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Les principaux creux-dans lefquels on pêche, ! poiffon dans la terre. Quelquefois , lorfque les
font au nombre de dix-huir. V oici leurs noms î | pécheurs ne font pas alertes , à peine peuvent-ils
Maljoberch , Karnine , Sueinskojamma , Vodonos , j lever le filet deux fois avant que l'eau foit partie.
Louretfchka , Kraloudour , Refcheto , Ribeska- Pour prévenir cette furprile, ils ont une marque
jamma, Rethje,Sittarza, Lipanza, Gebno.Koteu, auprès de ce creux? c'eft la pierre appelée du
Am z , Zeflenza, Pounigk 5c Levilche. Outre ces
creux il y en a plufieurs autres moins confidéra-
bles, & dont on ne tient point compte 3 parce
qu'on n’y pêche pas comme dans ceux que je viens
de nommer.
Dans les mois de juin , juillet 8c août 3 lorfque
ce lac commence à fe retirer 3 il eft foue-à-fait lee
en vingt-cinq jours s’il ne fur vient- pas de grandes
pluies, 8c les dix-huit creux font tous vidés, l’un
après l’autre 3 dans un certain ordre de t.ems qui
n'eft jamais interverti.
Quand le lac commence à baiffer, ce qui paroît
fur une certaine pierre qu’on obferve, k s habitons
du village d’Oberdorf ou Seedorf en donnent
avis à tous les pêcheurs du voilà nage , qui font
appointés par les différens feigneurs auxquels appartient
cette pêche. Les habitons die ce village
ont la charge, non-feulement d'épier la retraite
de l'eau, mais encore d'avoir foin que perfonne
ne s’avife de pêcher dans le lac lorfqu'il eft pleinJ
la pêche étant alors défendue > ils font donc pour
ainfi dire les gardes du lac.
r. Le premier creux-, nommé Maljoberch , n’eft
pas proprement un creux comme une chaudière $
c'eft feulement une déprèffion du fond., fans aucun1
tfou j mais il y croît beaucoup d'herbes, &. on y
prend beaucoup de poiffon. Trois jours après que
J'eau a commencé à fe retirer, ce creux eft vide j
alors le clerc de lai paroiffè de Seedorf èn foie le
lignai par le fon à*une cloche, & tous les habicans
de la ville , vieux 8c jeunes , hommes & femmes,
Jaiffent toute autre affaire de c ô té , & vont à la
pêche nus comme la main, fans qu'aucun motif
de honte ou de modeftie les arrête. Ils partagent
en deux la totalité du poiffon r une partie appartient
au feigne-ur du lieu $ l'antre moitié eft pour
eux.
2. Le creux Velkjoberch eft vide le troifième
jour après le premier. La manière de pêcher 8c le
droit for la pêche font les mêmes.
3. Quatre heures après ce creux, le creux Ka-
mme commence à fe vider. On y pêche ordinairement
avec un filet à mailles étroites ( trah ie ) ,
comme dans quelques autres creux de moindre
importance.
4. Saeiftskojamma fe vide une heure après Ka-
mine. On y prend beaucoup de poiffon 8e quan*
tité de greffes écreviffes ; mais elles font maigres
8e peu favoureiïfes.
Le cinquième creux, Vodonos, fe defleche
cinq jours après Karnine* Dans celui-ci & dans les
foi vans on pêche-avec un long filet ou feine. On
ne peut y lever lé filet que cinq ou fix fois , a
cau fede la gronde violence avec iaquètlè l'eau fe
précipite vers les trous du fon d , & entraîne le
pécheur, qui, dès qu’elle commence à paroître à
fleur d’eau, indique qu’il eft tems de commencer
la pêche. 6. Le creux Louretfchka fe vide un jour 8c demi
après Vodonos. La pêche s’y fait de la même manière,
8c il faut les mêmes précautions à caufe de
la retraite fubite des eaux.
7. L’eau quitte le creux Kraloudour douze
heures après Louretfchka.
8. Le creux Refcheto eft mis à fec trois jours
après celui-là. Dans ce dernier, en l’année 1683 ,
le lac ayant été quelques années fans être à fe c ,
on prit, au premier coup de filet, vingt-une charretées
de poiffon, dix-lept au fécond, 8c neuf au
troisième. (Onentend par charretées autant qu'un
cheval peur traîner. ) 1
9. Le creux Riheskajamma fe deffèche en même
tems que Refcheto, qui eft le plus proche. On.
pêche fous terre dans ce creux? ce qui eft une
cUriofité amalante , 8c une chofe toute différente
des autres pêches. Il y a au fond un grand trou
dans la pierre, par lequel les hommes peuvent-
aifémem defcendFe, avec des torches allumées ,
comme dans une citerne profonde, & ils fe trouvent
dans une grande caverne voûtée , dont le
fond ou le pavé e ft, comme un crible, tout percé
de petits trous par lefquels l'eau s'enfuit, 8c laiffe
Je poiffon à fec au pouvoir du pêcheur.
10. Le creux Rethje eft vide deux heures après1
les précédera. Il n’eft pas de grande importance
pour la pêche. Une heure après celui-là ,
11. Le creux Sittarza, 8 :, dans cinq à lix heures
de plus,
1 1. Le creux Lipanza, font à fec. |
13. Le troifième jour après Refcheto, le creux
Gebno eft évacué. On fe fert rarement de filet
pour y pêcher ; mais on le laiffe vider. Les trous
du fond étant fi petits qu'un homme peut à peine
y fourrer fa main, tous les gros poiffons relient à
fec dans le creux.
14. Deux jours après Gebno, le creux Koteu
devient fec. On prend quelquefois le poiffon dans
celui là comme dans le précédent $ ma-is les trous
étant plus grands, on perd plus de gros poiffons.
ly. Le creux AmzTe vide quatre à cinq heures
après Koteu. Les pêcheurs larlfènt rarement écou-*
1er l'eau fans y jeter leurs filets comme dans
Gebno, à moins qu’ils ne paillent pas faire autrement,
parce qu'il y a dans le fond un grand trou
par lequel beaucoup de gros poiffons peuvent s’é chapper.
16. Le creux Zeflenza batffe trois heures après.
On y pêche toujours avec des filets, comme dans
17. Le creux Pounigh-, qui etiévacué le lendemain
après Koteu#
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iB. Le dernier creux, appelé^ Levifehe , s’éva-
tue le troifième jour après Pounigh, c’eft-à*dire,
le vingt-cinquième jour après que l’eau du lac a
commencé à fe retirer > de forte q u e , dans 1 ef-
pace de vingt-cinq jours, la pêche de ce lac eft
terminée. Des perlonnes dignes de foi ont affuré
que , dans ce dernier creux , il tomba une année,
dans le te ms de la pêche, un coup de foudre qui
étourdit une grande multitude de gros poiffons,
d î forte qu'on en ramaffa vingt-huit charretées.
Ces poiffons n’étoient pas proprement foudroyés j
ils n'étoient qu'étourdis par la violence du choc
& par la vapeur fuifureufe du tonnerre -, ce qui
les faifoit furnager corrçme morts à la furface de
l'eau j mais fi on les pfenoit 8c fi on les mettoit
dans de l’eau fraîche, ils revenoient bientôt >
autrement ils périffoient. C ’eft un accident qui
n’eft pas rare dans ce lac.
La pêche étant ainfi terminée , un lignai eft
donné par une cloche. A ce fon tous les habitans
des vi.lages voifins & de Cirknit[ , fans diltinétion
d’âge ou de fe x e , entrent , pour la plupart tout
nus, dans le la c , & cherchent de poiffon parmi les
joncs , les herbes 8c dans k s petits creux. Plufieurs
fe gliffent dans les cavernes 8c paifages foute
rrains, 8c y trouvent beaucoup de gros poif-
fons. Ils font alors en pleine liberté de chercher
partout le la c , excepté dans les creux Pianze,
Natte 8c Velkjoberch.
Outre les creux dont nous avons parlé, il y en
2 quelques autres dans le lac, comme Skednenza,
Maia 8c Velka- Bobnarza, où l’on pêche aulïi,
comme encore dans Mala-Kalouza 8c Velka-Kar-
louza. Dans ces derniers on va fous terre avec des
torches allumées, 8c on trouve du poiffon ? mais
ces creux ne font pas d’un grand produit. Dans
Ve ka-Bobnarza on peut entrer dans de grands
trous , 8c deffendre à .plufieurs braffes dans la
terre. Ces deux noms, Velka oc Mâla-Bcbnarza ,
fignifient, en langue carniole, le grand & le petit
tambour. Ce n’cit pas fans raifon que ces creux
font ainfi nommes, car lorfqu’il tonne, on y entend
comme le battement de plufieurs caiffes.
Les deux creux Narte 8c Pianze ne font jamais
vides , mais ils demeurent toujours marécageux
lorfque/le refte du lac eft tout-à-fait fec. On croit
que les poiffons iaiffent leur frai dans ces creux j
c’eft pourquoi la pêche y eft prohibée, li s’y
trouve un nombre incroyable de fang-fues qui
s’attachent Couvent à ceux qui pêchent, 8c la méthode
qu'on emploie pour s'en défaire eft de
faire pilier quelqu’autre perfonne fur la fan g-fus 5
ce qui lui fait lâcher prife.
Il y a fur la montagne auprès du la c , mais un
peu plus haut, deux grandes cavernes pierreufes,
l'une nommée Urainajamma, l'autre Sekadulze,
q u i, quoique très-eloignées l ’une de l'autre, ont
cependant le n ime effet 5 favoir : lorfqu'il éclaire
& qu’il tonne, ces deux grottes jettent de l'eau
avec une force étonnante 8c incroyable, 8c quel-
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que foi s , en même tems, une grande quantité de
canards , avec du poiffon.
Lorfqu’il pleut modérément, l'eau jaillit avec
violence » à deux ou trois braffes de hauteur perpendiculaire
, des creux Koteu 8c Zeflenza ; elle
fort aufli avec force de la fource Tréfenz, ainfi
que du creux Velkjoberch, emmenant avec elle,,
de ce dernier , beaucoup de poiffons 8c quelques
canards. Mais lorfqu’il pleut fort 8c long-tems de
fuite, furtout avec du tonnerre, l ’eau arrive avec
une force excefïive, non-feulement par les creux,
les trous 8c les cavernes dont nous avons parlé,
mais encore par plufieurs milliers d'autres petits
- _ trous qui font répandus dans tout le fond du lac,
8c q u i, lorfque le lac eft à fe c , engloutiffent les
eaux des huit ruiffeaux qui s’y rendent 5 ils forment
des jets d’eau de plufieurs braffes de hauteur,
les unes perpendiculaires, les autres obliques,
en forte qu'on ne peut rien voir de plus
beau dans ce genre. Les creux Vodonos, Refcheto
8c quelques autres qui ont des trous dans
le fond, vomiflènt avec l'eau une grande quantité
de poiffons. Dans les grandes pluies, les huit ruiffeaux
s'enflent auffi beaucoup -, de forte q ue , par
le concours de toutes ces caufes, ce la c , en vingt-
quatre heures, de fec qu'il é ta it , devient rempli
d'eau, 8c quelquefois il ne faut pour cela que dix-
huit heures, quoique d'autres fois on l’ait vu être
trois femaines à fe remplir -, mais c ’eft une obfer-
vation confiante, que les. orages avec éclairs 8c
tonnerres aident beaucoup à le remplir promptement.
Ce la c , ainfi humide 8c fec tour-à-tour, fert
aux habiwns de plufieurs manières. f°. Tandis
qu’ il eft plein d’eau , il attire diverfes elpèces
d'oies 8ç* canards fauvages, 8c d’autres oiféaux
aquatiques, comme d e s .h é ro n sd e s cignes 8c
autres, qu’on peut tirer au fufil, & qui font ex-
celîens. 2°. Auliitôt que le lac eft vidé , ils enlèvent
les joncs 8c les mauvaifes herbes, qui fourni
fient une excellente litière pour les beitiaux.
30. Vingt jours après qu’ il a été tout-à-fait fec,
ils y fauchent une très-grande quantité de loin.
4°. Dès que le foin eft enlevé , ils labourent 8c
lèment du millet, qui quelquefois » par le retour,
trop fubit des eaux, fe trouve détruit? mais pour
l’ordinaire il parvient à fa maturité. y°. Pendant
que.le millet eft.en végétation, ils prennent un
grand nombre de cailles. 6°. Le millet étant recueilli,
il refte un bon pâturage pour le bétail.
70. Dès, que le lac eft à fec , ii y vient une quantité
de venaifon des montagnes & des bois voifins,
tels que des lièvres, des renards, des bêtes fauves,
des iangÜers, des ours, 8cc. 8°. Lorfqu’ il eft plein,
on peut y pêcher. 9P. Dans l’hiver , la glace qui
le couvre eft fi forte, qu'elle porte toutes fortes
de voitures, 8c c’eft une grande commodité pour
le tranfporc du bois & autres denrées. 1.0. Enfin,
au moment où l’eau fe retire, il fournit, comme
nous l’avons d it, une .uès-grande abondance de