|p J A R
mieux, & elles ne font pas expofées -aux dégrada-
lions dont on f6 plaine avec tant de taifon dans ceux
dont il vient d'être queftion. 11 y a aufli des cou-
chesnues & à chàffis, des orangeries, des bâches ,
des ferres tempérées & chaudes. Toutes les opérations
qui s'y font, ne different pas de celles, des
Jardins de botanique , à l'exception de celles qui
regardent l'école. Leur etendue doit etre allez
confidérable pour qu’on y trouve naturellement
ou qu'on puiffe y créer artificiellement des terreins
fecs & montueux, expofés aux vents i des vallons
gras & humide's, des Dois fombres, des prairies,
des champs, des rochers, des eaux dormantes &
courantes. Leur ordonnance eft généralement la
même que celle des Jardins payfagers, dont il tera
queftion plus bas -, mais on y trouve une bien plus
grande variété de plantes. Je citerai , comme modèle
en ce genre , celui de Kiw 3 appartenant au
Roi d'Angleterre. Nul en France ne peut lui être
comparé , & en -richeffe, & en élégance. Tous
les climats ont été mis à contribution pour l’embellir}
on y compte, dit-on, plus de dix mille
efpèces, chacune cultivée comme il lui convient,
& placée de la manière la plus favorable pour
produire tout l'effet dont elle eft fufceptible.
Il eft beaucoup de ces fortes de Jardins aux environs
de Paris & dans les départemens, furtout
vers le nord. Parmi eu x , celui que poftede , près
de Boulogne , M. Dumont-Courfet, auteur du
Botanifie cultivateur, fe diftingue par la quantité
d’objets qu’il contient & par la fcience qui preftde
à fa culture. Les amis de la botanique doivent
faire des voeux pour qu’ ils fe multiplient encore
davantage, car c'eft principalement fur eux qu'on
peut compter pour la confervation & la multiplication
des efpèces que nous pofledons , & pour
l’introdu&ion de celles connues ou inconnues, qui
ne s'y trouvent pas encore, parce que le goût des
plantes devient facilement une paftion qui, comme
toutes les autres, fait furmonter les obftacles.
Un des objets fur lefquels on doi t porter le pi us
d’attention dans ces fortes de Jardins , c eft 1 éta-
biiflement de plates-bandes droites ou courbes de
terre de bruyère, parce que c’eft là que réufliffent
exciufivement une grande quantité d arbuftes a
racines grêles, dont les fleurs fe font fouvênt remarquer
par leur beauté. La maniéré de les faire
fera mentionnée au mot T erre de bruyere.
Les Jardins des marchands déplantes étrangères ,
dont je fais ma quatrième forte de Jardins non-
produftifey quoique ce foit fans contredit ceux
q u i, proportion gardée., rapportent le plus , font
à ceux des amateurs de plantes étrangères ce que
ceux des jardiniers fleuriftes font a ceux des amateurs
de fleurs : même négligence dans les objets
' aceeffoires, même économie de terrein & de tems.
Ici comme là , le but eft de produire promptement
& confidérablement j en conféquence aucun
des moyens d’affurer la germination des graines ,
la reprile des naarçotes, des boutures., des greffes
, & c . n’eft négligé : là on ne. craint point dç f l
faire des avances dès qu’ on prévoit un bénéfice f l
certain. En effet, qu’eft-ce qu’une dépenfe de. f l
6 francs lorfqu'il s’agit de faire reprendre en un an J
plutôt qu'en deux , une marcote de magnolier à f l
grandes feuilles, qui fera vendue 300 francs? Qu’eft. ■
ce qu’une dépenfe de 100 francs de plus en feu, I
pendant un hiver, lorfqu’il s’agit de faire poufler I
plus vigoureufement des plantes dont une feule, ■
comme le ftrélitzia, fera vendue plus de 2,000 fr. ? I
Tous les travaux qui font néceffaires à l’entre- I
tien des Jardins de botanique & à ceux des ama- I
teurs de plantes étrangères s’exécutent dans ceux I
des marchands dont il eft ici queftion. Seulement, I
comme je l’ai déjà d i t , on pouffe plus à l’eau & I
au feu , pour me fervir de l’exprefiion confacree, I
dans le but d’avoir une vente plus prompte & plus I
avantage ufe.
Prefque tous les marchands de plantes étrangè- H
res font en même tems pépiniériftes, & même I
quelques-uns fleuriftes} inais j’ai dû feparer c£$ I
diverfes occupations pour ne pas jeter de la con- I
fufion dans ce que j’avois à en dire.
C ’eft chez les marchands de plantes étrangères I
que.fe fourniffenr les amateurs , qui enfuite , lorf- il
qu’ils ont multiplié certaines efpèces rares, lj?$ B leur rendent en échange d’autres qu’ils ne polie- B
dent pas encore. C ’eft cette rotation qui, ainfi que B
je l’ai déjà obfervé, allure la confervation des B
plantes exotiques dans nos Jardins, car il eft fort B
rare que telle d’entr’ elles periffe la meme annee B
dans tous ; & comme, dès quelle ceffe d’être com-1
mune , fa valeur augmente, le defir de la repro-1
duire fe ranime. ‘
Les amis des plantes doivent donc favorifer de I
tous leurs moyens les marchands de plantes etran- fl
gères.
On appelle Jardins d*ornement, Jardins français I
Jardins peignés, ceux que je range dans ma qu.i- |j
trième forte. Ils étoient l’objet de l’admiration de I
nos pères} aujourd’hui ils font tombés dans un tel fl
diferédit, qu’on n’en conftruit plus que pour les I
promenades publiques. Ils font caraftérifés par des I
allées toujours droites , & par l'exaCte fymmetiie I
de toutes leurs parties. On y trouve des Ma s sifs, |
des Quinconces , des Berceaux , des Etoi- I
les , des Labyrinthes , des Boulingrins, !
dès Parterres, des Bassins , des Jets d’eau. I
Les arbres y font taillés en paliffades, en éventail, I
en boule, &c. Les ftatues femblent leur être eflen-1
tielles par l’habitude qu’on a d’y en voir.
Ces fortes de jardins, lorfque, comme les Tui- H
leries & Verfailles, ils ont été plantés par une I
main'favante, ont de la grandeur & de lamajefte, I
& plaifent au premier coup-d’oe i l} mais bientôt I
leur monotonie fatigue , & on les quitté pour ai-1 1er jouir de la variété des champs. Il femble qu'ils I
ne font deftjnés que pour les réunions nombreufes I
l 8c paffagères, qu’on n’y va tque pour voir & 11
être vus, I ■
■ J A I
Des allées à ratifier plufieurs fois fia fi s l’annee,
fies plates-bandes de parterre à labourer , planter
& biner 5 des arbres de. ligne, des charmilles &
I des arbuftes à railler} des gazons à faucher, font
les objets principaux d’occupation des ouvriers
[ attachés aux Jardins français. La plus médiocre
; habileté fuffit pour diriger & exécuter les travaux
qu’ ils exigent.
I Ni les arbres de ligne ni les fleurs des' parterres
ne font variés dans les Jardins français. Le marro-
nier d'Inde ou l’orme pour les grandes allées , Je'
tilleul ou l’orme pour les petites', la charmille pour
les palifiades ; quelques arbuftes , comme lilas de
[iPerfe, fpirée à feuilles de millepertuis, lavatère
; -en arbre, rofiers , feringat, chèvre-feuille de Tar-
ltarie , &c. pour les plates-bandes des parterres}
quelques touffes de grandes & petites plantes vi-
; vaces, prifes parmi les aftères , les verges-d’o r ,
; les centaurées, les chry fan thèmes, les lychnides,
| les hélianrhes, les althées, les campanules, les pi-
pvoines, les fauges, les véroniques’,les matricaires,
; les mufliers , les àlyifes, les ancolies, les immor-
I telles, les ceràiftres , les iris, les oeillets les fia-
I ticés ; quelques plantes annuelles, comme les pieds-
; d'alouette, les pafle-velours, les adonides, les
bal famines, le pavot, le liferon belle-de-jour, les
Ibafilics, le coquelicot, le lupin, le taget, le
rfouci, les ^belles- de-n u i t , les nigelles , la reine-
j^marguerite , le zinia, les giroflées , la perficaire
■ du Levant, la feabieufe fleur-de-veuve, le thlafpi, -
Ifonc prefque les feu-s objets qu’ on y rencontre,
i Voyei tous ces mots, où eft décrite la culture des
Iplantes qu’ils indiquent.
B On voit dans les Jardins français, auflî Couvent
■ que la localité le permet, des pièces d’eau de forme
■ toujours régulière , & qu tique foi s pourvues de
■ jets d'eau. Les fontaines, s'il s'en trouve, font généralement,
ou des monumens d'architedlure , ou
ides colifichets en pierres de couleur, en coquilla
g e s , &c.
■ Quant aux ftatues qui les ornent, on fent bien
lqii'el;es ne peuvent avoir de valeur, fousje rap-
iport de l’a r t, que dans les Jardins des Rois. Il en
li f t de même des vafes lorfqu’ils offrent des bas-
ireliefs.
B Vo ic i, d’après Leblond , élève de Lenôtre, un
fextrait des préceptes ou règles qijMloivent guider
Élans la formation des Jardins français.
■ Il y a trois fortes de Jardins r- cèux à niveau parafait
, ceux en pente douce, & ceux en terraffe.
i Les premiers font les plus beaux, les plus faciles
à conftruiré , & les moins coûteux à entretenir.
B Les féconds font fujets à être ravinés par les-
pluies} mais au moyen de rigoles traverfant obliquement
les allées, on peut remédier à cet incon-
q é 'ien t.
B Les troifîèmes ont des beautés-nombreufes , en
|pe que chaque terraffe forme un Jardin particulier,
d'ou on a le coüp^d’oeil des inférieures, & en ce,
j Agriculture. T'orne K.
J A R 73
mais ils font extrêmement coûteux à conftruiré 8c
à entretenir.
Il doit toujours y avoir un rapport entre la grandeur
! qu’on peut y multiplier les pièces d’eau à volonté*
du Ja rdin & celle de la maifon. En fortant de
cette dernière on fe trouve d’abôrd fur un perron
au moins de trois marches , d’où on découvre la
majeure partie de fonenfemble. Au-defîbus de ce
perron , en face & fur les côtés, eft le parterre ,
qui fera accompagné de boiquets , de palifiades,
mais feulement dans le cas où il n’y auroit pas dé
vue à conferver, car alors il faudroit les remplacer
par dés boulingrins.
Les bofquets voifins des parterres offriront des
compartimens,, des quinconces , des fa lies, dés
boulingrins , des treillages v des fontaines. Ceux
d’arbres verts font à préférer.
l\ eft defîrable que la tête d’un parterre foit décorée
avec des pièces d'eau, & des gazons en
broderie, garnis de vafes.
La principale allée fera toujours triple , & en
face du bâtiment : une ou plufieurs autres lui feront
perpendiculaires dans fa longueur ; des grilles
ou des fauts-de-loup les termineront.
Dans le relie du Jardin on plantera, fur diffé-
rens deflins, des bois de haute futaie, des quinconces,
des cloîtres, des galeries, des falles vertes,
des cabinets, des labyrinthes, des boulingrins
, des amphithéâtres ornés de fontaines, de
canaux, ftatues, &c.
Une attention à avoir en traçant les différentes
parties d'un Jardin., c ’eft de les oppbfer toujours 1 une à- l’autre. On ne doit répéter les mêmes pièces
que dans les lieux découverts.
Un Parc ( v o y e ^ ce mot) fe voyait prefque
toujours anciennement à la fuite dès Jardins des
châteaux, & en faifoir réellement partie. Aujoùr-
d hui on en établit peu, mais on cônfervé ceux
qui exiftent.
Là derniere forte de Jardins non-produ6lifs eft
celle qu'on appelle Jardins anglais , Jardins chinois,
Jardins naturels, & que je crois qii’oh doit nommer
Jardins payfagers, parce qu'ils imitent en petit
ce que 1| campagne offre en grand , c’eft-i-dire,
qu’ils renferment', dans une enceinte de quelques
arpens , ce qu'on trouve dans un efpace de plufieurs
lieues.
Ces Jardins, connus de tout tems en C h in e ,
imités enfuite en Angleterre , font devenus très-
communs en France dans ces derniers tems , 8c
commencent à fe multiplier en Allemagne. Ils
offrent des beautés toujours nouvelles à leurs
propriétaires , parce qu'ils réunifient un grand
nombre d'intentions , & qu'ils frappent enfemble
ou fucceffivement plufieurs fens. Leur perfection
confiftè dans le choix & la diverfité des fîtes, dans
un enfemble agréable, & dans des détails toujours
intéiefîans. On doit faire en forte que l'art ne
paroifte pas , que tout femble naturel. Les lignes
droites/ fi eftimées dans les Jardins français, y