
difioures, plus groffières & plus abondantes, font
foutenues par la vitefle de l’eau, qui, ralentie,
n’en peut plus foutenir que des parties légères &
très-divifées. Si l’on examine bien attentivement
ce travail, on trouvera que, par la fuite des fiècles,
les fleuves doivent former des dépôts a fiiez confi-
dérables dans les parties du baflin de la mer, voi-
lines de leurs embouchures, & que même ces dépôts
peuvent être difperfés au loin dans le bafïin ,
s’étendre & fe mêler avec les dépouilles des animaux
marins qui fe multiplient, foit le long des
côte s , foit dans l’intérieur du baflin.
Tous ces produits accumulés ont pu fuffire dans
la plus grande partie des mers pour compofer des
continens, ainfî que nous l’avons déjà indiqué.
Lorfqu’on compare ce qui a dû s’ opérer dans
nos mers avec ce que nous voyons fur la plus grande
partie de nos continens, il n'y a pas de doute que
nos coniinens n’ aient été conftruits lits par lits par
les vafes 6c les autres matières que 1. s fleuves &
les rivières des anciens continens portoient dans
les baflins où ils fe raffembloient , & que cette
conftru&ion ne foit la fuite d'un travail fort long.
Ces anciens continens & ces mers ont dû en con-
féquence fubfifter comme nos continens 6c nos
mers, plufieurs fièiles, pour opérer ces effets par
Tadlivité des caufes qui y ont vifîblement concouru,
ainfî que nous l'avons démontré ci-devant.
Ces anciens continens nourrifloient des plantes,
ces anciens plateaux de continens étoient peuplés
des mêmes plantes & des mêmes arbres qu’on y
trouve aujourd’h u i, 6c c’tft fur les bords extérieurs
de ces plateaux, dans là nouvelle terre de
l'Angoumois, qu’on a découvert, à une certaine
profondeur , des débris d’arbres que les fleuves
du Limoufin avoient entraînés & dépofés. Dans
ces cas il n’y a nul changement dans le climat :
cependant il y a eu des circonftances où les retraites
de la mer& fon changement en terres fèches
ont produit celui des climats ,& relativement aux
anciens continens qui ne donnent~plus les mêmes
plantes, parce que leurs productions 6c leurs af-
peéts font changés. Voilà ce qui a occafionné cette
révolution dans un grand nombre de circonftances.
Je ne connois pas au refle quelle a pu être la
caufe de cette révolution qui a mis à découvert les
parties du globe qui font les produits des dépôts
faits dans le baflin de la mer, & qui a fubftitué à
cette mer une autre mer plus reculée , laquelle ne
produit plus les mêmes coquillages} mais je fais,
parl’obfervation, que ce fait eft arrivé, que les
monumens naturels qui font répandus partout en
font des témoins beaucoup plus authentiques 6c
plus fûrs que tout autre témoignage qui auroir pu
j ’altère?. Les empreintes de ces faits font marquées
partout ên caractères ineffaçables, & font aufli
multipliées qu’elles font inconteftables : leur force
ne s’àffoiblit ni ne s’altère pas par le laps du tems.
ii paroît au refle que ces changemens ne fe font
pas opérés peu à peu } mais tous les faits nous
noncent une révolution fubite qui a brufqué les
dép’.acevnens de plus d’ une efpèce.
Je pourrois démontrer qu’il n’y a de changemens
fur les bords de la mer aéluelle que par les dépôts
formés à l’embouchure des rivières & des fleuves :
voili la feule caufe aCtive qui ait pu produire ces
effets d’une manière fenfîble : toute autre caufe ne
peut avoir que des progrès que l’obfervateur ne
peut pas fuivre , mais dont feulement il peut faifîr
les réfultats.
C e pourroit être l’objet d’ un chapitre de géogra-
phie-phyfîque , 6c l ’examen des embouchures des
fleuves & le rapprochement des phénomènes for-
meroient un tableau intéreffanr, qui détruiroit les
affertions vagues qu’on a hafardées fur les changemens
de mer en terres, & de terres en mer.
On réduiroit par-là les chofes à leur véritable
valeur & à leur vrai point de vue.
Les golfes, comblés à l’embouchure des fleuves,
fe fout par les dépôts de ces fleuves, au lieu que
les golfes , comblés à l’origine des fleuves , font
formés par les dépôts foufmarins.Voilà une différence
effentielle.
Les vallons de l’ancien Allier 6c de l’ancienne
Loire étoient bien moins alongés que l’ Ailier actuel
& la Loire aétuellej ils avoient à leurs embouchures,
des golfes que des dépôts foufmarins ont
comblés.
D’où vient cette différence-là? Pourquoi les
dépôts des fleuves aétuels ne s’organifent-ils pas
fous la mer, mais l’éloignent au contraire ? Les
golfes diminuant ou de profondeur ou de nombre
fur les côtes , il s’enfuit que ces côtes tendent à
cl’ égalité, à êtiemoinsdenteiées, à préfenter moins
d’enfoncemens} mais il n’en efl pas moins inté-
reflant de reconnoître l’ancien état des parties
comblées par les dépôts des fleuves, & à circonf-
crire leur étendue ancienne.
Dépôts des rivières.
Les dépôts formés par les rivières d’une certaine
étendue méritent d’être obfervés fous deux
points de vue différens, 6c quant à la nature des
matériaux primitifs que les eaux courantes ont
détachés des parties fupérieures de la vallée , &
quant à la pofîtion & à la hauteur où fe trouvent
ces dépôts.
On reconnoît dans la nature des fables, des
pierres roulées , l’ancien emplacement de ces fubfl-
tances , la route qu’elles ont faire & le progrès
des deftruéfcions par les eaux courantes.
Dans la pofîtion relative de chacun de ces matériaux
dépofés par les eaux courantes on reconnoît
quelle a été la fuite du travail de l’ eau dans l’ap-
profondifîement de toute la vallée } car les matériaux
détachés des bords élevés des croupes dans
les parties fupérieures de la vallée voifine des
I fources fe trouvent dépofés fur les parties correfpondantes
des parties moyennes ou inférieures de j
la même vallée , comme les matériaux détachés de |
la bafe des croupes dans les parties fupérieures
doivent fe trouver dépofés fur les plaines de débordement
actuelles : c ’eft cette correfpondance
de niveau dans les matériaux détachés 6c dépofés
qui annonce que l’approfondifTement de toutes les
parties du vallon s’eft fait également partout ; en
forte que les mêmes circonftances qu’on y remarque
actuellement fe faifoient remarquer dans
les premiers tems où il s’ébauchoit comme dans^
le tems où il étoit à moitié approfondi. Voilà les
objets que la géographie-phylïque obferve, fuit
& compare pour en tirer toute la théorie de l’ex cavation
des vallées par les rivières. Avec ces fe-
cours tout s’éclaircit, on remonte vers les tems
reçûtes, & par une fuite de faits non interrompus
on parvient à l’état aCtuel, ou plutôt de l’examen
de l’état aCtuel on s’élève aux différentes époques
qui ont précédé.
Dépôts des rivières fujètes aux crues.
Je crois que les dépôts des rivières , comme la
Seine & la Marne, fe font avec de certaines circonftances
qu’on n’a point encore examinées ou
anaiylées. Il y a peu de changemens remarquables
dans le tems que les rivières n’éprouvent point de
crue ou d’augmentation, & que leur maffe d’ eau
qu’elles charient, eft fournie par les fources feulement
} mais dès qu’une certaine crue commence
à fè faire fentir dans le courant de la rivière, l’eau
commence à exercer fur le fond de fon lit une
certaine force qui fait cheminer , de proche en
proche, d’abord les vafes, enfuite les vafes & les ,
graviers les plus légers ; & à mefure que la crue '
fait d<.s progrès, les graviers plus confidérables
font transportés. Les obftacles des vannes & des
retenues ou digues de moulins ceflent 6c s’ouvrent
aux longs tranfports qui font proportionnels, 6c
pour la quantité 6c pour la longueur d’eau que les
rivières reçoivent par accroiflement. Il fe fait
eh même tems des affouillemens confidérables qui
creulent chaque partie du lit des rivières, 6c qui
eh abaiffent pius ou moins le niveau. Tous ces
effets fe foutiennent dans toute la longueur du canal
des rivières tant que la crue a lieu ; mais dès
que le raientiffement 6c la diminution de l’eau fe
font fentir, c’ eft un autre ordre d’effets qui commence
à s’établir. Avant il y avoit plus de tranfports
que de d é p ô t s préfentement il y a plus de
dépôts que de tranfports.
Dans tous les tems d’une crue il y a tranfports,
affouillemens 6c dépôts,• car les parties fupérieures
(du canal fe dégarniffent pour charger les parties
moyennes , .& celles ci pour charger les parties
inferieures : ceci eft une fuite d’effets foutenus qui
s’étendent dans toute la longueuivdu canal. Cependant
eft comblé «Tune'quantité prodigieufe de matériaux
, avec tous ces effets, comment eft-il arrivé j
que le fond des vallées de la Seine & de la Marne I
, & que malgré cela le lit fe creufe , & tes
bords ou berges diminuent j car il eft vifible que
le rempliflage de la vallée eft la fuite de la tendance
que l ’eau a à former beaucoup plus de dépôts que
de tranfports , & cependant, en approfondiflant
fon l i t , en diminuant la hauteur & l’épai fleur des
berges, il femble qu’ il y auroir une autre tendance
d’ agens en fens contraire j il femble que cette
dernière force fe feroit oppofée au îempliffage
des vallées , qui eft proportionnel à la diftance de
la fourcedes rivières. Les rivières ont formé, à
la longue, des dépôts dont la fomme a comblé leur
lit dans une proportion aflez régulière, & malgré
cela je vois que le lit aCtuel des rivières , -quant à
la fuperficie des berges, fe trouve au de flous du
niveau aCtuel. Quant au fond du li t , il y a grande
apparence que ce fond s’élève encore. La diminution
du volume d’eau, foit dans l’état de crue,
foit dans l’érat moyen , doit occafionner ces baiffe-
mens dans le niveau des dépôts,
Si l’on fuit toutes les côtes, tes plates-formes
voifines d’ un can -1 ou d’un vallon, telle que la
Loire, ou la Seine, ou la Dordogne, on trouvera
conftamment que les dépôts torrentiels de ces li-
vières font de la nature des terres & des pierres
que les eaux des parties fupérieures de tout le baf-
fin qui s’étend au defius pouvoient entamer & entraîner
, & qu’en conféquence les dépôts que ces
eaux ont pu faire , fontaüujettis aux coupures que
les premiers torrens ont faites. Partout où ils. ont
IaiflTé des marques du paffage de leurs eaux & des
veftiges de leurs cours, ils y ont laiffé en même tems
des traces de leurs dégradations.
Par conféquent la difpofition générale de ces
dépôts eft au même afpeCt dépendant toujours dft
la route que fuivoient les premiers courans déjà
affujettis à une ébauche de canal.
Voilà une obfervation générale , 6c qu’il eft
aifé de'vérifier partout’ en fuivant des rivières,
foit qu’elles aient voituré des matières fertiles ou
infertiles , qu’elles aient entraîné des ful'-ftances
d’une nature différente de celle où les dépôts fe
font faits., ou de la même nature à peu près.
On fent bien que les eaux fe font portées des
parties élevées dans les parties plus baffes ; que leur
marche ancienne eft encore tracée par les rivières
qui leur ont fuccédé , & que c’ eft en fuivant ce
même plan de diftribution des eaux courantes qu’on
peut fe rendre raifon à foi-même de tous ces phénomènes
dont je viens d’expofer un précis.
Dépôts des plaines fluviales.
Il femble que les dépôts des plaines fluviales font
plus confidérables vers les extrémités des plans
inclinés, que le long du pied des bords efearpés.
Les premiers dépôts font la continuation de ceux
qui recouvrent le plan incliné, & paroiffent l’effet