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bancs inférieurs, qui font vraifemblablement les
mêmes que ceux que Ton exploite à Saint-Fortu-
nat. Les entrepreneurs ne trouveroient pas leur
compte à tirer des blocs confidérables de ces car- '
rières ; ils ne pourraient les faire parvenir à leur
deftination qu’en les embarquant fur la Saône; il ;
faudroit donc les charger à la carrière pour les R
porter au rivage, les charger fur un bateau, les !
décharger au port, les recharger de nouveau pour
les conduire aux lieux où l’on voudroit les employer
, tandis qu’une charrette prend, dans la
carrière de Saint-Fortunat, un gros bloc ou plusieurs
d’un volume conlîdérable, les voiture juf-
qu à leur deftination , & peut faire deux voyages
par jour. Il n’eft donc pas furprenant que les propriétaires
des carrières de Saint-Germain fe bor- ■
nent a n extraire de la pierre que pour mettre dans
les fours à chaux qui font dans le faubourg de ;
V a ife , & de ceux qui font fitués fur les bords de
la riviere. Ils ne tirent de la pierre par grandes j
parties 8c deftinées à la taille, que pour leurs pro- i
près conftru&ions & l’ ufage de leurs voifîns. j
Dans une obfervation affez furprenante, 8c qui l
paraît détruire toutes les conféquences qu’on avoit
tirées de l’infpeétion des carrières précédentes,
eft qu’on examina, aux carrières de Saint-Ger-
inain, des bancs inclinés du fud-oueft au nord : on
y reconnut néanmoins les mêmes qualités qui font
dans ceux des carrières voifines, en y faifant creu-
fer & lever les terres jufqu’à la fuperficie de la
pierre ; on y reconnut, par le niveau , que les
bancs analogues aux voifins étoient d ’un pied neuf
pouces plus bas. Cette fingularité engagea à faire
découvrir de plus en plus la fuperficie : on ap-
perçut,enfin une réparation d’ environ trois pieds,
remplie de terre, entre la malfe générale & la
partie^ qui fixoit toute attention : on découvrit
bientôt qu’elle n etoit qu’un gros fragment qui
avoit glilîe fur fes fondemens, & qui s’étoit placé,
fur fa nouvelle affiète, félon que les circonftances
qui accompagnèrent fon déplacement l ’avoient
permis. Les informations qu’on prit en rétrograd
e r , apprirent que cette efpèce de phénomène
n étoit pas rare, & qu’on en avoit découvert de
femblables dans les autres carrières.
A Dardilly, éloigné d’une lieue & demie de
L y on , il y a une carrière au couchant. Si l’on ne
s ’eft point trompé "dans l’examen qu’on en a fa it,
«lie mérite attention. On dit que fes bancs fupé-
rieurs répondent aux quinzième & feizième bancs
des carrières de Saint-Fortunat, comme une fuite
de ces memes bancs. Cependant leur pente y eft
plus considérable, puifqu’au lieu de dix pouces,
on y a trouvé jufqu’ à trois pieds 5 mais elle eft
dans la même diredion. Les bancs inférieurs répondeur
^pareillement, par leur couleur & par leur
qualité, à ceux de Saint-Fortunat, qui font au
défions du feizième, félon le même ordre qui s’y
fait remarquer, & dont on a déjà lepréfenté le
tableau.
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Après avoir paffé la rivière d’Azergues, 8c en
déclinant vers le nord, on trouve les coteaux
d Anfe 8c de Lucenay. Quoiqu’ils foient à peine
éloignés d’une lieue des cantons que nous venons
de parcourir, ils nous offriront des objets bien
différens de ceux qui ont fixé jufqu’à préfent notre
attention.
On trouve au bas de ces coteaux fix ouvertures
principales de carrières. La pierre qu’on en tire ,
comme toutes celles que fournit cette montagne
jufqu’ à Pommiers, eft tendre fous le cifeau. Sa
couleur, qui eft un blanc-fale , règne, (ans variation
bien apparente, depuis le haut jufqu’à la plus
grande profondeur à laquelle on foit parvenu. Le
grain en eft gros. On voit facilement, dans le bas
où la pierre eft moins compacte, qu’elle eft com-
pofée, en grande partie, de coquillages marins,
qui font comme fondus 8c pulvérifés , ainfi qu’on
le remarque à la fuperficie des carrières de Couzon ;
mais on n’y apperçoit pas cette efpèce de grès ou
ce fable brillant qui fait le fond efl'entiel des carrières
de Couzon & de Saint-Romain. La pierre
dont on parle n’a rien qui la rapproche des marbres
: on ne fauroit en faire des ouvrages auffi
achevés <^ue le peuvent être ceux dont la matière
feroit tiree des meilleurs bâties de Saint-Fortunat;
mais, en général, fa qualité eft fupérieure pour
refifter aux injures du rems, 8c elle l’emporte encore
par 1 épaiffeur de fes bancs. Il faut auffi convenir
qu’elle eft moins propre que la pierre bien
choifie de Saint-Fortunat, a faire des marches 8c
des pavés. Le frottement des pieds l’ufe plus tôt ;
mais employée à tout autre ufage, elle réfifte
beaucoup mieux aux impreflions de l’air. Un feul
exemple peut nous en convaincre. L’églife de
Saint-Nizier à Lyon fut conftruite trois fiècles
avant fon portail t il paroît très ^certain que b s
matériaux de l’églife furent tirés des carrières
dont nous parlons à préfent, & ceux du portail
des carrières analogues à celles de Saint-Cyr &
de Saint-Fortunat. L’églife n’offre aucune dégradation
apparente fi or. n’en excepte les marches qui
conduifent au clocher, qui font profondément
ufées dans leur foulée , & le portail exigeoit depuis
long-tems des réparations qu’il n’a plus été
poffible de différer.
La première des carrières dont il eft ici quef-
tion , eft ouverte prefque dans le bas du coteau
de Lucenay. La couverture eft un amas d’environ
huit pieds de hauteur, de moëlons d’ une forme
cubique, 8c recouverts de quelques pouces de
terre. On ne peuc les employer que dans les conf-
truélions groffières, 8c la aifficulté du tranfport
les rend prefqu’inutiles. On tire néanmoins quelque
parti des moelons dont la forme eft aplatie ;
ils fervent à faire du pavé.
Les couches régulières commencent fous cette
couverture ; leur pente fuit la même direâion
que celle de toutes les carrières que nous avons
déjà parcourues ; elle eft de vingt-cinq pouces par
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toife. Quoique les délits qui féparent les bancs
foient fenfiblement parallèles entr’eux, on ne peut
s’affurer de trouver dans le même banc plufîeurs
blocs de l’épaiffeur qu’ils préfentent au premier
coup-d’oeil. Si le banc eft entier i c i , là il eft refendu
en plufieurs bancs réguliers. Au refte, oft
peut extraire des blocs de deux pieds d’épaiffeur:
ce font les bancs les plus bas qui les fourniffent :
leur épaiffeur diminue en remontant, mais non
graduellement 5 les plus minces font de trois pouces
: la pierre en eft tendre 8c plus ég a le , & en
général elle eft meilleure dans le bas que près de
la couverture.
Dans toutes les autré's carrières ouvertes au bas
du coteau, on ne découvre aucune d'fférence,
foit dans la pierre en elle-même, foit dans la dif-
pofîtion des bancs. Les carrières les mieux exploitées
font laTeconde 8c la troifième. On v o it , dans
la partie la plus profonde de cette dernière carrière,
une maffe d’environ neuf pieds d’épailfeur,
prefque fans refends, qui continue vifiblement
dans la longueur d’environ vingt-un pieds. Le grain
en eft fort gros , mais il eft très-égal.
En montant, & au quart environ du coteau, fur
le territoire d’Anfe, on rencontre la dernière ouverture.
La pierre y eft de la même couleur qu’on
a obfervée dans les précédentes, mais Je grain en
eft plus fin ; elle eft plus compacte. On a cru s’ap-
percevoir que les parties.les plusexpofées au foleil
étoient auffi les plus avancéès dans leur pétrification.
Cependant, à la confidérer en général, elle
eft inégale ; les refends y font plus communs, 8c
on n’y apperçoit aucun veftige de corps marins. Le
poffefleur de cette carrière ne defeend ordinairement
que julqu’au douzième banc. I^a raifon qu’ il
en donne, eft que le treizième eft mêlé de pierre
à feu. Il eft certain que celui à qui appartient çette
carrière, eft le mieux placé pour voiturer de gros
quartiers au port d’Anfe.
L’ inclinaifon des bancs de cette carrière eft dans
la mêtr.e dire&ion que les autres; mais elle l’eft de
deux pieds de plus par toife. Cependant elle n’eft
éloignée de la première carrière qu’on trouve fur
ce coteau, que d’environ trois quarts de lieue.
Carrières de Pommiers.
Dans le fond d’ un vallon, au revers de la montagne,
à la diftance de deux lieues 8c à trois quarts
de lieue de Ville-Franche, on trouve la carrière
de Pommiers, qui a fourni à la ville de Lyon,
pendant plus de douze fiècles , des blocs immen-
fes, & de la meilleure qualité. Cette carrière eft
actuellement prefqu’abandonnée. Peut-être que les
chemins ont été détruits par quelqu’événement ;
peut-être auffi que lesconteftations qui s’élevèrent,
il y a;trente ans 3 pour la fucceffion de celui qui
étoit le propriétaire de cette carrière , ne font pas
encore terminées ; peut-être enfin que celui qui la
poflede aujourd’h u i, a des raifons pour ne pas la
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faire travailler. Quoi qu’ il en foit, il eft certain que
cette carrière ne produit rien en comparaifon de
ce qu’on feroit en droit d’en attendre.
La partie qui eft ouverte au pied de la montagne
, préfente à fon fommet une furface à peu
près verticale, de vingt-cinq à trente pieds de
hauteur, refendue obliquement 8c fans fuite, depuis
la terre qui recouvroit la maffe entière, juf-
qu’aux premiers des fix lits qui font actuellement
découverts ; c’eft ce qui fait que cette carrière eft
bien différente des autres, dont les couverture»
en général font compofées d’ une couche de huit,
de.dix ou de douze pieds d’épaiffeur, refendue
en cubes irréguliers, de la groffeur du meëlon
ordinaire. Cependant cette différence ne donne à
cette carrière qu’ un très-foible avantage fur les
autres, parce qu’on eft obligé de fe fervir de la
poudre pour extraire fes parties confidérables &
irrégulières , & q u e , par le grand nombre de
fentes qui ,fe trouvent dans les déblais, les trois
quarts fe réduifent en décombres qu’il faut enlever.
Mais à vingt-cinq ou trente pieds de ces
premiers bancs, .on commence à trouver ceux qui
font réguliers, inclinés fuivant la même direction
qu’on obferve dans les autres carrières, c’eft-à-
d ire, de feize pouces par toife. Ces bancs ont
differentes épailfeurs; mais en général ils font plus
épais que ceux analogues des carrières dont nous
avons parlé. Cette carrière, lorfqu’on la vit," étoit
fort embarraffée; ce qui' fut caufe qu’ on n’y put
appercevoir que fix bancs, mais le plus mince
avoit dix pouces d’épaiffeur. On en mefura un
bloc parfaitement détaché 8c très-fain , n’ayant
aucun délit apparent, 8c qui portoit cinq pieds
trois pouces de longueur, deux pieds dix pouces
de largeur, 8c deux pieds fix pouces d’épaiffeur.
Des fix bancs qu’ on apperçoit, celui qui eft le
plus bas paroît fupérieur aux autres dans toutes
fes parties. Si cette carrière étoit bien fervie, elle
l’emporteroit infiniment fur toutes celles qui font
ouvertes dans les environs de Lyon : il eft à regretter
qu’elle foit fort négligée.
Sur la montagne oppofée, & prefqu’ à fon fommet,
en tirant au couchant, à une demi-lieue de
Pommiers, paroiffe de Liergùes, on trouve la première
ouverture d’ une carrière qui fournit une
pierre dont la qualité eft entièrement differente de
celles dont nous venons de parler : la couleur en
eft d’un jaune-brun, & le grain reffembie'à celui
de la pierre ordinaire de Couzon 8c de Saint-
Romain , quoiqu’elle foit cependant inférieure à
plus d’ un égard. La pente des couches eft dans
la même direction, 8c de dix pouces par toife. Le
nombre des bancs eft de trente-fix, 8c le plus épais
a huit pouces, Cette carrière eft comme abandonnée,
8c mérite de l’être.
BEAUJOU, village du département des Baffes-
Alpes, arrondiffement de'Digne. On trouve dans
fon territoire un filon de mine de fer de bonne