
dans lequel on met la pâte , & qu’on entoure !
enfuite de cendres mêlées de braife.
Pour mettre les Pains dans le four * on .em- •
ploie une pelle de bois ( celles de hêtre font les
meilleures, parce quelles s’enflamment le plus
difficilement & ne fe fendent point ) de la forme
du Pain, & faupoudiée de farine. Les maffts de
pâtefe mettent fur la pelle, tantôt en les retournant
, tantôt dans la poiïdon où elles étoient pendant
qu’elles fermentoient. Cette dernière manière
exigeant deux opérations contraires, allez
difficiles , le renverCernent de la maffe de fon panier
fur une planche, & de, cette planche fur
la pelle, elle eft la moins pratiquée 5 cependant
elle eft indifpenfable pour certaines fortes de
Pains. ,
La manière de ranger Jes Pains dans le four dépend
de leur forme ; encore ici l’habitude en
apprend plus que les préceptes les plus détaillés.
Le principal, c’ eft qu’ il en entre le plus poffible ,
& qu’ils ne fe touchent pas.
Lorfque tous les Pains font enfournés, on ferme
le four pendant dix minutes, après lefquelles on
l’ouvre pour voir comment le Pain fe comporte.
Si on s’apperçoit qu’ il fe foit trop coloré , c’eft
Ligne que le four étoit trop chaud; alors on en
laiffe îa porte ouverte pendant plus ou moins de.
tems. Le tems néceffaire à la cuiffon du Pain varie
félon le degré de chauffementdu four, félon l’ef-
pèce de Pain, félon lagroffeur des miches, &c. ;
il eft impcffible de le fixer. Je dirai feulement que
lorfque le four eft convenablement conftruit &
chauffé , c’ eft environ trois quarts d’heure pour
les Pains de quatre livres , lorfque leur pâte eft
légère, & environ une heure & demie pour les
très-gros Pains dont la pâte eft très-ferme.
Le coup d’oe il d’abord, enfuite le ta£t, décident
du moment où il faut ôter les Pains du four. Une
miche convenablement cuite réfonne lorfqu’on la
frappe a,vec le dos de la main, & lorfque la mie,
dans les lieux où elle eft vifible (les baifures),
repouffe le doigt lorfqu’ on la preffe.
Les Pains fe retirent du four avec la pelle, employée
pour les y mettre, quelquefois avec des
crochets de fer. Il faut les ranger enfuite fur une
planche, les uns à côté des autres, ne les renfermer
que lorfqu’ils font complétementrefioidis; car fans
cette précaution ils moifiroient promptement.
En gardant les Pains plus de deux à trois jours
on court rifque , ou de les manger trop durs, ou
de les voir.moifir : ceux qui font les mieux levés
& les mieux cuits fe deffèchent le plus vite ; ceux
qui font mal levés & mal cuits fe moififfent le
plus promptement. Ce dernier inconvénient eft
beaucoup plus grave que le premier, car on
peut retarder le defféenement en mettant le Pain
dans un coffre, en l’énveloppant d’un Jinge ; on
peut le ramollir au fe u , à la vapeur de l’eau,
mais lamoififfure lui communique un goût extrêmement
défagréable, & une altération nuifible
à la Tanté, goût qu’on ne peut jamais lui enlever
entièrement.
Il eft utile à la fanté & économique de tnan* I
ger le Pain raffis ; mais il eft beaucoup plus agréable I
de le manger frais, furtout fi la levure de bière
a été employée à fa fabrication. Tout Pain chaud I
doit être profçrit, comme pouvant donner lieu à I
des indigeltions dont la fuite eft louvent là morr:, I
Comme fans humidité il ne peut fe former de I
moififfure, & que les Pains très-fecspeuvent être I
Facilement ramollis , on a , depuis des fiècles,ima-1
giné de remettre les Pains au four ^près leur I
cuiffon , à un degré très-foible de chaleur , pour I
les faire deffécher complètement ; de là le nom
de bifeuit , deux fois cu it, que porte une forte I
de Pain fabriqué dans l’intention de le conferver
des mois, même des années , eh bon état. C’e
principalement pour l ’approvifionnement desvaif-
féaux qu'on en fait le plus.
Il y a deux fortes de bifeuit : i° . celui qui fe
fait comme il vient d’être d it , c’eft-à-dire, des |
Pains de foible dimenfion, deux à trois livres,!
coupés dans le fens de leur épaiffeur, & remis aul
four jufqu’à ce que toute leur-humidité furabon- j
dante foit évaporée. On en fabrique à Paris pour H
la foupe , dans quelques campagnes ifolées, pour I
les casjmprévus , & dans les ports de mer, pour I
les provisions des officiers de marine ; i°, celui 1
qui eft fabriqué avec de la pâte fermentée , mais I
q u i, au lieu d’être façonnée en gros Pains, & 1
mife de nouveau à fermenter , eft divifée en ga- Il
letres au plus de fix pouces de large & un pouce I
d’épaiffeur , galettes qu’on laiffe dans le four juf-
qu’ à ce qu’elles foient complètement fèchfcs. C’tft
aujourd’hui le véritable bifeuit, celui dont on ap-1
provifionne exclufivement les vaifleaux, les pla-1
ces affiégées , &c. Il feroit fort à delïrer que les 1
cultivateurs q u i, par principe d’ économie ,l_
cuifent que tous les quinze jours, même tous les 1
mois, le préféraffent au pain lourd & moifi qu’ils
mangent fi généralement. Mis en lieu fec, dans I
des boîtes ou des tonneaux exactement fermés•, I
il peut fe conferver plufieurs années au même I
degré de bonté qu’ il avoit en fortant du four. I
Dans l’origine des fociétés agricoles y on fa-1
briquoit le Pain à mefure du beioin, avec de lai
pâte non fermentée, & on le faifoit cuire fous la |
cendre, ce qui fuppofe qu’on le mettoit en galette I
d’une petite épaiffeur. Il avoit donc beaucoup
de rapport de forme avec le bifeuit.
Aujourd’hui on fait en Italie, principalement|
dans le pays de Venife, une forte de Pain quiI
femble être en rapport avec ce Pain ancien. I
Pour le fabriquer on met fi peu d’eau dans la I
farine , qu’il eft impoffible de la pétrir. Pour fup* I
pléer au défaut de la main, on met la pâte fous un I
levier formé d un arbre de quatre pouces dé dia- V
j mètre & de douze ou quinze pieds de long, nxea I
; un tourillon par une de fes extrémités; lev^rfl
l dont on introduit le corps dans la pâte, d’abora J
I èn appuyât avec les mains, & enfuite en fautant
I & s’affeyant fur fon extrémité libre. Lorfque la
(pâte eft fuffifamment pétrie, c’eft-à-dire, qu’elle
I Râliez dure pourqu’on ne puiffepas y enfoncer le
IJ0iat, on l’abandonne pendant quelques heures,
[après quoi on la divife en morceaux d’ un quart de
■ livre, auxquels on donne une forme cylindrique &
Iqu’on enfourne de fuite.
j Ce Pain , qui n’eft réellement que de la farine I légèrement altérée , ne plaît pas d’abord aux per-
Ifonnes habituées à manger du Pain de pâte fermentée;
mais on s’y accoutume bientôt, & il fe
jmnge de préférence , furtout à déjèûner, ainfi
■ que je y ai éprouvé pendant mon féjour dans Je
■ pays vénitien. Il peut fe garder long-tems, mais
! Je conferve fa bonté que pendant quelques jours : I c’eft pourquoi il eft allez général qu’on n’en fab r ique
à la fois que pour deux ou trois jours.
| Ceux qui voudront prendre une idée' de la ma-
pière de pétrir ce Pain , peuvent le faire en allant I voir travailler la pâte des vermicelliers.
| Il ÿ a'auffi une machine qui fupplée à l’ effort du
■ levier, & qui nécefîite l’emploi des forces de deux
Ihoinfnes pour être mife en aètion. 3
I Jufqu’ à préfent j’ai fuppofé qu’on n’employoit
Idans la fabrication du Pain que de la farine pure
Ide froment; actuellement je dois dire un mot du
■ Pain de farine de froment mélangée de fon &
Id’autres fubftances, ainfi que de celui fait avec de
l l ’épeautre, du feigle , de l’orge , de l’avoine , du
Imaïsydu riz , du farrafin, & c . Voye^ Farine &
■ Mouture.
On appelle Pain bis ou Pain de munition, parce
Ique c’eft celui qu’on donne aux foldats, celui
■ dans lequel il entre plus ou moins de So n .
1 ce mot.
Le fon étant indigeftible, & le Pain étant def-
Itiné à nourrir, il femble qu’il ne devroit jamais en
■ entrer un atome dans ce dernier ; cependant,
Id’un côté, l’ eftomac des perfonnes qui travaillent
■ beaucoup des bras, & en plein air, eft pourvu
■ d’une telle activité, qu’ildemanderoit continuelle-
Iment des alimens, fi on ne le leftoit pas de ma-
Itières de difficile digeftion, même totalement in-
Idigeftes; de l’autre, excepté dans la mouture éco-
Inomique, il refte attaché au fon une fi grande
■ quantité de farine, que ce feroit une perte confî-
Idérable que de ne la pas employer ; auffi les habi-
Itans des campagnes font-ils entrer dans leur Pain
■ tout ce qui compofoic le grain du blé, ou air
■ plus'en enlèvent-ils le plus gros fon pour le
■ donner à leurs beftiaux ou à leurs volailles.
I L’effet du fon dans le Pain, c ’eft de l’empêcher
■ de lever convenablement, de lui donner une
légère âcreté, & de le rendre purgatif pour ceux
■ qui n’y font pas accoutumés.
T Le Pain méteil eft celui dans lequel on mélange
la farine du feigle à celle du froment; c’eft
pu très-bon aliment, qui fe digère plus facile- j
P^nt que le pur Pain de froment, & qui a l’avantage
précieux de fe conferver frais plus long-
tems. La proportion la meilleure eft deux tiers
de farine de froment & un tiers de farine de
feigle ; mais généralement, dans les campagnes, on
mélange ces deux fortes de grains par moitié.
J’ai fait fentir au mot Meteil les inconvéniens
qu’il y avoit à femer le feigle & le froment enfem-
b le , & au mot Mouture ceux qui réfultoient
du mélange de ces deux grains dans cette opération
: ce font donc les farines qu’ il faut réunir pour
faire le Pain méteil.
Beaucoup de pauvres cultivateurs mélangent
auffi avec leur farine de froment, de la farine d’orge
& d’avoine, ce qui altère d’autant plus la qualité
du Pain , que ces dernières font en plus grande
proportion , ainfi qu’on en jugera d’après ce que
je dirai plus bas de leur-nature.
Il eft quelques endroits ou on fait entrer auffi
de la farine de r i z , de la farine de maïs, de 1a
farine de pois , de haricots, de lentilles, de
fèves, de'vefces, de geffes, même de lupins dans
la compofition du Pain de. froment. Le réfultat
de tous ces mélanges donne des Pains plus ou
moins lourds, plus ou moins défagréables au
goût , :même plus ou moins mal-fains.
J’en dirai autant du Pain de châtaignes, du
Pain de pommes de terre , du Pain de patates,
quelque préconifés qu’ ils aient été , furtout le
fécond, parce que tous les effais dont j’ ai été té moin
ent donné pour réfultat une nourriture
moins bonne que ces mêmes alimens Amplement
cuits fous la cendre ou dans l’eau, & de plus une
manutention très-longue & très-difpen‘dieufe.
Ces forres de Pains ne peuvent jamais, à mon
avis, devenir d’un ufage général : j’en parlerai
cependant aux articles C h â t a ig n ie r , P omme
de terre & Pa t a t e .
Prefque toutes les matières nutritives peuvent
être mêlées avec le Pain & lui donner leurs
noms ; mais je m’arrête à celles que je viens
d’énoncer, comme les plus fréquemment employées.
La farine de feigle eft, après celle de froment,
la plus convenable pour fabriquer du Pain. Voyer
Seigle.
Pour préparer le levain du Pain de feigle, il faut
mêler le levain chef avec un cinquième de la
farine deftinée à la fournée ; Sc lorfque le levain
eft parvenu au point convenable , on exécutera le
pétriffage félon les règles indiquées pour celui
de la pâte de farine de froment , excepté qu’on
emploiera l’eau plus chaude & qu’on tiendra la
pâte plus ferme.
La fermentation des maffes de pâte s’exécute
de la même manière, foit en é té , foit en hiver.
■ Lorfqu’on. juge que cette pâte eft affez levée
pour être enfournée , il faut donner un dernier
coup de feu au four , afin qu’elle foit faifie par la
chaleur dès qu’elle y fera‘placée. Le four ne doit
être fermé que quelques minutes 5 car ce coup