
compofent la confédération des Suiffes. Voyc{
l'art. (He l v é t iq u e C orps & Su is se .
C A P DE B O N N E -E S P É R A N C E , colonie
des hollandois. Voye^ le Diâion. de Géographie.
Remarques fur le climat. L e Cap de Bonne-efpê.
rance, dont les parages font fi o ra g e u x , termine
la pointe la plus méridionale de l'A fr iq u e . A feize
lieues de ce tte fameufe montagne, eft une pénin-
fule formée au nord par la baie de la T a b le 3 &
au fud par Falfe-baie. C 'e f t à la première des
deux b a ie s , qui ne font réparées que par une distance
de n eu f mille toifes.y qu'abordent tous les
batimens durant la plus grande partie de l'année ;
mais depuis le 20 mai jufqu’au 20 feptembre 3 la
rade eft fi dangereufe 3 & l'on y a éprouvé de fi
grands malheurs, qu'il eft défendu aux vaiffeaux
hollandois d 'y mouiller. Ils fe rendent tous à l'autre
b a ie , ©il, dans ce tte fa ifo n , l ’on n ’a rien à craindre.
; L e ciel du Cap feroit trè s-a g réab le, fi les vents
n’ y étoient prefque continuels & communément
violens. O n eft dédommagé de l’efpèce d ’incommodité
qu'ils ca u fen t , par la délicieufe température
dont ils fon t jouir un climat qui par fa latitude
d e vra it être embrafé. L ’air de,’ c e féjour eft
fi pur j qu'on le regarde comme un remède prefque
fouverain pour la plupart des maladies apportées
d’Europe , & qu’il n eft pas fans utilité pour
les maladiés contractées aux indes. P eu d’infirmités
affligent les colons. L a petite vérole même
n y a pénétré que tard. C e t t e contagion apportée
, d i t - o n , par un bâtiment d an o is, y fit d 'a bord
, & y fa it encore par intervalle j de très-
grands ravages.
_ Fertilité du fol. L e fol de cet établiffement ne
répond pas à fa réputation. Les hollandois n'y
virent à leur arrivée que d'immenfes bruyères, quelques
arbuftes, une efpèce d'oignon qui, lorfqu’il
eft 'cuit, a le goût de la châtaigne, & qu’on a
nommée le pain des Hottentots. Par-tout où la
chute de ces plantes n’avoit pas dépofé un fédi-
ment gras, la terre n’étoit qu’un fable ftérile. On
n’eft point encore parvenu à la féconder, même
dans le voifinage de la capitale, où les encoura-
gemens n’ont pas manqué. A l’exception de quelques
vallées où les eaux ont entraîné le peu de
terre qui couvrait les montagnes, l’intérieur du
pays n’eft pas plus fertile, & il eft encore moins
arrofé que les côtes où rien n’eft pourtant fi rare
qu’ un ruifleau ou une fontaine. Delà vient quë
quoique la colonie ne foit pas nombreufe, fes ha-
bitans font difperfés fur cent cinquante lieues le long
des|rivages de la mer, & furprès de 50 dans les terres.
ProduBions. A l’extrémité de la ville , ell le jardin
fi renommé de la Compagnie. Il à huit à neuf
cens toifes de long. .Un ruifleau l ’arrofe. Pour en
défendre les plantes contre la fureur des vents,
on a entouré chaque quarré de chênes taillés en
paliflades, excepté dans l ’allée du milieu où on
lés Iaiffe croître de toute leur hauteur. Ces arb
re s , quoique médiocrement élevés, forment un
fpe&ac le délicieux dans une contrée où il n V
a j W Pe“ bois 3 même taillis , &r où l'on eft
réduit à tirer de Batavia tous ceux de charpente.
Le s legumes occupent la plus grande partie du
terrein. L e petit efpace confacré à la botanique ,
n a que peu de plantes. L a ménagerie , qui jo in t
le jardin eft également déchue. Elle renfermoic
autrefois^ un plus grand nombre d'oi féaux & d e
quadrupèdes inconnus dans nos climats.
C e font les vignes qui couvrent principalement
les campagnes voifines de la capitale. Leur produit
eft prefque aftiire dans un climat où la g rêle
& la gelée ne font pas à craindre. Il fernble que
fous un c iel lî p u r , dans un terrein fab lon eu x,
avec la fa c ilifé de choilîr les meilleures expofi-
tions y on devroit obtenir une boiffon exquife.
Cependant , que c e foit le v ic e du climat ou la
négligence des cultivateurs , elle eft d'une qualité
fo r t inférieure $ à l'exception d'un v in , fec aig
re le t , & affez ag ré ab le , qui tire fon origine,de
M a d e r e , & que confomment les colons riches^
C e lu i que l'Eu rope connoît fous le nom de conf-
tance, & qui eft blanc en partie & en partie roug
e , n eft recueilli que dans un territoire de quinze
arpens , fur des feps apportés autrefois de Perfe*
Pour en augmenter la quantité , on y mêle un v in
mufcat affe z bon que produifent les ceteapx votons*
Un e partie eft livrée à la compagnie , au p rix
qu'elle-meme a fixé ; le refte eft v en d u , à raifon
de douze cens francs la barrique , à tous ceux qui
fe préfentent pour l'a cheter.
L e s grains fe cultivent à une plus grande dif-
tance du Cap. Ils font toujours abondans & à un
prix modique , à caufe de la facilité des défri—
c h em en s ,d e l'abondance des engrais & de la fa - (
culté de laiffer repofer les terres.
L e s grains qui fe fement ordinairement dans
les terres du Cap 3 fon t le from en t, le b led de
turquie & le ris : il eft ordinaire de voir ces grains
rapporter cinquante pour un. O n y cultive beaucoup^
de plantes légümineufes, tels font les pois ,
les rêves & les haricots. C e s légumes fervent aux
approvifîonnemens des vaiffeaux qui relâchent au
Cap 3 en allant ou revenant des Indes orientales.
L e Cap e f t , pendant la plus grande partie d e
l'année , expofé à des orages violens qui foufflént
ordinairement de la partie du nord-eft. C e s v en ts
font fi imp étu eu x, qu'ils renvèrferoient toutes les
plantes à grains, & abattroient les fruits de tous
les arbres , fi on né leur oppofoit une barrière
pour garantir les récoltes. L e colon hollandois a
imaginé de divifer les terres par petites portions ,
& de les entourer de hautes paliflades de ch ên e s ,
ou de quelques autres arbres plantés p rè s -à -p rè s ,
comme pourroit l'être une charmille deftinée à
faire l’ornement d'un jardin. C e s paliflades fe
taillent en croiffant toutes Içs années j on les é lè v e
à 2 f ou 30 pieds d e hauteur , d e forte que chaque
champ feparé eft fermé comme une chambre.
La' colonie du Cap produit d'ailleurs une quant
ité confidérable de fruits e x ce ilen s , dont les
plans ont été tirés des quatre parties du monde.
L'abondance dont jouit ce tte c o lo n ie , comparée
à la ftérilité des pays immenfes qui l'en vironn ent,
montre bien que la terre n'eft avare que pour les
tyrans & les e fclaves 5 qu’elle prodigue des tréfors
au-d elà de toute efpérance dès qu'elle eft libre
& remuée par des hommes intelligens, que des
lo ix fages & nvariables protègent.
A quarante ou cinquante lieues du p o r t , s'arrêtent
les cultures. Dans un plus grand éloignem
e n t , il ne feroit pas poflible de voiturer les
denrées a vec avantage. L e s campagnes ne font
plus couvertes que de nombreux troupeaux q u i ,
deux ou trois fois l'an n ée, font conduits au ch ef-
lieu de la colonie. Ils y font échangés contre
quelques marchandifes apportées d'Europe & des
Indes , ou abfolument néceffaires ou feulement
agréables. Le s païfibles habitans de ces lieux écartes
connoiffent peu le p a in , & fe nourriffent affez
généralement de viandes fraîches ou falées , mêlées
avec des légum e s , qui n’ont pas moins de
g oû t à ce tte extrémité de l'A fr iq u e que dans nos
contrées. N o s f ru it s , qui la plupart n'ont pas dégénéré
font une autre de leurs reffources. Us tirent
moins d'utilité des végétaux d 'A f ie qui viennent
m a l, dont quelques-uns m êm e , tels que le fucre
& le c a fé , n 'ont jamais pu être naturalifés.
Remarques fur la population Cf fur les hottentots.
L a co lo n ie -, qui n'a que fept cens hommes de
troupes régulières pour fa d é fen fe , compte quinze
mille européens, hollandois, allemands & fran-
ç o i s , dont la quatrième partie eft en état de porter
les armes. C e grand nombre fe feroit a c c ru ,
fi de funeftes préjugés de religion n'euffent repouffé
une infinité de ma lh eureu x, difpofés à
aller chercher la paix & l'abondance fous ces heureux
climats. O n ne comprend pas comment une
rép u b liqu e, qui admet avec tant de fuccès tous les
cu ltes dans fes p rovinces, a pu fouffrir qu'une compagnie
formée dans fon fein , portât une odieufe
intolérance au- delà des mers. Si le gouvernement
a jamais la force de réprimer un a b u s f io p p o fé à
fes principes , la colonie fe peuplera en raifon de
fes fubfiftances j & alors on pourra fans inconvénient
abolir la fe rv itu d e , q u i , quoique moins
pefante que pa r-tou t ailleurs , eft toujours une
dégradation de l'e fp è c e hûmaine.
U n e multitude de françois chaffés de leur patrie
s par la révocation de l'éd it de Nan tes , ont
trou ve au Cap une véritable p a tr ie , & dans cette
nouvelle patrie la fu re té , la prop r ié té , la lib e r té ,
feuls vrais fondemens de l’agriculture, feuls prin-
cipes de l'abondance. Us ont enrichi ce tte mère
adoptive de leur ind uftrie, & du travail inefti-
mable de leurs bras ; ils y ont fondé des peuplades
confid érables, dont quelques-unes ont tiré leur
nom du pays malheureux, mais toujours c h é r i,
qui leur avoit refufé le feu & l'eau. L a peuplade
de la petite R o ch elle furpaffe toutes les autres par
l'induftrie des colons qui la com p ofen t, & par les
richeffes des terres qui en dépendent.
Le s efclaves fon t au nombre de quarante ou
cinquante mille. L e s uns on t été achetés aux c ô tes
d 'A frique ou à Madagafcar j les autres viennent
des ifles Malaifes. Us font nourris comme
leurs maîtres , & ne font condamnés qu'aux
mêmes travaux. D e tous les établiffemens que
l'Eu rope a formés dans les autres parties du
monde , c 'e ft le f e u l, p e u t - ê t r e , où les blancs
aient daigné partager avec les noirs les occupations
heureu fe s, nobles & vertueufes de la pai-
fible agriculture.
Si les hottentots avoient pu adopter ce g o û t ,
c ’eût été un grand avantage pour la colonie : mais les
foibles hordes de ces africains, qui étoient reftés
dans les limites des établiffemens hollandois, périrent
toutes dans une épidémie en 1713 . I l n 'éch appai
aux horreurs de ce tte contagion qu'un trè s-p etit
nombre de familles, qui font de quelque utilité
pour la garde des troupeaux & pour lé fervrce
domeftique. Le s tribus plus puiffantes, & qui
occupaient les bords des rivières , le voifinage
des bois , les terres abondantes en pâturages ,
obligées d'abandonner fucceflivement les tomr
beaux & la demeure de leurs p è re s , fe font tou tes
éloignées des frontières de leur oppreffeur.
L 'in ju llice qu'elles éprouvoient a beaucoup ajouté
à l'éloignement qu'elles avoient naturellement
pour tous nos travaux L a vie oifive & indépendante
que ces fauvage mènent dans leurs d éferts ,
a pour eux des charmes inexprimables. Rien né
peut les en détacher. U n d'entr'eux fu t pris au berceau.
O n l'é le v a dans nos moeurs & dans notre
croyance. I l fu t envoyé aux In d e s , & utilement
employé dans le commerce. Le s circonftances
l'ayant ramené dans fa p a tr ie , il alla vifiter fes
parens dans leur cabane. L a Angularité de ce qu'il
v it le frappa. I l fe cou vrit d'une peau de b reb is ,
& alla rapporter au fort fes habits européens.
» J e v ien s , d i t - i l au gouverneur, je viens renon-
» cer pour toujours au genre de vie que vous m'a-
« v ie z fait embraffer. M a réfolution eft de fuivre
» jufqu'à la mort la religion & les ufages de mes
» ancêtres. J e garderai pour l'amour de vous le
» collier & l'ép ée que vous m'avez donnés. T r o u -
» v e z bon que j’abandonne tout le refte ». I l n'attendit
point de réponfe , 8c Ce dérobant par la
fu it e , on ne le revit jamais.
Remarques fur Vadminifiration de la colonie. L o r s que
la compagnie forma fon établiffement du Cap ,
elle afligna gratuitement à chacun des premiers
colons un terrein d'une lieue en quarré. C e s
conceflions & celles qui les fu iv iren t, ont é té de
puis grevées d'un impôt à chaque mutation.
C e t t e innovation n'eft pas le feul reproche que
les colons faffent au monopole : ils fe plaignent du
bas prix qu'il met aux denrées qu'il exige pour fes
befoins. Ils fe plaignent des entraves dont il em-
barraffe le débit des productions qu'il ne retient