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C ’eft vers le milieu d’oêtobre qu*on rentre la
plupart des plantes 'des Orangeries dans les enviions
de Paris.
Il faut ceffer d’arrofer les plantes quelques
jours avant de les rentrer, & les nétoyer de
toutes leurs feuilles mortes & furtout moifies.
Retarder de quelques jours eft avantageux lorf-
que le tems eft humide.
Il y a deux manières de diCpofer les plantes
dans lés Orangeries, ou à plat fur le fol , ou fur
des gradins de bois : toutes deux ont leurs avantages
& leurs incônvéniens.
C e n’ eft pas une chofe facile que de ranger
convenablement les plantés dans une Orangerie.
Pour bien faire cette opération, il faut connoître
la nature des plantes & les changemens qui s’op-
pèrént en elles pendant le côurs de leur végétation
d’hiver. En principe général, à rai.fon de
la nécefiïté qu’elles foienc toutes également frappées
de la lumière , les plus grandes fe mettent
dans le fond, & ainfi fuccefivement jufqu’aux plus
baffes ; mais comme celles qui perdent leurs feuilles
ont moins befoin de lumière, on doit les placer
derrière les plus grandes : aucune ne doit toucher
contre les murs. Si l’Orangerie a douze pieds ou
plus de large, outre l’allée qui tournera autour,
on en fera une dans le milieu, non-feulement pour
la facilité du fervice, mais encore pour qu’il y ait
plus d’air. Cette allée fera d’un à deux pieds, &
même plus, fi ce font des orangers ou aiitres
grands arbres, & qu’ils foient fur quatre rangs.
Certaines plantes, telles que celles qui fleu-
riffent pendant l’hiver, & dont les feuilles font
très-tendres ou três-aqueufes, celles qui exigent
un air conframment. fe c , qui demandent plus d’air
& plus de lumière, celles-là feront mifes de préférence
devant les fenêtres ; car il faut établir
un gradin d’un pied de large à la hauteur de ces
fenêtres, gradin fous lequel on place les pots
qui renieiment des racines ou des graines qui
ne doivent pouffer qu’au printems, & qui par
conféquent n’ont nullement befoin de jour.
Les plantes cultivées dans nos Orangeries font
de plufieurs climats, & demandent un mode différent
de culture; celles des parties méridionales
de l’Europe qui, comme l’oranger, ne doivent pas
pouffer pendant l’hiver, font les moins difficiles à
conduire, puifqu'ii ne faut que les empêcher de
geler; mais celles du Cap de Bonne Efperante ,
de la Nouvelle-Hollande, qui végètent & même
fleuriflent pendant cette faifon, ont befoin d’une
furveillance d’autant plus a&ive , que les premières
veulent un air fe c , & les fécondés un air humide
pour profpérer. Ces deux circonltances
contraires devroient engager les cultivateursqui
en ont les moyens, à avoir deux Orangeries ;
favoir: une pour les plantes qui craignent, & une
pour celles qui ne craignent pas l’humidité.
Dans tous les cas, le nombre des pieds d'arbres,
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d’arbriffeaux, d’arbuftes ou de plantes q u i con-
fervent leurs feuilles pendant l’hiver, d o it être
plutôt foible qu’exagéré dans une O ran gerie
d’ une dimenfion donnée, attendu que leur fura-
bondance amène toujours un excès d ’ h um id ité I
&: que , je ne cefferai de le répéter, c’ eft “ humid
i t é qui nuit le plus à la confervation des plantes
qui y font renfermées.
*’ C'eft encore la crainte de cette humidité qui
s’oppofe à ce qu’on arrofe les plantes dans les
Orangeries autant qu’en plein air ; généralement
ce n'eft que lorfqu’elles fe font fanées par le befoin
d’eau , qu’il faut leur en donner. Les arbres
ou les plantes qui perdent leurs feuilles ne feront
arrofés qu’ une fois par mois au plus’. Il faut qu’un
cultivateur, jaloux de la profpericé de fon Orangerie
, fe perluade que les plantes n’y font pas
placées pour v égéter, mais pour être confervées;
s’il veut ayoir des fleurs pendapt l’hiver, c’eft dans
des ferres, des bâches, fous des châffis qu’il faut
qu’il renferme fes plantes.
Très-fréquemment on met un ou deux poêles
dans les Orangeries, mais le plus fouvent c’eft moins
pour parer aux effets des gelées qu’ à ceux de l’ hu?
milité. Quand il n’y en a qu’ un , c’eft au milieu!
qu'il doit fe trouver ; quand il y en a deux , c'eft I
à huit ou dix pieds des deux extrémités. On doit
éviter de les accoler à un mur,'-parce que, d ’un
côté , il y auroit une partie de leur chaleur de
perdue dans ce mur, & que de l’autre ils attire-
r oient l’humidité de ce mur. On les allume le matin
lorfque les tems brumeux fe prolongent, &
que la moififfure ( C hancissure, voye^ ce m ot)
commence à fe montrer. On les allume auffi le
loir dans les Orangeries à murs peu épais & à
fenêtres &poites mal fermées, lorfqu’ily aappa-
reuce de forte gelée pendant la nuit.
Tant que la température fe foutient de cinq à
fix degrés au-deffus de zéro du thermomètre de
Reaumur,& que le ciel n’eft pas chargé de brouillards
j on ouvre tous les jours les fenêtres de l'O rangerie,
depuis dix heures du matin jufqu’à trois
heures au loir. Si cette température baiffe, ôn ne i
les ouvre plus que quelques inftans vers midi j &
lorfqu’elle elt à zéro , on les tient conftâmment
fermées. C ’eft alors feulement qu’on calfeutre
toutes les fenêtres, excepte deux, une de chaque
c ô té , en collant du papier fur tous les joints de
leur teimeture; on en tait de même aux jointures
des portes qui ne font pas néceffaires pour entrer.s
Ces deux fenêtres font deftinees à donner de l'air j
a l’intérieur lorfque le tems eft fec & qu’il ne j
gèle pas.
S’il eft important d’empêcher le froid d’entrer i
dans les Orangeries, il l’ elt au fl! d’empêcher la
chaleur de s’y eleve r ; car il en rélulteroit que les
plantes poufféroient a contre-faifon & s’eiiole-
roient, deux circonftances qui feroient fort défavorables
à leur confervation , ainfi qu’aux jouif*
fances qu’on en attend ; à leur confervation, parcÊ
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fflu’elles feroient plus expofées à poulrir & à être
l^ppéês de l’air froid, & m êm e de l’air fec : aux
iiouiftanees qu’ on en attend , parce qu’elles nefleu-
[Jiroient pas.
Tous les jours un jardinier , jaloux du fucces
[de fes cultures, vifice fon Orangerie pour voir ce
[qu’il y a à y faire , furtourà l’époque des grands
[brouillards & à celle des fortes gelées ; toutes
les lemaines il fait enlever les extrémités des pouffes
[quipourriffent, les feuilles mortes, cueillir les
[graines mûres , & il fait arrofer les plantes qui
[en ont le plus de befoin, & c . ; tous les mois il
fait déranger tous les pots ,Jeur donne un lé g e r .
[binage, fait balayer le fo l , change de place les
[plantes qui l’exigent, & c . J’ai eu foin, à l’art i-
[de de chaque plante exigeant l’Orangerie, d’indiquer
la place qu’elle doit y occuper.
Auffitôt que les gelées ont ceflé, on ouvre
otites les croifées , d’abord dans le milieu du
[jour, puis tout le jour, enfin jour*& n u it, afin
[ de réaccoutumer les plantes aux effets du grand« tir. Foye^ É t io l e m e n t .
Certaines plantes étant plus robuftes que les
[autres, peuvent être forties de l ’Orangerie dès le
[ commencement d’avril ; mâis dans le climat de Paris
[on ne fort guère les orangers avant le io ou le
Iiy de mai. Un tems doux & un ciel couvert font
[indifpenfables pour éviter les incônvéniens qui
[font fouvent la fuite de cette opération , beaucoup
de pouffes étiolées étant fubitement frap-.
[pées de morclorfqu’un air fec les faifit. Si le tems
iB’eftpas couvert, en place les plantes à l’ombre
■ pour quelques jours, afin de leur faire éprouver
[j’impreffioh du grand air avant de les expofer
[aux rayons direéis du foleil; des cultivateurs les y laiffent même jufqu’ à l’époque de leur rempo-
I tement, & par-là ils évitent une dépenfe de main-
[d’oeuvre qui ne laiffe pas que d’être quelquefois
I confidérable. Voyei R e m p o t a g e .
[ La manière de difpofer dans les jardins les plantes
| forties de l'Orangerie , varie félon le but de la
I culture & le goût du propriétaire ; tantôt on les
I difperfe, en enterrant les pots , de manière à les
I faire participer à l’agrément de toutes les parties.
K Dans les écoles de-botanique & chez les pépi-
iniériftes, on les enterre les unes à côté des aulnes,
fur plufieurs rangs, dans l’ordre de leur
I grandeur, le plus grand nombre vis-à-vis de 1*0-
I rangerie, ou à quelque diftance d’un mutexp'ofé
I au midi ; quelques-unes au levant & quelques au-
I très au nord'. Les plantes de la Nouvelle-Hollande
I font celles qui aiment mieux le levant, & celles
I des Alpes, qu’ on renferme dans l’Orangerie pour
I remplacer la neige qui les couvre pendantfix mois,
I font celles qui exigent le nord. J’indique cés cir-
I confiances aux articles des plantes qui les offrent.
I Beaucoup de plantes d ’Orangerie , principale-
I ment les gérarûons , fervent aujourd’ hui à l’or-
I jument des jardins français ; celles-là trouvent
I *eur plaçe fur les appuis des terraffes, fur les gradins
des efcaliers-, fur des amphithéâtres conftruits
en gazons ou en pierres dans le voifinage de la
maifon, le long des allées des parterres. Rarement
on enterre leurs pots, mais on les cache fouvent
dans des vafes de marbre, de terre cuite , de
fonte, & e . , fervant eux-mêmes, à raifon de leur
grandeur, de leur forme & de leur fculpture ,
à l’embelliffement du local.
Les pots enterrés, furtout lorfque leur terre
eft couverte de moufle , perdant moins d’eau par
l'évaporation , n’exigent pas autant d’arrofement
que ceux qui font expofés à l’air par tous leurs
points.
Je parlerai, au mot Oranger, des foins particuliers
que demande cette efpèce d’arbre pendant
les fept mois qu’ il refte dans l’Orangerie.
Les arbres deftinés à être mis en Orangerie
font généralement en pots , & par conféquent
gênés dans leur accroiffement : il y auroit beaucoup
à gagner pour eux de les mettre en pleine
terre , & de difpofer leurs entours de manière à
pouvoir les couvrir d’un to it , & les garantir du
côté du midi par des vitrages. Ces fortes d’Oran-
geriesfont inconnues en France; mais il en eft
plufieurs en Allemagne, qui excitent l’admiration
; des amis de la culture ; celles de Schoenbrunn ,
château de l’empereur d’Autriche, près Vienne,
font principalement dans ce cas.
Ces Orangeries peuvent paroître , au premier
coup d’oe i l , d'un établiffement & d’un entretien
plus confidérable que celles que je viens de décrire
; mais j’ai lieu de croire, d’après des calculs
approximatifs que j’ai faits pendant que j’étois à la
tête de l’Orangerie deVerfailles, la plus grande
& la plus coûceufe de toutes celles qui exiftent
en France, qu’ il y auroit eu une économie de
moitié fi elle avoit été bâtie & conduite comme
celle de Schoenbrunn. Il èft vrai qu’ il y auroit eu
moins d’orangers, mais ces orangers euffent annuellement
fourni plus de fleurs que ceux qui
exifterrt en ce moment.
Pour conftruire une Orangerie de ce genre ,
i de quelque longueur qu’elle foit, mais n’ayant que
i douze à quinze pieds de large, c’eft-à-dire, ne
! devant contenir que deux rangées d’orangers, on
! défoncera le fol de fix pieds ; on conftruira le mur
de derrière de dix pieds plus haut que' la partie
antérieure de ceux des côtés ; fur le devant, excepté
l’ouverture pour la porte, il y en aura un
de deux à trois pieds de haut; fur ce mur s’élèveront
des montans en bois , de douze à quinze
pieds de longueur, d’ un pied carré d’épaiffeur,
efpacés de fix pieds, qui fe fixeront par le bas dans
des trous creufés dans la pierre ; & par le haut ,
dans des mortaifes creufées dans une fablière , ou
poutre, de même grofleur, .& de la longueur de
l’Orangerie. Deux traverfes feront pofées parallèlement
à la fablière, (avoir, une au milieu &
. une contre le mur de derrière ; & les murs de cô-
| tés, qui font coupés obliquement à leur Commet *
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