
47» C O N
de la mer dans les continens, & qu’ ils! h*y ;o$£pas
été dépofes peu à p eu, mais qu’ il faut avoir recours
à un depot immédiat de la mer. Deux obfer-
vations nouvelles viennent de conftater encore
cette vérité, & ajouter un grand poids au fenti-
ment de quelques naturaliftes qui avoient déjà, cru
pouvoir avancer que toutes les pierres calcaires
dévoient 1 ur fubftance & leur matière aux coquillages
qui fe font produits & détruits fous les eaux
de la mer.
«« La nature ( Mercure de juin 1753 ) de tous les
» terrains que la Marne a tranchés &traverfés dess
puis Joinville jufqu'à Saint-Dizier, & dont la
99 coupe fe préfente en plufieurs endroits, eft d’ une
»a pierre blanche & coquiliière, dont les plus belles
99 carrières font à Chevillon & à Savonnière. En
3» examinant les pierres de ces carrières,j’ai trouvé,
»9 dit l'auteur, que le boulin ou la partie la plus
99 tendre de leurs bancsn’étoit qu’ une fine femence
99 de coquilles , qui aff.-éte differentes formes,
99 mais qui généralement eft un peu ovale &creufe,
», & qui Iaitfe une multitude de petits vides, lef-
>9 quels rendent cette pierre extrêmement fuf-
93 ceptible de la gelée. Un feul poucë cube de ce
33 boulin peut contenir cent vingt-cinq mille fe-
9j mences, & le pied cube, par conféquent, deux
93 cent feize millions , & la toife cube quarante--
33 fix milliards lîx cent cinquante-lix millions } le
99 tout eft entré- mêlé d’autres coquilles toutes
39 formées, & plus ou moins avancées les unes que.»
39 les autres. Quelle prodigieufe fécondité en fi
>9 peu d ’efpace! Que fera-ce f i l’on regarde, non
99 pas un lèul pouce cube, mais toute la maife du
39 pays? Et ne ferarce-pas un argument invincible
93 pour prouver combien la multiplication des co-
33 quilles a contribué, à conftruire les lits & les bancs
99 du fond des mers, que de calculer ce qu’un
99 pouce cube de cette femence pétrifiée eût formé
99 en volume , en iuppofant quelle eût eu letems
9» de parvenir, à une moyenne grandeur, ainfi que
*3 toutes les autres? Si chacune de ces graines eût
99 acquis, par exemple, en croiflfant, le volume
» d’ un cinquante-quatrième de pouce cube, toutes
33 contenues dans ce pouce cube euftent formé un
93 folide de deux mille trois cent quatorze toiles
•3 cisbes, &r par conféquent ce pouce cube auroit
» pu couvrir d’ un banc de deux pieds d’épaifleur,
93 fans aucun vide, une fuperficie de fix mille neuf
»3 centquarante^deuxtoifescarrées.Quand onexa-
93 mine tous les autres bancs du pays, on reconnoît
33 qu’i's ne fo’nt pas formés d’aurses matières ; que
» ceux dont le grain eft le plus fin, ne font com-
» pofés que de cetre même femence écrafée &
99 autres coquilles , les unes brifées, les autres
>3 confommées. Ainfi donc , en ne confidérant
33 l’efpace d’où cetre pierre calcaire fe tire , que
- 99 fur trois lienes carrées, & un quarantième
33 de toife de hauteur , on voit quJil a dû y avoir
93 un tems ou cette-maflfe énorme , qui'ton-
» tient fix cent vingt-trois millions fept cent cin-
C O N
>9 quante-fix mille toifes cubes, n*a été qu*un fo-
93 lide de cent cinquante-fix pieds cubes environ.
>9.Nous n’avons point pris ici les termes qui au»
9> roient rendu cette croiffancë encore plus mer-
99 veilleufe , car, i°. la groffeur de ces femences
»9 n’eft pas la première groffeur, puifqu’elle n’ a pu
99 parvenir au terme que par une infinité de degrés
»9 inférieufs, par lefquels doivent pafler tou> les
»9 êtres qui fe développent organiquement} i° . les
>9 pierres dans lefquelles cette femence eft confu-
99 méé.& broyée, font bien plus compactes & en
39 contiennent par conféquent bien plus de quarante-
39 fix milliards par toife cube, & $°. il eft certain
>9 que cette femence étoit, pour la plus grande
»» partie, de nature à acquérir un plus, grand vo-
lume que celui d’ un cinquante-quatrième de
39 pouce cube} chofe fenfible par lés coquilles plus
» entières & plus avancées, & par les fragmens
» épais que l’on trouve dans les autres pierres de
«. la contrée. Si les deux extrêmes de ces gran-
99 deurs étoient connues, ces feules carrières nous
99 feroient prefque juger à coup-fûrque la maife
f 9- des plus grandes montagnes du Monde., & peut
ê t r e celle de tous les continens > ont eu pour
99 commencement fous les eaux des intinimens pe-
9J tits. J’ai trouvé les mêmes embryons de coquilles
>» dans un grand nombre d’autres carrières. Le bou-
>9 fin delàpierrede Saint-Maur& des autres pierres
99 dont on fe fert à Paris, eft de cette nature. 93
L’ auteur de cette obfervation ne parle ici que
; des grands produits des animaux marins & dépôts
de la mer qui font entrés dans la compofition des
montagnes. Je crois qu’on doit en excepter Van-,
cienne Terré, & je penfe qu’il convient de renvoyer
à cet article. Que de matières s’y trouvent
accumulées, qui n’ont pas fans doure pour élément
& pour principes les coquilles foffîles ou
leurs débris !
Une obfervation fi belle & fi détaillée confirme
d’ une façon bien éclatante, ce que M. de Buffon
avoit fort clairement reconnu bien avant l’auteur
de cette lettre. « Il y a , dit ce favant naruralifte
>9 ( tome I , article 8 ) , une prodigieufe abondance
99. de coquilles bien confervées dans lés marbres y
99 dans les pierres à chaux, dans les craies & dans
99 fes marnes : on les voit fouvent par collines &
» par montagnes} elles y< font fouvent plus de la
»9 moitié du volume des matières où elles font con-
>9 tenues. Mais je vais bien plus loin} je prétends
>9 que les coquilles font l’intermède que la nature
99 emploie pour former la plupart des pierres} je
>9 prétends que les craies, les marnes & les pierres
3> à chaux ne font compofées que de pouflière &
39.de détrimens de coquilles } que par conféquent
39 la quantité de coquilles détruites eft encore infi-
33 niment plus considérable que celle des coquilles
« confervées. On verra dans le difcours des miné-
»3 raux les preuves que j’en donnerai. 93
On pourroit déjà s’en tenir aux obfervations faites
d$ fon tems, & être fur de la vérité de ces recherches.
La lettre de M.Maffard à M. Jahbert, é c r ie {
furie même fujet, & inférée aufii dans le Mercure
de mai, année 17^3, reçoit de tout ceci un
grand degré d’authenticité, ainfi qu’une autre le ttre
fur le même fujet, encore de M. Maflard à M. Ja-
labert, au château de Prépatour, Mercure d octobre
de la même année. J’avois fait aufii-de ^mon
côté toutes ces remarques en plufieurs provinces
de France. Toutes les carrières des coteaux de
Choignes, auprès de Chaumont en Baffigny, font
remplies de ces embryons de co q uille sm ais ce
n’eft pas le boufin feul, c’ eft la pierre de toute la
carrière qui en eft formée. Les pierres qui font
entrées dans la conftruètion des parties hors des
eaux du pont d ’O rléans, ont aufii un boufin de
cette nature, & ces embryons, qui ne fe voient
ordinairement que pétrifiés dans les pierres, fe
trouvent en'nature & femés dans les fablor.s de
•Courtagnon, de Grignon, de Pont-le-Vire & autres
lieux connus pour leurs beaux coquillages
fo Ailes. Que de démonftrations s’offrent partout,
toutes certaines fur l'origine des couches & des
bancs de la Terre !
La fécondé obfervation que je voulois citer fe
trouve aufii dans la même lettre d ou j ai tiré la
première. EHe ne prouve pas avec moins d’évidence
combien la fubftance de nos pierres doit aux
corps marins’. « Ce même boufin de la pierre de
33 Savonnière en Champagne, celui des pierres de
33 Saint-Maur & de Saint-Leu, celles mêmes où
33 ces embryons trop confumés ne fe diftinguent
33 plus, & où il n’y a plus le moindre veftige de
30 coquilles, toutes ces pierres échauffées fous le
33 marteau ont une odeur défagréable & fétide,
»9 qui ne peut provenir que de la fubftance toute
33' animale dont elles font formées. Cette obfer-
39 vation que j’ai faite, dit l’auteur, en plufieurs
39 contrées de la France, avoit, quelque tems au-
39 paravant, été faite aufii en Allemagne, & avoit
» été publiée déjà dans un Mémoire fur la végéta-
»9 tion des pierres, par M. Lieberoth, officier dans
39 les mines de Saxe. Ce Mémoire a été inféré dans
»9 le J o u rn a l éco n om iq u e de juillet 1 7 Les bancs
39 d’ardoifes, dit cet obfervateur, chargés de poiflf
*» fons pétrifiés, dans le comté de Mansfeld, font
*9 furmontés d’un banc de pierre appelée Puante ;
39 c’eft une efpèce d’ardoife grife qui a tiré fon
39 origine d’une eau croupiflante , dans laquelle les
» poiflons avoient pourri avant de fe pétrifier} elle
39 répand une très mauvaife odeur lorfque les oust
vriers la travaillent, ou qu’on la brife & qu on
33 la frotte avec force, & cette puanteur doit être
33 uniquement attribuée aux fels urineux qu elle
« renferme, qui n’agifîent que -quand on les met
» en-mouvement. 99
• Notre obfervateur français auroit pu citer encore
d’autres phyficiens qui ont fait la meme re^
y a plufieurs pierres dont parle Henkel, qui participent
marque. On voit dans la lithogéognofie de M. P ott,
que Vallérius parle d’une craie noire q u i, expofee
au fe u , répand une odeur très- défagréable > qu il t
de la nature de la chaux & du cailiou, &
dont il fort une odeur de pourriture quand on les
hume&e avec de l’eau ; que la pierre de p o rc ,
lapis suillus, ou la pierre puante du genre des calcaires
, fediftingue furtout par fa mauvaife odeur}
& qu’enfin il y a certains marbres & un grand
nombre de ces pierres puantes qui donnent un fel
urineux & volatil, & des traces de fel marin , qui
indiquent les fubftances marines dont toutes ces
pierres tirent leur origine en partie. L’hiftoire des
anciennes révolutions du Globe terreftre rapporte
aufii les remarques de M. Hoffman, exadt obfer-
vateur. Dans une de fes expériences, l’ardoife rendit
une odeur plus défagréable que 11 pierre puante
lorfqu’on la frotta } .« &r no.n-feulemnt> dit-il, les
33 poiffbns qu’on y trouve pétrifiés , ont été des
99 êtres vivans, mais les couches d’ardoifes n’ont
33 été que le dépôt d’une eau fangeufe, qui, après
33 avoir fermenté & s’être putréfiée, s ecoit ptéci-
33 pitée par couches très-minces , en forte que les
99 parties les plus légères & les plus volatiles ont dû
33 prendre le deffus, comme il eft manifefte par
33 l’odeur de l’ardoife qui couvre le pqifldn. 33
C e qu’on ne fauroit trop admirer à la fuite de
ces obfervations , c’eft le concert furprenant des
naturaliftes étrangers les uns à l’égard des autres,
qui, en divers tems & en divers lieux, en Allemagne
, en Angleterre & en France, ont obfervé les
mêmes phénomènes, & les rendent prefque tous
dans les mêmes termes & en tirent les mêmes
conféquences. Cette odeur infe&e, qui eft plus
générale qu’on ne pênfe dans les pierres, fur-i-
tout quand elles font fraîchement tirées des carrières
, a occafionné un foupçon nouveau fur
les principes de la mauvaife qualité de certaines
eaux.
ce La plupart des vapeurs, dit encore l’auteur
» de notre première lettre, proviennent vraifem-
33 blablement de ces dépôts infe&s dont l’ inté-
33 rieur de la Terre eft rempli, & dont la plupart
33 de fes bancs font formés. Toutes ces matières y
9? font encore^dans une fermentation‘continuelle,
39 & l’ on ne peut douter que les 'mauvaifes qua-
33 lires des eaux ne proviennent aufii par quelques
endroits, indépendamment de toute autre caufe,
33 de leur féjour & de leur paffage dans des réfer-
33 voirs & des canaux pleins de corruption. 33
Entr’autres faits qui peuvent confirmer cette
réflexion, c’eft que les eaux des contrées de la
Touraine, ou fe trouvent les faluns, ont un goût
extrêmement infipide, que l’on ne peut guère
attribuer qu’ au terrain , qui n’a peut-être 'pas
fon femblable dans le Monde, relativement à l’innombrable
multitude de fofiiles marins qu’il renferme.
M. de Réaumur en a affez parlé pour que je
fois difpenfé de répéter ce qu’ il a dit fur la parfaite
régularité que ces coquilles préfentent chacune
dans leur pofition & dans la direftion de leurs
veines;, qui nenous annoncent que l ’ancien ouvrage