
contribué à l’abaiffement du niveau des eaux de
la Baltique & à la diminution de fes baflins: c’étoit
à cette feule confidération que devoir fe borner
la grande & longue difpute entre les favans de la
Suède fur cette mer -, mais comme ils y ont mêlé des
di feu (fions étrangères, il n’eft pas étonnant qu'une
queftion aufli (impie , & qui auroit pu fe décider
par des obfervations fufceptibles d’une grande
prétifion, ait donné lieu à tant d’écrits dont la
plupart font peu inftruétifs'.
On y rappelle aufli des faits d’une époque bien
antérieure à celle de la formation des Méditer-
ranées, telle que nous l’avons fuppofée ci-devant ;
car on a examiné les dépôts de l ’O céan, qui datent
d’un tems plus ancien que celui auquel on doit
rapporter les dépôts de la Baltique ; car , comme
-nous l’ avons mis en principe, fi la formation du
badin des Méditerranées a commencé à l’époque
où les fleuves ont creufé leurs vallées 8c déblayé
les matériaux qpi les rempliffoient 3 elle a continué
par l’aétion des mêmes eaux courantes qui ont
réuni leurs canaux en détruifant les bords de chaque
embouchure.
On peut aifément recônnoîrre 3 par l’obferva-
tion 3 que les eaux de la Baltique ont laiffé^à découvert
une grande étendue de terre du côté de
l ’ Allemagne, de la Poméranie, de la Pruflè, & c .
i ° . Il y a beaucoup de fables & de cailloux roulés
à une très-grande diftance des rivages aétuels,
comme nous le dirons par la fuite. En lecônd lieu,
on trouve à une grande diftance des côtes de cette
mer, des étangs & des lacs qui font vifiblement
l ’ouvrage des vagues, lefquelles , refoulant les
fables contre les eaux courantes des rivières, en
ont bouché les iffues. Ces lacs , ces étangs, font
fort communs dans la Poméranie 8c dans la Finlande
: on ne peut douter qu’ ils ne foient d’anciens
étangs des bords de la mer Baltique. On a
cherché de petits faits dans la difpute fur la diminution
de l’eau de la Baltique ; mais un fait phy-
flque de cette importance doit avoir des fuites ,
des conféquences qui prouvent beaucoup mieux
les démarches de la mer, que tous les faits hifto-
riques qu’on peut avoir recueillis pour ou contre.
Ceux que nous citons font les feuls monumens
qu’on puiffe admetrre comme preuves phyfiques.
Dans la difpute des Suédois on ne s’eft attaché
qu’à de (impies faits hiftoriques , fur lefquels on
ne favoit quel parti prendre. Je ne prétends pas ,
au refte, que cette mer ait quitté toutes fes côtes
également > car il y a grande apparence que certaines
côtes ont été abandonnées dans des parties
par une retraite fuiv ie, pendant que d’autres ont
anticipé fur les baflins terreftres.
Je le répète , (i l’on confidère toute l’étendue
des baflins terreftres de cette mer 8c celle de
la fuperficie de la terre qui y verfe fes eaux, on
verra aifément quelle a été naturellement formée
par le rendez-vous de ces fleuves 8c rivières, &
que ion baflin n’eft que le réfui tac de la réunion
de tous ces canaux particuliers qui avoient leur
débouché dans la mer d’Allemagne : par confé-
quent on ne peut pas la regarder comme un lac ,
mais comme une grande & large embouchure d’une
grande quantité de fleuves.
Cette mer peut être confidérée comme une
preuve que toutes les Méditerranées font l’ouvrage
des fleuves qui s’y jettent, 8c qu’en général
les inégalités des bords de la mer, les enfoncement,
les golfes ont été produits par l’aétion de
l’eau intérieure des continens , qui a une activité
continuelle, plutôt que par l’aétion des vagues
qui ne minent que très-peu , 8c qui n’ a pu pénétrer
ainfi dans les terres par une ouverture aufli
étroite que le détroit du Sund.
Le Sund n’ a donc pas été ouvert tout à coup
par l’Océan, mais il a été l ’ancien canal, l’ancienne
embouchure des fleuves qui ont dû fe décharger
dans la mer affez abondamment & avec
une certaine vit^ (Te, lôrfque les différentes parties
du baflin de la Baltique n’étoient pas encore agrandies
comme elles le fpnt, ni le baflin creufé, parce
qu’alors l’évaporation ne pouvoir être affez abondante
pour fuffire à l’enlèvement des eaux fuper-
flues de la Baltique. '
C ’eft pour mettre toutes ces vérités effentielles
en évidence, que j’ai fait figurer deux Cartes de la
mer Baltique ; la première , où j’ai joint au baflin
-de cette mer les baflins terreftres des fleuves &
des rivières qui s’y jettent > la fécondé, où je
continue les lits particuliers de ces fleuves dans le
baflin maritime, tel que je conçois qu’il exiftoit
dans les premiers tems. Ceci fait voir les progrès
du travail de l’eau dans l’agrandiflèment de l’embouchure
de chaque fleuve. J’ai déjà dit que , dans
la grande difeuflion au fujet de la diminution du
niveau des eaux de la Baltique, on n’avôit pas fait
entrer tous les élémens néceffaires à la folution de
ce problème‘curieux > car il n’ a pas été queftion
de ces différens états par lefquels je prouve que la
mer Baltique a paflfé, & , par cette confidération,
je ramène la queftion à fes véritables termes j car ,
de part 8c d’autre , il me paroît qu’on les a méconnus,
& qu’on a confondu furtout les époques.
Il eft évident que Feau de la Méditerranée a été
plus élevée qu’elle ne l’e ft, lorfque les fleuves
n’avoient pas encore réuni & élargi leurs canaux >
& d’ailleurs, il y a grande apparence que chacun
des fleuves dans ces tems donnoit plus d’eau, 8c
ces deux circonftances ont fuffi pour augmenter le
niveau, au lieu que, par la fuite, les circonftances
contraires ont concouru à fa diminution.-J’ajoute
que d’ailleurs tous ces faits n’annoncent point
une diminution abfolue des eaux de la mer en
général > car comme ce golfe tient fes eaux fépa-
rées descelles de l’Océan avec lequel il n’a qu’ une
très-petite communication, les différens états par
lefquels l’ eau de la mer Baltique a pu pafler, ne
peuvent avoir aucune correfpondance à l’Océan,
ni autorifer les conféquences qu’on pourroic ea
tirer relativement à la diminution de la maffe de |
fes eaux en général.
La quantité de l’eau de la Baltique 8c la hauteur
de leur niveau dépendant de la quantité de l’eau
des fleuves qui s’y rendent , il eft clair que les j
diminutions ou augmentations qu’elle éprouvera, j
doivent avoir pour origine les changemens que la j
culture des terres oçcafionne chaque jour dans
l’ eau des fleuves. O r , comme ces changemens font ;
connus, il s’enfuit qu’on ne doit pas avoir recours ;
à d’autres caufes hypothétiques dont l’influence
eft aufli difficile à établir que l ’exiftence.
Details fur l'intérieur du bajjin de la Baltique.
Depuis la bouche orientale du Sund jufqu’ à l’île
de Bornholm, la Baltique a de neuf à quatre-vingts
brades de profondeur ; de là jufqu’à Stockholm ,
de quinze à cinquante, 8c un peu au fud de
Lindo, foixante. On trouve dans ce trajet plu-
fieurs bancs de fable, mais aflez enfoncés fous
l’eau. Entre Alands-Haff 8c parmi les îles Alandës,
à côté de l’île d’O z e l, dans le golfe de R ig a ,
les profondeurs varient' de foixante à cent dix
bralîes. Il y a beaucoup de lacs d’eau douce qui
en ont davantage : ainfi l’on doit en conclure que
cette mer a très-peu de profondeur en général,
8c qu’elle n’eft fous cette confidération que la
fomme des embouchures des rivières qui y affluent.
L’étendue en longueur de la Baltique eft très-
confidérable : d’Elfeneur, où proprement elle commence,
jufqu’à Cronftadt, à l’extrémité du golfe
de Finlande, cette mer a huit cent dix milles marins
d’Angleterre j fa largeur, entre Salurie en
Smaland & le rivage oppofé, eft de deux cent
trente-fept milles.
De l’île de Rugen, le baflin de la Baltique eft
droit & ou vert, excepté où il eft interrompu par
l ’ile de Gothland.
Au-d e là de Stockholm, la Baltique 1 Ce‘divife
comme en deux golfes : celui de Bothnie, 8c celui
de Finlande. Le premier court au nord, & fon
baflin fe trouve dans un maffif immenfe de granit,
de mile forte que, fur-les côtes, le pays offre des
mafies détachées de cette même pierre. Sa plus
grande largeur eft entre Gefle & A b o , dans la
Finlande, où elle embraffe une étendue de cent
quatre-vingt-quinze toifes. Le granit fe termine
en Laponie, pays arrofé par la rivière de Tornéa,
navigable fort avant dans les terres. Le pays offre
une fuite de montagnes couvertes de forêts non
interrompues, de vaftes marais, de rivières, de
lacs fort nombreux traverfés par ces rivières : ces
lacs & ces rivières fervent de retraite à des milliers
d oifeaux aquatiques, qui s’y rendent l’été
pour y faire leur ponte, dans la paix & loin des
atteintes des hommes. Linné nous apprend que
ces oifeaux, en grand nombre, vont chercher en
automne des rivages & des climats plus favorables.
Les lacs 5c les rivières font aufli peuplés de p o if - ,
fon's, de peu d’efpèces il eft vrai, mais dont chacune
eft nombreuse : ce font des faumons en grande
abondance, qui remontent jufqu’à la fource des
rivières de Tornéa & de Kimi pour y dépofer
leur frai j le char s’y trouve dans les lacs , 8c
l’ombre dans les rivières : on y pêche des gv/inia-
des du poids de huit à dix livres, des brochets
qui ont jufqu’à huit pieds de longueur, des perches
fort groffes; enfin,le faumon albula termine
la courte lifte des poifîons qu’on pêche dans cette
partie de la Laponie.
Dans les contrées méridionales de ce pays, la
civilisation & la culture ont profpéré depuis long-
tems. On y trouve plufieurs cantons bien peuplés,
des marais defféchés, & la raifon s’ y eft tellement
perfectionnée parmi ces peuples, que beaucoup
d’entr’eux fe font unis avec les Suédois, & qu’ ils
ont même envoyé leurs repréfentans à la chambre
des payfans dans les diètes nationales. Ils furent
dans tous les tems les plus laborieux de cette
race : ils accoutumèrent le renne au traîneau, l’ap-
privoifèrent, & le fubftituèrent au boeuf 8c à la
vache.
L’embouchure du golfe de Bothnie eft remplie
d’un groupe nombreux d’ îles fort petites & d’é cueils
dangereux pour la navigation. Aland eft la
'principale de ces île s , qui préfente partout l’af-
peét de rochers efearpés.
C ’eft de là que le golfe de Finlande s’étend
droit à l’eft : on voit far la côte feptentrionale
une chaîne d’îles femblables. Toute la cô te , ainfi
que ces îles, eft compofée de maffes graniteufes
rouges & grifes : les côtes de Suède font des
mêmes matériaux, mêlés de pierres de-,fable.
La Finlande & la Carélie font les bornes du
golfe d’ un cô té , la Livonie & l’ Ingrie de l’autre.
Le golfe diminue en profondeur de foixante brades
à cinq en avançant vers Cronftadt j de ce port il
y a douze milles de baffes-eaux jufqu’à Péterf-
bourg.
Quelques auteurs ont prétendu que la mer Baltique
communiquoit avec la Mer-Blanche, & ont
cru reconnoître les veftiges de cette communication
dans les lacs nombreux que préfente leur
intervalle, ainfi que dans l’état de la terre qui
offre prefque partout le maffif primitif des granits,
couvert de dépôts modernes formés par des cailloutages
& des graviers abondans j enfin , dans
les fragmens de granits détachés de Ja grande
maffe.
Ils croient retrouver les portions de ce canal de
communication de la Mer-Blanche à la Baltique ,
dans les lacs Siouda & V ig o , qui forment une
chaîne affez fuivie de la Mer-Blanche au lac Onega.
Les lacs & les rivières étant d’ailleurs fitués dans
des lieux bas, femblent offrir les reftes d’un canal
: c ’eft là le détroit, félon eux , par lequel la
marée fe verfoic de la Mer-Glaciale, & couvroic
de fon flux les îles quePomponius Mêla a décrites.
C ’eft ainfi qu’on peut expliquer comment la Scan