
jour. On lui joint Couvent ce qu’on appelle un
alonge verfoiry c ’eft-à-dire , un bâton de bois dur,
à une des extrémités duquel eft fixé un croéhet de
fer qui s'introduit dans un anneau placé derrière
le verfoir, au bas du manche de la char n e, & un
peu plus loin eft cloué un bout de planche} l’autre
bout du bâton eft tenu par un homme qui lui fait
faire, avec h charue , un angle plus ou moins
ouvert. La terre, après s'être éleveedans la courbure
de l’oreille , à toute la hauteur poftible, Ce
jète fur l’alonge qui la difpérfe fi on le defire, à
deux ou trois pieds de diftance, en couche extrêmement
mince.
Cette invention eft dans le cas d’être appliquée
à toutes lès charues, tant elle remplit bien fon
objet.
La charue du Piémont, appelée Slcria, eft
regardée comme une des meilleures connues, par
M. Piété t, qui en a donné la defcription dans le fep-
tième volume de la Bibliothèque britannique.
On voit dans l'Argau , en SuiflTe, une charue
fort longue , fort baffe, à manche fort court,
qui laboure fort mal. Elle eft figurée fur la planche
du Boeuf de Fribourg, dans i'ouvrage de Witte ,
fur les races des bêtes à cornes.
Arthur Young a inventé une charue qui a obtenu
le prix dans un concours de laboureurs de
Suffolk,en Angleterre. Son emploi, depuis nombre
d’années , à la ferme de Liancourt, dans le département
de rOife,conftàre fa bonté.
On cite la charue de Rotheram , comme une
de celles qui ont le plus de réputation en Angleterre.
Lafteyrie , dont on ne peut trop louer le zèle
pour la profpérité de l'agriculture , a rapporté un
deffm de la charue de Suède, appe lée de Stierfund.
qu’il regarde comme une des meilleures connues.
Il y a en Angleterre , principalement dans le
Dewonshire, une charue dont le foc eft extrêmement
plat, & qui fert à enlever & retourner le
gazon lorsqu'on veut écobuer. Cette charue ne
prend que deux à trois pouces de la fürfaee
du fo l, mais coupe toutes les racines qui fe
-trouvent fur fon paffage. Son introduction dans
l'agriculture fi ançai fe , feroit donc très-importante
dans beaucoup de cas.
Une autre charue du même pays, & qui fe rapproche
beaucoup de la précédente, eft employée
pour faire des tranchées. Elle eft figurée pi. 13 de
Y Art aratoire. .
Il me feroir poftible dé multiplier encore beaucoup
les citations des. charues qui font eftimées
dans les pays où on en fait ufage, ou qui ont été
préconifées par les agronomes'; mais il faut fe
borner & , du nombre des fimples, je ne parlerai
plus que de celle qui a été présentée, il y a quelques
années , par M. Guillaume , au concours
ouvert fur les charues , par la-Société d’Agriculture
du département de la Seine ,& qui lui a
valu un encouragement de 500 francs.
Frappé de l'idée que la charue, l’ inftrument le
plus utile, étoit celui de la perfection duquel on
s'occupoit le moins , M. François-de-Neuf Château
provoqua , en l’an ix de la République , la
proclamation d’un prix par cette fociété, prix qui
fut porté à 10,000 francs par M. Chaptal, alors
miniftre de l'intérieur. Le rapport qu'il fit à ce fujet,
rapport qui eft unehiftoire complète de la charue,
& qui felitdans le troifième volume des Mémoires
de la Société, a été fuivi de quatre autres dans
lefquels il décrit les différentes charues envoyées
à la Société, 8c rend compte ces effais faits pour
juger du mérite de chacune d’elles.
C ’eft de la charue de Brie , comme la plus parfaite
de France , dont les. cpmmiffaires de la
Société d'Agriculture fe font fervr pour pointée
comparaison , afin de juger le mérite delà charue
de M. Guillaume, la feule qu'ils aient diftinguée
parmi celles envoyées au concours. Voici comme
ils s’expriment à fon fujet :
« La charue de M. Guillaume, dont l'arrière-
train eft à peu près femblable aux charues ordinaires
, porte, aubout .de la haie, une alonge
furbaiffée à laquelle eft attaché un régulateur qui
remplace l’épart pour diriger la ligne de tirage.
La haye eft broyée fur une fellette mobile & tenue
folide par la manière dont elle eft broyée parallèlement
à la fellette. La chaine de tirage prend au
gendarme & paffe.par le régulateur.
» Cette charue a été trouvée d’une conduite
facile; elle tient bien la raie. Les allions que les
agiicLiiteurs appellent le revotage & /'étrampage,
font on ne peut plus ai fées. Son Labour eft parfaitement
retourné ; aufli uni qu'un Laboür à la
houe ; elle marche parfaitement; fon travail a été
jugé infiniment fupérieur à celui d é jà charue de
Brie.
» Après avoir jugé de la qualité du Labour, il
falloir juger de la quantité de force employée pour
le tirage. Pour cela, chaque charue étant enrayée
à cinq pouces de profondeur, prenant huit pouces
de raie , dans un teri ein uni & d’égale qualité,
on a dételé les chevaux & un dynamomètre (forte
dé romaine deftinée à pefer les forces mouvantes)
a été attaché fucceflîvement au point de tirage de
chacune, & des hommes tirant dans la raie &
fans fecouffes, ont pu juger que la charue de
Brie exigeoit trois cents quatre-vingt-dix kilogrammes
pour marcher, tandis que celle de M. Guillaume
n’en demandoit que deux cents. Ainfi cette
dernière dépenfe environ quatre cents livres de
forces de moins, ce qui eft un avantage ira-
menfe.
» Cette expérience prouve que plus le point de
tirage eft-rapproché de celui de la réfiftance, &
moins il faut d'emploi de force. C'eft de cette
bafe, qu'avoient déjà fentie des inventeurs de
charues, entr'autres M. Àrbuthnot, qu'eft parti
M. Guillaume pour conftruire fa charue, que les
çommiffaires confîdèrent. comme la; plus parfais
^qui exifte en ce moment en France; car ce qui
■ conftitue une excellente charue, c'eft que fa conf-
ItruéBon foitfimple, folide; qu'elledoit facile à
■ mener ; qu'elle tienne bien dans la terre ; que
■ le foc coupe toute la terre retournée par le ver-
I loir ; qu'on puiffe labourer à volonté à groffe ou
■ petite raie, profondément ou légèrement, &
■ qu’elle exige le moins d'efforts poflibles pour la
■ tirer. Sans doute, avec ces qualités, une charue
■ ne fera pas encore bonne pour tous les terrains &
§ tous les cas; mais au moins pour le plus grand
■ nombre & le principe qui la perfectionne, pourra
■ être enfuite adapté à toutes les améliorations que
■ l'on poura faire dans les autres parties de i'inftru-
| ment, de manière à approcher toujours plus en
fl plus de la folution complète du problème.
■ » On cite fouvent des charues qui font beau- *
■ coup d’ouvrage. Il eft facile de prouver que celle-
I c i doit en faire plus qu’une autre ; c’eft furcout à
: rai fon de la légèreté du poids que les chevaux
Igvont plus ou moins vite : ce qui a été prouvé le
■ jour de l'expérience. La charue de Brie n'a fait
Iqu’un planche de dix pieds, pendant que celle de
■ M. Guillaume en a fait une de douze.
■ » Nous penfons qu'il doit réfulter de l’emploi
|de cecte charue, un très-grand avantage pour
l'agriculteur. Car li la charue de Brie, par exem-
Iple, pefant trois cents quatre-ving-dix kilogramm
e s , eft menée par trois chevaux, il s'enfuit que
■ chaque cheval eft chargé de cent trente kilogrammes.
O r , cette charue de M. Guillaume ne pefant
Mue deux cents kilogrammes, deux chevaux feront
■ ’ouvrage de trois , &c traîneront foixance kilogrammes
de moins; ce qui doit donner plus de
«célérité à leur marche, & augmenter par confé-
iquent la malle des Labours. 11 n'eft perforine qui
lue puillè calculer lé foulagement qu en recevront
les animaux 6c les hommes qui les conduifenr.
gPour labourer un feul arpent, il faut que les che-
Jvaux ou-les boeufs parcourent plufieurs lieues ainlî
» ue leur conduéteur. Lorfque le cirage eft pénible,
i>n ne fauroit aller qu’au pas , & les animaux 8c
jjes hommes font bientôt fatigués. Plus ce poids
;jdiminue, plus la marche s’allége 8c plus l'ouvrage
javance. Quelques livres de moins font en ce genre
P n e conquête. La charue de M.Guillaume enlève,
én quelque forte, la .moitié du fardeau : c’eft, on
°/e le dire, un bienfait pour l’humanité> 8c fi ce
l ’efi qu'un premier pas vers la pérfeâion, ce pas
fit h nouveau, il préfente tant d'avantages, il fait
paître tant defpérances, que le concours de la
inairue, n'tut-il que ce feul réfuitat, c ’en feroit a fiez pour l’honneur du pays qui l ’a propofé , &
, fu liecle qui l'a vu naître, »
J Ces réflexions font excellentes ; cependant on.
peut jeter quelques doutes fur le fait de la fupé-
ïionté des charues légères , quoique l’opinion
fies çommiffaires foie en concordance avec celle
^.eneraiement reçue-en France \ car il rélu! te. d’expériences
faites en préfence de la Société d'Agriculture
de Londres, 8c donc on ne peut contefter
l'exactitude, quand on en lit le procès-verbal-,
que les charues pe fan tes labourent mieux 8c fatiguent
moins les chevaux. Cette différence dans
la manière de voir, provient lans doute de ce que
les çommiffaires de la Société d’Agriculture de
Paris , n ont pas fait entrer en ligne de ’compte
dans leurs .calculs, les ficcades qui ont plus fou-
vent iieu avec les charrues légères. D’aiileuis , à
quelle autre eau Je pourroit-on attribuer la difficulté
de faire ufage de la charue de M. Guillaume,
dans les terres fortes, difficulté telle
qu’on a été obligé d’y renoncer dès les premiers
inomens où elle a été connue, aucun laboureur ne
pouvant réiifter à la fatigue.
Depuis, M. Guillaume a voulu faire difpa-
roïtre ce grave inconvénient fans augmenter la
pefanteur de fa charue ; de forte que celle qu’ il
vend en ce moment n’eft pas celle que les com-
milfaires de la Société d'Agriculture ont effayée.
A-t-il réuffi à l’améliorer ? Les uns difenc oui i
les autres difent qu'il l'a rendue moins propre à
labourer dans les terres légères, fans la rendre plus
convenable pour les terres fortes.
Jufqu’ici je n'ai parlé que des charues fimples >
mais il en elt de compolées de deux , ou,d'un plus
grand nombre de focs ; il en eft qui ne font formées
que de contres, comme je l'ai déjà annoncé*
Je dois dire un mot des unes & des autres.
Il a dû depuis long-tems venir à l'idée des cultivateurs
, de mettre deux focs à côté l’un de
l’autre pour faire double befogne dans le même
tems ; mais l'expérience n'a pas tardé à faire con-
noïtre que pour remplir leur objet, il falloir que
ces focs ne fulïènt pas fur la même ligne , parce
que la terre de la raie intermédiaire ne pouvoir
pas être renverfée. C ’eft donc en arrière l'un de
l’autre, & à une diftance qui ne peut pas être
moindre de trois pouces, largeur ordinaire des
filions, les plus étroits qu’ ils doivent être placés.
On en voit^ un exemple fig. 7 de la neuvième*
planche de Y Art aratoire.C ’eft en Hollande & en
Angleterre qu’on en fait le plus ufage ; cependant
on a cité & on cite encore quelques cultivateurs
même aux environs de Paris, qui fe trouvent bien
de fon emploi. Le lord Sommervüle l’a pe faction
née , au point de faire dans des terres fortes
avec trois chevaux, un meilleur Labour en moins
de tems qu'avec deux chevaux ordinaires attelées
chacune de deux chevaux.
Non-feulement on peut fabriquer , avec avantage
, des charues à deux fo c s , donne l’un en arrière,
fur le même niveau, mais encore des charues
à deux focs, dont l’un en arrière , le premier
plus élevé que le fécond. Cette dernière forte eft
comme on le fent bien , deftinée. à approfondir
les filions, & elle remplit bien fon objet. Lorf-
quon en. augmente beaucoup les dinreniionu &£