
tique par la fuite, & des caufes qui leur donnent
naiffance , & de la conformation au baflinde cette
mer, fi des caufes accidentelles n'y apportoient
par fois quelques modifications.
Je Rentrerai pas dans le détail minutieux des
variations qui peuvent avoir lieu en différens endroits
dans toutes les circonftances poflîbles , réfutantes
d'une plus ou moins grande quantité
d'eau fournie par les fleuves , en différentes
années & en différentes faifons 5 des vents impétueux
fouflant dans une direction concurrente
ou oppoféeà celle des courans, circonftances où
leur viteffe doit être augmentée ou diminuée, ou-
même leur mouvement anéanti fur la furface de
l ’eau5 des vents obliques continus, q u i, dans les
endroits fpacieux, peuvent les déranger de leur
direétion, qu’ils reprennent pourtant lorfqu’ils approchent
de paffages plus étroits} des tempêtes
dans la mer Baltique, qui quelquefois élèvent fu-
bitement l’eau à une hauteur prodigieufe dans les
archipels, les g olfe s, & fur les côtes oppofées
au vent.
Il eft des dérangemens plus confidérables encore
dans la direction des courans, & ils éprouvent
des changemens naturels , venant de caufes
étrangères à la Baltique , & trop remarquables
pour les paffer fous filence.
Quand des vents viole-ns du fud-oueft ou de
l’ouèft s’élèvent dans la mer du Nord, chaffent j
l’eau contre la côte orientale , & la forcent
de refluer vers le Sagerack, & j.ufque dans le
C atega t, mais furtout quand le vent d’oueft
foufle long-tems & avec force dans l’Océan,
qu'il pouffe les flots contre les îles Orcades &
celles de Schetteland dans la mer du Nord, &
les amoncèle contre la côte orientale dans le golfe
de Hambourg, la réfiftance qu’oppofe la terre-
ferme & l'effort continu du vent obligent alors
les eaux élevées à une hauteur confidérable, à,
s’écouler avec rapidité le long de la côte qui leur
préfente le paffage le plus facile dans une direction
eft-nord-eft, parle Sagerack, entre la Norv
èg e & le Jütland.
Ce courant occidental tourne enfuite à l’eft ,
autour de la pointe de Skaga, force le courant du
nord à fe ranger plus au nord-eft dans le golfe ,
perce dans le Categat, laiffant une eau quelquefois
immobile, quelquefois tournoyant avec rapidité,
entre lui & le courant oppofé, qui alors fe rapproche
de la côte de Suède, & élève l ’eau à une grande
hauteur dans les skares qui la bordent : de là il continue
fon cours au fud, autour des îles Laffo &
Anholt, vers les Belts & le Sund. Là luttant contre
les courans qui fe précipitent en fens oppofé , il
tes rejette fur l'un des cô té s , & s’ouvre un paffage
en partie par le Sund, où il fuit la côte de
Sélande pendant que le courant feptentrional for-
tant fe gliffe le long de la côte de Scanie, &
en partie plus confidérable par les Belts, & pénètre
dans une direction précifément oppofée à
celle des courans fortant de la Baltique, àuffi loin
que fa force le lui permet.
Décrire maintenant la marche progreflîve de
ce courant dans cette mer, ce feroit retracer
de nouveau la direction des courans, dans un fens
inverfe. ' . ..
Plus le vent du nord-oueft eft violent, plus il
d ure, plus aufli, par une fuite naturelle , ces
contre-courans accidentels s’enfoncent profondément
dans la mer Baltique.
Pénètrent-ils jufqu’à la hauteur de Stockholm
ou plus loin par l’archipel d’Aland, & de la mer
d* Aland dans la mer de Bothnie ? alors l’eau monte
à une hauteur extraordinaire fur ces côtes, dans
l’archipel de Stockholm , dans le golfe de Finlande
, & caufe, dans les courans qui en fortent,
les changemens qui doivent naturellement réfulter
des circonftances que nous avons expofées.
S'il s’élève en même tems un ouragan chaffant
du fud-oueft ou de l’oueft dans la mer 'Baltique,
l’eau afflue pour lo rs , en plus grande abondance
encore, dans le golfe de Finlande; le courant
occidental, paffant devant Dago , perce dans le
golfe tout le long de la côte ruffe, tandis que le
courant ordinaire fort en côtoyant la Finlande &
double la pointe de Hango, à cinq milles de la-
uelle giflent les célèbres écueils de Juffari & de
egerften, où la bouffole éprouve une variation.
L’ouragan foufle-t-il au contraire du f îd-eft ou
de l’eft ? alors le courant occidental entre encore
plus avant dans le golfe de Bothnie & dans l'archipel
de Stockholm, où il produit ce que l'on
appelle en fuédois upsjo, c’eft-i-d ire, remonte de
la mer, & fe jette dans le Mélar ou Mêler, dont
la furface eft pourtant à Medelhoge de trois pieds
plus haute que celle de la mer Baltique à So-
derflufs.
Ces accidens, qui s’ écartent de la règle ordinaire,
ne fe préfentent que rarement, & n’ont
guère lieu que dans les faifons orageufes, lorfque
les vents ont plus de confiance & de force , & ils
ne durent le plus fouvenTque quelques jours ; car
la nature eft ordinairement modérée dans fes opérations,
& tout ce qui eft violent eft par bonheur
aufli de courte durée.
Bajfins terreftres de la Baltique & de fes golfes.
J’ai cru qu’il convenoit de traiter à part ce qui
avoit pour objet les baflins terreftres de la Baltique
& de fes golfes, cette méthode étant nécef-
faire pour faire valoir ce que l’obfervation nous a
découvert fur l’enfemble de la conftitution de ces
mers & fur les circonftances qui ont concouru à
leur entretien, de telle forte que de grands changemens
ont pu s’introduire dans les caufes que la
nature met en jeu , circonftances qui s’annoncent
particuliérement, & en grand détail, par les coai-
rans intérieurs qui paroiffent liés avec les eaux
affluentes du dehors > ce qui définitivement montre
fa correfpondance qui a fubfifté en tout tems, &
qui fubfifté encore entre les baflins maritimes &
les baflins terreftres. Ceci prouve furtout la né-
ceflité de cette double confidération, qui eft
cependant parfaitement nouvelle en géographie,
& c’eft fon importance qui m’engage à décrire les
différentes parties des baflins terreftres que j’ai eu
occafion de parcourir & d’obferver à plufieurs
reprifes. Faute d’avoir été à portée de faifir la
correfpondance des baflins, & d’avoir foupçonné
l’exiftence de ceux du dehors ou terreftres, on a
méconnu l’état primitif de la Baltique : aufli dans
la difcuflion de la queftion fur la diminution des
eaux de cette mer, il eft vifible qu’on n’ avoit pas
embraffé toutes les circonftances qui pouvoient
éclairer fur fa folution ; car les eaux raffemblées
dans les baflins maritimes, étant alimentées par les
fleuves & les rivières qui appartenoient aux baf-
fins terreftres, & qui n’avoient aucune correfpondance
avec l’Océan, ne pouvoient être appréciées
comme une maffe qu’on pût foumettre à un calcul
précis : d’où il fuit que l’on ne pouvoit appliquer
a l’Océan les réfui tats des obfervations qu’on avoit
inconfîdérement fuivies fur les côtes de Suède &
de Danemarck. D’ailleurs, tout ce que nous dirons
fur cette Méditerranée , prouvera inconteftable-
ment qu’elle n’ a , comme toutes les autres mers,
aucune union ou dépendance avec la grande mer.
Il eft vifible que cet amas d’eau n’a de correfpondance
avec l’Océan, que parce qu’il eft plus élevé
que de grands égouts , le Categat & la mer d’A llemagne
, où il verfe fon trop plein.
Bajfins terreftres.
En allant de Hollande à Copenhague, on trouve,
du côté d’Oldenbourg en Weftphalie, des blocs
de granit gris & rouge, ifolés & difperfés fur un
fable fin de même nature que les élémens du granit
; & ce fol, à la furface duquel il ne croît que
de la bruyère, s’étend fans interruption jufqu’â.
Hambourg : feulement on remarque que plus on
approche de Hambourg, & plus on s’élève vers le
nord, plus les blocs détachés de granit font confi-
dérablès : ce font fouvent des fragmens de plufieurs
pieds de diamètre.
On ne découvre à l’horizon aucune montagne
d ’où l ’on pourroit croire que ces maffes auroient
été détachées; & fi l’on jette les yeux fur les
Cartes de ce canton, & qu’on fuive le cours des
rivières qui s’y réunifient, tels que l’Elbe & le
W e fe r , on voit que la diftribution des granits ne
fuit point l’ordre & les progrès qu’auroient dû
fuivre les dépôts de ces fleuves.
Sur la route de Hambourg à Kiel, ces mêmes
blocs de granit fe voient encore dans un fol plus
fertile & plus cultivé ; & on les retrouve même
au Sund, fur la rive du Danemarck, c ’eft-à-dire j
à un degré & demi de latitude de K ie l, & à trois
degrés d’Oldenbourg. Mais vers le nord ce ne
font, pas feulement quelques morceaux ifolés fur
du fable fin, mais un grand nombre de blocs de
toutes grandeurs. Enfin, cette compofition fingu-
lière du fol fe prolonge de l’ autre côté du Sund ,
fur la rive qui appartient à la Suède.
Depuis le Sund jufqu’ à Carlfcroon, qui eft à
trois degrés plus à l’eft , on rencontre toujours de
ces mêmes maffes de granit détachées. Quelques
lieues avant d’arriver à cette v ille, on apperçoit
des monticules à l’horizon, qui forment une chaîne
de granit, laquelle court de l’oueft à l’e f t , &
Carlfcroon eft à l’extrémité de cette chaîne qui
fe perd dans la mer, & reparoît par quelques éminences
fur lefquelles on a établi des batteries qui
défendent le p o r t, & c’ eft dans un maflif de ce
granit qu’on a commencé à creufer ces formes
qu’on deftine à vingt-quatre vaiffeaux de ligne.
Ce maflif de granit fe continue, & fe montre à
découvert jufqu’ en Dalécarlie, en fe prolongeant
jufque fur les bords de la Mer-Glaciale. Enfin , il
s’étend aufli à l’eft. Labafe d e l’ile d’Aland dans le
golfe de Bothnie, eft de granit. On le voit dans la
Finlande, fur la route d’Abo à Pétersbourg ; mais
on remarque que,dans la partie de la Finlande qui
appartient à la Ruflie, ces blocs de granit font
dilperfés en défordre, & les voyageurs s’en font
affurés en fuivant des routes tortueufes tracées
entre ces blocs énormes de granit.
Lorfqû’on approche de Pétersbourg, le fo! s’a-
baiffe & devient marécageux ; mais on y trouve
toujours de ces morceaux de granit détachés. C ’eft
une de ces maffes trouvées dans un marais voifin
de Pétersbourg, qui fert de piédeftal à la ftatue
de fon fondateur.
Ces mêmes granits font encore fernés fur la
route de Mofcow, à plus de cent lieues au fud de
Pétersbourg, dans des pays bas & marécageux. Il
eft vrai qu’ils font plus rares & moins gros que
dans les environs de Pétersbotirg.
Enfin, les fables granitiques font difperfés, à la
furface de grandes plaines en Pologne, au cinquante
troifième degré de latitude. Plufieurs de
ces amas de fables recouvrent des dépôts fous-
marins compofés de coquillages ; ce qui indique
que le fable granitique eft poftérieur à ces dépôts.
En réfléchiffant fur ces faits, on croit être auto-
rifé à en conclure que les blocs de granit ifolés
qu’on trouve dans la Weftphalie, y ont été amenés
du nord. On eft tenté de penfer que les fables
granitiques qui recouvrent les mêmes plaines où
font difperfés ces blocs, font le produit du détritus
de ces maffes pendant leur tranfport.
La dégradation de ces maffes, quant à leur
nombre & à leur volume, femble indiquer que
leur origine eft du nord au fud , & de l’eft à
l ’oueft.
Le terrain fur lequel fe trouvent ces dépôts
embraffe à peu près quatre degrés de latitude, &
vingt-neuf degrés de longitude.
La hauteur de Carlfcroon, où l’ on retrouve le