
d'Amérique commençoientà lui donner de Tin-
quiétude : elle vit que fi elles fe révoltoient, il lui
feroit utile d'avoir line vafte province dans les
environs.
D«s que l'Angleterre fut en poffeffion du Canada
3 elle y porta l'activité & Tinduftrie qu'elle
met dans tous fes établiffemens. Le Voyageur
Américain nous a donné d'état du commerce
qu’on y faifoit en-1770 : le voici.
Marchandifes exportées de la Grande - Bretagne
pour le Canada. Draps, de laine , toiles , cotons 3
indiennes & autres marchandifes des Indes 3 linons
, fufils , poudre 3 balles & pierres à fufils 3
couteaux ^ fourchettes & autre fer travaillé 3 galons
d'or & d’argent , habits 3 étoffes 3 bas , chapeaux
, gands , livres 3 papier , drogueries, épiceries
3 ouvrages de verreries 3 cuir, acier3 cuivre ,
étain 3 fer blanc travaillé , eftampes, couleurs ,
vernis, vermillon, habillemens d'homme & de
femme, ouvrages de modes, felles , brides, &c.
couvertures, voiles, cordages, uftenfiles dépêché,
fromages, tabac, pipes, biere , liqueurs
fortes , vins. Ces articles , au prix moyen de
trois années, ont coûté 105,000 liv. fterung.
Marchandifes exportées du Canada pour la
Grande-Bretagne.
. 9000 peaux de caftor......... • ........ |
9000 peaux d'ours---------------- • I
4000 peaux de pêcheurs................... • . . f l .
13000 peaux de Loutres.............. . -S
36000 peaux de martes ............ . • • ?
350 peaux de loups.............. . • • *1
4000 peaux de fouines............... j 76000
2000 peaux d’orignaux ...........' fterling
2000 peaux de renards......... .........f
50000. peaux de gazelles . . . . . . . . . .
ioooco peaux de lapins...................
24000 peaux d'élans................ .
2000 livres de calloreum. . . . . . . . .
Côtes de baleine , huile de baleine, de
marfouin & autre poiffon. . . ' ............ 3 foo
î loooquarters de froment, à 20Tchel. ; 12000
Ginfang, ferpentine, capillaire & autres
plantes médicinales.................. 3000
Planches & bois de. conftruétîon, &c. 11000
T o t a l ....................................................... 1 ,0 ^ 5 ,0 0 0
Ce commerce employoit alors 34 navires ,
montés par 400 hommes.
Il a fait des progrès depuis cétte époque. Aujourd'hui
que l'Angleterre a perdu 13 colonies de
l'Amérique feptentrionale, elle attire au Canada
& à la N o u v e l l e -E c o s s e les royaliftes, c'eft-
à-dire, ceux des Américains qui avoient embraffé
fa caufe dans la guerre qui vient de fe terminer 5
& l'on fera peut-être étonné dans dix ans de la
rofpérhé dü C an ad a & de la N ouvelle-
c o s s e .
C A N A R A , petit royaume d’Afie fur la côte
de Malabar. Je n'ai pas encore pu favoir d'une
manière précife quelles font aujourd'hui fes di-
menfions. C ’ eft une des conquêtes d'Ayder-Aly :
le port de Mangalor y eft fitué.
Une armée angloife, de 8 mille hommes, partie
de Bombay , s’empara en 1768 de Mangalor.
Le commandant voyant qu'il n'avoit qu'à
marcher à Ayder Nagar , capitale des états
d 'Ayder-Ali, fut furpris d'apprendre qu'il avoit
foixante lieues à faire dans un pays coupé de
montagnes, de bois , de rivières, & que fur-tout
les approches de Nagar feraient de la plus grande
difficulté. H ne perdit cependant point courage ,
& continua fes préparatifs. Son armée campqit
alors aux portes de Mangalor , dans la plus grande
fécurité.
Le fils d'Ayder s'étant mis en marche de Ben-
guelour, & marchant avec l'ardeur d'un jeune
homme qui brûle du defir de combattre, & d'acquérir
de la gloire, arriva bientôt dans le royaume
de Canara, dont les peuples allarmés, mais
pleins de confiance dans lé fils de leur fouverain ,
coururent au-devant de lu i, comme à celui qui
devait les fauver. Animé par les acclamations du
peuple, le jeune prince marcha vers Mangalor,
à la tête des troupes qu'il troùvoit fur fon paffa-
ge , & qui arrivaient de tous côtés. Sa marche
fut fi prompte, & la fidélité des Canarins fut
fi grande, qu'il arriva à la vue-du camp des An-
glois, fans qu'ils euffent reçu aucun avis. Tippo-
Saïb s'appercevant dü tumulte & de la frayeur
que caufa fon apparition à l’ aimée angloife, culbuta
fur le champ les gardes avances, attaqua
l'armée , la mit en déroute , & la pourfuivit juf-
ques dans les rues de Mangalor, où fa cavalerie-
entra pèle - mêlé avec les. fuyards. Trois mille
hommes de renfort , qui venoient le joindre ,
trouvent le c-amp angîois abandonné : ils le pil-^’
le n t , & le fils d'Ayder leur permet même de
piller la v ille, pour punir les habitans de n'avoir
point voulu fe défendre. La déroute de l'armée
angloife fut fi grande, qu'à peine quelques hommes
fe fauvèrent à bord desvaiffeaux5 leur fu ite ’
échauffant de plus en plus l'ardeur guerrière des
européens & des cipayes d'Ayder , ceux-ci s'embarquèrent
dans des bateaux , attaquèrent les ’
vaiffeaux de tranfport, & en prirent trois. Le
fils d'Ayder s'empara en cette occafion des armes
& bagages de l'armée angloife, du général, de
quarante-fix officiers , de fix cents quatre-vingt
anglois , & de plus de fix mille cipayes.
Le Canara , contrée limitrophe du Malabar
proprement dit, s'eft fucceflîvement accru des
provinces de d'Onor, deBaticala, de Bandel &
de Cananor, ce qui lui a donné une affez grande
étendue. Il eft très - fertile, & furtout en r iz .-
C'étoit autrefois J'état le plus floriffant de ces
1
contrées ; mais il déclina, lorfque fon fouverain
fe vit forcé de donner tous les ans i z à 15 cent
mille francs aux marattes fes voifins, pour garantir
le royaume de leurs brigandages. Sa décadence
a augmenté encore:,! depuis quAyder-
' Ali en eft devenu le maître. Mangalor, qui lui
fert de port, a déchu dans les mêmes proportions.
Les navigateurs étrangers l'ont moins fré-
quenté, parce que les denrées n'y étoient plus fi
- abondantes, & parce que la multiplicité des droits
- en augmentoit exceifivement le prix. De temps
immémorial, les moeurs y font très-corrompues.
Le Canara eft toujours en polïeffion de fournir les
courtifannes les plus voluptueùfes , & les plus
belles danfeufes de tout l'Indoftan.
royeç les articles M a i s s o u r , C a l i c o t ,
A r c a t e , M a l a b a r , D e c a n .
CANARIES ifles , Voye[ leur pofition dans le
Dictionnaire de Géographie. .
Ces files, fituées à cinq cens mille des cotes
d'Efpagne , & à cent mille du continent d'Afrique,
font au nombre de fept. L'antiquité les
connut fous le nom.d’ijles fortunées. Ce fut a la
partie la plus occidentale de ce petit archipel,
que le célèbre Ptolomée, qui vivoit dans le fécond
fièclc de l’ère chrétienne, établit un premier
méridien, d'où il compta les longitudes de
tous les lieux, dont il détermina la pofition géo- '
graphique. Il auroit pu, félon la remarque judi-
■ cieufe des trois aftronômes françois qui ont publié
en 1778 la relation fi curieuiè & fi inftruc-
tive d'un voyage fait en 1771 en 1772 a
choifir Alexandrie : mais il craignit fans doute ,
que cette prédileélk* pour fon pays ne fut
imitée par d'autres, & qu'il ne réfultât quelque
embarras de ces variations. Le parti auquel
s’arrêta ce philofophe , de prendre pour premier
méridien celui qui paroifîbit laitier à fon orient
toute la partie alors connue de la terre , fut généralement
approuvé , généralement fuivi pendant
piufieurs fiicles. Ce n'eft que dans les tems
modernes, que piufieurs nations lui ont mal-à-
propos fubftitué la capitale de leur empire.
L'habitude qu’on avoit contraélée d'employer
Je nom des files fortunées, n'empêchoit pas qu'on
ne les eût perdues entièrement de vue. Quelque
navigateur avoit fans doute reconnu de nouveau
ces terres, puifqu'en 1344, la cour de Rome en
donna la propriété à Louis de la Gerda, un des
infants de Caftille. Obftinément traverfé par le
chef de fa famille , ce prince n'avoit encore pu
rien tenter pour mettre à profit cette étrange libéralité
, lorfque Bethencourt partit de la Rochelle
le 6 mai 1401 , & s'empara deux mois
après de Lancerote. Dans l'impoffibilité de rien
opérer de plus avec les moyens qui lui reftoient,
cet aventurier fe détermina à rendre hommage
au roi de Caftille de toutes les conquêtes qu’il
pourroit faire. Avec les fecours que lui donna ce
fouverain , il envahit Fortaventure en 1404,
Gomère en 1405 , Tille de Fer en 1406. Canatie,
Palme & TenerifF ne fubirent le joug qu'en
1483 , en 1492 & en 1.496. Cet archipel, fous
le nom des ifles C a n a r i e s , a fait toujours depuis
partie de la domination efpagnole, & a été
conduit par les loix de Caftille.
Les Canaries jouiflent d'un ciel communément
ferein. Les chaleurs font vives fur les côtes :
mais l'air eft agréablement tempéré fur les lieux
un peu élevés, & trop froid fur quelques montagnes
, couvertes de neige la plus grande partie
de l'année.'
Les fruits & lès animaux de l’Ancien & du
Nouveau-Monde profpèrent tous , ou prefque
tous, fur le fol-varié de ces ifles. On y récolte
des huiles, quelque foie, beaucoup d’orfeille , &
une affez grande quantité de fucre inférieur à
celui que donne l’Amérique. Les grains quil
fournit, fuffifent le plus Couvent à la confomma-
tion du pays y & fans compter les boiffons de
moindre qualité, fes exportations en vin s'élèvent
annuellement à dix ou douze mille pipes de
Malvoifîe.
En 1768 , les Canaries comptoient cent cin^
quante-cinq mille cent foixante-lix habitans, indépendamment
de cinq cents huit eccléfiaftiques,
de neuf cents-vingt-deux moines, & de fept cents
quarante-fix relrgieufes. Vingt-neuf mille huit
cent de ces citoyens étoient enrégimentés. Ces
milices n'étoient rien alors : mais depuis on les a
un peu exercées1, comme toutes icelles des autres
colonies efpagnoles.
Quoique l’audience, ou le tribunal fupérieur
de juftice foit dans Tille, fpécialement appel lé c
Canarie, on regarde comme la-capitale de l’Archipel
celle de Ténériff, connue par fes volcans *
& par une montagne qui, félon les dernières &
les meilleures obfervations , s'élève à mille neuf
cents quatre toifes au-deffus de la mer. C’eft là
plus étendue, la plus riche & la plus peuplée f
elle eft le féjour du commandant général, 8c lç.
fiège de Tadminiftration. Les navigateurs, pref-
• que tous anglois ou américains, Font leur venrè
dans fon port de fainte-Croix, & y prennent leur
chargement.
L'argent que ces négocions y verfent, circule
rarement dans les ifles. Ce ne font pas les impôts,
qui l'en font fortir, puifqu'ils fe réduifent aui
monopole du tabac, & à une taxe de fix pour
cent fur ce qui fort, fur ce qui entre ; foibles-
reffources que doivent abforber les dépenfes de
foüveraineté. Si les Canaries envoient annuellement
quinze ou feize cens mille francs à la métropole
5 c’eft pour la bulle de la croifade ; c'ell
pour la moitié de leurs appointemens ,^jue doivent
la première année à la couronne, ceux des
citoyens qui en ont obtenu quelque place ; c’eft
pour le droit des lances , fubftitué fur toute l’étendue
de l'empire, à l'obligation anciennement im-
p'ofée à tous les gens titrés de fuivre le jpi à U 1 r - u î t, . ^1