» tout lé contraire. Tout le monde fait combien' ;
=î les hommes tiennent a leurs opinion^ particuliè- 1
m res, combien il eft doux de les voir adopter ,
» & de régner fur la raifon de fès difciples. 11 pa-
„ roît 'beau d'être le chef d'une^ feCte > 8c puif-
n que la Caroline permet à tout étourdi de vingt-*
» un ans d'afpirer à cet honneur , en profitant de
» fon imagination & de l'ignorance de quaton:e I
s» autres étourdis comme lui , on doit être fur qu aa j
30 lieu d'avoir une religion raifonn'able,- elle n aura J
» que des enthoufiaftes 8c des illumines.
La loi dont on vient de parler 3 nous a paru fage
malgré fes inconvéniens : M. l'abbe de Mably
exagère beaucoup ces inconvéniens > 8c Ü y a lieu
de croire que dans yô ans la Caroline méridionale
fie fera pas remplie de nouvelles feCtes comme il
femble le craindre. Sans doute , 1e faoatifme & la
fuperftition ont produit de grands maux immédiatement
après la fondation des colonies d Amérique
> mais les Etats-Unis 3 occupes de leur liberté 3 de leur conftitution 8c de leur commerce 3 mettront
moins d'importance aux folies des enthoufiaftes
& des efprits illuminés : les lumières de la
efclaves, ou qu'il y ait été envoyé d'Angleterre >
il eft fûr que le fol fembloit l'appeller. Au refte, il
fe multiplia très-lentement, parce que les colons,
obligés d'envoyer leurs récoltes dans les ports de
la métropole, qui les tranfportoit en Efpagne 8c
en Portugal où s'en faifoit la confommation, reti-
roient un fi minçe prix de leur denrée, qu'à peine-
rendoit-elle les frais de culture. En 173° j unÇ
adminiftration plus éclairée permit l'exportation directe
dation & l'intérêt plus prefîant. de la liberté civile
& politique arrêteront les progrès de ces chimères.
Au refte* cet article de tolérance eft une fuite des vues
politiques des américains : ils ont voulu attirer des
étrangers parmi eux > & il falloit pour cela établir
une grande tolérance : s'ils font allés trop loin* ils
reviendront fur leurs pas. La plupart de leurs loix
font des eflais , & ils les réformeront avec moins
de peine qù'on ne l'imagine , fi l'efprit public &
l'amour de la patrie & de la liberté ne fe ralentif-
fent point : enfin il eft inutile de confeiller aux Etats-
Unis de fe borner à la vie agricole , de dédaigner
le commerce 8c la population > ils n écouteront
point les moraliftes fur cet article.
La remarque de M. l'abbé de Mably, judicieufe
d'ailleurs , ainfi que la plupart des autres inférées
dans les Observations. Jur le gouvernement & les
loix des Etats-Unis de V Amérique 3 eft appuyée
fur des principes qui ne font point appliquables aux-
Etats-Unis de l'Amérique, & que nous examinerons
Voayilelieurs. . l'article Et a t s -U nis & les articles des
douze autres Etats de l'Amérique.
S e c t i o n I I Ie.
Remarques fur la cultute , la population & le
commerce.
La Caroline méridionale fournit au commerce des
deux mondes les mêmes objets que la Caroline fep-
tentrionale 3 mais en moindre quantité. Elle a principalement
tourné fes travaux vers le riz & vers
FinOding on.' eft pas d'accord fur la maniè* re d1ont le riz
s’eft naturalifé à la Caroline. Mais , foit qu'elle le
doive à un naufrage 3 qu'on l'ait porté avec dos
de ce grain au-delà du Cap-Finiftere. Quel-;
ques années après, elle la permit aux Indes occidentales
i 8c alors la province, affiliée de yendre
a-vanta'geufemént le bon riz en Europe8c le riz
inférieur ou gâté en Amérique, s'en occupa vivement.
Cette production croît, par les foins des
nègres, dans les marais voifïns des côtes. A. une
plus grande diftance de l'océan, les mêmes bras
font naître, mais avec moins de danger, l'indigo.
Cette plante, originaire de l'Indoftan reuftit d a-!
bord au Mexique, puis aux Antilles, 8c enfin dans la
Caroline méridionale. Dans cette province, les premiers
effais ne donnèrent que des produits d une
qualité très - inférieure ; mais ce germe de teinture
acquiert tous les jours plus de perfeCtion.
Ses cultivateurs ne défefpèrent pas même de fup-
planter, avec le temps, les efpagnols 8c les fran-.
çois dans tous les marchés. Ils fondent leur efpoir
fur l'étendue de leur fol, fur l'abondance & le bon
marché des fubfîftances, principalement fur 1 ufage
où ils font de labourer leurs champs avec des animaux,
8c d'y femer l'indigo comme, le bled 5 tandis
que, dans les Indes occidentales , c'eft l'efciave
qui prépare les terres, c'eft l'efciave qui jette la
graine dans des trous difpofés de diftance en dif-.
tance pour la recevoir.
Si, contre toute apparence, cette révolution dans
le commerce arrivoit jamais, la Caroline méridionale,
qui compte actuellement deux cents cin-
quante-qu'atre mille habitans, moitié blancs, moitié
noirs, & dont les exportations , en y comprenant
celles de la Caroline feptentrionale , s'eleve-
rent en 1769 à io, 601, 336 livres, verroit bientôt
doubler fa population 8c fes cultures. C'eft déjà,
de toutes les provinces du Continent feptentrional,
la plus riche^ Auffi lé goût des commodités y eft-
il général : aufli les dépenfes s'y élèvent-elles juf-
qu'au luxe. Cette magnificence fe faifoit remarquer
naguères dans les enterremens. On y raffembloit le
plus grand nombre de citoyens qu'il étoit poflîble j
on leur fervoit des mets recherchés > on leur pro-
diguoit les vins les plus exquis , les liqueurs les
plus rares. Auxvafes précieux qu'on avoit, etoient
ajoutés ceux des parens, des voifins, des amis. Il
étoit ordinaire de voir des fortunes arriérées ou dérangées
par ces funérailles. Les^fanglans 8c ruineux
démêlés des Colonies avec leur métropole, ont
mis fin à ces profitons.
Nous croyons devoir entrer dans de plus grands
détails fur le commerce & la population de la Caroline
méridionale} elle n'avoit en 1723 que quatre
mille blancs 8c trente-deux mille noirs. Ses exportations
pour l'Europe 8c pour 1 Amérique ne s e-
levoient pas au-defïus de 4, 950,0001. Elle a depuis
acquis un degré de fplendeur , qu elle ne doit
qu'à la liberté. Mj j f ,
Quoique la Caroline méridionale ait réuni a établir
des échanges affez confidérables avec les fap-
vagesj qu'elle ait reçu des réfugiés François tfne
fabrique de toiles 5 qu'elle même ait imaginé de
faire quelques étoffes, en mêlant fes foies à la
toifon de fes moutons, on doit attribuer fpéciale-
ment fes progrès au riz 8c à l'indigo.
En 1 7 5 4 , il fortit de la Caroline méridionale fept
cents cinquante-neuf barils de thérébentine, deux
mille neu f cents quarante-trois de goudron , -cmq
mille neu f cents foixante-neuf de poix ou de réfine
, quatre cents fêize barils de b o e u f , quinze
cents foixante de p o r c , feize mille quatre cents
boifleauxde bled d'inde , 8c neuf mille cent foixante-
deux de pois 5 quatre mille cent quatre-vingt-feize
cuirs tannés, 8c douze cents cuirs vetds ; un million
cent quatorze mille planches, deux cents fix mille
lambourdes, 8c trois cents qua tre -v in g t-q u in ze
•mille pieds de bois de charpente, huit cents quatre-
vingt - deux mille peaux de bête fauve , cent
quatre mille fix cents quatre-vingt-deux barils de
riz , deux cents feize mille neuf cents vingt-quatre
livres d'indigo. - ; ; ;
Voici un état plus récent encore des marchan-
difes exportées de la Grande-Bretagne pour la Caroline
méridionale.
Fer, acier, cuivre, étain , plomb 8c bronze
travaillés, marchandifes de Manchefter, de Birmingham
8c de SheffieW, chanvre, cordages, foie,
toiles à voile, flanelle, baie de Colchefter, har-
nois, mercerie, quincaillerie & bonneterie, gands,
chapeaux, galons d'or 8c d'argent, étoffes, toiles
d'Angleterre 8c étrangères, tapifferies , marqueterie
, poterie, meules à aiguifer, bijouterie, graines
de jardin, fromage , faumure, bière forte ,
pipes, tabac, vins & drogues médicinales. Ces
articles , au prix moyen de trois années , coûtèrent
611 , 000 liv. fterl.
Marchandifes exportées de la Caroline méridionale
pour la Grande-Bretagne & autres marchés.
•
liv. fterl.
22, 000. f§ o.
2, 6 6 6 . 13.4-
2y, 000.
4J, 000.
jo, 000.
20 ,000.
121 000 .
1 j , 000.
6 3 000.
395, 6 6 6 . 13. 4.
110, 000 barils de riz, à 40 fchellings ^ • • • $jjj • • • • • • • • • • • • •
8, 000 dito, poix , goudron & thérébentine, à 6 liv. fterl.
Porc 8c boeuf fumés.
Peaux de bêtes fauves & autres ...........
coo, 000 liv. indigo, à 2 fchellings. • • •
Planches, mâts & autres bois, &c. . . .
Bled d'inde, pois , fèves, 8ce.............
Chevaux & bétail..............................
10 vaiffeaux, à 600 liv. fterl................
Le tout, au prix moyen de trois ans (1)
La Caroline méridionale n'a que trois villes dignes j
de ce nom, 8c elles font en même - temps des ;
ports.
Georges-Town,fituée à l’embouchure de la rivière
de Black, eft encore peu de chofe ; mais fa j
fituation doit la rendre un jour plus confidérable.
Beaufort ou Port-Royal ne fortira pas fi-tôt de fa
médiocrité, quoique fa rade puifle recevoir les plüs j
grands vaiffeaux , & les mettre en fûreté.
C'eft Charles-Town, capitale de la Colonie ,
qui eft a&uellement le marché important, 8c qui
le deviendra nécéffairement de plus en plus.
Le canal qui y conduit,' eft femé de récifs &
embarraffé par un banc de fable: niais, avec le
fecours d'un bon pilote, on arrive furément au
port. Il peut recevoir jufqu'à trois cens voiles, 8c
les navires de trois cents cinquante à quatre cents
tonneaux y entrent dans tous les temps avec leur
chargement entier.
La ville occupe un grand efpace au confluent de
l’Ashley & de la Coper, deux rivières navigables.
Elle a des rues bien alignées, la plupart fort larges
, deux mille maifons commodes 8c quelques
édificés publics, qui pafferoient pour beaux en
Europe. Le double avantage qu'a Charles-Town
d'être l'entrepôt de toutes lés productions de la
Colonie qui doivent être exportées, & de tout ce
qu'elle peut confommer de marchandifes étrangères
, y entretient Un mouvement rapide, & y a
fucceffivement élevé des fortunes fort confidérables.
S e c t i o n I V e.
Remarques générales fur les deux Carolines.
Les deux Carolines font encore bien éloignées
du point de grandeur où il leur eft permis d'afpirer.
I La Caroline du nord ne demande pas à fon fol toutes
les productions qu'il lui -offre j 8c celles dont elle
I paroît s'occuper un peu, font comme abandonnées
( i") Voyageur américain, pag. 1 j 2. Il paroît que cet état ne renferme pas tous les articles exportes delà ÇaroUnS
méridionale, & nous ne l’avons inféré ici que pour indiquer la proportion de chacun de ces articles.