très-profondes fur les croupes des vallons font les
premières ébauches des vallons latéraux ou des
vallons des croupes dont les bords font très-
èfcarpés.
Tous les vallons , malgré leur profondeur ,
font à fec & fans aucune eau courante dans le
trajet que nous avons parcouru , c ’eft-à-dire ,
depuis Crèvecoeur jufqu’au Ménil. Ceci n’eft pas
étonnant, car la craie qui occupe le fond des
vallons ne tient pas l’eau. La couche fuperficielle,
qui eft un mélange de fable & d’argile , tient l’eau,
mais ne la verfe pas fur les croupes par les fources,
car elle eftabforbée par le fol crayeux. On remarque
que le fol change aux environs de Grandvillievs, où
lesfources paroiffent & ouïes filets d’eau courante
fe continuent après s’être montrés.
CRIMÉE ( l a ) , aujourd’ hui Tauride depuis
fa réunion à l'empire de Rufiie. Elle eft lituée
entre le 50 & le 53e. degré de longitude , & le
43 & le 47e. de latitude.
Vers le nord cette province s’étend jufqu’au
gouvernement de Catherineflaw : à l’eft ‘elle eft
bordée par la mer d’A z o f & la rivière de Cuban 5
& au fud, à l ’oueft & au nord-oueft par la Mer-
Noire.
Eu égard à la nature du fo l, à la fituation & à
la forme du terrain des diverfts contrées de la
Crimée ou Tauride, on peut la divifer en quatre
parties : en pays p lat, en pays de montagnes ou
collines un peu élevées, enfuite en terrain de la
prefqu’ile de Kertch & en île de Taroan. Toutes
ces contrées contiennent des objets dignes d’occuper
les naturaliftes, & nous nous propofons
d'en traiter féparément & en détail.
Du pays plat. .
Cette partie offre de vaftes plaines, qui s’é tendent
vers le nord, depuis le Nieper jufqu’ à
Perecop, & de là jufqu’aux rivières de Salghir &
de Boulghanak occidental, entre la Mer-Noire, la
mer d’A z o f & celle de Sivache. Ces plaines fe
reffemblent toutes par la nature de leur fol.
Quoiqu’affez élevées au deffus du niveau de la
mer on y trouve fréquemment des lacs falés |
des amas de fels ou falines , des couches horizontales
qui renferment un grand nombre de
corps marins & de coquilles pétrifiées.
Le fol, qui varie très- peu, eft une terre argileufe
jaunâtre, qui, à la fuperficie, ayant été mêlée des
débris des végétaux, paroît, dans cette partie fu-
erficielle,d’un gris jaunâtre. Dans un grand nom-
re d’endroits ce fol abonde en amas de fe l, particuliérement
dans le diftridt de Perecop & de la
mer de Sivache,
Entre Perecop & Koflow , & au-delà, le long
de la Mer-Noire, fous cette argile, on trouve
une pierre calcaire, diftribuée par lits horizontaux,
mêlée de fragmens de coquilles & de gros fable
de mer. Cette pierre eft fort poreufe.
La fertilité de ce fol n’eft pas uniforme ; elle
paroît dépendre d’une certaine proportion du
mélange de terreau, débris des végétaux, avec la
bafe d'argile, & en même tems de l ’état d’humidité
où ce fol fe trouve. Dans plusieurs endroits
il produit abondamment des plantes propres aux
pâturages, dans d’autres il eft fufceptible d'être
cultivé avec fuccès.
On n’y rencontre nulle part des bois & des
forêts ; cependant les jardins des environs de
KofLow, où les arbres fruitiers & les autres ef-
pèces d’ arbres croiffent facilement & fans beaucoup
de foin, prouvent qu’ il eft poffible de peupler
ce pays d’arbres.
L’eau des petites rivières & des ruiffeaux eft la
plupart du tems trouble & de mauvais goût;, ce
qui provient des fonds limoneux que ces eaux parcourent,
& du peu de pente qu’elles trouvent
l dans leurs lits ; ce qui les y rend Ihgnantes dans
plufieuts parties. Dans les puits creufes. à différentes
profondeurs l’ eau eft louvent faumâtre, parce
qu’ elle rencontre dans le fol beaucoup de parties
falines dont elle eft chargée; mais dans les environs
deK oflow, où quelques-uns .de ces puits
ont jufqu’ à cinquante fajènes de profondeur, 5c
d’où on la tire à l’aide de chevaux, eljeeft excellente
, & fi claire qu’elle ne le cède en rien aux
meilleures eaux des fources des grandes rivières.
Les lacs falés, épars en diyers endroits de ces
plaines, doivent fixer un moment notre attention,
tant par rapport aux amas de fel qui fervent à les
alimenter, que par rapport aux avantages qu’on
en retire.
Ces lacs font à différentes diftances de la mer,
mais ils font plus nombreux le long de fes bords..
Quant à leur étendue, ils diffèrent beaucoup. Il
ne paroît pas qu’on ait encore obfervé à quelles
caufes on peut rapporter la formation de leurs baf-
fins. Nous favons feulement que les bords font quelquefois
en pentes douces, & d'autres fois e(carpes
& hauts. Les premiers peuvent être confidérés
comme des marais falans, & les autres comme des;
baffins approfondis d’une manière quelconque dans
le fol au milieu duquel on les trouve.
La profondeur de la plupart de ces lacs eft d’environ
quatre à cinq pieds. Le fond des uns eft limoneux,
& celui des autres fablonnenx.
On ne remarque aucun mouvement particulier à
la furface des eaux de ces lacs, d’où l’ on ait pu
conclure qu'ils font alimentés par des fources fa-,
lées abondantes & qui fortent du fond. Dans ce
cas, il eft probable que des eaux qui filtrent entre
deux terres, s’y rendent par tous les points de
leurs bords, foit chargées de fe l, foit propres à
en diffoudre les amas qui fe trouvent au fond de
ceslacs^On a remarqué que les ruiffeaux qui tra-
verfent quelques-uns de ces lacs ne contribuent
en aucune forte à leur falure, parce que leurs eaux
1 1
ne font pas g fenfiblement chargées de fel. Ainfi
nous n’avons-aucune obfervation qui puiffe jeter
du jour fur l’origine de ces lacs; nous ne connoif-
fons pas même la part que,la retraite delà mer
peut avoir eue dans l’état de ceux qui fe trouvent
voifins de fes bords.
On préfume cependant que plufieurs de ces
lacs ont fuccédé à des golfes anciens , & 1 on fe
fonde fur-la pente douce de leurs bords, à 1 endroit
où ils communiquoient à la.mer , & par les
amas de coquilles marines qu’ s’y trouvent. Ceux
des environs de Koflow font bien propres à confirmer
cette hypothèfe ; car tout le terrain qui les
fépare de la mer eft un compofé de débris de coquilles
marines & de fable de mer. C eft la réunion
de ces matériaux, qui forme les pierres calcaires
qu’on rencontre dans ces intervalles. Rien
ne prouve , au refte , que ces amas d eau falée
aient confervé aucune communication fouterraine
avec la mer. Il eft plus vraifembîable que la falure
des lacs eft plus ou moins confidérable, fuivant
les amas de fel qu’elle a dépofés autrefois fur fes
bords, & que les eaux diffolvent.
Parmi les lacs abondans en fel , ceux des environs
de Perecop tiennent le premier^ rang. La
quantité de fel qu’ ils fourn ffent annuehement eft
très-confidérable , & indique que l ’amas falin primitif
formoit tine très-grande maffe de fel.
Le tems où le fel fe forme ordinairement fur
les lacs eft celui des mois les plus chauds de l’eté ;
ce qui comprend une partie du mois de juin, le
mois de juillet & celui d’août. Plus le tems de la
falaifon eft fe c , plus le fel eft abondant , parce
qu’alors l’évaporation de l’eau furabondante a la
criftallifation étant enlevée plus, rapidement, les
parties falines s’accumulent en même raifom On
fent qu’un tems pluvieux & humide produit un
eff.t contraire. Lorfque la faifon eft favorable,
comme nous l’ avons d i t , la croûte de fel qui fe
trouve fur le fond des lacs eft une maffe folide de
deux doigts d’épaiffeur, compofée de. petits &
de moyens criftaux étroitement unis par leurs faces
, & dont la plupart ont une forme cubique.
Quelquefois ces criftaux font fi confufernent en-
taffés, qu’ ils n’ont aucune figure précife & déterminée.
Outre cela ils font plus ou moins purs ,
plus ou moins blancs, fuivant le fond du lac.
Quelquefois fous* ces croûtes on rencontre des
criftaux ifolés d’une grandeur & d’ une transparence
remarquables, & dont la figure eft régulièrement
cubique.
Pour la récolte des fels on n’ emploie d’autres
?nftrumens que des pelles de b o is , au moyen def-
quelles on enlève les débris des croûtes falines
après les avoir lavées dans l’eau pure pour en
détacher les parties terreufes : on en charge des
chariots avec lefquels on les tranfporte dans les
dépôts & magafins. La profondeur des lacs eft fi
peu confidérable , que les chariots y entrent jufqu’à
une affez grande diftapce de leurs bords.
Géographie- Phyjtque, Tome I lL
Pays de montagnes & collines.
Les contrées de la partie montueufe font bornées
au nord par les rivières de Saghir & de
Boulghanak. De ces limites le terrain s’élève fen-
fiblement jufqu’au pied des montagnes, qui fe haui-
fant elles-mêmes par degrés vers le fud, vont former
le bord de la mer en demi-cercle ; de façon
que cette chaîne à l’eft s'étend , par une de fes
extrémités Jufqu’ à Caffa, & par l’autre, à l’oueft,
jufqu'auprès de l’embouchure d’Alma. Le commencement
de cette maffe montueufe peut être
placé au milieu de cette bande de terrain, à vingt
vetftes environ de Saghir vers Caraffoubazare ,
parce qu’on y rencontre les premières collines
couvertes de terre végétale & de gros fable rouge.
Elles continuent ainfi jufque près de Caraffoubazare,
où ces maffes font déjà de moyennes
montagnes.
Eu égard à leur difpofition relative & a leur
élévation, ces montagnes peuvent fe dift nguer en
montagnes de l’avant, en montagnes du milieu CsC
en montagnes méridionales du revers. Quelques-
■ unes annoncent qu’ elles ont ete -formées en ffffe-
i rens tems par les fédimens de la mer; quelques
I autres paroiffent compoféts de produits du feu ,
ou altérées par l’ aétion des éruptions fouterraines.-
En général cependant toutes ces maffes fe refiem-
blent en ce qu’elles fe prolongent dans la direction
de l’eft à l’oueft. Leur face feptentrionale eft
plus inclinée que là méridionale. La pierre calcaire
, fubftance qui domine dans toutes , s’y
trouve en divers états, & quant à la folidité & au
tiffu de fes parties, & même quant au mélange
des matières hétérogènes ; enfin les couches horizontales
paroiffent avoir une certaine tendance
à s’ incliner vers le fua.
Les pieds déchaînes principales font pour la plupart
couverts de bancs argileux , & par une fuit©
naturelle on rencontre dans cette région différens
fehiftes & autres terres & pierres que nous ferons
connoître plus particuliérement par la fuite lorfque
nous décrirons en général les avantages de
cette partie montueufe.
Ce fyftème de mort ignés offre des fîtes agréables;
des cantons fertiles , fourniffant d’abondantes
récoltes ; des bois applicables à plufieurs ufa-
ges; des jardins où font produits les meilleurs
fruits ; une quantité innombrable de fources, de
fontaines, qui verfent fur toutes les pentes des
montagnes des eaux dont la réunion forme un
grand nombre de ruiffeaux & quelques rivières.
Les vallées entre les principales montagnes font
bien ouvertes & acceffibles ; leur fond, ainfi que
le. pied feptentrional des maffes montueufes , eft
de l ’argile jaunâtre ou g r ife , dont nous ayons
parlé au commencement de cette defeription.
Cette terre eft mêlée de petites pierres qu’on
rencontre ordinairement fous une couche de terreau
qui, dans quelques endroits, a plus d’uu
A a a a