
Dunes de Dunkerque.
Nous ne pouvons terminer cet article de Dunkerque
fans faire connoître les dunes qui accompagnent
cette ville & Ton p o r t , & qui lui ont;
donné fon nom. Ces dunes ihtéreffent d’autant
p lu s , que c’eft par elles que Ton a fait l’entre-
prife de leur défrichement, que le Corps des ponts
& chauffées a étendu fur plufieurs côtes, & particuliérement
fur celles qui font entre la Gironde
& 1 Adour. Ce fut fur les dunes qui fe trouvent à
l’eft de Dunkerque, que M. Antoine Lebrun, cor-
refpondant de la Société d’agriculture de Paris,
ofa le premier faire cette entreprife en 1784. Je
pour lors que ce défrichement d ’une vafte
linère de dunes fituées à l’eft de Dunkerque, &
commencé par le cultivateur, meritoit l’attention
du Gouvernement, & j'allai de fa part en fuivre
les différens travaux. Confidérée du côté du bien
public , cette entreprife préfentoit à la France un
modèle de culture de la plus grande importance, j
dont l’imitation fur toute l’étendue des côtes de j 1 Océan devoir être infiniment précieufe à l’État.
Un tableau rapide & fuccinél , rédigé d’après mes
obfervations , fur la nature des difficultés & de
I importance de ce défrichement, pourra mettre à
portée de juger de cette culture.
Les fables que le mouvement de l’Océan porte
fur la plage , étant pouffes par lès vents, s’élèvent
en dunes à quelques diftances des bords de la
mer , & l’aélion continuée des vents en forme
plufieurs rangs. Ces chaînes, prefque partout élevées
& abfolument nues , où croît feulement
une efpèce de jonc marin, appelé dans le pays
loya3 mais du côté des terres, font éparfes &
^ffez féparées par des terrains intérieurs, où il y
végète quelque herbe & mouffe, du bois nain &
épineux, qui a des racines très-étendues & difficiles
à extirper. Ces terrains, plus ou. moins inégaux,
qu’ il faut applanir|& fertiiifer, étoient la
matière des défrichemens praticables. Les groffes
dunes qui les coupent en tout fens, ajoutoient aux
difficultés du travail.
- Parmi les efpèces de fols rebelles à la culture
on pouvoir évidemment ranger ceux dont nous
parlons : c ’eft du fable criftaliin comme celui des
•groffes dunes qui traverfenr ces terrains. La main-
d’oeuvre qu’ils exigent pour leur applanîffement,
jointe a la difficulté d’en déraciner le bois très-
multiplié, le tuf ferrugineux qu’on y rencontre,
le défaut de pentes , qui rend les eaux {lignantes
pendant une grande partie de l'année, & l’ingratitude
du fol ne font pas les feules circonftances à
-confidérer : ces défavantages fi grands font beaucoup
augmentés par la fituation fur le bord de la
mer , à l’embouchure de la Manche, où régnent,
Ja majeure partie de l’année, des vents violens :
de H une difficulté extrême, i° . de fixer le fable g
fans quoi on ne peut parvenir à en former une
terre végétales 20. de fixer les femeDces & d’affurer
les plantations ; 30. d'empêcher que le fbl
qu’on a fécondé & les productions qu’on a fait
naître ne foient étouffés fous le fable répandu
de toutes parts par les vents. Ces obftacles, qui
ont-détruit un grand nombre de plantations & de
cultures , & par conféquent confumé fans fruit
des fommes conftdérables, font d’une telle nature,
qu on n’a pas d’expreflion affez forte pour faire
fentir tous ces défavanrages : ainfi, fans s’appesantir
fur des vérités palpables, il refte à confidérer
quelle étoit cette entreprife du côté de fon
importance.
Les vents qui enlèvent le fable delà plage ont
éle vé , comme nous l’avons dit, des dunes, & ,
continuant leurs efforts fur la plage & fur les dunes
-mêmes, ont formé plufieurs rangs de dunes, &
par cette progreffion ont dérobé à la culture
un terrain immenfe, & menacent outre cela, de
proche en proche, & en divers lieux, les terrains
fertiles. C ’ eft par l’attention continuelle qu’ on
a eue à prévenir leurs funeftes effets, qu’on s’oppofa
aux progrès de l’enfablement. Cette affertion eft
appuyée fur la connoiflancé qu’on a des terres
autrefois cultivées, qui font aujourd’ hui couvertes
ou environnées de dunes : les preuves s’en trouvent
dans les terres^ mêmes du défrichement de
M. Lebrun, qui avoient été toutes ou la plupart
en culture, & ce n’étoit pas depuis plufieurs
années qu’elles avoient ceffé de l’être : orhpoti-
voit s’en convaincre par le regiftre des mouvances
du R o i, relativement à don château de Bergûes.
On voit que les dunes ont gagné du côté des .terres,
puifqu’elles ont envahi un village 3 dont l’ églife
fubfifte encore, ayant été enfevelie fous les fables
au milieu de grandes étendues de terres cultivées,
qui ont eu le même fort.
Cês faits étant conftans, M. Lebrun apperçut du
premier coup-d’oeil l’extrême utilité de ces défrichemens
, qui étoit double, l’une de rendre à
1 agriculture les terrains immenfes qu’elle avoit
perdus, & l’autre de garantir du progrès de l’enfablement
les terres cultivées qui tenoient à cette
époque aux dunes.
A une importance fi décifive on pouvoit ajouter
des circonftances politiques, relatives à l'embouchure
de la Manche, laquelle mettoit à portée de
jcfuir de grands avantages pour le commerce du
nord, lequel exige la multiplication des hommes
pour le fervice de la marine contre une puiffance
rivale.
Les difficultés & les grands avantages du défrichement
de M. Lebrun ne pouvoient être méconnus
; aufti le Gouvernement fe décida-t-il à
protéger, dans le terra, une entreprife qui annon-
çoit une forte de hardieflè & de courage; protection
dont ce cultivateur avoit befoin pour écarter
les obftacles de plus d’une forte, qui s’oppofoient
à fes travaux.
DUNMORE ( Grotte de ) . Cette grotte fe
trouve près de Kilkenny en Irlande. Elle eft fituée
dans une belle plaine ± parfemee de plufieurs petites j
élévations éparfes çà & là. Ses alentours font j
couverts de pierres calcaires & remplis de car- j
rières d’un beau marbre noir, dans lequel on découvre
des coquillages de couleur blanche. Elle
’diffère des grottes du Derbyshire & de Mendip
par fa profondeur de trente pieds perpendiculaires,
par fon ouverture de quarante verges de diamètre.
Les parois de cet antre font de pierres calcaires
, dont les feiffures font recouvertes par les
arbres & les arbuftes qui y végètent.
L’homme que le defir de connoître & de voir
conduit dans ces lieux, y doit defeendre avec précaution.
Il eft furpris d’y rencontrer de toutes
parts des pigeons fauvages, raffemblés en grand
nombre, &: des chouettes : il eft" vrai que celles-
ci habitent les parties plus intérieures de la caverne.
Arrivé dans le fond de cette g rotte, il
contemple avec admiration l’ouvrage de la nature.
Une voûte de vingt-cinq verges d’étendue en
forme la principale falle, qui eft percée de deux
ouvertures, l’une à droite, & l’autre à gauche.
Si on tourne à droite , on trouve des rochers &
des pierres incruftées de fubftances dépofées par
les eaux, & qui préfentent les figures les plus bizarres.
Ces efpèces de criftallifations font formées^
par les eaux qui fuintent de la voûte. Elles font
tranfparentes , variées dans leurs couleurs, &
fufceptibles du poli le plus fin. Si on jette par
deffùs de l’acide quelconque , il fait auffitôt une
prompte & vive effervefcence.
Ces criftallifations mamelonées pendent dans
plufieurs endroits de la voû te , & qudques:unes,
par couches, fucceflîves , fe font accrues au. point
de s’unir avec celles du fol. Dans cet état ôn, les
prendroit pour des colonnes , pour des piliers d§
quelque cathédrale d’architeéhire gothique, pour
des orgues, des croix; enfin l’imagination y trouve
2 peu près toutes les reftemblançes qu’elle defire,
& la pâle clarté des flambeaux augmente,le délire
des lens. Cependant l ’enfëmble de cette cavernë
offre un tableau agréable,.mais terrible. , ,
Cette voûte yarie finguliérement dans fa hau^
teur; ici elle s’élève à la hauteur de vingt verges;
là , s’abaiflant tout à coup, il faut marcher courbé
fur fes mains & fur fes pieds pour entrer Fun
après l’autre dans des efpèces de. cellules : c’eft
ainfi que ,‘dans cette partie dù côté, droit, de la
g rotte, on peut y parcourir l’ d'pacéd.e plus de cinq
fcents verges avant de retourner fur'fes pas pour
gagner le jour & pour fe difpofer à vifîter le côté
gaùché.
Cette partie eft divifée en plufieurs routes;
mais les.gjuides ne manquent pas d‘en prévenir le
Voyageur , qui , au moyen d’une peloté de ficelles
qu’on fait fuivre avec foin , peut s’enfoncer avec
confiance dans ce labyrinthe. Cette'partie n’ ëft
pas aufti horizontale que l’autre, & fes appartemens,
fi on peut s ’exprimer ainfi, font extrêmement
grands ; plufieurs ont au moins cent verges
de largeur , & leur hauteur eft de cinquante. On
trouve un petit ruiffeau dont les différentes caf-
cades produifent une trille harmonie, bien conforme
aux lieux que l’on parcourt. C e ruiffeau va
fe rendre à un bafiîn qui eft à près d'un quart de
mille de la fource. Là on trouve les oflèmens au
moins d’ une centaine d'hommes : plufieurs font
très-grands , & fe divifciiren morceaux lorfqu’on
les tire de l ’eau.
Comme il n'y a aucune infeription, & que dans
le voifinage de cette grotte les habitans n’ont
confervé aucune tradition à cet égard, nous ne
nous permettrons aucune conjecture , finon peut-
être que c ’eft une fuite des guerres civiles , 8c
furtout de celle de 1641.
Plufieurs rochers de la v oû te , & même des
parois de cette grotte, font de marbre noir par-
femé d’empreintes de coquilles blanches. Ce marbre
reçoit un poli très-fin, & on s’en fert dans les trois
royaumes pour tailler des dalss , des chambranles
de cheminées, &c.
DUNÔIS ( Le ci-devant Comté de ). C ’étoit
un petit pays du ci-devant Orléanois , qui faifoit
partie de la Beauce , entre les pays Chartrain 8c
Vendômois , & au couchant de l’Orléanois. Cette
contrée avoit environ douze lieues dans fa plus
grande longueur , & neuf lieues dans fa plus
grande largeur. Elle eft arrofée par le L o ir ,
l’Y è r e , la Connie & la Connie-Palue. Ses villes
étoient Châteaudun, qui en étoit la capitale ;
Freteval , Cloye & Marchenoir. On y comptoic
autant de bourgs. Le Dunois fait aujourd’hui partiç
du département d’Eure-&-Loir.
DURANCE. Le fol de la ci-devant Provence
eft finguliérement inégal.- Les montagnes dont il
eft fiériffé, ne font ordinairement féparées que par
des vallées .étroites. Les principales montagnes,
âu voifinage defquelles la Durance coule, font
celles de Lure & du Leberon ; elles font l’une &
l’autre formées par couches, & uniquement com-
pofées de pierres calcaires & de marnes.
A Sifterôn la Durance paffe entre deux montagnes
qu’on peut règarder comme une dépendance
de célle de Lure. Elles font nues dans un
certain efpace , & elles font rèmarquàbles en ce
que leurs lits font prefque perpendiculaires à l’horizon,
& dans le mène plan fur les deux bords.
La rivière eft fort refferrée en cet endroit ; elle y
coule fur un rocher calcaire & fous une arche unique
de quatorze toifes & demie de longueur, qui forme
le dernier pont qu’on trouve fur fon cours..
p| eft extrêmement rare que la Durance foit contenue
par des'rochers calcaires, ou par des bancs
de marne ; même Je haut des montagnes au pied
dèfquelles, elle coulé , n’offre que ces efpèces de
pierrës. Je commençai à obferver cette rivière