
Probablement, & la théorie l'indique, les plantations
faites avec ces éclats ne durent pas autant
que celles qui font le produit des jeunes pieds..
Quelquefois cependant on opère le remplacement
de s pieds qui ont manqué ou qui font morts,
en couchant en terre une des tigesvdes pieds voi-
fins & en l'amenant contre le chinkaréen, qui a
befoin d'étre regarni.
Toutes les autres tiges droites ou rampantes ,
tous les rejets qui ne font pas employés , font
brûlés, & leurs cendres difperfées fur la plantation.
Avant cette incinération on cueille les graines
des tiges qui en portent : ces graines , quoi-
qu'incomplétement mûres, fournilfent un poivre
de fécondé qualité.
Outre ce mode de renverfement, il en eft un
autre qui confifte à laifler la plus belle tige continuer
de monter fur les chinkaréens, de couper &
arquer, comme je l'ai dit plus haut, deux ou trois
de celles qui s’en rapprochent le plus par leur
groffeur, tk de faire difparoître toutes les autres.
Les deux ou trois tiges arquées prennent racine à
leur extrémité, & les branches qui en fortent, font
attachées la fécondé année aux chinkaréens comme
celles de la tige non coupée.
Toutes ces opérations fe rapprochent , comme
on le v o it, de celles qu'on fait fubir à la vigne
dans quelques cantons- de la France ; elles ont pour
but, i° . d'augmenter le nombre des grains & leur
groffeur 5 20. de changer les pieds de place pour
qu’ils aient toujours un fol également riche, &
ces buts font fort bien remplis. ,
. Sarcler les mauvaifes herbes une fois par an, au
commencement de la faifon des pluies , avec
une houe , & fort incomplètement , eit la feule
_ culture qu'on donne aux Poivriers. Il ne paroît
pas qu'on laboure même leur pied, quelqu'avan-
tageux qu'il y ait lieu de croire que cela foit.
Les Poivriers , comme je l'ai déjà obfervé ,
commencent à porter la troifième année, mais la
récolte eft retardée pour une ou deux années par
le renverfement; elle augmente dès-lors jufqu'à
la feptième ou huitième, époque où ils font ef-
timés être dans leur plus grande vigueur ; ils fe
maintiennent dans cet état félon la bonté du fol ,
pendant deux à trois ans , alors ils diminuent de
produit jufqu'à leur mort. Quelques pieds portent
jufqu'à vingt ans , mais ces exemples font rares.
Un homme & une femme, & même un homme
feul, s'il eft actif, peuvent planter & cultiver mi lie
pieds de Poivrier , & de plus, femer dans les intervalles
autant de riz qu'il leur en faut pour leur
fubfiftance.
Généralement les Poivriers en rapport donnent
deux récoltes par an ; favoir : une grande au mois
de fepteonbre , & une petite au mois de mars ;;
mais il y a de nombreufes variations à cet égard , ,&
il eft des cantons où on en récolte tous les mois,
& d'autres où on n'en récolte qu’une fois l'an. Les
grandes féchereffes qui régnent fouyent, font la j
principale caufe des retards; ces féchereffes font
quelquefois fi longues, que les Poivriers perdent
leurs feuilles & leurs fleurs ; mais ordinairement
la récolte de l’année fui vante eft fi abondante ,
par luite du repos produit par cette circonftarrce,
qu'elle dédommage de celle qui a manqué. Voyez
Récoltes alternes.
On reconnoït que le poivre eft bon à récolter
lorfque quelques grains de chaque grappe font devenus
complètement rouges. Il vaudroit fans doute
mieux attendre que tous fuffent rouges, car cette
couleur indique leur complète maturité ; mais
comme ils ne tnûriflent pas en même teins, & que
ceux qui font très-murs, ou tombent, ou font la
proie des oifeaux, on eft forcé d'anticiper dur la
maturité de la plupart. A mefure qu’on arrache
les grappes, & elles tiennent peu à la tige , on les
mec dans un petit panier que le cueilleur porte
derrière le dos, & enfuite on les étend fur des
nattes, près de la maifon, ou fur un terreinbattu ,
pour les faire fécher; là ,1e poivre devient noir &
ridé, tel qu'il arrive en Europe : celui qui eft le
moins mûr eft celui qui fe ride le plus. Pendant
qu'il fèche , on le nettoie par le moyen du van , &
on en fépare les grains légers & tendres qui proviennent
des moins mûrs, attendu qu’ils ne font
pas marchands. On reconnoït que le poivre eft:
bon en le frottant entre les mains, lès grains légers
& tendres fe réduifant en poudre par cette
opération. Le poivre qui eft tombé naturellement
&;qu’on a ramaffé fur la terre, fe diftingue au manque
de fon enveloppe.
On a cru pendant long-tems que le poivre blanc
provenoit d’une autre efpèce que le poivre noir ;
mais 0« fait aujourd’hui avec certitude que c'eft
le même privé de fon enveloppe extérieure. Pour
l’obtenir on fait macérer le poivre noir dans l’eau
pendant une quinzaine de jours5 là , il fe gonfle &
fon écorce crève; alors on l’expofe au fo.leil, &
lorfqu’ il eft fec on le frotte entre les mains & on
le vanne. Le poivre blanc a été long-tems plus
eftimé que le noir ; mais aujourd’hui qu’on a reconnu
qu’il eft moins piquant & qu'il a perdu
une partie de fon arôme , on le recherche peu :
en conféquénce il n'en vient prefque plus en
Europe.
. On prétend que l'eau de la mer n'altère pas le
poivre ; en conséquence on ne prend pas , dans
les vaiffeaux, toutes les précautions néceffaires
pour l'empêcher d'être mouillé par elle. Il m\eft
difficile de,croire à la vérité de cet effet par les
feules lumières de la théorie , & la grande différence
de qualité de celui qu'on trouve dans le commerce
femble prouver que cette eau agit fur lui.
La culture du poivre à Cayenne eft dans un
grand état de profpéritë, quoiqu'il n’y ait guère
que ,vi»gt-cinq à trente ans qu’ elle y a été introduite.
L'expérience a appris que l'efpèce d’arbre
qui eft , dans cette colonie , la plus propre à fup-
pléer aux chinkaréens de Sumatra, eft le C a l e -
bassier (v o y e ç ce m o t), q u i , comme lu i, fe
multiplie de boutures, croît fort v ïce , s'élague
fans inconvénient , & ne s’élève pas à plus de
douze ou quinze pied.s.
On peut auffi planter les Poivriers contre le bois
immortel (erythrind) il n'y réuffic pas f i bien.
La plantation des boutures de calebaffier fe fait
lin an avant celle des Poivriers, & à fix pieds de
de diftance en tous ftns. Les Poivriers , on n'en
tînt qu'un à chaque, fe plantent à fix pouces de
ces calebailiers , auxquels on nelaifle que fept à
huit branches au fommet, pour qu'elles acquièrent
plus de groffeur & donnent moins d’ombre ; car
le Poivrier eft fort lourd, & donne moins de
fruit quand il eft ombragé.
L à , on multiplie les Poivriers de toutes les
manières indiquées plus h au t, mais plus fou-
vent de boutures, avec la précaution de choifir
des jets qui n'aient pas encore- produit, ces jets
ayant été reconnus les meilleurs. ( Voye^ Bou tu
r e . ) Ces boutures doivent avoir quatre à cinq
noeuds, & être plantées obliquement, un feul de
ces noeuds reftanc hors de terré.
Lorfque les jeunes p o u f f e s des plantations de
Poivriers commencent à monter, on leur fait prendre
une bonne direéiïon en les attachant avec un
foible lien au tronc du c a l e b a f f i e r .
On donne tous les-ans un, & même quelquefois
deux binages aux plantations du Poivrier ; mais
on ne leur fait pas fubir l'opération du renverfement
dont il a été queftion plus haut. Lorfque la
plantation eft achevée, un feul nègre peut cultiver
8c récolter les fruits de huit cents à mille pieds.
A Cayenne comme à Sumatra, le Poivrier commencé
à donner des fruits la fécondé année, &
il eft en plein rapport la quatrième ou cinquième.
De fes deux récoltes , la première , qui a lieu en
mai, eft ordinairement la meilleure ; mais il y a
auffi dès* variations à cet égard , & une des récoltes
manqué également quelquefois j par fuite des
grandes pluies qui font couler fes fleurs. Les vents
froids font peu nuifibles à ces fleurs, parce que
les grandes feuilles des calebaffiers les abritent.
Les fruits du Poivrier fe cueillent dès qu'ils
commencent à rougir, au moven d'une petite
échelle & d’un panier attaché à la ceinture du
cueilleur ; les grappes feféparent fans effort de la
tige; on fait enfuite fécher ces grappes, puis on
ifole les grains par le frottement & le v a n n a g e .
Chaque pied de Poivrier en plein rapport donne
chaque année , terme moyen, vingt livres de poivre
fec ; ce poivre eft gros , bien plein , d'unè
belle couleur , très-piquant & très-aromatique ;
enfin, fupérieur à celui des Indes , ainfi que j'ai pu
en faire la comparaifon fous lè miniftère de Roland,
à qui oh en avoit officiellement envoyé' une çaiffe.
Sans doute cette fupériorité provient des foins
qu’on donne à fa plantation, à fa culture, à fa récolte
, &c. ( B ose. )
P o i v r i e r d u J a p o n , V o y e i F a g a r i e r .
f POIX. Toutes les réfines qui fluent naturelle-
! ment ou par incifion des pins & fapins , portent
cè nom ; mais il s’applique cependant plus particuliérement
à celle qui eft fournie par le fapin
. peffe ou épicéa.
Mife dans l’eau , fur le feu , la Poix fe fond &
peut être paffée à travers un canevas. Le réfultat
de cette opération eft la Po ix grajfe ou Poix de
Bourgogne, &" lorfqu’on y mêle du noir de fumée ,
la Poix noire.
Quelquefois cependant la Poix noire n’ eft que
du Goudron épaifli. Voyez ce mot.
Poix-résine : fynonyme de Résiné de pin.
Viyeç ce mot.
En général, les acceptions du mot Poix varient
félon les lieux, & il feroit difficile de les fixer.
Voyey les mots Pin , Sapin & M e l è z e dans le
Dictionnaire des Arbres & Arbufiés. (B o s e .) '
POLCHË. C ’eft la Ketmie à feuilles de peuplier.
POLDERS nom flamand des terres dt fléchées
par des moyens induftriels, & devenues fuf-
ceptibles de culture.
Les Polders les plus étendus font ceux qui font
fitués entre les villes de Dunkerque, Berg-Saint-
Vinox , Honfchoote & Fûmes; ils appartiennent
aux freres Herwyn , q u i, fans être épouvantés par
la ruine de plufieurs particuliers qui auparavant
a voient tenté lansfuccès le defféchement des lacs
& des marais,aont ils tiennent la place, parvinrent,
à force de dépenfe, à les mettre en état de donner
..de fuperbes récoltes. La guerre leur fit perdre, en 1793 » plus grande partie du fruit de leurs travaux
j par l'inondation d’eau de mer opérée pour
la défenfe-de Dunkerque ; mais ils ont réparé en
grande partie ce défaftre.
Le terrein des frères Herwyn eft de trois mille
arpens, fépâré en deux par une chauffée , & chaque
partie divifée par des digues garnies d’éclufes.
.On y voit cinq moulins à vent pour éiever Ls
eaux & les porter, dans un canal de ceinture , qui
fe jette dans le.port de Dunkerque.
Honneurs foienc rendus aux frères Herwyn^
qui ont fi bien mérité de l’agriculture ! Puiffent les
evénèinens futurs fàvorifer leurs projets, & ré-
conipenfer leurs efforts ! ( B ose.)
POLEMOINË. PoLEMONlUM.
Genre de.plante de la pentandrie monogynie &
dé làfaipiile de fort nom, qui réunit fix efpèces,
dont trois , les feules qui lui appartiennent cer-
taih.eiîoe^t, fe cultivent dans nos, jardins. Il eft
figuré dans Tes Illustrations des genres de Lamarck ,
pl, :i,oé. ,
Efpeces.
1. La Polemoine à fleurs bleues, vulgairement
yulérian'e.grecque.
Polemonium c&ruüum. Linn. Du midi de
l’ Europe.