
organifation, ou, fi l’or» veut , des filamens extrê* 1
mement fins, qui fe dirigent prefque toujours
parallèlement ; ils femblent reluire à travers la
fuperficie, & n’empê hent pas que cette fuperficie
ne foit fort liffe.M. Pallas croit effe&ivement
pouvoir lui attribuer une faculté végétative. Ce
ne fauroit être un dépôt formé par les eaux fulfu-
reufes : un pareil dépôt n'auroit ni autant de con-
fiftance, r.i autant de ténacité, ni une épaiffeur
auflfi uniforme & auflî mince. Dans les endroits où
cette peau recouvre des fragmens de végétaux tn
pourriture , on trouve entre deux une matière
d’une nature très-fulfuretrfe, d’ un rouge-pâle, qui
relfemble à de la bouillie, 8c qui fe forme affez
ordinairement, dans d'autres eaux fulfureufes,
autour des plantes.
C e lac a un canal de décharge qui porte le nom
de Monofchlaja-Retska ou Ruijfeau-de-lait, nom
qu’ il porte déjà avant d’entrer dans le lac. Ce
canal eft partout d’ une profondeur affez confidé-
rable. A fon entrée dans le la c , il a plus de fix
pieds de fond : fa largeur eft de deux à quatre
toifes. Les eaux fulfureufes du lac ne commencent
que dans ce canal à dépofer les parties calcaires &
fulfureufes dont elles font chargées, lefquelles
prennent, en fe précipitant, la forme d’ une bouillie
ou gelée d’ un blanc de la it, ou quelquefois un
peu jaunâtre. On voit diftin&ement les fines couches
de cette matière, qui fe font formées fuccef
fivement fur la fuperficie de ce canal, particuliérement
au deflus des morceaux de bois qui font
allés à fond j & dans nombre d’endroits, ces morceaux
de bois en font couverts de l'épailfeur d’un
pouce. Malgré cela , les eaux de ce canal, ainfi
tapiffées de blanc, conferVent au commencement
toute leur limpidité , & ce n’ eft qu’ après avoir
parcouru un efpace de plus de foixante 8c feize
toifes, qu’elles deviennent peu à peu blanchâtres,
8c reffemblent alors à du petit-lait clarifié. Ce
ruiffeau conferve cette couleur dans toute la longueur
d’ un werft, & la communique à la rivière
de Surgut, dans laquelle il fe jette. Dans les endroits
où ce même ruiffeau, devenant plus profond
, ralentit fa fource , on apperçoit, fur^ la
fuperficie, une pellicule femblable à celle qui le
forme d’ordinaire fur l’eau de chaux.
C e fédiment dont nous venons de parler, prend,
en fe formant, une furface très-liffe, qui eft pour,
l’ordinaire , principalement aux endroits où le
courant eft le plus rapide, parfemée de cette
même végétation fulfureufe dont nous avons fait
mention plus hau t, 8c préfente un phénomène
des plus intéreffans. Ce font de pentes houpes
en forme de pinceau, compofées de filamens fim-
ples , les plus fins qu’ il foit poflïble de fe figurer.
Elles font d’un blanc de lait} mais on n’y apperçoit
aucune organifation fenfible, pas même au
microfcope, 8c jamais elles n’ont au-delà de trois
lignes de longueur. Ces houpes ondoient dans
l’eau comme les moufles d’eau -( confervà-') les plus
délicates, auxquelles elles reffemblent beaucoup
à l ’extérieur. Cependant elles font infailliblement
formées de la matière fulfureufe même dont l’eau
eft chargée, puifqu’eîles en feroient fans cela dans
peu toutes couvertes 8c entièrement défigurées,
ainfi que le font tous les autres corps étrangers
qui fe trouvent au fond de ce ruiffeau-
Toutes les matières que ces eaux dépofent, ne
font autre chofe que du foufrè combiné avec des
particules calcaires que l'eau a charriées après
avoir, par l’effet des propriétés alcalines de la
chaux, attaqué le foufre, 8c avoir produit du
foie de foufre imparfait, dont la nature 8c l'odeut
fe décèlent, dans l’eau même, d’ une manière affez
fenfible. Le canal entier étoit ci-devant revêtu de
''planches, afin que l’on pût ramaffer ce fédiment
dans toute fa pureté 8c plus commodément. Tout
cela fe faifoit au profit des fonderies de foufre qui
exiftoient alors le long de la Sock , 8c dans lef-
quelles on féparoit le foufre de ce fédiment. A
peine apperçoit-on encore aujourd’hui quelques
traces de ce revêtement : les fonderies or.t été
tranfportées fur les bords du Wolga , 8c perfonne
ne s’inquiète plus de ce foufre aquatique. Au
retour de chaque printems, l’ impétuofité du courant,
lorfque les eaux du ruiffeau groffiffent,nétoie,
dit-on , prefqu’entiérement le canal de ce fédiment,
qui fans cela s’y accumuleroit en bièn plus grande
abondance.
il y avoit autrefois., à cinq werfts au deffus du
Ruifleau-de-lait, près du village d’Ifchutkina ,
iîtué à peu de dittance des bords de la Surgut,
deux fources fulfureufes., 8c l’on trouve dans ces
environs-là, fous un lit épais d’ une terre noire
fort chargée de falpêtre-, une efpèce de pouffère -
femblable à de la cendre, contenant des pierres
ca;caires poreufes , qui paroilfent avoir été calcinées.
Nous laiderons à. d’autres à décider fi l’on
peut inférer de la nature de ce terrain 8c de la
forme de la plupart des collines de ce canton,
que les choies ont été mi fes dans cet é ta t , dans
des tems très-reculés, par l’ tffer de quelque feu
foutenain. Peut-être qu’ une couche de terre bitu-
mincufe 8c fulfureufe qui s’étend oit au travers de
cette contrée , aura été confumée par le fe u , &
que dans cet incendie les ^parties fulfureufes de
cette couche ie feront en quelque forte fublimées
dans les cavités des montagnes calcaires fous lesquelles
elle fe trouvoit , 8c qu’a&uellement les
fources qui coulent au travers de ces cavités entraînent
peu à peu ce foufre. Nous ne donnons
ceci que comme de pures conjectures.
Il n’exifteplusaCtuellemenr dansce lieu, qu’ tjne
feule fource fulfureufe dans fon état natuiel. Cette
fource forme dans un bas-fonds marécageux , fur
la rive droite, une efpèce d’étang de moyenne
grandeur, qui ne gele jamais, & qui n’a point
de décharge, fes eaux fe perdant vraifemblable-
ment dans les marais voifins. Différentes circonf- 1 tances rendent cette fource remarquable. On voit
très-diftinélement fon eau fourdre par deux ou trois
bouillons d’une terre femblable à de la cendre} elle
contient beaucoup plus de parties calcaires que
l’eau du grand la c } ce qui n’empêche pas qu’elle
n’exhale une forte odeur de foufre} elle aépoie auflî
en abondance autour des tiges des rofeaux une matière
blanche, femblable à une crème épaiffe 8c fort
chargée de foufre. La moufle dont les bords de l’étang
font garnis , eft revêtue & comme incruftée
d’ un tuf brun, qui fait un effet agréable. Mais ce
qu’il y a de plus fingulier, c’eft une matière qui fe
forme autour de toutes les branches d’arbres ou d’ar-
briffeaux qui tombent dans cette eau j elle confifte
en une gelée affez compacte, qui a plus d’un doigc
d'épaiffeur, d’ un brun éclatant 8c frangée à l'extérieur
} ce qui lui donne toute l’apparence d’une
éponge de mer qui a encore fa bave naturelle : il
n y a d’ ailleurs que la fuperficie de cette gelée qui
foit enduite d’une couche très-légère de ce fédiment
blanc produit par le foufre. Il fembleroit
que cette matière fingulière appartînt effectivement
à la claffe des éponges fpongieufes. Mais
comme ce que nous en vîmes étoit déjà parvenu
à un certain degré de détérioration, il n’étoit pas
poflïble d’en faire une analyfe dans les formes.
Cette matière fe retire confidérablement en fé-
ch in t, 8c décèle en effet, lorfqu’on la brûle,
quelque chofe du genre animal ( i) .
Une chofe qui mérite bien encore d’être ob-
fervée , c ’eft que la pierre calcaire des collines
qui bordent la rivière dex S urgut, n’ eft qu’ un af-
femblage de corps creux, qui ne font guère plus
gros que de la graine de pavotr, mais q u i, lorf-
qu’on les examine plus attentivement, ne font
autre chofe que de très-petits limaçons, tous
d’ égale forme & groffeur. Les cavités de cette
pierre font fouvent revêtues de criftaux de fpath.
Tous ces lacs fulfureux, qui viennent d’ être
décrits ou cités , fe forment dans le même diftriCl
que les fources d’afphalte, ou tout au moins dans
leur voifïnage. Ainfi les fources fulfureufes qui
entretiennent ces flaques d’ eau également fulfureufes
, tirent leur origine de la même chaîne de
montagnes calcaires qui fourniflent la matière des
fources d’afphalte. Si nous fuppofons à prélent
qu’il fuinte a travers les cavités de ces montagnes
calcaires quelque partie de l’huile de pétrole, que
l ’on fait être une des principales parties confti-
tuantes de l’afphalte} que cette huile de pétrole,
après s’être réunie à une eau chargée de la terre
alcaline de la pierre à chaux, vienne à pénétrer
jufqu’au foufre natif dépofé dans ces cavités} que,
ce foufre foit enfuite mis en diffolution par les
(i) Cette production fpongieufe a , félon cette deferip-
tion, beaucoup d’analogie avec une matière femblable que
M. J . À . Marini a trouvée dans les fources chaudes de
V ic c a t i, 5c qui confîftoit pareillement en une gelée fpongieufe
qui brûloir 6c fc; confumoit à la chandelle. Mélanges
de Philof. & de Mathémat, de la Société royale$de Turin.,
ifcjne I V , 1766, 1769.
parties huileufes de la pétrole, à la faveur d’un
degré modéré de chaleur , qu’ on peut très-aifé-
ment fuppofer dans l ’intérieur de montagnes auflî
remplies que le font celles-là de corps inflammables
} que par l’effet de et tte chaleur qui doit augmenter
à mefure que cette diffolution a lieu , la
terre calcaire fe fraie un paffage d’aurant plus libre
pour pénétrer ce foufre , il fe formera confé-
quemment un foie de foufre que les eaux amèneront
continuellement au jour ; ce qui expliquera
tous les phénomènes que M. Pallas vient de décrire
, 8c que nous allons examiner plus en détail.
Le fédiment blanc provient très-vrai femblable-
ment d’une précipitation de foufre détachée du
foie de foufre par l’opération d’un fel acide qui
doit entrer dans le mélange dont eft chargée l’eau
de la fource fulfureufe. Ce fel acide exifte dans
tout bitume. Dans le cas aéluel il a été féparé des
parties huileufes lors du mélange de l’huile de
pétrole avec le foufre ; mais après avoir été charrié
par l’eau dans les lacs fulfureux, il a produit
cette précipitation du foufre, 8c formé ce fédiment
blanc. On trouvera de même dans cette
précipitation opérée par un acide, au moyen de
laquelle le foufre eft dégagé de fon mélange , l’explication
de cette odeur de foie de foufre, qui
rend le féjour des environs de ces lacs auflî désagréable.
Ces petites houpes en forme de pinceau, qui fe
forment fur la fuperficie du fédiment,ne fauroient
être envifagées que comme une criftallifation provenue
de la réunion de l’acide fulfureux volatil avec
l’alcali. On, fait que le fel mixte qu’on prépare de
cette manière fe diftingue du rame vitrioiifé par
une criftallîfation figurée de même } favoir : en
pointes difpofées en forme de houpes, de panaches
ou d’arbriffeaux. M. de Born a obfervé
cette figure filamenteufe dans les tufs calcaires de
différens bains chauds , dans la compofition desquels
il entroit des parties de foufre 8c de chaux.
Cette matière grife, femblable à de la cendre,
qui fort avec les bouillons de la fource, paroit être
la partie terreufe de l’huile de pétrole, qui s’eft
dépofée là en forme de caput mortuum, après que
fes parties huileufes fe font introduites dans le
mélange qui a produit le foie de foufre , 8c que
fes parties falines ont été entraînées dans les lacs
parles eaux. Cette matière.eft aéhiellèmentamenée
dé même de l’ intérieur d e là montagne. Il paroîc
encore que cette terre grife, en forme de pouf*
fière , femblable à de la cendre mêlée de pierres
à chaux calcinées 8c poreufes , qu’on trouve fous
une couche de terre noire chargée de falpêtre ,
n’eft pareillement qu’ un refitJu de cette huile de
pétrole, qui s’étant mêlée autrefois dansce même
; lieu avec le foufre qu’elle y rencontra, ces deux
matières entrèrent d abord, pendant leur diffoîu-
: tion réciproque, en une fermentation dont il ré-
t fulu finalement une inflammation violente, dont les
B i