
des dépôts que la mer y a formés pendant fon féjour
au milieu des terres. Tous ces cailloux roulés dont
je viens de décrire les mafles & les bancs, nié fem-
blent appartenir à l’ancien golfe du Danube , &
aux vallées fecondaires qui s’y réunifient. Tous
ces dépôts , envifagés fous un même point de vue
&dans toute l’étendue qu’ils pouvoient embrafler,
offrent un enfemble vraiment inftruétif, & beaucoup
plus facile à faifir & à décrire que lorfqu’on
les parcourt par parties ifolées, comme on les a
préfentes dans un P'oyage de Strasbourg en Pologne,
fu ! van t la mauvaife méthode dont j’ ai marqué les
défauts & les inconvéniens à l’article G u e t t a r d .
Ce n'eft donc qu’en fuivant avec foin de grands
objets, en les circonferi,vantvavec précifion, qu’ on
peut fe flatter de faifir les opérations de la nature,
& furtout les rëfultats intéreflans qui peuvent en*
trer dans les théories particulières.
§. IV. Caillou filex.
Cette nature de pierre les pierres calcaires , & furtnoeu tf ed atrnosu lvae c rqauiee :d ealnles fyo pnrt ernédg udliifèfréerse,n pteasr cfeoqrmu’eesl lqesu fio, ndta ncse lcleesr tdaeins sc ocrapss, pmluarsi nbsi zqaurir eosn,t péatréc eft lqifuié’se l;l eds’ atuietrnens efnoti so eultlrees fcoenlat maua rtrinavs aqilu id eo nl’té afue rqvuî id ae fnaoity daeusx a.dditions aux corps
Ces fortes de pierres font fort nombreufes à la
fui face de la rerre, & fous formes bizarres, fur-
tout parce que la matière qui les renfermott,a
éprouvé & éprouve tous les jours des deftruc-
tions qui mettent à découvert les filex qui étoient
engagés dans les bancs de pierres calcaires, & fur-
tout dans les maflifs de craie où de marne. On
remarque partout que les filex, quoiqu’ en corps
ifolés, font rangés fur des lignes exactement horizontales,
comme des notes de mufique j cè qui
tient à la ftrafification des corps marins au fond
du baflîn de la mer, lefquels ont fervi de noyau
au filex, & dont l’organifation a fans doute facilité
â l ’eau l'infiltration filifiante.
Les amas de filex en pierres perdues & èn mur-
gées fur les traétus crayeux & marneux font pré^-
eieux aux yeux d’un naturalifte qui juge , par leur
grande mafle, de l’étendue des deftruCtions que
les pays de craie & de marne ont éprouvées &
éprouvent tous les jours. Ces témoins de la def-
truétion des maflifs crayeux ou marneux nous
prouvent combien les eaux ont dégradé de couches,
non-feulement à la fuperficie des plateaux
qui réparent les vallées, mais encore fur les croupes
de ces vallées qui fe dégarniffent de nombreux
amas de filex accumulés fur ces croupes.
Outre les tràétus de marpe & de craie où fe
trouvent les filex ainfi dégagés de leurs matrices,
lefquels font très-étendus dans la nouvelle terre,
& qui nous donnent une idée de l’abondance des
fucs infiitraps qui ont contribué à la formation des
î filex, il y en a encore d’autres où l’ on rencontre,
| non-feulement les coquilles &: autres corps marins.
\ fiiifiés, mai$ encore des mafles informes qui ont
J pris la dureté & la couleur des filex. Je penfe que
| l ’étendue de tous ces tra&us mériteroic d’être
j déterminée avec foin , & qu’au lieu de fe jeter
j dans des conjectures vagues fur leur formation, il
| feroit fort utile d’en connoître d’abord l ’ étendue,
i enfuite d’autres circonftnnces qu’on joindroit à
i cette première détermination. Plus j’ ai fuivi les
plans que m’infpiroit le defir de perfectionner la
Géograpkie-Phy/ique, & plus j’ ai fènti que c’étoit
le moyen de nous débarraffer des fyftèmes & des
affertions vagues, & de parvenir à la connoiflance
de la marche de la nature par la connoiflance des
réfultats de fes opérations.
§. V . Cailloux charriés par les rivières^
M. Boules a tort lorfqu’ il prétend que l’Ailier
n’aYair aucun tranfport de pierres le long de fon
lit : il eft vifible qu’il a fait de ces tranfports fur
de grands trajets ; car on y trouve des laves fort »
loin de leurs gîtes. 11 en eft de même de la Loire;
car on y trouve, particuliérement à Nevers, beaucoup
de matériaux d’amont. Il en eft de même à
Orléans,!où l’on trouve nommément des quartz
& des granits.
Voici un grand fait qui détruit tous les raifon-
^nemens de M. Boules. Non-feulement l’ Y onne,'
mais même la Seine, l’Aube & la Marne ont fait ;
de grands & d’immenfes tranfports de pierres que
leurs eaux courantes ont roulées, polies & d é - .
pofées à tous les niveaux des croupes de leurs
vallées : ce font des graviers plats calcaires qui
ont pris leur origine au deflus de la craie, l’ont,
recouverte, & fe font établis au-delà. Je vais plus
loin, & je dis que quelques-uns de ces graviers
plats fe trouvent dans les dépôts des environs de '
Paris & à tous les niveaux : on en trouve dans le
canal de la Seine, & même dans la traverfée de
Paris.
On voit chaque jour que ces mêmes rivières
éprouvent des mouvemens vermiculaires; ce qui
ne peut fe faire fans les tranfports des pierres &r des:
fables qui fe trouvent dans leur lit , & qui pafîent
fucceflïvement d’ un bord efearpé à la pointe d’urr
plan incliné > & de la pointe d’un plan incliné à la
pointe d’un autre plan incliné'lors des crues.
Je regarde les rochers où fe fait la perte du
Rhône comme une digue naturelle qui arrête par"
conséquent, comme les digues, les matériaux que
la rivière peut charrier.
Qu’on examine toutes les rivières torrentielles
qui, dans leurs débordemens, entraînent des pierres
, des graviers & des fables fur les terres voi-
fines lorfque les digues des moulins les forcent à
fortir de leurs lits , & qui étendent leurs ravages
fur une grande étendue de pays.
J’ai remarqué de même dans le lit d&la Vienne,
pieds de profondeur, & au milieu duquel filtre
j l’eau qui abreuve les puits de la ville : au reltc,
cette eau , que l’on peut confidérer comme fta-
gnante, tient en diflblution beaucoup de fel marin
au deAus & au deftous de Limoges, des morceaux :
de granits qui ne font point roulés ni polis comme !
les cailloux roulés ordinaires. Il en eft de même des
autres rivières du Limoufin & de l’Angoumois >
mais elles font toutes barrées par des digues de
moulins fort fréquentes, lefquelles s’oppofent à '
tout mouvement des pierres fur le lit de ces riviè- .
res : les feules pierres roulées qui fe trouvent dans
leur li t , viennent des avalaifons latérales.
Ces cailloux ou galets ont été tous arrondis &
polis par la mer , & dépofés le long de fes limites.
Ç ’eft une erreur d’attribuer aux fleuves & aux
torrens la forme de tous les cailloux qu'ils charrient,
& qu’ ils détachent chaque jour des amas
que la mer a faits à deux époques différentes :
i° . le long des bords du baflin de la mer où a été
formée la moyenne terre, c ’eft-à-dire, le long des
limites de ces maflifs & fur la ligne où il confronte
avec l'ancienne terre ou les maflifs graniteux;
i° . le long dts bords du baflin de la mer où
la nouvelle terre a été formée, c’eft-à-dire, actuellement
le long des limites des maflifs les plus
modernes fur la ligne où ils confrontant, ou bien
avec l’ancienne,, ou bien avec la moyenne terre.
Au defliis de ces deux limites fucceflives on ne
voit point de cailloux roulés dans les lits des fleuves
ni des rivières > au deflus ils s’y trouvent abon-.
damment, ayant été détachés & roulés par les
eaux courantes, & particuliérement dans les crues
que les fleuves 8c les rivières éprouvent de tems
en tems. .
Par conféquent, fi les fleuves n’ont pas ufé &
arrondi les cailloux roulés, on ne peut pas leur
attribuer les dépôts de ces cailloux qui fe trouvent
quelquefois à de grandes hauteurs au deflus
de leur lit àétuel : ce-fbot vifiblement les reftes des
dépôts faits par la mer lorfqu’elle couvroit le continent
à cette hauteur.
C A L A IS , ville de France, département du
Pas-de-Calais. Cette ville eft bâtie fur une paptie
des dunes qui bordent le détroit de la Manche,
& fe prolongent jufqu’à Nieuport. Si l’humidité
de l’ atmofphère n’a pas , fur cette c ô te , des effets
aufli fâcheux qu’on auroit lieu de le-craindre, on
doit furtout l’attribuer à l’a&ion des vents impétueux
qui ne manquent pas de balayer les émanations
malfaifantes des marais les plus voifins. Il n’y
a peut-être pas de canton où les vents exercent
un empire plusabfolu, & où les variations de-
l’air foient aufli fréquentés & aufli fubites. D'ailleurs
, le froid s’y fait fentir vivement lorfque les
vents font au nord ou à l’eft. En été même, lorfque
ces vents régnent, un jour de pluie fuflfit pour
refroidir tellement l’atmofphère, qu’on eft obligé
de fe chauffer à Calais.
Les murs des maifons de Calais, où l’on trouve
du natrum criftallifé, ont leurs fondations pofées
fur un banc de fable verdâtre, très-fin, rempli de
débris de corps marins, & placé à douze ou quinze, |
à bafe terreufe , & du nitre aufli à bafe ter- '
reufe. Il y a grande apparence que le natrum provient
du fo l, c’ eft-à-dire, de la portion de fel
marin contenue dans la nappé d’eau qui fournit
aux puits d é jà ville. C ’eft la bafe de celui qui fe
décomp.ofe.
La connoiflance qu’on a acquife depuis quelque
tems fur la conftitution du fol du royaume, &
fur les caufes de fa fertilité , qui eft parfaitement
femblable à celle du fol de la Flandre françaife
maritime & de la Flandre autrichienne, & par la
qualité des eaux qu’ il contient & par celle des fels
qui y font diffous , & furtout du natrum , qui, en
petite quantité, peut entretenir une certaine fraîcheur
& une certaine humidité qui y font végéter
très-vigoureufement les plantes, même dans
les plus grandes fécherefles.
C ’eft aufli à la conftitution de ce même fo l , que
l’air du Calaifis doit une partie de la grande humidité
qui y règne, & donc ons'eft affiiré par plu-
fieurs expériences très-décifives.
CA'LAis (Ifthme & Détroit de ) , placé entre
deux mers libres, & où le flux & le reflux fe
font fentir vivement contre les côtes efearpées.
L’aètion des marées auroit fuffï pour détruire in-
fenfiblement cet ifthme. J’en juge par les côtes
de Normandie & par celles du Boulonnots, qui
font minées chaque jour par les vagues. On ne
peut obje&er les fables qui envafent une partie de
ces g olfes , puifque c’eft l’effet naturel des eaux
des fleuves qui fe déchargent dans les golfes.
Il faut obferverque la pente des terrains qui
bordent les deux golfes fitués aux deux côtés de
l’ ifthme , part de cet ifthme, & détermine les eaux,
d ’un côté vers la mer d’Allemagne, & de l’autre
vers la mer de l’Oueft.
Ce font ces deux mers qui ont travaillé , par
des courans , à creufer le fond & à miner les
bords. C ’ eft ainfi que les deux rivages, qui étoient
d’abord près l’un de l'autre, font à préfent éloignés
de fix lieues , & emportés à la moindre
profondeur qu’ il y ait dans ces deux baflins ou
manches.
On regarde allez. communément le baflîn de la
mer comme ayant été du premier moment cir-
confcric & terminé par des bords tels que nous les
voyons. On ne réfléchir pas qu’elle s’eft formé &
creufé elle-même fes limites, & que toutes les
côtes plus ou moins efearpées ont été battues par
les vagues, fapées & affouillées avec d’autant plus
d’avantage, qu’elles étoient, comme dans le cas
préfent, d’une matière tendre & crayeufe ; au
moyen de quoi on peut aflurer , d’un grand nom-
i b r e , qu’elles ont été reculées de beaucoup, & ,
pour peu qu’on ait obfervé avec fo in , on pourra