
558 C R I CRI
principales montagnes, maritimes , leur diftribu-
tion & leurs formes;
Elles commencent, comme nous l’avons déjà
d i t , à Boulaclava , & courent de là parallèlement
aux bords de la Mer-Noire jufque près de Caffa,
formant une chaîne qui n’éprouve, que très-peu
d'interruptions. Leur hauteur» quoique non po-
fîtivement mefurée, furpafle probablement trois
cents fàjènes en plufieurs endroits. On n'y rencontre
nulle part des débris de corps marins.
La chaîne qui commence à Boulaclava parcourt
environ trente verftes, conservant toujours la
même élévation : il s’en détache enfuite une partie
auprès du village d’Aloupha, q u i, s’éloignant
de la mer, parvient jufqu’ à Yalta. La côte, fëpten-
trionale de cette chaîne eft peu efcârpée & couverte
dé bois, & la méridionale, efcârpée dans
les parties Supérieures » n’offre des. pentes que
vers le bas. La roche qui fe montre dans ces ef-
carpemens eft partout uniforme, c ’éft-à-dire , de
pierre calcaire , compacte, d’ un gris-foncé, &
donne de rôdeur quand1 on la frotte. La partie inférieure
de cette chaîne, qui eft en talus, fe termine
en bords efcarpés lorfqu’elle eft parvenue
à la mer. Elle confifte dans un fond argileux1, où
l’eau des pluies 8c des neiges fondues a creufé de
profondes ravines, autour desquelles-on voit plusieurs,
blocs de pierres tombées des hauteurs : ces
ébouleraens de maffes. de pierres éparfes çà & là
s?étendentj u fque fur ie rivage de la mer.
Dans tous ces ravins 8c fur les bords des ruif-
fèaux- on trouve de grandes couches de fchiftes
de différentes efpèces, dures 8c fragiles, parmi
lesquelles on rencontre- auffi be.: iicoup d*ardoifés
en rognons, pour la plupart de forme rondej 8c
même en quelques endroits l’atdoifè des toits,
noire, qui fe délite eu lames minces , ne fait
point efferveScence* avec les* acides. Toutes ces
qualités* prouvent qu elle eft propre- à la couverture*
des maifons. Dans ces bancs argileux il
n-’eft pas rare de trouver auflll’efpècede fchilte noir
q u i, fe defféchant & fé fendant à l’ air en petits
morceaux , en-recouvre-de grands efpaces. L’eau-
en extrait du fel maTin , qui fe criftalité le long
de certaines parties des bords des ru-Üfeaux qui
les* reçoivent. Le* fol fuperficiel' des parties baffes
de ces montages , qui lémb’leroit devoir être fté-
r ile , produit malgré cela,, dans quelques-endroits ,
des b o is , des, pâturages, & même dès plantes
qui ne fe rencontrent pas ailleurs. Les jardins
plantés, le long de la. côte , depuis Boulaclava
julq.it à. Yalta , fe diftinguent de tous l'es, autres,
par la grande variété 8c. l’excellence de leurs
arbres fruitiers.
Si l’on recherche lès caufes* de- ce tte fertilité',
on ne peut l’attribtier qu’à cette grande quan-
tïté dé four ces 8c de fontaines-, dont Teau entretient
line humidité continuelle dans le ftm de là
terre : ceci eft confirmé aifément par- là ftérilicé
j des lie u x ,q u i, ayant le même fo l, font privés de
toute humidité.
! Dans toute cette* chaîne on rencontre, fur les
fommets , des plaines vaftes & étendues, où la
pierre calcaire compare eft quelquefois à découvert
: en certains endroits cepen iant lés
fommets font couverts d’une couche épaiffe de
terre qui produit les meilleurs pâturages. Les
habitans de la côte y font paître leurs troupeaux
en é té , 8c ils y jouiflènt de l’avantage d’être pré-
férvés des. piqûres des infeétes.
La plaine qui du pied de ces montagnes s’étend
jufqufà la mer, eft couverte de champs cultivés
& de jardins: les deux petites rivières d'Akarfou
& de Balkuffou qui L’arrofent, contribuent à fon
embelliftcment j La dernière furtout fait mouvoir
trois moulins, en conféquence de la pente du
terrain où fon lit eft creufé. Le cercle d’Yalta,
ainii que tous les environs-de la côte , abonde
en fontaines 8c en ruiff-aux dont on tire de grands
avantages.
D’Yalta- jufqu’ à Lonfchta la grande chaîne de
montagnes offre la même compofition & un grand
nombre d’éboulemens vers leurs bafês. Près d’Yalta
fe voient de grandes fentes 8c de grands déphee-
mens. Dans les bancs & prèsdf’Ourfève, des blocs
détachés des lommets de la chaîne font épars le.
long de. fa bafe. La montagne du cap élevé ,
voiiin du village de Parchenide, offre des pierres
d’un gris-clair 8c foncé,.qui renferment en même
tems des criftaux de fchorl & des paillettes de
mica} elles font fufcepcibles* de prendre le poli.
Les blocs dom les croupes dé cette montagne font
revêtus de ces pierres, font la plupart dans, une
fituation verticale , pendant que fon fourniet eft
recouvert de grandes dalles carrées de la même-
pierre dans une fituation horizontale.
A cinq verftes de ce cap on trouve une autre
montagne auprès du petit Lambat, comp. fée de
1a* même efpèce de pierre, mais pas auffi élevée.
Elle forme un autre cap dont les rochers font
fendus de mille manières, & d’immenfes débris
détachés du fornmet font difperfés le long des
parties inférieures, & même jufque dans la mer..
A une aflèz grande diftanee des bords on voit
plufieurs de ces blocs au dèffus de la furface de
l’eauj enfin tout le rivage,dans l’étendue de quelques
verftes , offre des blocs de pierre calcaire
rouge, dont les fentes ont reçu l’ infiltration d'un
fpath blanc qui* les'remplit1 exactement.
Près d'A lonfchta1 la- grande chaîne eft interrompue,
& deux grandès montagnes détachées
d'elle' forment une belle &? riche vallée-. Une de
ces montagnes s’élève en- borcte efcarpés vers fon
fornmet, &- toute fa'partie inférieure eft en pente
douce. La côte- du nord» s'étend environ« douze
verftes, 8c celle du £ud quinze* verftes jufqu’ à la
mep, 8ê elles font* toutes deux* formées* par une
fuite dfc* bancs* argileux 8t d-e*différens fchiftes. Elle
a , fur ton-famine c-, des plaines unies Sc étendues*,
C R t
en partie formées de couches de pierres, en
partie d’une couche de terre qui produit des
plantes alpines. Dans le milieu ce Commet offre des
pics élevés , qui font la fuite des déplacemens
de bancs calcaires , dont plufieurs font dans une
fituation verticale.
Au fud fa partie inférieure eft couverte de
bois épais, qui s’étendent au nord jufque près
de fes fommets : feulement plus ces bois s’approchent
des cimes élevées, plus ils font rares,
ne formant vers le haut que des bocages fort
peu «ferrés.
Un de ces bocages recèle un vafte trou, où
la glace fe conferve toute l’année : il n’ eft pas
cependant auffi confidérable que celui dont nous
avons parjé, car il n’a pas plus de quatre archines
de diamètre, & environ quatorze fajènes de
profondeur. Dans quelques fentes qui fe trouvent
au fornmet -de la même montagne la neige fe
conferve également, même en été. Cependant
elles ont peu de profondeur > feulement elles font
bien à couvert des rayons du foleil. Cette formation
& confervation de la glace prouve la grande
élévation de cette montagne , qui d’ ailleurs eft fou-
vent couverte de nuages, ainfi qu’ on l’apperçoit
d-i côté dePerecop, à plus de foixante-dix vérités.
Par un tems clair on peut voir de fon fornmet
,prefque toute la partie occidentale delà prefqu’île
Taurique , & particuliérement la vafte plaine qui
s’étend vers Koflow & la Mer-Noire.
La fécondé montagne , qui forme la plaine voi-
fine d’Aloufchta, ne lui cède guère en élévation.
Sa longueur fe dirige d,u nord au fud. A l eft , fur
un de fes flancs, on trouve à fes pieds 1 argile 8c
des bois. Vers le fornmet on trouve des bancs calcaires
femblables à ceux des montagnes que nous
avons décrites. A l’oueft les bancs argileux du pied
font mêlés dedifférens lits de fchiftes: on y trouve
auflî d’immenfes bloirs de poudmgues fendus &
brifés de mille manières j ce qui préfente les traces
de grands déplacemens. Quelques-uns de ces blocs
de poudingues reffemblent à de hautes tours, à
des colonnes. Quelques-ans de ces blocs font fi
fragiles , qü’ on les biife à la main , d autres font
extrêmement durs. Ils font les uns & les autres
compofés de pierres calcaires, de q u a 'tz , de
grands & de petits cailloux roules, tous cimentés
cnfemble par une pâte argileufe.
Toute la partie fupérieure de la montagne, couverte
de ce poudingue, eft ftérile > mais vers ia
bafe elle n’èft pas dénuée de fertilité. Le fol eft
propre à la culture de différentes efpeces d arbres
& autres plantes. ^
Les montagnes qui s’étendent de la ve^ *e
nord préfentent la même forme, la même ftruèture
& la même compofition intérieure , foit en pierre
calcaires ,'foit en fchiftes, & les mêmes accidens.
A quelques verftes de la vallée ou le village
attuel d’Aloufchta éft fitûë., la chaîne des grandes
montagfies maritimes recommence, 8c continue
C R I 55g
enfuite fans interruption jufqu’ à Ouskuth, retenant
à environ dix verftes éloignée de la cote.
Tout l’efpace compris entr’elle & la mer eft
occupé par de hautes montagnes , dont Jes bafes
font argileufes. Quant au refte, elles font de même
nature que celles qu’on trouve entre Yalta 8c
Aloufchta , & que nous avons décrites.
Dans les vallées, le long des ruiffeaux qui y
coulent, le terrain èft affez ftrüle •; mais fur les
hauteurs il ne peut être amélioré que par le fe-
cours des arrofemens.
En face d’Ouskuth de médiocres montagnes
s’étendent jufqu’ à la mer. On rencontre,dans leur
intérieur, d’épaiffes couches de pierre argileulè
noire 8c grife, -fur laquelle fe forment quantité de
criftaux de roche , qui , par leur pureté 8c leur
tranfparenee, ne le cèdent en rien aux autres
criftaux orientaux. Ils tiennent par leur bafe à des
maffes de quartz folide.
On trouve auffi parmi ces fchiftes, des poudingues
-difperfés.
’ D’Omkutk à Soudak la chaîne :fe dirige de la
même manière que d’ Alouf. hta à Ousikuth : on
n’ y remarque ni dans la nature des pierres , ni dans
les propriétés de fon fo l, aucune différence.
La côte de la mer eft formée enfuite des mèmès
montagnes argileufes ftéïiles dont nous avons décrit
la compofition.
Près de Soudak toute la contrée.préfente h
même compofition de montagnes, le même détordre
dans les éboülemens des bancs de pierres
calcaires qui fe font inclinés à l’horizon : de
même les lits de fchiftes qui occupent le pied-des
montagnes paroiffent avoir pris des fituations variées
& différentes. Quelques-uns de ces lits renferment
des criftaux de fcnorl & des mines dt* fer.
Les fommets des montagnes font entourés de rochers
calcaires bouleverfés de différentes manières
, & qui s’ élèvent en pics 8c en demi-
combles .
Les fameux vignobles de Soudak, qu’on pré*-
fère à tous ceux de la Tauride , occupent entre
les montagnes dont nous venons de parler, une
grande vallée qui s'étend fur une longueur d’ environ
dix verftes jufqu’ à la mer. Le fond du:tol eft
une argile grifâcre , mêlée d’une terre noire &
graffe , & de gravier, & au deffus de laquelle
fe trouve une autre argile dure , rougeâtre. La
quantité innombrable de tources qui entretiennent
ce fol dans une humidité continuelle facilite non-
feulement la produ&Lon des meilleurs raifins, mais
auffi d’autres fruits délicieux dont Ls arbres etn-
•belliffent ‘ce vignoble.
De Soudak à Gaffa c ’eft le même fyftème dans h
compofition des montagnes, dans leurs formes, dans
| leur culture, dans leurs produ&ions. Vers lamer les
'hauteurs tont taillées à p ic , formées la plupart de
{ poudingues, dont lès blocs détachés des maffes
montueufes fe font répandus à leurs pieds, dans
•ie fond des Yalléés & jufque daps la mer. Dans les