
de Saint-Fortunat fournirent la plus excellente
qualité de pierre de tout le Mont-Dor. La direction
de ces différens lits fait penfer que la fuper-
ficie paffe au de flous des endroits les plus fouillés
de Saint-Romain & de Couzon : on croit en avoir
acquis la preuve par la carrière exploitée dans
une vigne à l'extrémité de Couzon , près du village
d’Albigny , qui eft fitué au pied de la montagne.
L'on y a fa it, il y a peu de tems , des excavations
très profondes j & l'on a rencontré un banc
noir de même nature que les couches fupérieures
de Saint-Fortunat.
La pierre eft de couleurs différentes : il y en a de
très-noire, veinée de blanc, pleine & fans aucun
coquillage, tenant beaucoup du marbre : il y en a
une qualité qui eft grife, tirant fur le blanc, & une
autre qui eft rougeâtre. En général, il y en a beaucoup
qui ont de petites parties1 criftallines. Les
couleurs ne font point féparées par couches j il eft
très-facile de s'en convaincre, puifque la partie
découverte & entamée à mi-coteau, à mefure que
l’on defcend, découvre la coupe de la montagne.
Il y en a une entr’autres qui préfente une furfacè
verticale d'environ douze cents pieds de large, &
deux cents pieds de profondeur. La pierre y ayant
été tranchée v iv e , l'on peut facilement compter
les bancs & remarquer la variété des couleurs. La
partie fupérieure qui eft noire, defcend ordinairement
prefque jufqu’au fond de la même couleur,
tranchant quelquefois un peu obliquement. Cette :
couleur fe fond, en d'autres endroits , dans celle 1
qui lui eft voifine, de manière que l’on peut avoir i
de la pierre noire de tous les bancs & de trois
couleurs. - ' .• • - - , î .
Voici les noms que les ouvriers du pays donnent
à chaque banc, qui font pour l ’ordinaire relatiîs à
fa qualité & à fon emploi.
La première couche qui fert de croûte à la fu-
perficie , fe nomme banc de favon : il n’ a que trois
pouces d’épaifleur j il eft communément gris d’ar-
doife, quoiqu'il y en ait dans l'intérieur de toutes
les teintes dont nous avons parlé. L'on n’apper-
ço it, dans cette couche feulement, aucun de ces
Aies criftallins qui paroiflènt faire le corps principal
de cette pierre : le grain en eft aufli plus fin
que tous les autres.
2°. Le banc'des^ b roquettes, qui a huit pouces
d’épaifleur, & qui donne une pierre médiocre.
3°. Le banc fanguin, qui a huit pouces d’épaif-
feur. L ’on trouve communément deffus de la terre
glaife ou une efpèce de bol rouge.
4°. Le banc fandras, qui a quatorze pouces d'épaifleur.
y°. Le banc roive , qui a quatorze pouces d’é paifleur
, & dont le grain eft fort gros.
6°. Le banc balofu, qui a dix pouces d’épaifleur,
dont la pierre eft mal-faine, & ne peut être employée
à des ouvrages délicats.
7°. Le petit banc platu 3 qui a fix pouces d’épaif-
feur. Bonne pierre qui a peu de fofliles.
8°. Le banc mérifoliet, qui a quatorze pouces
d'épaifleur, tout en refend horizontal.
9°‘ Le banc blanc, qui a feize pouces d’épaifleur,
& qui forme une bonne pierre.
ro ‘. Le pavé du banc des marches 3 qui a quatre
pouces d épaifleur. C'eft une mauvaife pierre, d’ans
laquelle on trouve quelques fofliles.
11 . Le banc des marches, qui a treize pouces
d epaiffeur, & qui eft une bonne pierre : on y
trouve cependant des coquillages.
; ƒ 2 / Le pavé du banc guepu, qui a quatre pouces
d épaifleur, & rempli de fofliles.
1 3 « Le bancguépu, qui a feizé pouces d’épaif-
feur, & qui donne des pierres de bonne qualité.
140. Le banc platu 3 qui a treize pouces d’épaif-
feur. Bonne pierre , dans laquelle il y a peu de
fofliles, . M 3 . ^
1 50. Le pave du grand banc fupérieur ,, qui a trois
pouces d épaifleur. Bonne pierre, quoique remplie
de fofliles. I
16°. Le gros banc y qui a douze pouces d'épaif-
feur. Pierre excellente, fans fofliles Cette pierre,
veinée de blanc, reçoit un beau poli.
170. Le banc blanc3 qui a huit pouces d’épaif-
feur. Cette pierre contient peu de fofliles.
180. Le petit banc platu , qui a fix pouces d’épaifleur.
Pierre excellente, fans fofliles.
.19°. Le gros bancplatu, qui a douze pouces d’épaifleur.
Bonne pierre, peu de fofliles.
2-0°. Le banc bojfu, qui a cinq pouces d’épaifleur. Pierre inégale, beaucoup de fofliles.
2 i° . Le banc foliajfu, qui a quatre pouces d ’épaifleur.
Mauvaife pierre, qui contient des fof-
files.
22°. Le banc des couches, qui a quatre pouces
d épaifleur. Bonne pierre, fans fofliles.
23 . Le banc de la terre, qui a cinq pouces d ’é-
paiflèur. Pierre ingrate , remplie de terraffes.
24°* Le banc des portes, qui a.feize pouces d'épaifleur.
Pierre très-bonne , peu de fofliles.
j 2j ’tL Le pavé du banc platu, qui a cinq pouces
d épaifleur. Mauvaife pierre, peu de fofliles.
26°. Le banc platu, qui a treize pouces d’épaiffeur.
Bonne pierre, peu de fofliles.
270. Le bancporpu y qui a vingt pieds d’épaifleur.
Bonne pierre, dont le grain eft un peu ferré.
28°. Le banc des évics, qui a cinq pouces d'épaifleur.
Bonne qualité de pierre, qui eft dure, &
qui renferme peu de fofliles. -
, 29 / Le banc des quatre mifes, qui a treize pouces
d épaifleur. Bonne pierre, mais elle ne peut être
employée que fur fon lit de carrière, autrement
elle éclateroit.
30°. Le banc des cailloux, qui a cinq pouces d'épaifleur.
Cette pierre inégale eft dure à travailler.
31 . Le banc des trois mifes, qui a d ix -fep t
pouces d’épaifleur. La pierre eft tout-à-fait fem-
blable à celle du banc des quatre mifes, ou du
n°. 29.
1 32°* Le banc d’avas, qui a quatorze pouces d’ épaifleurTCette
pierre eft bonne 5c remplie de fof-
files.
330. Le banc dur, qui a cinq pieds d’épaiffeur.
Cette pierre eft bonne & fans fofliles.
340. Le banc balicam , qui a fix pouces d’épaif-
feur. La pierre eft bonne, & ne renferme que peu
de fofliles.
3J°. Le banc des couches, qui a quatre pouces
d’épaifleur, fournit une bonne pierre.
36°. Le banc de marche, qui a fix pouces d’épaiffeur,
eft encore une excellente pierre.
370. Le banc crefiliam , qui a vingt-deux pouces
d’épaifleur, eft une mauvaife pierre remplie de
fofliles.
38°. Le gros banc platu3 qui a dix-fept pouces
d'épaifleur, eft une bonne pierre qui a peu de
fofliles.
390. Le banc des évies, qui a douze pouces d’épaifleur.
Pierre très-bonne, peu de fofliles.
40°. Le banc de vas , qui a neuf pouces d’épaif-
feur. La pierre en eft mauvaife, peu liée enfemble,
& renferme beaucoup de fofliles.
410. Le grand banc de vas, qui a vingt pouces
d'épaifleur. La pierre en eft bonne, & n'a point
de fofliles, à l'exception de quelques bélemnites.
L'on defcend rarement plus bas.
L’exportation des pierres de Saint-Fortunat fe
fait de la même manière que celle de Saint-Cyr:
c’eft le même mécanifme pour détacher les bancs.
Mais on trouve à Saint-Fortunat des pierres beaucoup
plus grandes , & en général elles y font
meilleures. Plufieurs bancs, tels que les nos. 16,
18, 19 , 26 & 2 7 , font ordinairement très-noirs,
avec des parties veinées de blanc, On en fait des ;
chambranles de cheminées & des ouvrages d’é-
glife , qui ont de l’éclat après avoir été polis. Le ;
treizième banc a été beaucoup employé pour des '
tables. Il y a des bancs très-intérèffans par la variété
des fofliles dont ils font jonchés. Il faut obferver
que les fofliles fe détachent toujours en blanc.
On trouve, en fouillant derrière la montagne
de Saint-Fortunat, une carrière de grès rangée
aufli par couches de grès. L’on trouve de la mo-
hiffe , pierre tendre qui réfifte au feu , & dont on
fe fert, comme du grès, pour polir. Il y à grande
apparence que les couches de grès & de molafle
fe perpétuent fous les carrières dont nous avons
parlé.
Depuis Saint-Fortunat jufqu’ à Ville-Franche,
c’eft-à-dire, dans l ’efpace d’environ trois lieues,
fur une longueur peu confidérable , on voit au
moins quatorze carrières, à ne les compter que
par le nombre des paroiffes qui en poffèdent : il
feroit facile d’en nommer plus de cent fi l’on vou-
Joit décrire toutes les ouvertures qui font actuellement
entretenues. En effet, chaque paroiffe en
offriroit huit ou dix. Cependant on ne prétend
pas qualifier du nom de carrière, des fouilles d’où
l ’on tire de la pierre que la difficulté des charrois
fait employer dans le voifinage. \
On paffe même fous filence toutes les excavations
qui ont été faites dans la paroiffe de Po-
leynueux, fituée entre Saint-Fortunat & Saint-
Germain : on fe contentera de faire obferver que
ce te fp ace , qui renferme plus d’une lieue, paroîc
être partout de la même nature que Saint-Cyr &
Saint-Fortunat, & il y a apparence qu’on y trou-
veroit les mêmes qualités de pierres 5c de marbres.
A Saint-Didier, il y a une carrière d’une pierre
à qui l’on a donné le nom de choin : elle eft d’un
rouge-fale, mêlé de jaune, & prend un vrai poli.
Saint-Germain, village dans le Mont-Dor, éloigné
de trois lieues de Lyon & fitué au levant fur
Je penchant d’ une montagne, a des carrières ouvertes
à une demi-lieue de la Saône. La direction
des bancs eft la même que celle des carrières dont
on a déjà donné la description, c ’eft-à-dire, qu’elle
eft du fud-oueft au nord. Elle s’écarte de la ligne
horizontale de dix pouces par toifes. La pierre y
paroît plus également grife qu’ à la carrière de
Saint-Fortunat, quoiqu’elle foit de la même qua*
lité que celle des bancs fupérieurs de cette dernière.
Elle eft remplie de parties molles & tend-tes
qu’on ne fauroit tailler proprement, & fujètes à
fe décompofer en peu d’années quand cette pierre
fe trouve expofée à l’ air. Les caufes principales de
ces défeCtuofités font, d’une part, que les coquillages
marins qui font entrés en abondance dans la
formation de cette pierre, font pétrifiés à un point
de dureté très-fupérieur à celui où s’eft arrêtée la
pétrification de la matière qui les unit & les lie ,
& , de l’autre , que cette matière pétrifiante n’eft
pas toujours juxtapofée immédiatement à ces fof-
files. Plufieurs de ces fofliles fe trouvent enduits
d’ un boufin noir que le fuc Japidifique n’a pu
pénétrer ou du moins n’a pu durcir. Cette matière
n’ eft pas même partout juxtapofée à elle-même,
le boufin s’y trouvant renfermé en lames très-
minces , qui ont à la vérité peu d’étendue , mais
qui font très-fréquentes.
Cependant, quoique cette pierre foit très-dé-
fe&ueufe fous le cifeau, la découverte n’en eft
pas moins importante pour toutes les conftruélions
en général : elle fournit la meilleure qualité de
chaux que l’ on emploie dans ces contrées, & la
plus grande partie de celle dont on fe fert à Lyon
en provient.
Ne devroit-elle pas fon excellente qualité à
la prodigieufe abondance, de coquillages fofliles
qu’elle renferme ? Les boucardites ou coeurs de
boeuf y fourmillent. Les bélemnites & les cornes
d ’ammon, fi abondantes dans les carrières précédentes,
font très-rares dans celles de-Saint-Germain.
Les dix-huitième & dix-neuvième bancs pré-
fentent des veines d’un rouge-vif, qui traversent
verticalement la pierre. Au refte, on n’a découvert
les carrières de Saint-Germain, & on n’y a
fouillé que jufqu’à la profondeur de vingt-cinq à
trente pieds : on n’ a pas encore pénétjré jufqu’aux