
produ&ive , on ne fème généralement l’indigo que
dans les lieux qui ne lui conviennent pas 3 c eft-à-
dire 3 que dans ceux qui font trop forts ou trop
légers pour elle. Dans les premiers , l’indigo eft plus
vigoureux, mais donne moins de fécule.
Des abris naturels ou artificiels contre les grands ;
vents font toujours avantageux a la croiffance de
l’ indigo, & en conféquence on doit préférer de
le femer fur le bord des bois, dans les vallons , &
lorfqu’on ne le peut pas 3 l’entourer d'une filière
de rofcaux ou autres grandes plantes d’une rapide-
croifiance, plantes fi communes entre les tropiques.
En général, on néglige trop la plantation des
haies dans nos colonies, où elles font fi faciles &
fi économiques à établir, puifqu’ il fuffit de mettre
des branches dans des trous. Voyei Boutures g*
Haie. s ,
Très-rarement on fume les terreins deltines a
porter de l’indigo, quoique cela devienne fou-
vent néceffaire, & qu’on puiffe le faire aifément
en mettant parquer delfus les chevaux, les mulets j
& le s vaches, ou en y apportant les fanes de cette
immenfité de grandes plantes vivaces qui croifient
dans les fieux non cultivés, furtout dans les marais.
J’ ai pu juger en Caroline, où la végétation n’eft
pas cependant fi aélive quYSaint-Domingue, de
la quantité de produits agricoles qui feroient la
fuite de cette pratique. M bsH Mar a is .
Dans aucune des colonies où on cultive l’indigo,
on ne connoît les bons effets des amande-
mens ; ainfi on laifie perdre les cendres qui proviennent
de la deftruétion du bois, au fieu de les
répandre fur les terreins anciennement cultivés,
pour ranimer leur force végétative ; ainfi on n’y
fait aucun ufage de la chaux , de la marne , des fables
des bords de la mer, &c.
Les cultivateurs d’indigo prétendent que les
labours à la charue ne font pas convenables, qu’ il
faut leur préférer ceux à la houe. Les raifons
qu’ ils donnent pour faire ^valoir cette opinion
font fi vagues, qu’ on ne peut croire qu’elles foient
fondées; mais il eft de fait que partout on n’emploie
que ce dernier moyen.
.Dans les pays chauds , où le foleil defïeche rapidement
être enlevées que par un défoncement de deux pieds
au moins, racines dont beaucoup pouffent des
rejetons ; de forte qu’une plantation d’ indigo,
dans ce cas , eft un fouillis inextricable^ : ce n’ eft
quaprès trois à quatre ans de culture qu’elle commence
la-terre , & où , pendant l'é té , il feforme,
journellement des orages accompagnés de torvens ;
d’eau qui l’entraînent, il faut faire les labours tres-
peu profonds fi on ne veut pas l’amener à un état
certain d’ infertilité; ainfi, quoique l’ indigo ait
une racine pivotante affez longue, on ne fait que
gratter la furface du fol ou on doit le femer,
c’eft-à-dire qu’on lui donne plutôt un binage
qu’ un labour.
. . Comme fouvent, ainfi que je I ai dit plus haut,
on fème l’ indigo fur les défrichis de bois , on
laide les fouches des grands arbres qui feroient
trop longues & trop çoûteufts à arracher; on
îailfe également en terre toutes les petites racines
des. arbriffeaux & des arbuftes, qui ne pourroient
à s’approprier par la pourriture des fouches
& des racines.
Quoique l’ indigo foit un arbufte, on dedans
l’ ufage de le femer tous les ans , parce qu’ôn a
remarqué que les jeunes pieds fourniffent, comme
cela doit être , des feuilles plus grandes & plus
nombreufes. , '
Après que le terrein a été débarraffé des mau-
vaifes herbes qu’ il contenoit, & labouré , comme
il a été dit plus haut, on le rabotte, c’ eft-à-dire,
1 qu’on le ratifie avec une douve de tonneau emmanchée
à un long bâton pour unir fa furface, puis
on fème. ^ . • Y
A Saint-Domingue on fème l’indigo depuis no^
vembre jufqü’ en mai, immédiatement après des
pluies. Dans la partie. feptentrionale on le fait en
novembre oru décembre , époque ou il tombe des
pluies amenées par les vents du nord. Dans la partie
fud il faut attendre mars & avril, époque des
pluies d’orage. Lorfqu’ il eft pqflible d irriguer,^on
doit toujours le femer de bonne heure, parce qu on
gagne beaucoup à le faire*
C ’eft dans de petites foffes de quatre pouces de
largeur, de deux pouces de profondeur, écartées
de fix à huit pouces, foffes.faites an moyen d’ un
feul coup de houe par des nègres rangés en ligne ,
que d’autres nègres dépofent huit à dix graines
d’indigo que d’autres nègres recouvrent avec le
rabot. . Y *
Il faut faire en forte que les femis d indigo fe
faffent ides intervalles fuffifans pour que les récoltes
puilfent être fuccèffives, carrrien ne nuitplus<aux
opérations qui fui vent ces récoltes * qu une trop
forte coupe à la fois. Cette confideration oblige
fouvent ;de femer avant la pluie, quoiqu’on rif-
que une non-réuffite complète fi elle ne vient
pas promptement, les graines fe racorniffant en
terre. \ • . n '
La graine la plus nouvelle doit etre prererée ;
cependant celle dé deux ou trois ans leve encore
en partie. Comme il y en a fouvent parmi beaucoup
qui n’eft pas arrivée au degré de maturité
convenable, il devient prefque toujours néceffaire
de la trier par des vannages répétés, ou d’en mettre
en terre plus qu’il ne faudroit fi elle etoit toute
bonne. Les graines qui ne font pas affez mures
lorsqu’ elles lèvent, le font plus tard que les autres;
ce qui met parmi les tiges une inégalité de végétation,
des mauvais réfultats defquels on s apperçoit
lors delà fabrication de la fécule, comme je le
dirai plus bas.
Lorfque les circonftances font favorables, &
qu’on n’a employé que de la graine bien mûre, elle
lève en trois ou quatre jours. Autant de tems après
k il faut faire un farclage, & .le répéter tous,les
quinze jours, jufqu'à ce que les pieds d’indigo
foient affez forts pour empêcher les mauvâifes herbes
de repouffer. Il femble qu’on devroit plutôt
faire des binages que des farclages, puifqu’ils ne
feroient guère plus pénibles, & qu’ils produiroient
deux fois plus d’effet. (F b yq Bin ag e .) Plus les farclages
font nombreux & bien faits, &-p!us on retire
d’ indigo, & plus cet indigo eft fupér-ieur; lés
herbes étrangères empêchant, foit par leur ombre',
foit par leur voracité, l’indigo de fe développer
autant qu’il l’auroit pu fans elles, & portant
dans la cuve des principes nuifibies à la fabrication
de la fécule. Si on a la poflibilité d’irriguer
on le fera, fi cela eft jugé néceffaire, lorfque l’ indigo
fera arrivé à un pied de haut, mais modérément,
car trop d’humidité nuit à la formation de.
| la matière féculente dans les feuilles, d
. L ’indigâ a à craindre la féchereffe, les vents
brûlans & impétueux, les pluies trop fortes ou
trop prolongées^, les chenilles ■ & autres infeâes.
On ne peut s’oppofer aux effets de la féchereffe
que par dés irrigations, comme je l’ai déjà obfervé..
Un champ d’indigo qui les relient donne fort peu
de feuilles,; & le nombre de fes coupes eft diminué’;
aufli eft-ce après la pluie que foupirént les
cultivateurs.
Les vents’ brûlans deffèchent quelquefois les
feuilles de l’indigo, foit en' totalité, foit en partie
(celles du fommet principalement, comme plusten-,
dres); ils agiffeht fur un champ'entier, ou feulement
fur quelques parties d’un champ. Des abris,
furtout des haies élevées, font le feul moyen de le
garantir de éët inconvénient. ( Voye^ Brûlure.)
Un foleil v if après une pluie caiife quelquefois des
effets fëmblables. L’indigo brûlé doit être coupé
de fuite, car on ne doit rien en efpérer, & ùne nouvelle
pouffe peut dédommager, ên partie , de fa
récolte fi le tems eft favorable*-' ’ * î r -
Des vents très-violens, comme il y en a fouvent
dans nos colonies, déchirent les feuilles de l’in- .
digo , caftent fes tigesj, enfin nuifent plus ou moins? j
à la récolte ; dont ils diminuent le produit. S’il eft!
près du moment où il peut être employé, il. faut le -
couper de fuite. C ’eft piincipalement pour ;Iej ga-‘
rantir des effets de ces vents, que j’ ai dit qu’il fal-i
doit le feiper dans dep lieux abri tes par des montagnes
ou des.bois. Quoique les haies foient moins
efficaces, elles peuvent cependant être encore
utilqs.
Les pluies continues femblent faire profpérer
1 indigo, mais elles empêchent fa fécule de fe former;
de forte que, quelqu’abondantes que foient
fes feuilles , fes produits font.'moindres; Il n’y a
point de-poffibilité d’ empêcher leurs effets j'en
dirai autant du déehauffement des pieds, de la
rupture des- tiges, qui font les effets des ;pluies
qui tombent a la fuite des orages pluies de la
violence defquelles on ne fe fait qu’une idée fort .
incomplète, en. Europe.. :
Trois efpèces d’infectes dévorent l ’indigo dans
nos colonies.
La première eft la chenille d’un bombyee. Elle
forme une toile fur les tiges, qui fe charge de ro-
fée pendant la nuit, rofée dont les goûtes fo n t ,
au moment où le foleil paroît, l’office de lentilles
qui brûlent les tiges. On l'appelle le ver brûlant.
La fécondé porte le nom de rouleux. Il eft probable
que c ’eft la chenille d’ une pyrale. Ce font
les rejetons qu’ il attaque particuliérement, 8c
qu’il ronge pendant toute la belle faifon.
La troifième eft, d’après l’obfervation de Pa-
lifot-Beauvois, la chenille d’un papillon blanc,
qui paroît fubitement lorfquelle, eft déjà fort
groffe, & qui met à nu les champs d’indigo en
deux ou trois jours.
J'ai: anciennement fait beaucoup de démarches
pour obtenir ces infe&es de Saint-Domingue
fans pouvoir réuffir ; de forte que je ne puis les
indiquer par leur nom.
Beaucoup de moyens ont été propofés pour
arrêter les ravages de ces infe&es , mais la plupart
ne remploient pas leur objet. Les deux meilleurs
& les feuls que je citerai, font, i* -d e couper
l’indigo (cela s’applique feulement au dernier)
& de le fabriquer : ce moyen eft d’autant plus praticable,
que c ’eft lorfque l’ indigo eft près d’être
récolté , que cet infe&e paroît ; 2°. de mettre dans
le champ un troupeau de dindons ou de cochons
affamés. M. Dé tour, qui a cultivé long-tems
l’indigo, préfère les dindons comme leur ayant
toujours vu remplir l’objet qu’on avoir en vue. J»
ne puis qu’applaudir à fon avis.
Le moment où l’indigo doit être coupé, eft indiqué.
par le commencement du développement
de fes premières fleurs. En effet, l’ex-périence x
prouvé-qu’avant là formation des boutons , &
après leur épanouiffèment complet, les feuilles
contenoient moins de fécule. La couleur des feuilles
eft aufli un indice de leur maturité; elle eft vive
& foncée. Lorfqu’ on mêle l’indigo franc avec l’indigo
batard,.c ’ eft la fl’oraifon du premier, laquelle
devancé.l’autre, qui décide. Généralement c ’eft à
Saint-Domingue, dans le cours du troifième mois,
qu’on en fait la récolte.^ En Caroline.* où- j ’ai vu
cultiver cette plante, c’eft dans le cours du quatrième
mois, parce que la- chaleur y eft moins-
confidérable.
On emploie une faucille bien tranchante pour
couper l’indigo à un ou deux pouèY^de terre.
Les tiges fe mettent fur des toiles c a r i fé , nom:-
mées balandras3 & font de fiiit-e portées à-l’atelier
foit fur la tête des nègres, foit fur dès charetres.,*
La première coupe de l'indigo eft fui vie d’une
fécondé fix à fept femaines après-, & de plus ou
moins- d ’autres, félon le terrain. Dans les terreins
médiocres ou épuifés, on détruit la plantation à
Ja fin de la première année ;, dans ceux qui font
'neufs (.nouvellement défrichés ),on la iaiffe fubliffer
deux-ans..