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rides & aux concavités de leurs grains : la farine
qu’ils donnent eft plus fucrée, mais moins abondante
& plus facilement altérable. Il eft des cas ,
& ils fe préfentent fouvent fur les bords de la
Saône , pays que j’ai habité, où la précocité des
froids oblige de cueillir le Maïs avant fa complète
maturité, & alors on le fait deflecher au four,
fur l’é p i, en graduant le plus poffihle la chaleur.
Dans beaucoup de pays on caffe à moitié le
fupport de l’épi de Maïs, & on laide les épis ,
alors renverfés, attachés auxttges, jufqu’à ce que.
leur defficcation foit complète. Par eette pratique
on empêche l’eau de pluie de pénétrer fur le grain
& de l’ altérer, à raifon de la difpofition des feuilles
qui le recouvrent, & on accélère la maturité des
grains, fans la précipiter j ce qui eft un avantage
important.
Dans d’autres pays on fait la récolte du Maïs en
arrachant les pieds & er. les tranfportant fous des
hangars, jufqu’à ce que les épis foienc complètement
fecs. Cette méthode offre les mêmes avantages
que la précédente ; mais elle exige , dans les
grandes exploitations, des bâtimens d’une étendue
telle que l’ intérêt des avances qu’ils néceffi-
tent , l’emporte de beaucoup fur les bénéfices
qu’ ils procurent.
La récolte du Maïs fe fait le plus ordinairement
en caffant, par un mouvement destorfion, le pédicule
de l’é p i , & n’apportant que les épis à la
maifon, où on les étend fur une aire pour les
faire fécher en les remuant de tems en te ms , afin
que ceux du defibus ne moi 'î fient pas. Tantôt toute
la famille s’occupe de les dépouiller immédiatement
de leurs feuilles, ce qu’ on appelle dérober, auquel
cas on met de côté les épis les moins mûrs,
les moins garnis de grains, ceux qui font difformes,
pour en confommer le grain le premier ou le donner
aux beftiaux & à la volaille tantôt on les laifTe
dans leur robe-jufqu’au moment de l’emploi. Après
quoi on les met en tas dans un grenier bien aéré ,
où on les remue d’abord tous les jours, enfuite
tous les deux jours, ou mieux on les introduit
par le haut dans des efpèces de tours à claire-
v o ie , conftruites à cet effet à une petite diftance
de la maifon , tours dont on les tire à mefure du
befoin, par une petite ouverture ménagée à leur
bafe.
Dans les pays chauds, où le Maïs mûrit complètement
& fe defleche facilement, il vaut mieux
Fe garder dans fa robe que dépouillé , parce qu’il
fe conferve mieux & eft moins fujetàêtre dévoré
par les fouris & les infe&es deftruéfeurs, tels que
le C h a r a n ç o n & l’ALUeiTEi
Dès que les épis de Maïs font rentrés à la maifon,
ii faut s’occuper de ramafier les feuilles ref-
tées fur les tiges, & les tiges mêmes, parce que
plus elles reftent à l ’air , & plus elles s’altèrent.
Les feuilles font encore mangées par les vaches ,
furtout lorfqu’on les a mêlées la veille avec du regain
frais, ou qu’on les mouille avec de l’eau fa-
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lée pour les attendrir $ cependant, pour peu
qu’elles foient moifies, elles ne font plus bonnes
qu’ à faire de la litière. Les tiges fervent à chauffer
le four ou faire bouillir la marmite : on peut auffi
les brûler pour en retirer de la potalfe ; mais elles
en foumilfent trop peu, à ce degré, de veuille
pour qu’on doive fpéculer fur fa fabrication; *
Mais il faut que je revienne fur mes pas, p0Ur
parler des cultures qu’on intercale fouvent avec
celle du Maïs.
Comme , ainfi que je ! ai dit plus haut, pour
que le Maïs profpère, il faut qu’il foit planté
fort clair, qu’il en périt des pieds , ou qu'il en
eft fouvent qui ne portent pas d’épis, & qu'on
arrache, pendant le troifième binage , le défit
d’emp.loyer le terrein vide, d’en tirer tout le parti,
poffible, détermine, prefque partout, à y femet
ou planter des légumes. Il eft même des cas,
comme dans les terres fèches par leur nature, on,
trop expofees aux rayons du foie i l , où ii ell très-
bon d’en mettre. Je ne puis blâmer que l ’ e x c è s &
le choix des plantes : l’excès, parce qu’il empêche
les binages i le choix, parce que celles à tiges élevées,
comme le chanvre, le Topinambour, &c.,
celles à tiges grimpantes, comme les pois, les haricots,
& c ., nuifent par leur ombre. Ce feront
donc des pois nains, des haricots nains, des lentilles
, des fèves de marais, des pommes de terre,
des choux, des raves, de la fpargoute , & c .,M
qu’on y mettra, toujours en les éloignant d’un
pied, au moins, de chaque tige de Maïs. A la
Caroline, où il fe récolte- de bonne heure, il
croît naturellement , autour de -lui, une plante
annuelle fort voifiwe du panic fanguin , le fyn-
therifma precox de Walter, que les beftiaux recherchent
avec paflïon, foit fraîche, foit fèche,
& qui fe multiplie a fiez, après le troifième binage,
pour pouvoir être coupée deux ou trois fois avant
les gelées. Il eft fâcheux que cette plante, dont
j’avois apporté çonfidérablement de graines, ne
puifle pas profpérer dans le climat de Paris, &
que perfonne n’ ait voulu profiter, dans le midi,
des reflburces qu’elle offre pour augmenter , fans
nouveaux frais, les produits de la culture du
Maïs.
Ce que j ’ai déjà dit de l’excellence des feuilles
de Mais pour la nourriture des beftiaux, p o rte !
croire qu’il doit être avantageux de^ le cultiver
comme fou rage > & c’ eft ce qui a eu lieu dans
beaucoup de cantons. L’important pour les contrées
méridionales, c’eft de faire fuccéder fa culture
à une précoce , afin que le même terrein
donne deux récoltes par année. J’entrerai , au mot
S u c c e s s i o n d e c u l t u r e , dans d e s d év elo p p e;
mens qui m’aurorifent à me contenter de d ire ici
que le plus grand inconvénient qu'on ait à redouter
dans ce cas , c’eft la f é c h e r e f f e j de forte q u e , h°rs
les terreins fufceptibles d’être arrofés à volons
elle e f t toujours précaire.
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Dans les pays moins favorifés, on ne peut compter
chaque année que fur une i écolte de Maïs pour
fouraffë , dans le même terrein > mais comme aucune
plante n’en fournit autant, & d’auflï excellence
qualité, il y a toujours un grand bénéfice
à efpérer de fa culture. Cependant il feroit fouvent
poflible, aux environs de Paris, par exem-
ole de femer du Maïs dans cette intention,
après une prairie temporaire, des petits pois, de
la navette d’hiver, &c.
C’eft fur un feul labour, & à la volée, qu’on
fème généralement le Maïs pour fourage : huit
ou neuf boifleaux de graines par arpent font la^
quantité nécefiaire i car le plant peut être dru3
non-feulement fans inconvénient, mais même
avec utilité, pourvu qu’ il n’y air pas excès, c’eft-
à-dire, que les pieds foient écartés au moins de.
deux pouces. On enterre la graine à la herfe, &
on veiile pendant quelques jours fur le champ pour
écarter les oifeaux. La recommandation de faire
tremper la graine dans l ’eau deux jours d’avance
s'applique ic i, encore hiieux que dans la culture
décrite plus haut , à raifon de la fécherefle de la
faifon où on opère.
Un femis de Maïs pour fourage ne demande
aucun foin, jufqu’au moment de le coïiper >
moment qui eft généralement indiqué par la fortie
des panicules des fleurs mâles : plus tô t , il n'au-
roit pas encore affez acquis de perfeètionj plus
tard, fes feuilles inférieures commenceroient à
S'altérer. La faulx eft l’ inftrument qu’on emploie.
Il le defîeche'comme le foin 5 mais fes tiges étant
fort épaiffes, & abondamment fournies de fuc
muqueux, il faut plus de tems & de foins pour
le mettre en état d’être confervé. S’ il n’étoit pas
■ extrêmement fec au moment où on le rentre, il
moiftroit & ne pourroit plus fervir à la nourriture
des beftiaux. Peut-être cette difficulté de fa
defficcation eft-elle le principal motif qui empêche
que fa culture, fous le rapport dont il eft quef-
tion, devienne auflî générale qu’il femble qu’elle
devroit l’être. Un moyen affïiré de diminuer cet
inconvénient, c’ eft de le flratifier avec de la
paille, qui s’emparera de la furabondance d'humilité
qu’il conferve, & d’ une partie de fa faveur
& de fon odeur.
L’ufage habituel du Maïs pour fourage, à raifon
de l’abondance du principe fucré qui s’y trouve,
engraiffe rapidement les beftiaux, & donne à leur
chair un excellent goût. Je m’appercevois toujours,
en Amérique, à l ’abondance & à la faveur de
leur lait, des jours où mes vaches étoient nourries
de feuilles de Maïs..
. Les produits de la culture du Maïs font, comme
je l'ai déjà obfervé, les plus confidérables de tous
ceux que donnoit la grande culture en Europe.
Le moindre taux paroït être celui indiqué par
Varennes de Fenilles , pour la ci-devant Brefie,
un des derniers cantons où elle ait lieu, c ’eft-à-
oue, cinquante pour cent.
- Il eft généralement avantageux , &r fous le rapport
déjà annoncé de faconfervation, & fous celui,
non moins important de fa bonté, de ne réparer
le grain de Maïs qu’au moment de fa cor-
fommation. C ’eft prefque partout avec la main
qu’on fait cette opération, qu’on appelle égrainer,
opération très-longue & très-pénible, lors même
qu’on s’aide du bord d’un tonneau défoncé où
d’une barre de fer fixée à travers le bord fupé-
rieur d’un tonneau défoncé, ou d’une planche po-
fée de champ.fur une table > cependant, dans quelques
endroits, on l’exécute , au moins en partie ,
l'aide du fléau ou de gros bâtons s dans d’autres,
en marchant defius avec des fabots ou des fouliers
ferrés , ou en les plaçant fous une planche garnie
en defibus, de têtes de d o u x , planche fur laquelle
un homme s’aflied pour la faire mouvoir dans tous
les fens.
Plufieurs fortes de machines ont été propofées
pour égrainer le Maïs en grand , mais nulle part je
n’ en ai vues en activité. Une des plus ingénieufes
eft celle décrite par M. Romand, dans le fep-
tième volume de la Veuille du_ Cultivateur.
Comme une defficcation complète des épis du
Maïs favorife leur égrainage, que dans les pays
du nord il eft fouvent nécefiaire, ainfi que je l’ai
déjà obfervé , de deflecher les grains pour pouvoir
les moudre, on eft déterminé, dans beaucoup
de ces pays, à mettre les épis au four avant
de les égrainer. Je ne blâme pas cette defficcation
forcée, en principe général j mais j’obferve qu’elle
nuit toujours à la faveur de la bouillie, ainfi que
j’ai-eu bien fouvent occafion de m’en aflurer.
Après que le Maïs eft égrainé , on le vanne
pour le débarrafler des pellicules de fon axe, de
la terre & autres corps étrangers qui peuvent le
fouiller ; après quoi on le met au grenier, foie
en tas , qu’on remue de tems en tems , foit dans
des tonneaux défoncés, qu’on tranfvafe tous les
quinze jours, foit enfin en facs ifolés. Cette dernière
méthode de confervation , indiquée par
M. Parmentier, eft certainement la meilleure,
parce qu’ elle ne prive pas les grains du contaét
de l’air, & qu’elle s’oppofe efficacement aux ravages
des infeéîes.
Les deux plus dangereux des infe&es qui attaquent
le Maïs en grain font lë charançon du
blé & l’alucite des grains dans les pays fepten-
trionaux, & les mêmes, ainfi que le charançon
du riz , dans les pays méridionaux. Les moyens
indiqués à l’article C h a r a n ç o n , pour en garantir
les blés, s’appliquent au Maïs. On peut les
appliquer également à ralucite, que j’ ai vue fi
abondante en Caroline, où elle eft connue fous le
nom de hejfian fiie, qu’elle éteignoit quelquefois
ma chandelle lorfque j’entrois dans mon grenier
pendant la nuit. Peu de grains égrainés échappent
à fa voracité ; mais comme elle ne détruit que
le quart de chacun de ceux qu’elle attaque , que
Je même grain »’eft jamais attaqué deux fois , on
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