pièces qui fe rabattent fur les bords. C e
33 radeau eft ordinairement placé fur un petit baflin
33 formé à la gauche du canal. Deux hommes le
33 manoeuvrent facilement avec des crocs de fer.
33 Ces deux hommes, qui d'ailleurs cultivent quel-
33 ques mefures de terre fur les bords du canal,
33 habitent avec leur famille auprès de ce baflin.
33 Dès qu'ils s'apperçoivent d'un orage, ils mon-
33 tent fur le radeau , le conduifent à l'endroit où
33 l'Ibron fe précipite & rabattent fes côtés :
33 cette opération eft l'affaire de cinq minutes. Le
33 radeau devient Un pont folide , fur lequel le tor-
33 rent & fes cailloux paflent fans s'arrêter. Dès
33 que l'orage eft fini, les deux hommes recondui-
33 fent le radeau dans fon baflin , & comme il n'y a
33 que des orages & point de pluies confiantes dans
33 ce pays , la navigation n'ell jamais interrompue
33 plus de quatre ou cinq heures , & le canal eft
33 préfervé de l'enfablement.
Un autre fa it, qui prouve l’attention vigilante
33 qu'on a pour ce canal, c'eft qu'on n'a plus befoin
33 du grand baflin que M . de R iq u e t avoit fait
. 33 faire à Nauroufe , lieu qu'il a très | bien nommé
33 grave | au point de partage des eaux. L'inutilité
» de ce magafin d'éau a été reconnue. M. le Comte
- 33 de C a r a m a n a fait élever une ifle de cent-*
33 quatre-vingt toifes de long fur 130 de large, au
33 milieu de ce baflin , & parallèlement à fes bords.
33 Le grand réfervoir de Saint-Féréol, qui a
» 1200 toifes de long fur 600 de large, & dans
» lequel il y a ordinairement fix cens mille toifes
W Q» Keçra dans la fuiie de cet article qu’çm a fait des changeraeus confidêrables au piemiec'rçfçrvQir de Nauroufe.
* ■ » cubes
cubes d*eau en réferve, fuflit 8c au-delà pour
35 nourrir la partie la plus élevée du canal, avant
33 qu'il puifle être fecour-u par aucune rivière. Par-
33 tout où l'on en a rencontré dans la fuite, on s'eft
v réfervé la liberté d'en prendre ou d'en laifler les
33 eaux, foit par la méthode que nous venons de
33 décrire en parlant du pont de Cejfe, foit par
« d'autres moyens aufli ingénieux* Il a fallu devi-
*> ner que quelques filets d'eau difpcrfés dans les
33 gorges de la Montagne-Noire, pouvoient fe
33 réunir , & former un volume fuffifant pour
33 fou rnir à la. navigation d'un canal de plus de .50
33 pieds de large, & de 9 pieds de profondeur. Il
a fallu conduire avec un art extrême ces ruif-
33 féaux épars, & les raflembler ,• dans ce réfer-
33 voir de Saint-Féreol, à plus de cent-vingt toi-
33 fes au-deflus du niveau des deux mers. Et quand
33 on fonge qu'il a été néceflaire de conftruire des
3> voûtes, & de placer des robinets fous ce réfer-
33 voir immenfe, & quand , entré fous ces voû-
33 tes & les robinets ouverts, on éprouve l'effort
33 terrible .de la mafle énorme d'eau fous laquelle
33 on eft placé, & de la colonne d'air qu'elle fup-
33 porte j quand on eft frappé tout-à-coup d'un
33 bruit dix fois plus fort que celui du tonnerre le
33 plus furieux, qu’on fent la terre trembler fous
33 fes pieds, les. voûtes s'ébranler fur fa tê te , un
33 vent impétueux fe glifler entre toutes les pier-
M res , & qu'on fait réflexion qu'il y a plus dé cent
33 ans que tout cela dure, & qu'en continuant
33 de l'entretenir aufli - bien qu'il l'a été jufqu'à
33 préfent, cela peut durer dix fois autant, on eft
33 pénétré de refpeét pour la grandeur majeftueufe
33 d’un pareil ouvrage.... m.
Projet d'un canal de navigation pour joindre la
Loire & la Garonne, C 'e ft le devoir d'un bon citoyen
de confacrer ce qu'il a de talens au fervice
de la patrie. L'auteur de cet article, perfuadé de
cette vérité, s'eft occupé depuis long - temps des
moyens de rendre utile à fes compatriotes le peu
de lumières & de connoiflances qu'il a reçues de
la nature & de l'expérience des chofes, en s'appliquant
à trouver un débouché commun à toutes
les provinces du centre du royaume. Dans cé
deflein, il a conçu le projet d'un canal, qui, à
l'inftar de celui de la Chine, vivifierait tout l'intérieur
de la France. Ce projet a été déjà préfenté
au miniftère.
L'auteur y propofe la confe&iqn d'un canal
qui, traverfant le Limoufin , & dénbuçhant d'un
côté dans la V ésère & dans la Dordogne , & de
l'autre dans la Vienne , joindrait par ce moyen
la Loire & la Garonne.
dPropofer un canal, c'eft prapofer une chofe
très - utile 5 mais en propofèr un qui devienne
comme le lien commun de toutes nos provinces
de l’intérieur, qu'on voit périr de langueur faute
de débouchés, c'eft donner au gouvernement
i'occafion de faire le bien, & de répandre fes
(Scan, polit, & diplomatique. Totp- /.
influences favorables fur les pays qui en ont le
plus de befoin.
La France^ a très-bien dit M. de Montefquieu ,
eft comme le globe terreftre.Le feu eft au centre
j la verdure couvre la furface, un fable aride
occupe l ’entre-deux. Ainfi l'abondance & les ri-
chefles fermentent dans la capitale & circulent
fur les frontières ; mais l’entre-deux, c ’eft à-dire,
nos provinces les plus hautes & les moins ouvertes
font dans la mifère. Telles font celles du
haut-Quercy, du haut-Perigord , du haut & du
bas-Limouiin . de la Marche, du haut-Poitou &
d’une partie de l'Angoumois. Elles trouveroient
dans ce canal un encouragement à la culture , &
des reffources progreflives qui y feroient naître
les richêfies & les habitans qui leur manquent.
L ’Auvergne & le Limoufin font la Suifle de la
France 3 ou les pays les plus élevés du royaume.
De ces deux provinces, & fur-tout du Limoufin
, fortent plufieurs rivières qui ^ fuivant l ’in-
clinaifon & les finuofités du terrein , fe répandent
j les unes au nord , & les autres au midi.
Du nombre des premières, la Vienne qui arrofe
Emoutiers, faint-Léonard , Limoges, faint-Ju-
nien, Confollens, Chatelleraut, Chinon, & c .
roule un volume d'eau confidérable, mais fon lit
a trop de largeur ; cependant depuis Chatelleraut,
où les bateaux de Nantes remontent, on peut en
refferrant fes bords, la rendre navigable jufqu’ à
Limoges. Parmi les fécondés, la Vésere qui fépare
le haut du bas-Limoufin, prend d’abord fon cours
vers le couchant, puis, tournant au m idi, fe jette
dans la Dordogne, qui elle-même fe joint à la
Garonne au bec d’Ambès. Elle baigne Treignac ,
Uzerche, le Saillant, pàffe peu loin de Brive &
fertilife les plaines de 1 erraflbn, de Montignac ,
de faint-Léon. Son cours n’ell pas aufli étendu
que celui de la Vienne ; néanmoins avant de fe
joindre à la Dordogne , elle n’eft guère moindre
que_ la Vienne à fon embouchure. La Vesère eft
navigable à Saint-Léon, à Montignac, à Con-
dat, & les bateaux de fel remontent jufqu'à Terraf-
fon , à trois lieues de Brive. Il y a'iong-temps
qu’on s’eft occupé du projet de la .rendre navigable
jufqu'à cette dernière v ille , ce projet a même
pafle au confeil : il en réfulteroit un grand avantage
pour le Bas-Limoufin ; mais on ne fauroit le
comparer à ceux que procurerait à tout le royaume,
& particulièrement aux provinces voifines des
deux rivières, la jonétion méditée. *
Pour bien comprendre la poffibilité & fe faire
une idée jufte du projet de jonftion, il eft nécef-
faire de confidérer attentivement fur une bonne
carte de France, ou encore mieux fur une carte
du Limoufin, le cours des deux rivières de Vienne
& de Vésère. On verra d’abord qu’avant de fe
faire une route direéle, l’une vers le nord, l’autre
vers le midi ; elles s’éloignent en coulant obliquement
au couchant; la Vienne prenant fa direction