
le Monde étant plus vrais que tout ce que les
hommes auroient pu nous en laiffer, & plus ref-
peftables que tout ce qu'ils peuvent & pourront
alléguer pour les réfuter & en affaiblir l'autorité.
V id i ego quod fuerat quondàm folidifjhna tellus
EJfe fretum ,■ vidi frottas ex equore terras ,
E t procul à pclago conchtt jacuêre marina.
J’ai vu que ce qui étoit jadis une terre folide, étoit
devenu un détroit de mer; j’ai vu des terres ouvertes
par la violence des flots, & des coquilles
marines dans des gîtes éloignés de la mer.
On trouvera peut-être l'article qui précède trop
long pour ce Dictionnaire, mais on doit le confi-
dérer comme le précis de l’hiftoire du Globe dont
j ai fait depuis long-tems une étude raifonnée.
b a illeu r s , il eft la bafe de plufleurs des articles
que j'ai commencé à publier fur un fujet aufli important
pour le développement & l’établiflement
des principes de la géographie-phyiîque.
C o n s t i t u t io n p h y s iq u e des t e m p é r a -
MENS , DÉPENDANTE DES CLIMATS. Hyppocrate
vécut au fud-eft de l'Europe, & non au nord.
Sous cette heureufe température , les hommes
étoient, de fontems, comme ils le font encore aujourd'hui,
forts & mufculeux ; & ceux du nord,
qui étoient foibles, n'ont pas, de nos jours, changé,
de conftitution. Les observations d’Hyppocrate
n'ont donc pas le même degré d'utilité pour les
habitons des contrées feptentrionales, qui paflent
leur vie dans les climats froids, dans les neiges
ou au milieu des frimats ; qui, couverts d'une peau
blanche, parés de longs cheveux blonds, peuvent
être comparés aux végétaux qu'on voit prendre
racine dans des grottes humides, & dont les tiges
longues & jeunes ne font garnies que de rameaux
fans élafticité.
Il ne faut donc pas s’étonner qu'Hyppocrate &
Gallien aient le plus fouvent trouvé les conftitu-
tions humaines fujetes à l’irritation & à l’inflammation
dans la Grèce, dans 1 Égypte & dans l’ Italie
, tandis qu’ au contraire Sydenhan, Cuffen &
Brown les ont trouvées languiffantes & engourdies
dans la Grande-Bretagne, dans l'Allemagne &
dans la Ruflîe. C ’eft par cette raifon que les premiers
fournirent leurs malades à l’emiflion des contenus
& aux caïmans, au lieu que l'humanité fouf-
frante fut réchauffée & nourrie fous la direction
des Sydenhan & des Brown.
Hyppocrate , fous les régions qu’ il habitoit,
eut à ramener à l'équilibre les forces croi flan tes.
Sydenhan, fous un ciel moins favorifé, dut au
contraire relever les forces abattues , & cela après
qu on eut reconnu que, fur cent maladies, on en
trouvoit quatre-vingr-dix-fept provenant de langueur
, contre trois feulement caufées par l'irri-
rarion ; différence effrayante en effet, & relevée
principalement dans les pays o ù , d'après les obfervations
météorologiques les plus exaéles, on
ne peut efpérër, dans tout le cours d'une anhée;,
que foixante-fix jours fort favorables à la fanté.
Aufli n'eft-il pas rare, dans ces climats, de voir des
malades languir, quelquefois même périr victimes
de la routine aveugle des humoriltes, qui, en
leur refufant les moyens de recouvrer leurs forcés,
les conduilent au point de n'être plus fufeep-
tibles de guérifon.
Le fyflème de Brown a déjà été adopté paj:
les régions limitrophes de la France; & on le dédaigne
à to r t, aujourd’hui furtout que la chimie
& la phyfiologie répandent un grand jour fur le
phénomène de la v ie , & qu’elles le mettent même
en évidence , aidées en cela par le galvanifme,
qu'on perfectionnera dans ceS vues.
Les médecins de Naples, qui fe trouvent dans
une pofhion favorable à l’obfervation & à la com-
paraifon des extrêmes, ont eu foin de diftinguêr
l'excitabilité de la vie; mais ils foutiennent que cette
excitabilité eft un principe elîentiel de la viè.
C ’eft là tout ce que nous apprend le profeffeurde
Naples, & à quoi il fe borne.
Ils obfervent, avec fondement, que fi les cataleptiques
, les apoplectiques n’étoient pas excitables,
la circulation de leur fang cefferoit, ainfï
que leur refpiration : outre c e la , que fl ces deux
appuis de la vie leur reftent, ce n’eft que parce
que leur fang, en circulant dans leurs veines, &
l'air en s'introduifant dans leur poumon , agiffent
comme des ftimulans propres à recevoir l’excitabilité.
Les extatiques , dont l’étàt diffère fi peu des
apoplectiques , font fortis de leur extafe toutes
les fois qu’on a feint d'alarmer leur pudeur. La
caufe en eft l'influence morale , qui » comme agent
interne, difpofe alors l'extatique à certains' ten-
timens violens, & lui fait éprouver une commotion.
D’après toutes cés confédérations on ne
peut douter que les effets des climats intermédiaires,
entre les deux extrêmes que nous avohs
indiqués au commencement de çét article, rt’ên-
trent dans la fuite des tempérament dé ces climats
, & n’en autorifent toutes, les conféquences
qui nous ont paru intéreffer particuliérement la
géographie-phyfique.
CO N T E V 1L L E , village du département de
l’O ife , canton de Crève - Coeu r , à cinq lieues
de Beauvais. Il y a quelques fabriqués où l'on
emploie avec avantage les laines du pays.
CONTINENT. C ’ eft la partie folide de là fur-
face de la Terre. J’en diftingue de deux .fortes :
les continens fe c s qui fervent de limités au baflin
de la mer, & qui verfent leurs eaux par les ri vières
& les fleuves : on n'a compté jufqu’ à préfént que
deux continens, l’ancien, qui comprend l'Europe ,
l’Afie & l’Afrique ; le nouveau , qui comprend
l’Amérique méridionale & l ’Amérique feptentrio-
nale. Mais, fuivant la définition précédente, toutes
les îles , & particuliérement celles d’iine certaine
étendue , font des continens , & doivent être con-
fidérés comme tels.
La fécondé forte de continens font les continens
foufmarins, qui fervent de fond au.baflin de la mer.
On a eu tort de n’admettre de continens que
ceux qu’on oppofoit aux mers, comme fi le fond
du baflin de la mer n’étoit pas une partie de la
furfacedu Globe, aufli folide que celle qui n’en
eft pas recouverte ; c’eft par une fuite de la meme
erreur qu’on partageoit le Globe en mers qu’on
oppofoit aux continens, puifque les mers ne font
que des maffes d’eau, feulement extérieures &
luperficielles, qui n’ont rien de commun avec les
continens fecs & folides qui s’étendent jufqu’ au
centre de la Terre. On a eu tort enfin d'oppofer
les lies aux continens, puifque leur conftitution
intérieure & extérieure eft la même, & que ces
parties de la furface du Globe ne diffèrent que par
la grandeur. J’ai été fort furpris de trouver dans
l’ancienne Encyclopédie cette diftinétion des îles
aux continens, fondée fur ce que les îles font environnées
d’eau , & au lieu que les continens ne
font ni coupés ni environnés par la mer : il fuffit
de jeter les yeux fur nos Mappemondes pour ne
pas donner dans des idées aufli fauflès, en conft-
dérant fous le nom de continens les deux parties
de la furface du Globe que je viens de diftinguêr.
Je n’ai pas prétendu établir une parfaite reflem-
blance entr’elles, furtout quant aux inégalités de
leur furface.
On a dit que le fond du baflin de la mer, ce
que je nomme continens foufmarins , offroit les memes
formes extérieures que la furface des continens
d,ç ceux-ci. Il eft vrai que les bons efpnts qu
cherchent des preuves folides & non des hypo-
thèfes hafar lées, ont trouvé dans cette nouvelle
marché à peu près le même fond de roman que
dans le premiér inventeur. On a fenti d abord
que l'a&ion des courans fur le fond de la mer étoit
très-peu connue; que l’exiftence des vallées fouf-
marines n’étant prouvée par aucun fait, en faifant
creufer de prétendues vallées par les courans ,
c ’étoit fe charger de produire un effet incertain
par une caufe incertaine, & que, fous la plume de
M. de Buffon, tout étoit refté hypothétique comme
dans les récits de Teliamed.
fecs.
Teliamed, qui a fait de cette affertionhafardée
la bafe de fon fyftème, nous rend compte ingé-
nuernent des moyens qu’ il prétend avoir employés
pour s’ aflurer de cette reflemblance parfaire dans
les formes extérieures des deux continens. 11 nous
préfente les détails de fes voyages foufmarins de
manière à nous difpenfer d’y croire , tant fes récits
font romanefques. Ainfi , fur la foi de Teliamed,
aucun des réfultats imaginaires qu’on trouve dans
fon ouvrage, n’a été adopté par les naturaliftes.
Cependant je dois excepter un écrivain habile qui, .
confidérant ces aflertions comme un principe qui
pouvoit fervir à l’ établiflement d’ un fyftème affex
lemblable à celui de Teliamed, a cherché à les
développer davantage & à les appuyer fur le rai-
fonnement & fur un autre genre de preuves. Il ne
nous a pas conduits au fond du baflin de la mer
pour nous y faire voir des formes femblables à celles
que nous offre la furface des continens fecs; il a
mis en jeu des agens connus qu’ il a fait mouvoir
fuivant les befoins de Ion fyftème ; il a chargé les
courans de la mer de fillonner le fond de Ion baf-
fin, d’y tracer des vallées femblables à celles des
continens fecs , & enfin de lui donner toutes les
formes extérieures que nous voyons à la furface
On alla plus loin encore en obfervant les inégalités
de la furface des continens fecs ; on remarqua
que bien loin d’avoir reçu ces formes dans
l’état des continens foufmarins lors de leur première
formation , ils ne les avoient reçues & ne les re-
cevoient chaque jour encore que depuis qu ils
étoient devenus continens fecs par la retraite de
la mer; enfin , depuis qu’ ils avoient été expofes a
l’ aélion de l'eau des pluies & de fa circulation à
leur furface. Nous avons développé ces grands
effets des eaux pluviales & montré cette belle économie
de la nature aux articles Pl u ie s , V a l l o n s ,
Bassins des Rivières : nous y avons prouvé que
les vallées n’a voient été creufées à la furface des
continens fecs que par les eaux dont ces vallées
facilitoient la marche & la circulation , &■ que par
conféquent les deux fortes de continens que- nous
venons de diftinguêr différoienc par ces derniers
effets des eaux pluviales.
Nous avons démontré que cet état de continent
fec étant fuppofé, foit par la retraite de la mer ,
foit autrement, les inégalités de leur furface, telles
que nous les voyons, devenoient néceflaires ; .que
l ’économie de la nature fubfiftant telle que nous
la voyons , les formes de toutes ces inégalités
' avoient dû s'ébaucher d'abord, fe perfetfionner
enfuite , puis fe modifier & s’altérer fuivant les
circonftances favorables ou défavorables à 1 aétion
de l’eau pluviale. D'un autre cô té , n’avons-nous
j pas des preuves inconteftables que le fond.du baf-
fin de la mer fous l’eau qui le c o u v ro it , non-feu-
I lement n’étoit pas expofé à être fillonné par des
courans particuliers, mais qu au contraire toutes
les parties de fa furface, en fuppofanr que le mouvement
de la mafledes eaux fe fût fait fl ntir jufqu’à
ce fond , s’étoient trouvées chaque jour , par ce
mouvement égal & uniforme , réduites à un
niveau parfait ? .
Il fuffit, pour s'en convaincre, de jeter les yeux
fur les continens fecs, & d y fuivre les traces de la
conftruétion des continens foufmarins. Leur organi-
fation par couches horizontales , qui étoit certainement
le réfultat du travail de l eau de la mer,
démontroit inconteftablement que 1 aétion des coûtons
n’avoit interrompu nulle part la continuité
des dépôts. Cette confidération de la forme des
dén-ôts, jointe à la certitude acquife par l’obferf
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