
gne. La chaîne qui va aboutir à Morèfes,eft toute
differente : la plus grande partie du terrain juf-
qu’au Commet eft une terre végétale , propre au
froment, & tous les rochers qui l’environnent,
font des bancs calcaires. Prefqu’au pied de cette
montagne il y a beaucoup d* oliviers i ils ne viennent
que dans les terres végétales calcaires, & propres
à la production des fromens, ou dans les terres
végétales, débris des ardoifes tendres. Ils neréuf-
fiffent pas dans les terres végétaL-s graniteufes.
C ’eft un coup-d’oei! allez fatisfaifant pour un
naturalifte, que celui que préfentent les deux côtes
d’une montagne des Cévennes 'd'une allez grande
étendue, dontia malTe intérieure eft du talcite, le
milieu d’une ardoife fine, & le Commet de pierres
calcaires par bancs, tandis que d’un autre côté on
apperçoit une autre montagne qui a une ou deux
lieues de large, fur autant de longueur, & dont le
maflif elt de granit tendre. Les rochers , qui font
par blocs , font formés d’un granit plus ou moins
dur, qui, à melure qu’on avance vers le Commet
de la montagneeft d’un grain plus Cerré. Ce
granit Ce trouve auilî le long des petites rivières
de ces cantons, & toujours par blocs arrondis.
Dans toute cette contrée il n'y a que du granit
’& point de pierres calcaires. Les matièrés dominantes
dans cette partie des Cévennes font les rochers
de granit & les terres végétales qui font les
débris des granits tendres. Telle eft la conftitution
du Col de cette contrée montagneufe : à meiure
qu’on s’en écarte on trouve les ardoifières ou
Cchiftes durs & tendres, enfin les pierres calcaires
par bancs.
La montagne qui paffe au deffus d’Alais à An-
duCe, à Saint-Hippolyte, eft remarquable par fes
interruptions & par fes brèches, qui ne fë trouvent
préciCément qu’à la rencontre d’une rivière ou
d’un ruifïeau dont les eaüx ont beaucoup de pente,
parce qu’elles descendent de montagnes fort élevées.
Plus on examine ces interruptionsplus on
les trouve dignes d’attention, & plus, oh eft au-
toriCé à perifer qu’elles pôurroient bien entrer dans
Je plan des changemens du Globe terreftre, & être
regardés comme des monumens qui ferviroient à
éclairer quelques points de théorie des plus an ■
ciennes révolutions. Il eft en effet a fiez fingulier
que dans un pays tel, par exemple, que celui des
Cévennes, où les montagnes font quelquefois entaf-
fees fans ordre , on n’en trouve point qui Soient
tellement difpofées , qu’elles forment, par la réunion
de leurs vallons ,- un baffin confidérable qui
n’eût aucune iffue , ou qui n'eût qu’une feulé ouverture
pour recevoir les eaux d’une rivière 3 en
forte que ces eaux ne puifient s’échapper autrement
qu’en s’ élevant julqu’au bord du baffin pour
s’échapper par-deffus , après y avoir formé un lac
coifidé râble. Les plus petits ruifléaux, comme les
plus grandes rivières, ont pour tous un écoulement
par une pente qui n’eft point arrêtée, & qui
ëft plus ou moins grande ,*félon que le terrain eft
plus ou moins au deffus du niveau de la mer. Lorfque
le cours en eft traverfé par une chaîne dè
montagnes ou de rochers , la chaîne eft à coup
fur. interrompue en cet endroit fi la rivière n’à
pu fe détourner commodément fur les côtés. Loin-
d’être une difpoiïtion établie par l’auteur de la
nature dès l’origine dés montagnes & dés rivières,
ne feroit-ce pas plutôt un .effet naturel, poftérieur
à la formation des continens , qu’on peut rappeler
à des lois connues ? Ne feroit-il point arrivé à
cette chaîne un événement approchant à celui qué
la tradition rapporte du détroit -.de Gibraltar?
Pour juftifier des foupçons & des conféquences
fi raifonnables, il eft aifé de faire voir que les rochers
ont été réellement percés par l’aélion. des
eaux de là rivière. On auroit tort d’imaginer que
la rupture fe foit opérée au tems où la maffe des
montagnes étoit molle, comme quelques nattira-
iiftes ont voulu nous le faire croire 5 car la rupture
de nos.continens eft de beaucoup ptaftérieuré
à.cet ancien état, s’il a fubfifté. Ainfi nos continens
n’étoient pas mous lorfque les ravages des
eaux ont culbuté dans les Cévennes tant de rocS
ifolés & entafles lès uns fur les autres] ils n’étoient
point mous lorfque la chaîne d’Andule a été rompue
& coupée par un torrent dont une médiocre
rivière occupe la place aujourd’hui. La chaîne de
rochers eft coupée jufque dans fes fondemens, dé
la largèur précisément du lit de la rivière, & celle'
que lui ont permis de prendre deux coteaux qui
bordent la rivière dans ion courant, & qui fe terminent
à la chaîne. Elle a laîffé de part & d’autre
deux rochers de marbre, d’une hauteur à peu près
égale] favoir : de vingt-cinq à trente toifes, fi
également efearpés , qu’ils font taillés prefque
partout à plomb. Ils forment une gorge qui livré
un paffage afifez étroit à la rivière.
O r , n’eff-il pas vifible ici que fi ces matières
de marbre euffent été molles au tems de la rupture
, ce débouché auroit été bien plus large, &
ne feroit point efearpé comme il l’eft. Si certaines
circonftaaces favorables s’etoient rencontrées, les
deux rochers tiendroient par le fommet & for-
meroient une arche fur la rivière, comme on lé
voit dans une chaîne de rochers qui traverie la rivière
d’Ardèche en Vivarais, au lieu nommé lé
Pont-de- V Arc.
Quelle folidité ne falloif-il pas qu’eüffent alors
les bancs de la terre pour refter ainfi fufpennus en
l'air après avoir été rompus par le pied ? On pour-
roit même dire que les. digues de rochers qui tra-
verfent nos chaînes & nos vallées en certaines
contrées, & du haut defquelles les eaux fe projettent
avec bruit, font de même les bafes des
rochers emportés, comme ceux dont il eft ici
queftion , avec cette différence qu’au défions des
premiers la rivière avoit fans doute uae pente ra-
pidé , & emportoit le terrain inférieur qui étoit
mpins folide : c’eft ainfi que fe font formées une
càtara&e Sr une'chute d’eau.
Cette
Cette dernière obfervation eft parfaitement
d’ accord avec ce que j’ai dit ci-deffus fur les cataractes,
& d'ailleurs établit très-bien quelle étoit
la folidité des terrains dans les âges de ces def-
trudtions, & combien les eaux courantes ont
trouvé dociles les chaînes de montagnes quand 1
elles ont été obligées de s’ouvrir des débouchés
pour fe frayer un écoulement jufqu’à l'Océan
Plufieurs obfervateurs ont fuppofé que nos fleuves
& nos rivières avoient été autrefois bien plus
confidérables qu’ils ne le font. En examinant les
rochers de talcites 2Jt de granit qui occupent certaines
contrées des Cévennes, & qui fourniffent les
noyaux des cailloux & des graviers de toute ef-
pèce, lefquels fe trouvent dans le lit des rivières ,
sis ont reconnu très-aifément leur origine & les
agens qui les y ont voiturés] ils n’ont pas douté que
ce ne foit la fource des galets arrondis des rivières]
ils font d’ailleurs portés à croire que les cailloutages
parfaitemenr femblables à c e u x - là &
dont un canton des environs, nommé B refis , eft :
rempli, forment une fuite dé coteaux iort élevés
au deffus du niveau du Gardon ou de la rivière
qui traverie le pays. Les cailloux & les galets
de Bréiis font de même niturë que ceux du
Gardon] ils font ufés & arrondis de la même manière.
En faut-il davantage pour être fondé à conjecturer
que le terrain de Bréfis, quelqu’élévé
qu’il foit aujourd'hui, quelque place qu'il occupe,
tire fon origine du golfe du Gardon ou. d'une
rivière qui traverfoit les Cévennes, & une contrée
de même nature ? J'ajoure que , creufant un puit's
très-profond, on en a tiré ces mêmes galets &
cailloux. On doit donc fe pèrfuader que la rivière
Veff portée de ce côté ou à cette profondeur, ou,
ce qui eft plus vraifemblabie , que tous ces maté- ;
riaux & leur difiribu'tipn dépendent de 1 étendue ;
du golfe où les fiots de la mer ont pu jouer &
arrondir ces noyaux de graviers. Ainfi les diffé- :
rentes matières qu'on en tire, confirment l'opinion
que tour a été travaillé dans un golfe, & qüe
ce n’ eft qu’à des époques anciennes que le niveau
des eaux atreignoic d'abord le fommet des coteaux
de Bréfis dans les premiers âges. Définitivement,
tout s’explique par Tétablilïement d’une vallée-
golfe , & de ce qui a dû s’opérer, dans ces cori-5-
tréës, à la fuite de la retraite de U mer.
' CÉYLAN. Cette île , firùéè à l’orient du cap
Cômorin , a.quatre-vingts lieues Vie lohgueur, fur
trente dans fa plus grande largeur. Dans lés fièeles
reculés, elle étoit connue fous le nom de Trapo-
hane. On peut conjecturer, avec vraifemblance,
que cette teire, qui n’eft qu’à quinze lie'ues du
Continent, en fut détachée, dans dés tems plus
ou moins reculés, par une fuite dés motivemens
dé la mer. L'efpace qui fépare Ceylan dè là pointe
dû cap Comorin , eft rempli de bas-fonds qui empêchent
les vai fléaux d’y naviguer. Dans'quelques
intervalles feulement on trouve quatre à cinq
Géographie-Phyfiquc. Tome I lL
pieds d’éau. C ’eft dans ce détroit que fe fait 1*
pêche des perles , qui fut autrefois d'un grand
rapport > mais on a tellement épuifé cette fource
de richeffes, qu’on n’y peut revenir que tous les
cinq ans j car le banc d’huîtres a befoin de ce tems
pour fe repeupler de maniéré à fournir une pêche
un peu abondante , & qui dédommage des frais.
CEZE , rivière qui fort (Jes Cévènnes, & va fe
rendre dans le Rhône au deffous de Bagnols. C'eft
celle de toutes les rivières du Languedoc dont les
orpailleurs retirent le plus de paillettes d’or. 11
paroi t que ces orpailleurs , non-feulement font le
lavagê des terres dans fon l i t , mais qu’ils fe font
mis. fur le pied de s’éloigner de fes rives, de telle
forte que les propriétaires des terres voifines fe
plaignirent qu’ils détruifoient leurs terrains pour
y chercher des paillettes d’or. D’autres propriétaires,
pour terminer ces conteftations, leur ven^
dirent la permiffion de chercher l’or dans leurs
terres. Totis cés faits prouvent qué les mines d’of
en grains & en paillettes font furtout contenues
dans les terrés qui quelquefois font àffez éloignées
des rivières aurifères, pourvu qu’elles foient toujours
voifines dés montagnes où elles prennent'
leur fource.
CHABANOIS , ville au département de la
Charente f arrondiflement de Confolens, à trois
lieues & demie fud.de cette ville, & à trois üeues
lin quart de Saint-Junien , fur la Vienne. On peut
obferver le granit à bandes depuis Chabanois juCi
qu’ à Saint Junièn, avec quelques îles fort inté-
reflantes de granit à grain uniforme.
J’ai vu à Chabanois lés fragmens de pi- rres , débris
de granit voiturés par la V ienne, qui n’étoient
ni ufés ni arrondis. Il eft vrai que la rivière éroit
au commencement de Ton cours , ainfi qùe toutes
celles qui y afflueat. J'ajouterai, au refte , qu’l
Châtellêraut lès débris de granit qui fortent du
Limoùfin, ne font pas arrondis à un certain point.
J’ai remarqué le long des bords de la Vienne,
au deffus & au deffous dé Chabanois, fur une étendue
de deux lieues, une fuite non interrompue
de vallons affluens, tous abreuvés, foit fimples
vallons, finiples filets > foit d’rime certaine longueur,
même avec embranchement à leur naif-
fance. Cette obfervation mérite d’autant plus
d’être difeutée , que fes détails annoncent plus
particuliérement la naiffance d’ une grande quantité
de filets d’eau fortant du granit à bandes donc
j’ai fuivi les maffifs , lefquelles bandes lotit des
moyens de l’imbibition des eaux de pluies, & les
rendent en même raifon qu'èlles les reçoivènt.
Je ne puis trop infiftër fur cette organifation
deS^grànits èii Limôufin, & fur la circulation dès
eaux à la luperflciè de la terre qui en ëft là fuitei.
C'eft ainfi que je me fuis inflruit, pendant le.féjour
que j'ai fait én Limoüfin, par l’étude de ces maffifs
lînguliers qui font la bafe dè plufieurs phénomènes,