
couru à l’ouverture des chaînes par les rivières,
font expofées en détail. )
Chaînes de montagnes TJralliennè 6? Alcaïque en Afie.
A l’eft de Peçzora commence le Continent de
l’Afie , qui s’offre avec les limites les plus naturelles
8c les plus énergiques. C'eftlà que fe mon-,
trent les monts Verchotuviens ou la fameufe chaîne
Urallienne.y qui commènce vifiblement près de la
ville de Kungur dans le gouvernement de Cafan ,
latitude 57 deg. 20 min., & qui court enfnite au
nord , & qui finit en face du détroit de Waigat,
& fe relève de nouveau dans l’iie de la Nouvelle-
Zemble. Les Ruffes appellent encore cette chaîne
du nom de Semennoi-Hoias ou Ceinture du Monde ,
parce qu'on croyoit pour lors qu’elle embraffoit
l ’Univers. C’étoient, chez les Anciens, les monts
Riphées : Ripkei montes, pars Mundi damnata h
naturâ rerum & denfd met fa caligine. Les monts Riphées,
portion du Globe condamnée par la nature
à de profondes ténèbres, dont la feule partie mé-^
ridionale était connue des Anciens, & encore fi
imparfaitement , qu’on en a écrit des tables fans
nombre. Au-delà de ces montagnes étoient placés
les heureux Hyperboréens, fur lefquels nous fup-
primerons le s fi étions brillantes que nous a tranf-
mifes Pomponius Mêla. ,
Les Modernes n’ont pas été plus exempts d’exagération
fur certaines circonftances qui concernent
ces montagnes. Isbrandf-Idés qui les traverfa
dans fon ambaffade en Chine, affure qu’elles ont
cinq mille braffes ou toifes de hauteur s d’autres
ont prétendu qu’elles fonç couvertes d’une neige
éternelle. Ce dernier fait peut être vrai dans les
■ plus voifines du cercle polaires mais on fait que,
dans les paffages ordinaires des voyageurs, elles
font dégagées de toutes neiges pendant trois ou
quatre mois de l’année.
Les hauteurs d’une partie de cette chaîne ont
été déterminées par M. Chappe d’Auteroche, qiii
affure que la montagne Kiria, près de Solikamf-
kaia (latitude 60 deg.), n’excède pas quatre cent
foixante & onze toifes en hauteur au deffus du
niveau de la mer , ou deux cent quatre-vingt-fix
au deffus du fol qui lui fert de bafe. Mais, fuivant
Gmelin, la montagne Pouda eft beaucoup plus
haute, puisqu'elle a fept cent cinquante-deux toifes
au deffus du niveau de la mer.
De Pétersbourg à cette chaîne eft une vafte plaine
mêlée de quelques élévations & plateaux, fem-
Mables à des îles au milieu de l’Océan. La partie
orientale defcend graduellement, en pénétrant affVz
longuement dans les bois dé la Sibérie, & forme
un immenfe plan incliné vers la Mer-Glaciale. Cette
difpofirion eft évidente d’après le cours de toutes
les grandes rivières qui prennent leurs fources dans
les contrées les plus élevées. Quelques-unes, à la
diftante très confidérable de 46 degrés de latitude,
après un cours de 2.7 degrés , vont tomber dans
la Mer-Glaciale à la latitude de 73 deg. 30 min#
Le feul Jaïk, qui, naiffant près'de la partie méri-‘
dionale du côté oriental, peut prendre une direction
au midi, va fe jeter dans la Cafpienne. La
Dw'inà, la Peczora & un petit nombre d’autres
rivières de. la Ruflîe européenne démontrent l’in-
clinaifon de cette partie : toutes fe rendent dans
la mer du Nord > mais leur cours, encomparaifon
de celui des autres, ri’eft pas long. Une autre pente
dirige le Dniéper & le Don dans la Mer-Noire,
& le large Wolga dans la Cafpienne.
La chaîne alcaïque, limite méridionale de l’Afie,
commence à la vafte montagne du Bogdo, pafle
au deffus des fources de l’Irtifch & de l’Oby, puis
fuit un cours montueux , inégal, efearpé, plein
de précipices couverts dé neiges, riches en minéraux
dans la partie voifine des fources de l’Irtifch
& de l’Oby : de là cette chaîne s’avance près du
lac Teleskoi à la fource deTOby, puis elle prend
une inflexion par laquelle elle embraffe les baflins
des grandes rivières, & particuliérement celui du
Jenefei. Enfin , fous le nom de' Sàihnes, elle continue,
fans interruption, jufqu’au lac Baikal. Une
branche s’infinue entre les fources des rivières
Onon, Ingoda & Ichikoi, & comprend plufieurs
ma fies moncueufes fort élevées, qui fe prolongent
au nord-eft fans interruption, & féparent ces fources
de celles de la rivière d’Amur, laquelle fe décharge
à l’eft dans l’Empire de la Chine, depuis la
Lena & le lac BaikaK
Une autre branche fe prolonge le long de l’O-
lecma , traverfe la Lena au dèffous de Jakoutsh ,
& fe continue, le long des deux rivières Tongouska
jufqu’au Jenefei, où elle fe perd au milieu de
plaines femées de bois & de marais. La principale
chaîne, hériflee de becs anguleux & de pics, s’approche
des rivages de la mer d’Ockhozt , & s’y
maintient j enfuite, paflant près des fources des
rivières Outh , Aldan & Main, fe-diftribue en
petites branches dirigées entre les rivières, les
plus orientales qui tombent dans la Mer Glaciale.
Je comprends dans ce nombre deux branches principales,
dont l'une, tournant au fud , traverfe le
Kamtzchatka par le milieu , & fe brife, au cap
Lopacka, dans les nombreufes îles Kuriles, & , à
l’eft , formé une autre chaîne maritime dahs les
îles fituées depuis le Kamtzchatka jufqu’en -Amérique.
La plupart dé ces îles, comme le Kamtzchatka
j font remarquables par de terriblës volcans
ou par les traces de leurs éruptions & de
' leurs incendies. Enfin, la dernière chaîne forme
principalement le grand cap Tfchutsky, avec fes
promontoires & leurs rivages èfearpés 6c hériffés
j: de rochers. C’éft d'après le dôéfcèur Pallâs & fes
j favans travaux, comme d’après les belles Cartes
I de T Afie de Danville , que j'ai tracé les limites de
; cette vafte région. J'ai ajouté ailleurs ce qui coa-
cerne les baflins qu'a décrits M. de Fleurieu.
A l’extrémité nord dé la grande chaîne Ural-
lieane eft le détroit dé Waygafz „ qui la fépare dé
la Nouvelle-Zemble. Le paffige.feft étroit, embar- ,
rafle d’îles, & très-fouvent obftrué par les g!aces. J
Ici le flux & le reflux font rendus irréguliers & 1
incertains, comme partout ailleurs, par les vents.
On a obfervéque la marée ne monte que de quatre
pieds, & que la mafle d’eau a dix à douze braffes
ae profondeur.
Chaîne des Alpes en Amérique. .
La terre intermédiaire entre les fources de la
rivière de Bourbon, du fleuve Saint-Laurent & du
Mifûflipi eft la plus haute terre de la Nort- Amérique.
Cette terre fi élevée fait partie des Mon-
tagnes-Ballantes, qui font des rameaux de la vafte
chaîne qui traverfe tout le Continent d'Amérique.
On peut très-bien en prendre le commencement
de l’extrémité méridionale à la Terre-des-États
ou à la Terre-de-Feu. Les Alpes d’Amérique s'élèvent
de,;la.mer, comme des anneaux ifolés, à
uqe hauteur immenfe, noirs , rocailleux, & fur- !
montés de Commets efearpés pyramidaux, affez
Couvent couverts de neiges. On peut annoncer la
Nouvelle-Géorgie comme un autre anneau, fem-
blable en pareilles horreurs, & fe détachant plus
loin vers l’eft. Les montagnes des environs du
détroit de Magellan s’élancent à une étonnante
hauteur , bien fupérieure à celles de l’hémifphère
feptentriônal, fous le même degré de latitude. A
côté nord du détroit de Magellan, elles forment,
à travers les royaumes du Chili & du Pérou, une
chaîne continue qui fe maintient dans le voifinage j
de la Mer-Pacifique. En plufieurs endroits leurs \
Commets font les plus hauts du Globe. Il n’y eh a
pas moins de douze quf ont depuis deux mille
quatre cents toifes d’élévation, jufqu’à trois mille.
Pichincha, qui penche fur Quito,,& qui eft à
environ trente-cinq lieues dé la mer, a fa cime
élevée de deux mille quatre cent trehte toifes au
deffus du niveau de fes eaux. Càyembé, qui eft
précifément placé fous T équateur , â plus de trois
mille toifes , & Chimborazo eft plus haute encore
que la dernière, de deux cents toifes. La plupart
de ces montagnes ont été volcans, & , à différentes
époques , elles ont été remarquables par
des éruptions incomparablement plus terribles que
| celles ' dont: on à été à portée de connoître les
effets dans toutes les autres parties du Globe. Sur
leur face orientale paroiflent des plaines alongées,
fur lefquelles coulent de, grandes rivières, dont le
fleuve des Amazones peut nous offrir un exemple.
Cette rivière coule fur un terrain revêtu de forêts,
depuis la retraite d’où elle fort à Pongo di Borjas,
jufqu’à fon embouchure," où elle reffemble plutôt
à un grand golfe qui entre dans l’Océan atlantique.
;
. Dans rhémifphère feptentriônal, les Andes
paffent >par; ,1’ifthme étroit de Darien , dans le
royaume du Mexique, & confervent une hauteur
majeftueufe & une difpofition volcanique. La montagne
Popocatepec fit une violente érup tion pendant
l’expédition de Cprtez , bien décrite par fon
hiftorien Antonio de Solis. Ce pourroit être le
même volcan que rencontra l’abbé Chappe dans
fa route de Vera-Cruz au Mexique , 8c qu'il conjectura
tout récemment éteint par l’état cù il
trouva les laves. Du royaume du Mexique cette
chaîne fe prolonge au nord & à l’eft de la Californie
5 enfuite elle tourne tellement à l’oneft ,
qu’elle ne Jaifle qu’un intervalle tiès-ptu rrendu
entr’elle 8c la Mer-Pacifique, & des montagnes
fouvent détachées vont s’avancer dans la mer
même, & former, fur fes bords, des caps & des promontoires
remarquables, qui ont été vus & décrits
par les navigateurs qui ont fuivi la côte nord-ouefl
dans le cours de leurs voyages. Une plaine riche
en bois & en favannes ou prairies, couverte de
bifons ou buffles, de cerfs, de daims de Virginie,
d’ours & d’une grande variété de gibier, occupe
une prodigieufe étendue, depuis les grands lacs
du Canada jufqu’au golfe du Mexique, 6c, vers
l’ eft, jufqu’à l’autre grande chaîne, les Apalâches,
-qui font les Alpes de cette fuite, de contrées dans
la Nort-Amérique. Je trouve qu'elle commence
vers le lac Champlain & le lac Georges & jette
des rameaux qui s'avancent obliquement jufqu’au
fleuve Saint-Laurent à l’eft, & qui s’élèvent fur
fes côtes oppofées 5 d’autres qui defeendent, en
décroiffant graduellement, jufqu’au trifte débris
qui nous refte du Nouveau-Monde , la Nôuvelle-
Ecofle. La principale chaîne paffe à travers la province
de New-Yorck, où elle eft diftinguée par I©
nom de Hautes-Terres, fituée à quarante milles
de l’Atlantique : de là elle s’éloigne .de la mer à
mefure qu’elle s’avance vers le fud , & près de
fon extrémité dans la Caroline méridionale elle
eft à trois cents milles de l’Océan. Elle eft com-
pofée de plufieurs chaînes parallèles,.dïvifées par
les plus déiieieufes vallées, & généralement couronnées
d’une très-grande variété de forêts. Ces
chaînes s’élèvent graduellement de i’eft l’une au
deffus de l’autre jufqn’à la chaîne centrale, d’où
elles redefeendenr, & vont, s’inclinant de même
par degrés , vers l’oueft, dans les plaines immenfe?
du Miffiffipi. La chaîne du milieu eft d'une mafle &
d’une élévation confidérables , & toutes enfemble
embraflent une largeur de foixante & dix milles ,
laiffant, dans plufieurs endroits, de grandes ouvertures
pour ia décharge de vaftes & nombreufes
rivières qui naiffent dans le fein des montagnes.,
& verfenc leurs eaux dans l’Océan atlantique ,
après avoir parcouru une navigation fans égale
pour les provinces qu’elles arrofent.
J’ai montré au leéteur la haute &. immenfe plaine
qui s’étend, dans l'Empire ruffe, au-delà de la
j; branche des monts Apalaches, appelés Monts-
fans-Fin : il en eft une autre, d’une étenduè pro^-
digieufe, prefqu’aufli haute que les montagne*
! elles-mêmes. Cette étendue , appelée les Hautes-
S Plaines, eft une terre extraordinairement riche