
notarié de la nourriture & à la méchanceté des
vieux mâles, mais la vigueur des reproductions
n’en eft-elle pas affaiblie?
Là ponte des Oies a lieu de très-bonne heure,
c ’eft-à-dire, immédiatement après le dégel. Dès
qu’on s’apperçoit qu’elle va commencer, il faut
renouveler la litière de leur toit ( c ’eft le nom du
bâtiment où elles couchent) , y conftruire fur les
côtés & au fond autant de cafés en planches qu’il y
a de femelles, & les tenir renfermées jufqu’à ce
que toutes aient pondu au moins un oeuf. Ce
confeil, de renouveler leur litière, eft fondé fur
l’ inconvénient de les troubler pendant la couvai-
fon ; celui de conftruire des cafés, fur l’utüité que
chaque couveufe foit ifolée, & ne puifle voir fes
voifines ; celui de les renfermer, fur ledefir quelles
ont généralement de fe cacher pour pondre, &
fur l’obfervation qu’ elles continuent de le faire là
oii elles ont commencé.
Si les Oies femelles ne font point interrompues
par un defïr trop-'précoce de couver, elles peu-;
vent pondre jufqu’à cinquante oeufs > mais ordinairement
elles ne vont que jufqu’à la moitié de
ce nombre, encore trop confidérable , puifque
chacune n’en peut couver que quinze, terme
moyen.
- Les oeufs d’O le , comme nourriture, font peu
eftimés j mais on les emploie avantageufememt
dans la préparation de la pâtifferie : il s’en vend
rarement dans les viîfes.
11 eft toujours defirable que la couvaifon ait
lieu de bonne heure, & en conféquence on doit
ne pas chercher à prolonger la ponte par les
moyens employés pour les P o u l e s . Voye^ ce
mot.
On juge que les Oies femelles font au moment
de couver, lorfqu’ elles gardent le nid, après la
p onte, plus long-tems que de coutume, &
qu’elles s’en rapprochent fouvent dans le cours
de la journée. Alors il faut les inciter à s’y placer
à demeure, en mettant auprès d’elles deux vafes,
l ’un dans lequel on met de la nourriture, & l’autre
de. l’ eau. Cette nourriture doit être fubftantielle,
c ’eft: - à - dire, de farine d’orge ou de maïs, du
pain d’avoine , des pommes de terre, des pois,
ou des lupins bouillis, &c.
Lorfqu’on met couver les Oies dans un lieu différent
de celui où elles ont pondu, comme on
le fait dans tant d’endroits, on rifque quelles
fe refufent à refter fur leur nid , ou qu’après y
être reftées quelque tems, elles le quittent.
Dans quelques cantons , on eftime qu’il vaut
mieux faire couver les oeufs d’Oie par des poules,
& notre Olivier de Serre eft de cet avis, mais quand
on confidère qu’on ne peut guère en mettre que fix
& même que cinq fous chaque poule, &r qu’ ils n’ y
trouvent pas affez de chaleur pour peu que le
tems foit froid & humide, on eft déterminé à
croire qu’ il vaut mieux fuivre la voie de la nature.
Dans d’autres cantons, 6n fait couver ces
oeufs par des dindes. Là , l’inconvénient précité ne peut être mis en avant ; mais comme les dindes
font plus délirâtes & d’un débit plus avantageux
que les Oies , Il n’eft pas économique de les employer
à cet objet, lorfqu on peut faire autrement.
Une fois .fixées fur leurs oeufs, les Oies ne doivent
plus être touchées. Il faut les laifier dans
le plus grand ifolement poflible, c ’eft à-dire
empêcher les enfans, les chiens, les chats &
même les individus de leur efpèce , excepté peut-
être les mâles, d’entrer dans le lieu où elles
couvent. La feule perfonnékjui leur apporte cha-|
que jour à boire & à manger, & qu’elles con-
noiffent, aura cette prérogative} mais elle fe tardera
bien de prendre les couveufes de force pour
les faire manger , compte on le pratique en quelques
lieux, ear il en peut réfultér des inconyé-
niens fans aucun avantage.
L’incubation des Oies dure trente jours. Il eft
extrêmement fréquent qu’il y ait une partie des
oeufs inféconds» c’eft pourquoi il eft bon de vifuer !
tous ceux de chaque couvée après le vingtième ■
jour , pour , en les feçouànt légèrement, juger,
par le bruit d’eau qu’ils rendent, ceux qui ne contiennent
pas de petit & les jeter fur le fumier.
Les petits premiers nés font enlevés à leur mère
par quelques femmes, & mis dans un endroit
chaud jufqu’ à la naiffance des autres } mais cette
précaution , motivée fur ce que quelquefois la
mère abandonne le nid lorfqu elle en voit quel-j
qufcs-uns , & occafionne ainii la mort de ceux qui
ne font pas encore fortis, eft fujèté à de graves
inconvénient, tels que la mort de ces premiers nés,
par fuite de leur refroidiffement, ou le refus dej
la mère de les reconnoître lorfqu’on les^lui rend.
Il en eft de même de l’ufage, fi commun dans
certains pays , de donner à une feule mère,
outre fes petits, ceux d’une on de deux autres,
dont plusieurs des oeufs fe font trouvés inféconds
ou fe font caftes, pour déterminer cesj
dernières à couver de nouveau. D’ailleurs, une
fécondé couvée épuife complètement les Oies, &!
il n’eft pas rare que leur mort en foit la fuite.
C ’eft ordinairement en mai que fe terminent les
naiffances des oifons,. les couvées plus tardives]
réuffiffant mal à caufè des chaleurs.
La première nourriture des oifons eft de l’orge
ou du maïs moulu , détrempé dans du lait&j
mêlé avec des feuilles de laitue ou de bette,!
ou des pommes de terre , des raves cuites, Sic. A
hachées menu. Le pain trempé leur eft encorel
meilleur, comme plus facile à digérer & plus]
fubftantiel.
S’il fait chàud, on peut Lifter fortir les oifons J
deux ou trois jours après leur naiffance, pendant!
quelques heures le matin & le foir. La trop grandi
ardeur du foleil, ainfi que la pluie & le
font dans le cas de les tuer. Dans ce premier â g e ,
Ifaiit veiller fur les fouines, les belettes, & fur-
toutles gros , rats ( mus decumanus ) , qui les tuent
pour les manger.
Très-foûvent les mères écrafent leurs petits
rendant les- cinq à fix premiers jours après leur
[ortiede l’oeuf. Cet inconvénient, qui tient à la
largeur des pieds & à la forte de bêtife de cet oi-
fèau, peut être difficilement é v ité , & favorife
l’opinion de ceux qui veulent qu’on faffe couver
les oeufs d’Oie par des poules.
A mefure que les oifons grandiffent, on augmente
leur nourriture } mais vers deux mois, on
peut fe difpenfer de la leur donner de choix. Leur
voracité fait qu’ils fe contentent alors des herbes
qu’ils paiftent, des infeCtes qu’ils faififfent, des légumes
cuits qu’on leur donne , de fon, de graines
de toute efpèce. Toutes les couvées fe réunifient
& ne forment qu’ un feul troupeau qui rôde feul
autour dé la maifon pendant toute la journée,
qui rentre le foir* pour manger encore ce qu’on
lui à deftiné, & fe coucher fous le toit qui leur
eft préparé.
• ll’eft très-rare que la première mue, fi fatale'
aux poulets & furtout aux dindoneàux, foit la
cauiede la mort de beaucoup d’oifôns, cependant,
s’il fait froid & s’il pleut lorfqu’elle commence,
il elt prudent de les empêcher de fortir pendant
quelques jours, & dedeS remettre à la nourriture;
de leur première enfance. S’il s’en trouve de plus
trilles que les autres , on leur donnera un peu de
vin chaud.
Lorfqu’ on fpécule pour l’élève des Oi,es , outre J
la fille de baffe-cour chargée de leur 'direction à la
maifon, par chaque centaine il faut avoir une
autre petite fille ou un jeune garçon prépofé
uniquement, lorfqu’eUes font parvenues à deux
mois d’âge , à les mener paître au l o i n d ’abord
dans les terréins en friche &• enfuite dans les
prés nouvellement fauchés, dans les champs nouvellement
moiffonnés. Le conducteur eft armé;
d’une longue houflïne, avec laquelle il dirige la
marche des oifons : quelquefois il eft aidé par un
chien à ce dreffé. Dans ces couifes, dont le lieu
varie chaque jour, les jeunes Oies fe difpofent a
l’engrais par l’abondance des fubfiftances en herbes,
en infeétes & furtout en graines quelles trouvent..
On'ne doit point laiffer aller les Oies dans les
P^és pendant la pouffe des herbes , parce qu’elles
, Porteraient préjudice à cette pouffe, en mangeant
] les bourgeons & en y dépofant leurs excrémens,
<lui nuifent par l’excès de fertilité dont ils font
pourvus, & par l’odeur qu’ils communiquent à 1 herbe. On ne doit pas non plus les laifier aller
dans les champs femés en froment ou autres céréales
avant la moiflon, parles ravages qu’elles
y occafionne roi en t > aimant beaucoup les feuilles
r & les graines de ces plantes. Dans les pays où
on élève beaucoup d’Oies; les propriétés font
entourées de haies vives foigneufement entre-,
tenues, & pour, les empêcher de s'y introduire
par les ouvertures que ces haies peuvent offrir, on
paffe une de leurs plumes de i’aiie à travers leurs
narines, plume à laquelle on conferve toute la
longueur : ç’eft un fort fingulier fpeétacle que de
voir dès troupeaux d’Oies ainfi décorées.
Les cultivateurs de certains cantons de la
France fe difpenfent d’élever des Oies pendant
les deux premiers mois de leur v ie , penfant qu’ il
eft plus économique pour eux de les acheter à
cette époque pour les engraiflèr. Ce font principalement
ceux des grandes plaines à b lé , comme
la Beauce, parce qu’en envoyant. enfuite journellement
ces Oies parcourir leurs chaumes après
la moilion, elles s’engraifftnt fans-dépenfe au
moyen du grain qu’elles ramaffent, & qui auroic
été perdu fans elles.
Il arrive quelquefois, pendant l ’hiver, que des
Oies fauvages s'abattent au milieu d'un troupeau
d'Oies domefliques , & les emmènent avec elies,
non pour .lo n g - rem sp a rc e que ces dernières ,
n’ayant pas l’habitude du vol , ne peuvent aller
loin, mais aflez de tems cependant pour qu'elles
I foient perdues pour le propriétaire. Afin d’eviter
cet événement, on doit leur ôter à cette époque
deux ou trois des grandes plumes de l'aile.
Les Oies deftinées à fervir à la reproduction
n’ ayant befoin que d’être entretenues, ne font
plus nourries extraordinairement, dès que les
autres font renfermées pour l’engrais } elles trouvent
, jufqu’aux gelées., fuffifamment à vivre dans
la campagne. Mais à cette époque, il faut recommencer
à les nourrir à la maifon matin & foir, &
abondamment, afin quelles foient en bon état de
chair , comme on dit vulgairement, lorfqu’elles
feront dans le cas de pondre par fuite de l’abaiffe-
ment de la température. Voye£, pour la théorie,
au mot P o u l e . .
Comme les.Oies.font, à celles près réfervées
pour la reproduction, mangées avant la fin de
l'hiver fuivanc, & que ce n’eft: qu’au printetns
que les jeunes éprouvent,’ pour la première fo is ,
. les feux de.l'amour, on regarde partout comme
inutile de leur faire fubir la caftration. ;
Ainfi que je l’ ai déjà obfervé-, ce font les
pères & enfuite les mères, qui font les premières
facrifiées} mais comme leur chaire eft coriace ,
elles font réfervées le plus fouvent pour régaler
les faucheurs, les moiffonneurs & autres ouvriers
du même genre , lorsqu'ils ont fini le travail pour
lequel ils avoient été appelés.
On vend à deux mois les oifons les premiers
nés, & ce par principe d’économie, c’eft à-dire,
parce que la faifon de l’engrais étant encore éloignée
, ils coûteroient trop fi on attendoit à cette
époque : ce font les habitans des villes qui les
achètent.
[ Les jeunes Oies font fujètes à deux maladies ,