
enfin du plus ou moins d’économie tpi’on vçuu
mettre dans ia plantation ; économie; qui peut être'
commandée par plufieurs caufes, telles que le haut
prix & la rareté de la denrée, & rétendue du ter-
rein qu’on veut planter. 11 y a donc à cet égard
tant de variantes, quJil eft difficile de prononcer
pofitivement. Nous nous bornerons à dire en général
que , i° . dans les bons terreins on peut
économifer fur la femence, furtout quant à la
grofieur des tubercules; i° . que les pieds peuvent
y être efpacés davantage,.par la raifon que leur
fane y acquérant plus détendue, -ils courroient
rifque de s’étouffer mutuellement, s’ils étoietvt
trop rapprochés i $°. que les pieds les plus efpacés
font ceux qui donnent les plus beaux & les meilleurs
tubercules ; 40. que d’autre part, cet efpa-
cemenc doit être limité, la force du terrein lui
permettant de fournir à la nourriture d’un plus
grand nombre de plantes ; j ° . que dans les terreins
maigres on s’expofe à perdre du terrein lî l’on ef-
pàce trop, tout comme on s’expofe à n’avoir que
de petits tubercules lorfqu’on n’efpace pas allez 5 6°. que les variétés naturellement petites ou bien
garnies d’yeux exigent dans chaque trou moins de
femences que les autres, comme, d’un autre côté ,
elles peuvent être plus rapprochées que-les variétés
vigoureufes,ce qui fait que les unes exigeant
un plus grand nombre de tubercules,, les autres
en emploient cependant un plus gros volume,
d’où il réfulte entre les foihles & les vigoureufcs
une efpèce de compenfation ; 70. qu’enfin la plantation
à la charrue eft celle qui en emploie le
moins : toutes ces confidérations, toutes ces cir-
conftances peuvent faire varier la quantité de fe-
mehce à employer depuis trois jufqu’ à douze fe-
tiers de Paris par arpent ou demi-he&are} le terme
moyen feroit donc de fept à huit fetiers.
Epoque de la plantation.
Encore ic i, mêmes réflexions fur l’influence du
fol &d u climat , fur la localité qu’on habite & fur
le but qu’on fe propofe, ainfi que fur la variété que
l ’on plante. C e n’eft point ici le lieu d’entrer dans
tous ces détails} nous les renverrons au moment
où nous traiterons des diverfes variétés & du
choix qu’on doit en faire; nous nous contenterons
d’expolèr ici les généralités.
On ne doit point fe preffer de planter, tant
qu’il eft à craindre que les tubercules ne gèlent
en terre} d’ailleurs, leurs germes font long-tems à
fortrr tant que la faifon eft froidé, & on remarque
très-peu de différence entre ceux plantés un
mois plus tôt ou plus tard. Les gelées planches du
printems attaquent leurs pouffes fans les fairé périr
, mais les fatiguent & les retardent d’autant.
On plante dans le climat de Paris depuis la fia de
mars jufqu’ à la fin de mai, mais le milieu du mois
d’avril eft la véritable faifon. Il faut planter plus
tôt dans les terreins feçs & légers que dans les
terreins froids & humides; dans les premiers* les
tubercules dorment quelquefois, par l’effet de la
féchereffe , & dans les derniers ils languiffent inutilement,
ou même pourriffent. Si l’on pouvoit,
à la maifon, empêcher leur germination ou ménager
les germes dans la plantation, il n’y auroit
aucun inconvénient à la retarder jufqu’an mois de
mai. Il eft poffible que, par une plantation tardive,
le moment de la grande fructification des tubercules
fe trouve éviter les grandes chaleurs de
l’ été. On cite plufieurs faitsquitendroient à prouver
que des plantations retardées, même jufqu’enjuillec
& a oû t, n’en font pas moins fruCtueufes} maisileft
difficile de le croire, & fi cela eft arrivé, on doit
l’ attribuer à quelques circonftances particulières,
& l’on ne peut en tirer des conféquences générales.
Des diverfes méthodes de plantation.
Plufieurs méthodes de plantation & de culture
font ufitées ; plufieurs auffi ont été propofées. Gn
peut les divifer en deux claffes, celles à bras &
celles à la charrue. Il feroit fort inutile de les ex-
pofer toutes} nous nous bornerons à celles confa-
créespar l’ufage , & reconnues comme préférables
par les cultivateurs les plus diflingués.
Première méthode, qui eji aujfi la plus Jtmple. Le
terrein ayant été préparé par les labours néceffaires,
& bien uni par un ou plufieurs herfages, le laboureur
commence à ouvrir une raie la plus droite
poffible} une ou deux perfonnes le furvent, & placent
les tubercules à la fuite de h charrue, à un
pied & demi ou deux pieds dé diftance l’un de
l’autre, absolument au pied de la raie qu’elle vient
de renverfer, afin qu’en repaffant, les pieds des
chevaux ne les dérangent point} on pratique en-
fuite foit une, foit deux autres raies, dans lesquelles
on ne met rien,& dont la première doit recouvrir
fuffifamment les tubercules} le champ eft
enfuice herfé pour recombler les raies. Il eft bon
d’y jeter un coup d’oe il, pour voir fi tous font bien
enterrés, & enterrer ceux qui ne le feroientpas.
Cette méthode eft fufceptible de quelques variantes,
& auffi de quelques p e r f e c t i o n n e mens :
on peut, comme nous l’ avons dit plus haut » planter
de deux ou de trois raies l’une, fuivant que l’on
veut efpacer les tubercules. Si la pièce de terre n’ a
point été fumée d’avance, & que l ’on foit obligé
d’ économifer les engrais, on peut faire fuivre les
planteurs par un ouvrier chargé d’un panier de fumier
pour en jeter une poignée fur chaque tubercule
feulement; enfin, en obfervant de placer tes
tubercules à une égale diftance, de forte qu’ils ne
fe trouvent point vis-à-vis les uns des autres, mais
en échiquier, cette régularité, qui tourne au profit
de leur plus égale végétation, permet auffi de
les cultiver dans tous les fens & de les butter avec
h charrue ; mais cela exige beaucoup d’attemion&
des ouvriers plus intelligens que ceux qu’on emploie
ordinairement. Il paroît que tel eft le procédé
de M. Fellcmberg.
Deuxieme méthode employée par feu M. Crêté de
Palluel. Cette méthode, employée par lui avec
beaucoup de fuccès, confifte à renverfer, à l’aide
de la charrue, trois raies l’ une fur l’autre, en
forme de fillon , ce qui élève le terrein & fait des
ados d’environ trois pieds de large. Le fond de
chaque fiilon eft fumé & enfuite laboure à la
bêche} c’eft dans ce fond & fur ce fumier qu’on
met les tubercules avec la houe, à un pied de diftance
les uns des autres ; de cette manière la plantation
préfente des rangées éloignées de trois pieds,
qu’ il eft fort aifé de cultiver avec la charrue.
Troifieme méthode i plantation ~a bras. Le terrein
ayant été préparé convenablement, on ouvre avec
la houe plufieurs rangs de trous d’environ fix pouces
de profondeur fur quinze pouces de.largeur,
& éloignés les uns des autres de deux bu trois
pieds } une fécondé rangée, puis une troifieme, fe
pratiquent, foit en même tems, par un ou plufieurs
autres ouvriers, foit par le même, lorlqu’ il a fini
la première, ayant foin que les trous de chaque
rangée fe trouvent précisément en face de l’efpace
qui fépare les trous de la précédente, & ainli de
fuite. On y place les tubercules, qu’on recouvre
avec une partie feulement de la terrre tirée du trou :
cette pratique s’exécute avec une grande prefteffe
& une grande régularité par ceux qui y font habitués
} elle elt le plus généralement en ufage chez les
petits cultivateurs & chez les vignerons ; elle eft
très - ufitée aux environs de Paris. Les ouvriers
s ’y font ordinairement accompagner par leurs
femmes & leurs enfans, qui placent les tubercules
dans les trous & les recouvrent, à moins que l’ouvrier
ne le faffe lui-même immédiatement avec fa
dernière houée de terre, fans être obligé d’y revenir.
Les Irlandais ont une méthode qui diffère de
celle-ci, en ce qu’ ils font des trous d’un pied de
profondeur fur deux de largeur ; ils rempliffent
ces trous de fumier, qu’ils foulent exactement.
Sur ce fumier ils placent les tubercules, qu’ ils recouvrent
d’une partie de la terre tirée du trou ;
mais cela confomme prodigieufement d’engrais, &
ne peut convenir qu’ à celui qui en a beaucoup, &
qui n’a au contraire que peu de terrein. C ’eft , il
eft v rai, le moyen d’obtenir un très-grand produit
& de tirer d’un très-petit terrein le plus grand
parti poffible. On fait que la Pomme de terre eft
la bafe de la nourriture aes Irlandais.
Telles font les principales méthodes fuivies pour
la plantation : routes fuppofent que .les pièces de
terre plantées font confacrées à elle feule ; mais
en petite culture elle peut s’affocier à plufieurs
autres végétaux , & même avec beaucoup d’ avantages
^ d’après le principe qu’ayant chacun leur
manière de fe nourrir particulière , ils fe nutfent
moins étant entre-mêlés, & que leur produit en eft
d’autant plus grand} auffi cette culture eft comf
munément pratiquée dans les vignes , dans les
I champs de maïs , de fe v e s , de ban..ocs , & ç , ,
1 dans les jeunes bois & même dans les taillis , au
profit defqueis tournent les labours de les engrais
donnés à la Pomme de terre.
Fafons a donner, binage, buttage, &c. , foit a bras ,
foit a la charrue.
La Pomme de terre exige pendant la durée de
fa végétation, qui varie de trois à fix & fepe mois,
une culture allez Poignée. L’économie en cette
partie feroit en général affez mal entendue : il eft
cependant des cas particuliers que nous ferons
connoître, où l’on peut & l ’on doit épargneras façons
; celles qu’il faut lui donner s’exécutent ou
a bras ou à la charrue, fouvent de.s deux manières,.
11 feroit à defirer fans doute que toutes puffenc
toujours fe faire à la charrue} il en réfuîteroit
plufieurs avantages inappréciables, économie de
tems & d’argent, & faculté d’en planter une plus
grande quantité de terrein. Malheureusement cela
eft impoffible, au moins quant à préfent ; cela
tient à l’imperfe&ion de notre agriculture, foie
en inftrumens de travail, foit à caufe de la mal-
adrelTe & de l’incurie des journaliers , lorfque ia
nature du terreiri & du climat ne s’y oppofe pas
elle-même. D ’ailleurs, il ne faut pas fe diffimuler
que ces obilacles mêmes, fuppofés vaincus, rien
ne pourroit réellement remplacer complètement
le travail des bras; & malgré tous les exemples
contraires qu’on pourroit c ite r , malgré toutes les
exceptions qu’on pourroit alléguer, il fera toujours
vrai de dire que plus & mieux la Pomme de terre
eft travaillée, plus elle produit.
Nous allons d’abord expofer la méthode de petite
culture } c’eft celle qui eft pratiquée par les
vignerons, par les petits cultivateurs, par les petits
propriétaires; c’eftla plus coûceufe, mais c ’eft
la plus productive : c'eft donc la meilleure pour
ceux qui peuvent l’employer. Nous la donnerons
dans toute fon étendue ; il fera facile de revenir
du plus compofé au plus fimple, puifqu’ il ne fera
queliion alors que de fupprimerce qui ne s y trouvera
pas abfolument indifpenfable,.
Auffiiôc que la plante a acquis quelques pouces
de hauteur, auffitôt même qu’il eft poffible de la
diftinguer.des herbesparafites qui devancent quelquefois
fa crue, il faut lui donner une façon; cette
opération, qu’on appelle f arc loge ou. plutôt binage,
s’exécute ordinairement avec la binette ou avec .la
houe plate, qui font pour cela les meilleurs inftrumens.
Néanmoins, dans un terrein léger, ou du.
moins très-ameubli, on peut employer la ratif-
foire, dont J’ufage eft moins fatiguant pour ceux
qui ne font point accoutumés à fe courber, mais
qui, fi elle débite affez promptement l’ouvrage
ne Je fait jamais auffi bon & ne peut pas abfolument
s’employer dans les terreins durs & pierreux, pour
lefquels on préfère la pioche oy la houe fourchue.