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les cinq ans font accomplis, on peut encore tirer
quelqu'indication de l'état des dents ; mais il faut
bien s’y connoitre & être très-exercé. A lo r s on fe
gu id e fur l ’ufé & fur la difpofition de ces petits
o s ; ils s'ufent de deux manières : le plus ordinairement
c’ett en dedans, par l'effacement en bi-
feau , ou o b liq u em e nt , de deux petites cavités
qui fe trouvent en bas & du côté de la mâchoire.
D an s l'autre manière , les bords des
dents font comme limés prefque hoiizontalement,
& non en plan incliné , comme dans le premier
c a s ; il s ’y forme auffi des .brèches le plus fou-
vent entre les deux dents du milieu ou à leur ex-
trémi é. Les dents dites les coins, qui ont pouffé
les dtriiières y félon qu’elles font -plus ou moins
e n t iè re s , font encore juger de l'âge. D an s la
jeuneffe, E s dents font courtes > elles paroiifent
longue^, dans lâ g e avancé, parce qu’elles pouffent
toujours & que les gencives fe retirent. Enfin,$la
forme des uents., qui eft en général pyramidale,
ayant fa feafd à l ’extrémité & la pointe dans l ’alv
é o le , ceffe de l’être autant dans la vieilleffe, &
fe rapproche de la forme cylindrique , c’eft-à-
d i r e , qu'elle devient plus égale dans fa longueur.
L e s mé rin os , par un avantage de leur conftitu-
tion , gardent leurs dents plus long-tems que les
autres races, quoique, chez e u x , celles de remplacement
aient i r é plus hâtives. L ’habitude de
v iv re au milieu des trou p eaux ,, de les obferver,
de les manier fouve nt , donne encore des moyens
de découvrir les â ges , quand on n’a plus d’indice
certain par l’infpeélion des dents. E n voyant lès
yeux moins v i f s , les lèvres pendantes, les na-
feaux r id é s , on peut juger qu’un animal n’eft
plus jeune.
O n fent bien que, quand une bête à laine a plus
de cinq ans , on ne fauroit avoir fur fon âge que
des apperçus, & à moins d’être un habile anato-
ir.ifte, il eft impoflible , avec les feuls fignes que
je viens d’indiquer, de fe déterminer précifément,
ce qui au refte n’eft pas toujours néceffaire. O n a
c ru que l’âge des béliers qui ont des cornes, fe
marquoit par les cercles de leur furface} mais
il ne s’en forme pas d’une manière allez régulière
p ou r q u ’ôn doive compter fur cet indice. I l faut
obferver que, quand les herbes des pâturages font
d u re s , les bêtes à laine perdent leurs dents beaucoup
plus tôt > on doit a voir égard à cette c ir-
coi itance. I l y a auflî quelquefois des individus
dent les dents s’ufent de très-bonne heure : cela
dépend de leur conftitution particulière.
L e s notions que je viens de donner fur les dents
des bêtes à laine font le fruit d’entretiens que
j’ai eus avec M . G ira rd , profeffeur d’anatomie à
l’E c o le impériale vétérinaire d’A l fo r t , q ui a fait
un examen fuivi d’un grand nombre de mâchoires
poftérieures de bêtes à laine. P ou r rendre plus
fenfible les différences que préfentent lès dents
«le ces animaux aux d ive rs âges de leur v ie , je
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les ai fait deffmer, & j’en ai placé la gravure dans
mon Inftruétion, page 19 8, i*. édition.
Marquès.
Indépendamment des marques à l’oreille, ou avec
un fer c h a u d , ou avec un infiniment tranchant
foit emporte-pièce , foit couteau, foit cifeau
& de celles qu’on fait fur la lame avec diverfes
compofitions, marques dont il a été queftion aux
pages 203 & 20 4 , t. I I de ce Di&ionnaire, 0.1 a
propofé l’emploi du tatouage y qui confifte à appliquer
fur une partie de la tête ou du corps un fer dentelé,
ayant la forme d’une ou plufieurs letires.De
toutes les piqûres il fort un peu de fan g 5 on les frotte
avec de lapoudre à canonpulvéris'ée ou avec toute
autre matière ; les plaies fe referment & la cou-
j leur ne s’efface jamais. Cependant cette application
ne fe E ifa nt que fur des parties dénuées de
la ine , telles que le plat des cuiffes & le deflous
des aiffelles, le fuint qui y abonde & les ordures
de la bergerie ou du terrein fur lequel le couche
l’animal donnent de la peine à découvrir la marque;
d’ailleurs, il faut prendre, coucher & examiner
la bête, chofe bien moins commode que fi à l’oeil
on appercevoit ce qui la diftingue. La- meilleure
manière , la plus fû re , celle qui n’a aucun inconvénient
pour la laine, eft d’imprimer fur la face,
avec un fer c ha ud , un chiffre ou des lettres ini-
; tiales. E n E fp a g n e , les lois puniffoient très-févére-
ment ceux qui prenoient la marque des autres.
Maniéré dé faire voyager les bêtes d laine.
P o u r bien conduire les bêtes à laine en petits
troupeaux , il f a u t , quand on le p eu t , choilir les
faifons où il ne faffe ni un grand froid ni une
grande chaleur. Voye[ les pages 204 & 2 p y , t. II.
L ’h iver & l’été ne font pas favorables. Autant
qu’on peut, on ne doit pas fe fervir de chiens qui, en
harcelant les animaux fans ceffe, les tourmentent
& fouvent les bleffent. Suivant le nombre des bêtes
du troupeau on emploie deux hommes ; dans ce
dernier c a s , un marche devant & l’autre derrière.
O n fait faire aux béliers quatre lieues par jour,
en partageant en deux fois la courfe ; de tems en
tem s , furtout fi les chemins font mauvais & le ciel
p lu v ie u x , on donne un jour ou deux de repos. Si,
fur la route ou près de la ro u te , il y a des herbes
fa ines, crues dans un fol qui ne foit pas humide,
on ralentit la marche , pour que les animaux paif-
fent. L e fo ir , à l’arrivée au g î te , comme le matm
avant de p a r t ir , les conducteurs comptent les
in d iv id u s , examinent ceux qui ont eu de la peine
à fuivre les autres, & panfent les blefiés ou les malades.
Pendant la nuit on a foin de placer devant
le troupeau du fourage de bonne qualité, meme
de donner de la provende aux plus fatigués, dans
une proportion relative à ce qui leur a manque de
pâture. Parvenus à leur deftination, ces animaux
- y doivent
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doivent fe repofer trois ou quatre jours avant d’être
conduits au pacage ; pendant ce tems on les
ourric à la bergerie, ou avec du fourage fec &
Se la provende , ou avec des herbes de prairies
qu’on laifft un peu faner avant de les leur donner
à manger. ,, . I , , a
U eft bien important d avoir des hommes lurs
pour la conduite de ces animaux : la moindre négligence
peut leur être funefte. Il arrive fouvent
que quand il s’ en trouve d’autres près des chemins,
les troupeaux fe mêlent, & qu’on a bien de la peine
à féparer les individus : à cet inconvénient il s'en
joint un autre pbs grand, c’eft le rifque de faire
comra&er à la troupe qui voyage, une maladie
contagieufe. Avec de l’attention on s’ informe de
l’état des troupeaux des pays par lefquels on paffe ;
on évite les endroits fufpe&s, on s’écarte des
routes qui conduifent à des foires ou à des marchés
de beftiaux. # . .
Je ne parle pas d’ un point effentiel, qui ne
concerne pas plus la conduite des bêtes à laine en
voyage que toute autre chofe , jë veux dire de la
probité de ceux qu'on en charge; on eft obligé de
sen rapporter à eux , quand on ne peut les accompagner
pour la nourriture des animaux aux drtfé-
rens gîtes : il arrive quelquefois qu’ils s’entendent
avec les aubergittes pour leur donner des reçus de
fournitures dont ils n’ont fait qu’ une partie, &
qu’ils n’ont peut-être pas faites; les animaux en
fouffrent. Pour qu’il y paroiffepeu, ils les lâchent
furtivement, pendant la route , dans des champs
cultivés ou dans des prairies plus ou moins mouillées,
ce qui eft un vol fait aux propriétaires des
champs, & un tort à celui auquel appartient la
troupe Je confeille de bien choilir les conduâreurs
& de prendre routes les précautions pofiîbles pour
qu’ils ne manquent point à ieur devoir.
Monte ou accouplement & agnelage.
Je n’ai dit que peu de choie à la page 2:0 du
tome II fur l’accouplement, en indiquant la faifon
où l'on doit mettre les béliers parmi les brebis;
j’ai même donné un confeil qui n’eft pas fuivi par
des propriétaires de troupeaux, 8c qae je ne fuis
pas moi-même. Je croyois qu’il falloir , dans les
parties feptentrionales de la France, toujours faire
couvrir les brebis en feptembre & octobre, &
non auparavant, afin que les agneaux , à leur
nailfanee, n’éprouvaffent pas de grands froids , &
qu? les mères , trouvant de l’herbe aux champs,
euffent plus de lait : ce motif eft très-taon , il ne
peut être condamné par personne ; cependant il y
ades économes qui préfèrent que la monte commence
dès la fin de juin ou au premier de juillet,
de manière que les agneaux foient tous nés en janvier.
On préferve aifément du froid ces petits animaux
y en les plaçant dans des bergeries où la température
foit douce, 8c par le moyen d’abris ; il faut
qu alors les mères reçoivent une abondante nour-
Agriculture» Tome V .
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titure* Il en réfulte que les agneaux, ayant pref-
cju’un an pour fe fortifier avant l’hiver fuivant, font
infiniment plus gros & ont de l’avance fur ceux
qui ne naiffent qu’en mars & a vril : à la v é rité , il
en coûte plus aux propriétaires ; mais on fuppofe
qu’ils ont des récoltes qui E s mettent à portée d ’y
luffire ; ils s ’en dédommagent , parce que leurs
animaux font plus tôt en état d’être vendus. I l eft
de fait que dans la ci-devant Beauce, pays, où
il n’y a point de prairies naturelles, & où autrefois
on n’en fai foit que très-peu d ’artificielles,
l'agnelage n ’avoit lieu qu’en h iv e r , parce que
c 'étoit le tems où l’on nourriffoit le mieux les
brebis; on les entretenoit fpécialement à la bergerie
avec des affourées de frorrfent ou d’avoine,
ou des pois en gerbe : au printems elles ne trou-
voient que très-peu d’herbe aux champs, car on
ne les menoit que fur les jachères. J’établis en
principe que la véritable époque où il convient de
difpofer l ’accouplement des brebis eft celle qui
peut faire naître les agneaux, quand on a de q uoi
bien fubftanter les mères ; ce qui doit varier fuivant
les pay s, les circonftances & les propriétaire si
O n a peu obfervé jufqu’ici les détails de la
monte, parce que les berge rs, les feuls qui euff nt
pu le bien faire , u’avofent ni le zè le , ni l’attention
, ni les connoiffânces néceffaires. U n agronome
très-diftingué, M . M o re l de V in d é , a entrepris
cette tâche peu facile, qui exige beaucoup
de fuite & une grande patience : il a publié cette
année (18 13 ) fes remarques & fes réflexions fous
le titre d‘ Obfervations fur la monte & l 'agnelage.
Je ren vo ie , pour les développemens, à l’ouvrage
même, & je me bornerai à en extraire les ré-
faltats.
L a b re b is , en l’abfénce du b é l ie r , ne paroît
pas a voir des chaleurs régulières ; il y a lieu de
croire que fa chaleur dure depuis le printerns
jufqu’à l’automne , & qu’elle fe renouvelle tous
l s dix-fept jo u r s , avec quelques légères variations.,
d’après ce qui fe paffe dans les troupeaux
où le bélier refte toute l’année.
M . M > re l de V in d é dit avoir fait des remarques
certaines fur cent quatre-vingt -dix-neuf brebis de
,1a monte de 18 î 2 , n’ayant pu examiner les autres ,
qui ont été couvertes pendant la nuit. Les béliers
ont été introduits le i er. juillet dans le troupeau
des portières : ce font les feisième,. dix-feptième
Scdix-Huitième jours de ce mois, fur vingt-fix, que
le plus grand nombre de brebis ont reçu le mâle;
cent cinquante-fept ont été fécondées dès leur
première chaleur; quarante-deux n’ont pas retenu
& font revenues en chaleur, dont vingt-deux le
dix-feptième jour; vingt-fépt ont été fécondées à
leur fécondé chaleur, quinze n’ont pas retenu &
font revenues en chaleur ; ces quinze ont été recouvertes
trois fo is , dont huit le dix-feptième
jour ; treize de ces quinze ont été fécondées à
leur troifième chaleur, deux encore n’ont pas retenu
, 8c font revenues en chaleur ; enfin > une de