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Je finirai ces détails fur la province de Bifcaye
par une anecdote fur leur navigation au dehors ,
& qui porte que la pêche de la baleine fe failoit,
dans les premiers te ms , par les Bifcayens, dans la
baie de Saint-Laurent.
BISCH WEILLER, petite ville du département
du Bas-Rhin , arrondiffement de Strasbourg , fur
le Moder, près de la rive droite du Moter, à une
lieue trois quarts fud-eft d’Haguenau. Le commerce
de et tte ville eft fondé fur fon induftrie
intérieure. On y trouve une manufacture de garance,
quatre moulins à préparer le chanvre, une
mine de fer en grains, par bancs 8c par nappes ;
une fonderie en cuivre 8c en fer, neuf poteries de
terre où Fon emploie l’excellente argile à potier
des environs, cinq tuileries 8c briqueteries où l'on
fait ufage de la même terre.
B IT CH E , ville du département de la Mofelle,
arrondiffement de Sarguemines. Il y a beaucoup
de forêts près de cette ville : on trouve une tuilerie
hors des murs.
B IT R Y , village du département de la Nièvre,
arrondiffement de Cofne, 8c à trois lieues un quart
de cette ville. Bitry eft proche Donzi en Nivernais.
C et endroit eft très-renommé par une mine
d’ocre fort abondante j. elle fert principalement à
peindre les bàtimens. Ces ocres fe tranfportent
fur tout à Nantes ; leur qualité friable les rend friperie
ures à celles tirées des ports de l'Empire.
Voici les détails de cette exploitation les plus
propres à donner une idée de cette mine, 8c de
la fubftance qu’elle renferme.
Les puits qu’ on fait à l ’ocrière de Bitry font
carres ou au moins carrés longs , 8c leur profondeur
varie fuivant le lieu où fe trouve cette ou--
ver cure.. Si la fouille s’entame fur le fomme-t d’une
petite montagne , ils font plus creux > fi c ’eft au
fond d’ une vallée, ils le font moins. Ceux de Bitry
n’ ont guère que vingt-cinq ou trente pieds de
profondeur. L’ocre eft communément précédée
de trois lits ou bancs de terre , qu’ il faut percer
pour arriver jufqu’ à elle. Le premier eft cèlui qui
jfuit 1 fond du terrain, dont Frpaiffeur eft plus ou
moins grande, Ion l’endroit où la fouillé èft
fitüée. A Bitry il n’ a guère plus'd’un pied ou deux
d’épaiffeur. Au deffous fe trouve une ‘glaife blanche
ou plutôt d’ un gris cendré, ou quelquefois
d’ une couleur bleue tirant fur le noir. Cette glaife
p ut être employée à la poterie, & le banc qui la
contient peut avoir huit à dix pieds d’epafflèur.
Au de ff lus eft une autre tfpèce de giûfe ou terre
rou g é , dont Fépalfieur eft un peu moindre' cjue
celle du banc précédent. Cejl -ci eft fuivie d’ un
jit d’une forte de grès jaunâtre , compofé de deux
ru trois couches, donc chacune peut avoir un
pouce d’épaifliur- C ’eft immédiatement fous.ee lit
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que fe rencontre l’ocre. Le banc en eft le plus épais
de tous , puifqiQ.1 occupe à lui feùl plus du tiers
de trente pieds de profondeur qu'ont les puits de
Bitry : il tft pofé fur un banc de fable dont or*
ignore l'épaifieur. Les ouvriers ne le creufent ordinairement
que de la hairteur d’ un homme pour y
pratiquer, à droite & à gauche , des chambres
dont le banc d’ocre forme le plafond, 8c la faire
tomber dans ces chambres au moyen de coins de
bois, de plus d’un pied de long, qu’ ils y enfoncent
pour en détacher des quartiers confidérables.
Ces gros morceaux fe nomment l'ocre enjquartiers
& les moindres morceaux s’appellent le menu. On
enlève les uns 8c les autres fur le fol où eft percé
le puits, & là on les dépouille foigneufement des
glaifes qui peuvent y être reliées adhérentes, 8c
en fuite on les met en tas ou en meules à peu près
coniques. On porte enfuite l’ ocre, pour la deffé-
i h r , lous des halles, qui, en la mettant à couvert
de la p luie, la laifiënt expofée à toute Faétion
de l’air $ & lorsqu’ elle a fubi cette préparation on
la met dans de vieux tonneaux à vin, 8c pour lors
elle eft en état d’être "vendue.
On a dit que Fon ignoroit l ’épaiffeur d’un banc
de fable qui fe troûve au deffous de l'ocre, 8c cela
fe trouve effeétivement vrai à Bitry. L’ocrière y
eft placée dans le fond d'un vallon , 8c les eaux
qui y féjournent ôtent alliez la fermeté du terrain
pour que les ouvriers ne puiffent fouiller, ni fort
avant ni fort profondément, fans s’expofer à être
enfevèlis fous les éboulemens qui s’y feraient infailliblement
j. mais dans d’autres ocrières différemment
placées, des ouvriers ont reconnu qu’on
trouvoit les bancs d'ocre 8c de fable placés alternativement
les uns fur les autres.
On ne trouve dans aucune des ocrières dont
nous avons connoiffince, que de Focre jaune. La
rouge eft l'ouvrage de l’art, 8c e’eft en calcinant
h rcement Focre jaune qu’ on lui donne cette couleur.
On la place pour cet effet dans un foarneau
femblable à celui des tuiliers, obier vaut d'y arranger
les quartiers d’ocre de manière qu’ ils laif-
: fent entr’eux un libre pafiàge à la flamme de bois
qu’on allume deffous dans le foyer du fourneau.
Le feu doit durer trois jours, modéré dans les deux
premiers x mais allez v if le rroifième. Si Fon ti-
roit l'ocre plus tô t, elle ne feroït pas rouge, mais
d’un brun-r'ôufle âcre, & beaucoup plus dure qu’elle
ne doit êtfe naturellement.
Je dois joindre à cette defeription celle de deux
autres ocrières, la première de Saint-Georges-fur-
la-Prée dans le Bery , 8c la fécondé de Tahnay»
proche Sancerre en Brie. Saint-Georges-fur-L-Prée
eft fitué fur un coteau fervanc de rivage à la rivière
du Cher. Les trous de Focrière font ouverts
dans une petite montagne y ils ont ordinairement
cinquante à fôixante pieds de profondeur > fur
quatre à cinq de largeur. On ouvre en les faifant
quatre à cinq pieds de terre commune,, quinze à
I feize pieds d’une terre argile nie mêlée de caiHB
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loutage. On trouve enfuite un banc de gros fable
rouge, de l’épaiffeur de trois à quatre pieds, qui
eft immédiatement luivi d ’un maftif de grès gris 8c
luifatic , de cinq à fix pieds d’jépaiffeur, 8c quelquefois
fi dur qu’on eft obligé d’employer la
poudre pour le rompre. Après ce maftif on perce
une terre brune, plus fermé 8c plus foli Je que l’argile
: elle a dix-huit à vingt pieds d’épaiffeur ; elle
change enfuite de couleur, 8c devient jaunâtre. Le
banc qu’elle forme a deux ou trois pieds d-’épaif-
ftpnr. Sous ce banc eft placé celui de Focre, qui
s’ étend horizontalement fort loin ; il n’a tout au
plus que huit à neuf pouces d’épaiffeur. On trouve
immédiatement deffous Focre un fable fin & lui—
fan t, dont on ne connoît pas la profondeur. Ce
qu il y a de confiant, c’eft qu’on le'creufe ordinairement
de la hauteur d’un homme pour y faire
des galeries, 8c y prendre l’ocre au deflus de la
tête. L’ocre ne fe trouve pas par quartiers féparés $
elle forme un l.t continu dans toute fon étendue,
8c confervë prefque partout la même épaiffeur^
Elle eft tendre dans la mine, 8c on la coupe ai Cément
avec la bêche. Elle eft originairement d’un
jaune-foncé j mais elle pâlir un peu , 8c durcit en
féchanr. L’ocre n’ eft pas mélangée de glaife d’aucune
couleur j mais lorfqu’ il fe fait des fentes dans
le l i t , il s’attache .Une petite quantité d’une matière
blanche aux parois de ces fentes. Il ne fe
trouve aucun caillou dans le corps de Focré j mais
une forte de gravier, de deux ou'trois doigts d’é
paiffeur, tient à Focre par-deffouS. Il y a parmi ce
gravier quelques petites pierres, de la couleur de
l ’ocre, affez tendres, 8c qui femblent fe former
par couches. Elles font ordinairement platces : on
en rencontre rarement de rondes'.
.L’ocrière de Tannay en Brie eft ouverte dans
une terre labourable : cette terre eft maigre, 8c a
peu de confiftance j elle forme le premier banc des
puits dont on tire l’o c re, & elle peut avoir environ
trois pieds d’épaiffeur. Sa couleur eft blanchâtre.
Elle eft fuivie d’une autre terre, dont le lit
a cinq ou fix pieds d’ epaiffeur : c ’eft une argile grife,
8c propre à faire de la tuile 8c des poteries. Au
deffous de cette terre il y en a une dont ie banc
eft épais de huit à neuf pieds j enfuite on en trouve
une couleur de lie de vin qui n’a environ qu’un
pouce dans cette dimenfion, 8c fous laquelle eft
placé un li t , également d’un pouce, formé par
une matière pyriteufe qui reffemble à du potin.
Enfuite vient le banc de l’ocre qui a huit ou neuf
pouces, 8c même quelquefois un pied d’épaiffeur.
Il eft porté deffus un fable verdâtre que la fouille
ne patfe pas. Quand on trouve Focre plus profondément
, chaque forte de matière forme un lit
plus épais, excepté l’ ocre 8c la terre rouge qui
confervent toujours la même épaifïèur. On rencontre
quelquefois dans ces fouilles des pierres de
grès très-greffes, 8c propres à la conftruétion des
fourneaux à fer.
Lorfqu’on compare les defcripiions de ces trois
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ocrières avec celle que le Monnier, médecin, a
donnée dans les Observations düifioire naturelle à
la fuite de la Méridienne, page 118 , on -ne peut
,s’empêcher d'être frappé des rapports qu’ il y a
'entre la diftribution & la nature des matières qui
accompagnent Focre. Les lits de fable , de glaife
donc il eft parlé dans la defeription de Focrière de
Saint-Georges-fui-la-Prée , font parfaitement de
même nature que ceux dont parle le Monnier, 8c
leur arrangement eft également le même. De plus,
on trouve des grès 8c des pyrites dans ces ocrières
, & les lits de ces Habitantes femblablement
pofés.
11 y auroit cependant une petite différence d’après
ce que le Monnier rapporte de Focrière qu’ il
a décrite j .lavoir, qu’il fe trouve plu (leurs lits de
iable 8c d’ocre poiés alternativement les uns àu
deflus des autres j mais comme les fouilles des
autres carrières ne s’étendent pas au-delà du lie de
fable qui eft au deffous de Focre, on ne peut rien
décider à ce fujet. Le Monnier dit encore que
l’ocre eft pâle & prefque blanche dans Focrière
dont il parle, 8c qu’elle devient d’ un beau jaune
à l’air. C ’eft le contraire dans les ocrières qui font
décrites ci-deffus. L’o c re ,,étant mouillée, devient
toujours d’un plus beau jaune qu’elle ne F eft quand
elle elt lèche ; 8c, lorfqu’ elle eft dans la mine, l’humidité
la pénétrant toujours, il eft naturel qu’elle
y foit d’un beau jaune.
Il y a donc un rapport confîdérable entre toutes
ces ocres 8c les mines d’où on les tire: les petites
différences qu’on a pu y remarquer ne-font pas
fort .effe mi elles, 8c ne dépendent peut-être que
de la profondeur plus ou moins grande qu’on tft
obligé de donner à ces mines pour parvenir au lit
de l’ocre j ce qui ne vient probablement que de
la iituation ou le trouve le maftif où Fon fait la
fouille. Il eft évident que les ocrières qui font
dans des fonds, ne doivent pas- être fi profondes
que celles qu’on ouvre fur des collines ou. fur des
monticules : dans c~ lies-ci on peut percer plufieurs
lits d'ocre, au lieu qu’il ne feroit pas facile de pénétrer
également dans les ocrières placées dans les
vallées, à caulë de l’eau qu’on y trouve beaucoup
plus tôt.
On voit que l’ocre que l ’on emploie communément
dans les arts, eft naturellement jaune dons
la carrière, 8c qu’eile devient rouge par Faétion
du feu. Elle eft douce au toucher, s'attache à la
langue , fe durcir au fe u , y devient un mauvais
verre fi le feu eft très-violent, ne fe diftout pas
aux acides, mais fe délaie dans Feau commune.
Les naturaliftes qui penfent que Focre commune
eft une fubftance qui a fouffert l’aétion du fe u ,
peuvent fe détromper par l'examen de la defeription
des ocrières qui précèdent. Les bancs de
fable, de glaife 8c d’ocre y font trop réeuliére-
’ ment pofés pour qu’ ils aient été fournis à l ’aétion
des feux fouterrains. On y reconnoît plutôt l’ouvrage
de quelques dépôts occafionnés par des
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