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fe livrer à des pratiques d’une abfurde ftiperftition,
avant <îu *‘s arrivent, il le preffe de rama fier fes
Joins , fes grains coupés, fes fruits mûrs , &c. ;
pendant qu’ils durent, il parcourt fes champs , la
bêche à la main, pour détourner les eaux, pour les
empêcher d'entraîner ceux de fes foins & de fes
gra»ns qu’il n’a pas pu rentrer ; quand ils font
paffes, il comble les rigoles faites par ces mêmes
eaux , il y ième des graines propres à le dédommager
des produits perdus 3 il rétablit l’ordonnance
de fes vignes 3 de fes arbres fruitiers, répare de
fuite fes toits , fes chemins, 8cc.
Les travaux à faire dans les jardins d’agrément,
après l’Orage , furtout s’ils font en pente, font
fouvent crès-difpendieux ; ils le font plus dans
ceux dits français 3 dont les allées font larges &
droites , 8c ri go u reniement fablées , que dans
ceux dits anglais (payfagers), où les allées font
étroites & courbes. Là , Couvent il faut couper de
fuite les tiges des plantes vivaces rez-terre, &
tailler les arbres fruitiers & les arbres d’agrément
pour leur rendre une apparence fupportable.
Il eft à remarquer que les plantes aquatiques
font plus fenfibles aux Orages que les autres , &
que les poifions affiuent davantage à la furface de
l'eau & mordent plus à l’hameçon à leur approche
& pendant leur durée. ( Bosc, )
ORANGIN ou FAUSSE ORANGE. Voye^
Pepon.
ORANGERIE. Dans l'origine on donnoit ex-
clufivement ce nom aux endroits où on renfermoit
les orangers pendant l’hiver j aujourd’hui on l’ applique
à tout lieu où on met des plantes vivantes
pour les garantir de l’atteinte des gelées : ainfî
tantôt c’eft un bâtiment fait exprès & uniquement
deftiné à cet ob jet, tantôt c’eft une-fai le baffe
de la maifon-, qui ne fert que pendant l’hiver.
Une Orangerie diffère d’une ferre tempérée,
parce qu’elle ne prend de jour que de diftance en
diftance par de larges 8c hautes fenêtres , tandis
que cette dernière eft complètement garnie de
vitres d’un 8c quelquefois de trois côtés, ce qui
lui donne un grand avantage. Voyei Serre.
Au commencement du fîècle dernier, il n’y
avoit encore que les rois 8c les princes qui euffent
des Orangeries j aujourd’hui elles font exceftive-
ment multipliées. ïl eft peu de propriétaires aifés
qui n’en aient. Je dois donc leur confacrer un
article d’ur.e certaine étendue.,
Pour qu’ur.e Orangerie foit bien placée, il faut
qu’elle fe trouve dans le voifinage de la maifon,
allez éloignée des bois 8c des eaux pour que l’humidité
ne l’atteigne pas Le fol fur lequel on l’établit
, quelque fec qu’ il foit naturellement, fera
élevé d'un à deux pieds par des affïfes de pierre à
chaux & à ciment, ou mieux par un lit de même
épaiffeur en laitier de forge, o u , à fon défaut, en
mâche-fer rie charbon eft auffi très-bon.
Une Orangerie qui n’ eft pas à l’expofition du
midi, ou à peu près, ne peut remplir complète-
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ment le but pour lequel elle eft conftruite ; a’mfi j]
faut la lui donner , à moins de caufes infunnoJ
tables.
L à grandeur'd’ une Orangerie varie a u ta n t q j
poffible , puisqu’elle dépend de la q u a n tit é d’objets
qu’on a à y placer , de la fortune du propriétaire
, du local dont on peut difpofer, &c.
La néceffité d’ y entretenir un air fec doit faire
de lire v qu’elle foit très- élevée ; mais fa hau.
teur dépend de celle des plantes qu’on y place, &
d.e leur difpofition fur des gradins. 11 ne faut pas
furtout que les plus, grands arbres touchent fi
partie fupérieure.
En conféquence, une Orangerie deftinée à recevoir
de vieux orangers aura au moins vingt-
cinq pieds d’élévation, 8c celle deftinée à recevoir
des plantes en pots fur des gradins, pourra n'en
avoir que la moitié fans grands inconvéniens. D’après
cela onchoifira, fuivant les circonftances J
fa hauteur enire ces deux extrêmes feulement,
quoiqu’on puifie les dépaffer dans quelques cas,
L e befoin qu’ont en ç p u t tems les plantes de la
lumière, & , pendant l’hiver, du peu de chaleur
dont font pourvus les rayons du foleil, exige que]
les Orangeries foient le moins profondes pofliblej
mais la néceffité d’économifer ne permet pas,
comme c e l a feroit bon, de n’y mettre qu’un ou
au plus deux rangs d’ arbres ; en conféquence, les
meilleures devront avoir en largeur la moitié de
leur hauteur. Cependant, comme il eft des arbres
& des plantes qui perdent leurs feuilles pendant
l’hiver, & que celles-là peuvent f e p a f f e r d’une !
grande lumière , on leur donne le plus communément
en largeur les deux tiers de l e u r hauteur. Il
en eft même qui font auffi larges que hautes,
qui rempliffent fort bien leur deftination.
Quant à la longueur des Orangeries, elle eft en-l
tiéremerit arbitraire j ainfî ce font des confidéraJ
tions de fortune , d’efpace , & c . , qui la 4étermi*|
nent.
Une Orangerie de foixante-douze pieds de long,)
ayant huit fenêtres de cinq pieds de large fur neufl
de hauteur, & ayant au milieu une porte de fix
pieds de large fur douze de hauteur, convient beau*
coup à un propriétaire aifé. Je donne ces dinien-
fions, parce que la fixation de la grandeur des fenêtres
eft difficile à établir. En principe général J
elles doivent être le plus large poffible , puilque
plus il entre de lumière dans l’Orangerie, & pM
les plantes y- profpèrent j mais il ne faut pas que
leur nombre ou leur largeur favorifeTemrée du*
froid dans l’intérieur, ou nuife à l’effet du coup!
d’oeil à l ’extérieur.
On petit conftruire les Orangeries en pierres de,
taille , en moellons ou meulières, en briques, eni
bois. Le plus fouvent c’eft en moellons ou meuH
lières, avec les angles & le tour des fenêtres & dej
la porte en pierres de taille5 cependant les baïquesj
furtout quand elles font vernies à l'extérieurp^l
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«cès de cuiffoti, font préférables, comme étant
|g plus mauvais conducteurs de la chaleur & ne
Contenant point d’humidité. Ç)ans la poflibilité de
choifir, on ne doit donc pas héfiter à les préférer.
Les naurs auront au moins un pied d’épaif-
feur, afin que le froid ne puifie pas facilement les
pénétrer, pour me Cervir de l’expreffion vulgaire.
Lr le derrière , c’eft-à-dire, du côté du nord, il
fera bon d’établir des chambres pour ferrer les outils,
les graines, ou même pour fervir d’habitation
au jardinier , parce que c ’eft de ce côté que
je froid agit le plus conftamment 8c le plus fortement.
Quelquefois on voûte les ferres ; mais 1a dépenfe
de ce genre de conftruétion-, qui fans doute eft le
imeilleur, fait qu’on fe contente le plus fouvent
d’un plancher plafonné. Dans ce cas, il faut que
ice plancher ait également un pied d’épaiffeür, 8c
îque le grenier qui lui eft fupérieur, f i , comme ■ Ion le pratique fouvent, il ne fupporte pas une
fuite de chambres , foit bien clos.
Si j’ avois une Orangerie à conftruire pour un
cultivateur jaloux du fuccès de fes cultures, je
me fuivrois pas la routine. D ’après le principe que
l’air eft un des plus mauvais conducteurs dé la
chaleur, après avoir établi des fondemens fur du
laitier, je ferois élever avec des briques pofées
de champ, entre‘des momans de bois de chêne
goudronnés ou peints à l’huilê, deux murs parallèles,
écartés d’un pied fur le derrière & les
côtés, & de fix pouces fur le devant j l’entre-deux
de ces murs feroit divifé d,e diftance en diftanèe
[par des cloifons aufli en briques, qui d’un côté les
jfoutiendroient, 8c de l’autre empêcher oient les
courans d’air. Une telle Orangerie coûteroit
moins ; & conferveroit mieux la chaleur que
[toutes celles qu’on voit en ce moment aux environs
de Paris. Sa du^ée feroit éternelle, puifque
lesmontans de bois n étant pas recouverts, pour-
roient être facilement remplacés lorfqu’ils feront
pourris j ce qui probablement n’auroit lieu
que très-rarement.
Le plus difficile 8c le plus coûteux dans la conf-
1 truCtion des Orangeries, c’ eft l’ établiffement & la
j confervation des fenêtres & des portes : leur bois ne
peut être trop fain 8c trop fec : leur fabrication 8t
leur placement trop foignés. C ’eft le coeur de
chêne qu’il faut choifir de préférence. On le peint
f abord à deux ou trois couches , & tous les cinq
a fix ans on lui donne une nouvelle couche. Il faut
[ que.les montans 8c les traverfes aient le moins de
Margeur poflible, afin qu’ils ne diminuent pas trop
h quantité de lumière, 8c que par la même raifon
I les vitres foient d’ un beau verre & d’une grande
I dimenfion > mais l’économie , à raifon de la caf-
fure , oblige de fe réduire à une moyenne grandeur
: les vitres colorées en rouge donnent plus de
chaleur, mais c’eft ce qu’on demande rarement.
Uu excellent mafli.c dohi être employé à les fixer.
Agriculture* Tome V»
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Comme ce font les portes 8c les fehêtres qui offrent
le mojns d’épaiffeur, & par fuite le plus de
moyens à l’ introduélion du froid, on les fait doubles
} 8c comme ce n’eft que la nuit, dans le climat
de Paris, qu’il y a beaucoup à craindre des effets
de la gelée, on peut fe contenter de garnie
de papier huilé les fenêtres intérieures.
Paver le fol des Orangeries, même lorfque -ce
fol eft formé de laitier, eft toujours une bonne
opération j cependant, fi cette Orangerie eft deftinée
à recevoir des orangers affez gros pour ne
pouvoir être tranfportés qu’au moyen des chevaux,
il ne faudroit pas le faire. Les carreaux
vernis feroient à préférer, par la raifon indiquée
plus haut, s’ils n’étoientpas fi caffans.
Quelques cultivateurs font couvrir, leuf Orangerie
8c garnir tout leur intérieur e» paille,longue,
parce que la paille éft un mauvais conduéteur de
;la chaleur.
L’eau avec laquelle on arrofe les plantes pendant
l’hiver, devant êtrë à- leur température, il
eft néceffaire d’avoir, dans un des angles de l’O -’
rargerie, une cuvette en pierre ou un tonneau .
défoncé pour la contenir. -
Il doit auffi y avoir deux thermomètres pour
' juger en tout tems de fa température.
Un mois avant de rentrer les plantes dans l’O rangerie,
on les rempote, c’eft-à-dire, qu’on
donne de la nouvelle terre à celles qui en ont
befoin , âc qu’on place dans de plus grands pots
celles qui fe, trouvent trop à l’étroit. Voye£ R e n c
a is s a g e & R e m p o t a g e .
A cette même époque on infpeéte toutes les
parties de l’Orangerie, on y fait faire toutes les
réparations néceffaires, & on laiffe ouvertes les
portes 8c les croifées pour qu’elle fe deffèche le
plus poffible.
Les opinions font divergentes, parmi les cultivateurs,
fur la queftion de favoir s’ il eft plus
convenable de rentrer les plantas dans l ’Orangerie
de bonne heure que-tard. Ceux qui prétendent
qu'il faut* t a rentrer de bonne heure ,
. difent que les plantes fe fortifient davantage avant
les gelées , 8c paffent par conséquent mieux la
mauvâife fai fon > ceux qui prétendent qu’ il faut
rentrer le plus tard poffible , difent qûe lés plante»
s’accoutument davantage au froid, s’acclimatent
mieux, 8c doivent parconféquent braver plus facilement
les - gelées. Fondé fur les obfervations
que je fais depuis quinze ans que j’ ai de grandes
Orangeries fous ma direction, je crois devoir me
ranger de l’avis des premiers j c a r , lotfqu’on
laiffe toutes les portes 8e les fenêtres ouvertes
jour 8c nuit, les plantes s’accoutument également
au froid, 8c cependant pouffent mieux , parce
quelles font à l’abri des vents, 8c on ne rifque pas,
comme cela arrive fi fouvent, d'être furpris par
les gelées 8c d’ avoir beaucoup de plantes tuées ou
au moins mutilées, avant de les avoir pu mettre
en fûreté.
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