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nord-eft, s’étend un vignoble dont les produits
font abondans, mais de médiocre qualité. De l'intérieur
du Jura elle tire de beaux bois de' construction
, & toutes les produirons ordinaires des'
Alpes en pâturages d’été. Le torrent ou là:rivière
de la Suze fort d’un vallon qui ouvre la communication
avec l ’Erguel, Moutiers Grandval^ leSalf-
gaw & autres pays de l’évêché de Bâle , par le
fameux paffage de Pierre-Pertuis, ouvert à travers
un roc* Les eaux, de ce torrent3 en débouchant
dans la plaine vers Boujean , fervent pour des martinets
, des tireries de fil de fer & d’autres ü fi nés.
On en rire encore parti, dans le$ baffes eaux, pour
l’ irrigation. La Thièle , qui fort • du lac près de
Nidau , offre la commodité des tranfports par
eau jufque dans l’A ar, & de celle-ci dans le Rhin.
A une très-petite diftànce de Bietvrie, au piëcT du
Jura, fort une fource d’eau vive qui fournît â
toutes les fontaines publiques.
• Les lieux principaux de cette contrée font la
NeuveviUe*, Dieffe > Lamboing* Nodz , Prefle &
Boujean. C e pays, ainfi que l’Erguel & Moutiers- ;
Grandval, quoiqu’implicitement réuni à la France ;
avec la principauté dêPorentruy, s’étoit, pendant
quatre ans , (ouflrait à l’effet du déc'ret du 23 mars
1753 i mais le Directoire exécutif a prononce l’ad-
jOnCtion définitive de ces lieux au département du
Mont-Terrible, & ce département ayant été incorporé
à celui du Haut-Rhin, le canton de Bienne,
tel que nous l’avons fait con n o ître e ft aujourd’hui
compris dans l’arrondiflement de Délémont.
B ienne , ville du département du Haut-Rhin,
arrondiflèment de Délémont , fur la Suze, à une
demi-lieue de Nidau , entre Soleure & Neuchâtel.
Cette ville , jadis alliée des Suiflès, faifoit partie
de la principauté de Porentruy, & non de 1 évêché
de Bâle proprement dit, parce que fes habi-
tans, ainfi que ceux de la Neuveville , du Val-
Saint-Imier & de Moutîers-Grandval, ftryant la
religion réformée fous la protection de l’État de
Berne, fe trouvoient ainfi hors du domaine fpiri-
tuel de l’évêque de Bâle. La pofition de cette ville
fur la Suze , non loin du lac auquel on arrive par'
un chemin bordé d’ arbres, eft très-pittorefque.
La propreté y règne. Ses maifons font décorées au
dehors de peinturés fuivant le coftume allemand.
Cette ville elt ornée de belles fontaines 5 ellefert
d’entrepôt au commerce de Neuchâtel, dont.elle
n’ eft éloignée que de fix lieues. Elle a plufieurs
ateliers, & une fabrique de toiles peintes. Le lac
de Bienne a quatre lieues dé longueur du nord au
fud , fur une lieue de largeur. Il eft très-poifTon-
neux, & renferme deux petites îles, dont la plus
grande, dite de la Mothc ou de Saint-Pierre, d’ une
lieue de circuit, & q ui, dans cet efpace borné,
Contient une-maifon champêtre, & réunit à la fois
des champs , des prés, des vignes , une petite forêt,
des pâturages , des collines & des vallées, eft illuf-
«rée par le féjour de Jean-Jacques Roujfeau, Iorf-j
b r e
qu’obligé de fuir du territoire de Môtier-Tràvers,
il vint chercher, dans cette habitation ifolée &
tranquille', un abri contre les perfécutions?; mais
Berne le força de quitter ce féjour. De là il paffa
' quelque rems à Bienne. û De toutes mes hhb'icatiùrist
M dit-il dans fes- Conférions , celle que j’ ai le,plus
» regrettée, c’èftTTie de Saint-Picrfe au lac de.
• sa Bienne. » , " lï 4 ■ -c
Le principal conirnèrce -de Bienne confifte en
vins, planches de fapin, bois de confti* 11 CtionSde. ,
Bif.nne ( Lac de). Ce lac eft firué à la fuite du
lac de Neuchâtel : il reçoit les eaux dé la Tbielley'
dans le vallon de laquèlié fon balfm fift placé. Il
peut avoir quatre lieues de longueur, fur une pe-'
tite lieue de largeur.
La Thielle, qui fort du lac près de Nidau, offre
la communication du tranfpôrt par eau jufque dans
[ l’Aar. Au printems,' lors de la fonte des neiges,'
la rivière de la Suze & le torrént Traunbach grof-
• fiffent au point qu’ ils font hauffer confidérable-
ment les eaux du lac. C ’eft alors que le bailliage
de Nidau eft expofé aux inondations du lac de
, Bienne & de l’Aar : celles du lac furtout arrivent,
comme nous l ’avons d it , au printems, & elles,
fubmergent fouvent toute la ville de Nidau, avec
le pays des environs dans la longueur de fix lieues.
Souvent ces inondations durent trois mois j mais
fi elles font courtes, elles contribuent plutôt à
augmenter la récolte des prairies, qu’à la détruire.
Ces inondations furviennent quelquefois fi rapidement,
que les habitans de certains villages font
obligés de fe fauver au haut de leurs granges pour
y refter jufqu’à ce que les eaux fe foient retirées,:
ou jufqu’à ce qu’ on vienne à leur fecours avec dès
bateaux.
La plus grande profondeur du lac eft de foixante
& dix toifes , entre Douane & Gerofingue, ou
même, fuivant quelques obfervateurs, de quatre-
vingts toifes près de Gléreffe, vis-à-vis la roche
qui èft au milieu du lac.
Le courant de la Thielle , qui a fon embouchure
dans le lac de Bienne, eft encore fenfible allez avant
dans fon baflîn ; mais fes deux bords fe garnifferit.
de joncs & de rofeaux , qui de là s’étendent le
long de la rive méridionale du lac, en fuivant une
large lifière de fable formée par les dépôts de la
Thielle , & qui tendent à combler le lac de ce
c ô té , pendant que le bord feptentrional eft plus
net & plus profond, parce que les eaux le battent
& gagnent fur la terre. Ge banc de,fable eft fort
large à fon origine , & fe prolonge enfuite jufqu’à
Tîle Saint-Pierre.
La Thielle, à fon entrée dans le lac, forme plufieurs
petits bras, dont l ’un embraffe la prefqu’iîe
Saint-Jean. Cette rivière ou plutôt le trop plein
du lac fort à Nidaug & fe jette dansT-Aar à une
lieue & demie du lac. C ’eft ce courant d’eau q u i,
avec la Schufs, a formé tous les marais au milieu
defquels font fituées les villes de Bienne & de*
Nidau i
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Nidau ? en forte que le baflin du lac paroît avoir
beaucoup perdu à fon extrémité orientale, & que,
par une fuite de cet ancien état, l’embouchure de
la Schufs étoit beaucoup plus bas. Les marais, fur-
tout vers Nidau, font fi pénétrés d’ eau, que tous
fes batimens en font fondés fur pilotis.
Ainfi la Schufs &r la Thielle tenden rà combler
le lac de Bienne, & à en refferrer les bords de la
même manière que la Thielle & l’Orbe, la Broyé
& la Glane tendent à combler les lacs de Neuchâtel
& de Morat. ( Voye^ les articles de ces lacs.)
C eft auflî aux dépôts des fables que la première
furtout y charrie , qu’on doit attribuer plufieurs
bancs de fables qui paroiffent jetés çà & là fans
fuite & fans ordre, & que les bateliers appellent
des montagnes, affurant que plufieurs des collines
de fables font prefqu’auffi hautes, à compter de
leur bafe, que celles qui s’élèvent au deflus de la
furface de l’eau.
Environ au tiers de la longueur du lac, & au
milieu de fa largeur, on voit la jolie petite île de
Saint-Pierre, connue par les defcriptions de Jean-
Jacques Rouffeau. Cette petite île , qui n’ eft proprement
qu’ un rocher ifolé de mollaffe, s’élève
environ vingt-quatre pieds au delfus de la furface
de 1 eau. Elle çft de forme alongée > elle n’a guère
qu un quart de’lieue de longueur du nord-nord-eft
au fud-fud-oueft.
Plus loin on voit encore, au milieu du baflin du
la c , une autre île plus petite, étroite, environnée
deyofea^iix, & formée de la même mollaffe que la
précédente.
Ces fingulières mafîes de rochers i fol es au milieu
d’ un la c , composes de couches régulières,
paroiffent avoir été détachées du bord méridional
du lac, & furtout du cap avancé de Julimont, qui
offre les mêmes couchés & la même organifation.
Cette feparation a été probablement opérée par le
travail lent & graduel de l ’eau courante, quL, en
creufant la vallée de la T h ie lle , a réfervé, d A le
maff'ff qu’elle entamoit, les deux îles de la meme
manière qu’ont été formées plufieurs maffes ifolées
qu’on rencontre dans certaines vallées à fe c , où
les rivières coulent fans obftacle. ( Voye[ L a c . )
Le la c lle Bienne eft fitué dans une vallée fort
étroite, refferrée par des côtes dont les pentes
font plus ou moins rapides. Le long de fa rive
méridionale, les côtes font très-peu élevées, &
compofées d’une mollaffe ftmbhble à celle du
Joret. On y exploite des carrières, d ’où l’on tire
des pierres propres à la conftruction des portes &
des croifées. Les plus élevées de ces côtes font
Julimont, fur lequel eft fîtuée la ville de Cerlier,
& le promontoire ifolé qui eft en face de Nidau.
La rive feptentrionale, au contraire, eft formée
ar un prolongement du Jura, qui offre, dans toute
étendue du la c , une pierre calcaire dure, comp
a r e , fufceptible de poli, blanche ou jaunâtre,
qui fe délite en gros blocs de forme indéterminée,
ou en larges plaques de deux ou trois pouces
Géographie-Phyfique. Tome III.
d epaifleur. C ’eft une partie du même maffif qu’on
obferve 4e long de la rive du lac de Neuchâtel,
mais q ui, au-delà de Neuchâtel, offre une pierre
jaune tendre, & qui peut être raillée facilement.
Outre les deux îles du lac de Bienne qui font
compofées de mollaffe, on trouve, entre la Neu-
veville & le village de CHavannes, un petit pro-
montoire qu’on nomme les Celliers, contigu au
maint du Jura qui s’élève au deflus & à cô té , &
<l u,lle" . aui“ coinpofé de couclies horizontales de
mollalle, comme celle des deux îles. On a d’.iil-
eurs remarqué que cette pierre forme le fond du
lac prefque partout où le fable & les cailloux
1 ouïes qui Je recouvrent communément, ont pu
permettre de le reconnoître 5 ce qui donne lieu de
croire que la pointe des Celliers, celle de Juli-
m°Jrr j !eS ^eux ^es onr aPPartenu au mè ne
a p,erre de fable avant la vallée de
la t hielle ait été creufée & approfondie de maniéré
a former le baffîn du lac.
| S et,ç,e m®me r^ve feptentrionale eft arrofée par
de beHes fources très-abondantes, qui donnent
naillance a plufieurs rivières, pSuel-létfi après
avoir parcouru la croupe du Jura, fe jettent dans
la plaine ou dans les lacs.
Quant aux produ&ions du lac de Bienne, elles
font prefque toutes.les mêmes que celles des lacs
de Neuchâtel & de Morat, ainfi nous n’en parlerons
pas j mais nous croyons devoir faire mention
ici d une production qui eft commune aux trois
lacs peut-être à beaucoup d’autres , & dont
nous n avons rien dit. Les eaux de ces lacs, fur-
tout dans le mois de juillet, font fujètes à fe cou-
vru en entier d une moufle en forme d’ écume
blanche, qui rend ces eaux très-fales : elles ne fe
netoient, pour un moment feulement, que lorf-
qu un coup de vent balaie leur furface. Certe
moufle communique à l’eau un goût défagréable
& une odeur très-forte de marée, laquelle dure plu-
fleurs femaines. Le même phénomène fe montre
fur les lacs de Neuchâtel &: de Genève, dont la
furface fe couvre suffi, vers la fin de mars, d’une
matière d’un vert-jaunâtre, qui en altère l’eau à
tel point qu elle ne peut fervir ni au blanchifla^e
du linge ni à la cuiffon des viandes, & c . I; / a
tout lieu de croire que ce phénomène elt du même
genre que ceitii donc Valiérius fait mention dans
fon Hydrologie, comme fe montrant communément
fur les eaux des lacs, & avec les mêmes cir-
conftances. C eft avec raifon que ce favant natu-
ralifte attribue ce phénomène à des plantes aquatiques
qui croiilent à certaines époques, & ftifpa-
roiflent de même.
Climat de la vallée de Bienne.
Nous terminerons ce que nous avons dit du lac
de Bienne, par quelques confiai dations fur le climat
de ce pdys. Excepté les environs du pont él ■ |a
Thielle & du Lande ron , ainfi que ceux de Nidau
S