
la terre : à peine, fur toutes les plaines que j*ai
parcourues , y a-t-il quelques pouces de terre v é gétale
rougeâtre. Quand la charrue l’a mêlée avec
les débris de pierre, il en réfulte que le fol n’eft
pas fans fertilité. Dans beaucoup d’endroits il n'y
a point de terre végétale. Cette pierre à lames
plates varie beaucoup dans fon grain , dans fa
couleur, dans fa dureté, & c . A. mefüre qu’on
s ’éloigne de Bar-fur-Seine & qu’on s’approche de
Dijon, je l’ai trouvée en général plus grenue, &
ayant plus le caractère d’une pierre arénaire, que
du cos auquel je l'ai d’abord comparée. Mais
quelque différence qu’il y ait entre ces pierres à
d'autres égards 5 qu'elles tiennent de la nature du
c o s , du marbre, de la pierre calcaire commune,
d’un grain approchant du grès, & c . ; qu’elles foient
blanches, rouges, grifes, bleuâtres, elles ont partout
un caractère commun dans leur difpofition ;
partout elles font difpofées en bancs horizontaux
qui fe délitent d’ une manière affez irrégulière, en
forte que les lames n’ont aucune forme régulière,
& n’ont leurs faces parallèles ni entr’elles ni avec
les deux furfaces fupérieures & inférieures du
banc. De plus, ces bancs font traverfés, dans le
fens perpendiculaire, d’une prodigieufe quantité
de gerçures qui paroilfent aufli, au premier coup-
d ’oeil , n’avoir aucune régularité, mais qui cepen-
dan t en ont une affez fingulière. Elle conlifte en
ce qu’elles fe fuivent, d’ une manière non interrompue,
à travers toutes les lames horizontales
dans lefquelles le banc principal fe délite » en forte
q u e , lorfque le banc eft brifé & interrompu par
un efcarpement quelconque, comme dans les carrières
creufées de mains d’homme ou fur la croupe
d’un coteau, chaque banc, dans cet efcarpement,
préfente toujours une face très-unie. A la régularité
près, je .ne puis mieux Je comparer qu’à un
mur de briques, ou, lï l’on veut, à la tranche d’un
gâteau feuilleté. Une chofe affez fingulière, c’eft
que ces feétions fi fréquentes qui partagent ces
bancs dans toute leur épaiffeur, & qui fe croifent
en mille manières, n’affeCtent, en aucune façon,
la direction perpendiculaire à l’horizon & aux deux
faces du banc. Elles le traverfent de biais, en forte
que l’afpeét qu’il préfente, eft celui d’un mur en
talus. JD’autres fois la fedtion eft perpendiculaire >
& comme les bancs de pierres, dans.tout ce canton
, pofent immédiatement les uqs fur les autres,
& ne font point féparés, comme dans nos carrières
d'Arcueil, par de petites couches minces
d’argile ou de boulin, on croiroit quelquefois
que ces efcarpemens font des ruines de murs faits
c e mains d’homme, & régulièrement arrangés par
affifes. Par exemple, en remontant du vallon de
la Seine dans la plaine qui conduit à Chanceau ,
on v o it, au haut de l’efcarpement, quelques-uns
de ces bancs, qui, -à cela près qu’ils ne font point
diftribués par colonnes, refièmblent un peu aux
eftamp.es de la Chauffée-des -Géans du comté
d’Antrim. , . '
Quelle que foit la caufe de ces fedtions, foît
perpendiculaires, foit obliques, de bancs horizontaux
formés de plufieurs lames, elle a agi généralement
dans tout le pays, depuis Bar-fur-Seine
& même Fouchères jufqu’à Dijon, & probablement
dans toute cette partie de la haute Bourgogne
qu’on laiffe à droite , depuis Dijon jufqu’à
l’extrémité du grand vignoble un peu avant Cha-
gny. Son adtion s’eft fu t fentir fur toutes les natures
de pierres qui font dans toute cette étendue,
cos, marbres, laves, pierres d’un grain plus grof-
j fie r, dures ou tendres. A la vé r ité , parmi les
bancs qui s’étendent dans tout ce trajet, il y en a
plufieurs fous la lave : il y en a plufieurs qui paroi
fient liés dans toute leur épaiffeur, & dont on
fait des pierres de taille très-bien équarries. Il y
a aufli des blocs de marbre énormes dans certains
cantons $ mais malgré cette dureté, on y apper-
çoit encore des traces de l’adtion de la caufe dont
j’ai parlé, quoiqu’elles foient prefqu’effacées. La
plupart de ces pierres laiffent voit des fentes, fur-
tout lorfqu’elles ont été long - rems expofées à
l’ air, & lorfque les gelées les ont fait éclater. O r ,
ces éclats font exactement dirigés comme les fec-
tions dont il a été queftion ci-deffus.
Depuis Chanceau les eaux tombent dans des
rivières affluentes à la Saône, & fe rendent définitivement
dans la Méditerranée. Les vallons qu’ elles
ont creufés, font d’une grande profondeur & hé-
riffés de rochers, qui font, pour la plupart, des
blocs de marbre. En defcendant dans la vallée de
Saint-Seine, je remarquai avec furprife que les
bancs de pierres dures qui font au deffous de la
la v e , & qui paroiffent dans le chemin fur la pente
de la montagne , n’ étoient pas parallèles à l’horizon
, & y étoient inclinés fous toutes fortes
d’angles j mais je m’affurai que c ’étoit uniquement
un accident provenant de la groffeur énorme
des blocs qui s’étoient renverfés lorfque les eaux
avoient miné les couchés inférieures : les bancs
qui n’avoient pas été dérangés par cette caufe,
confervoient leur parallélifme à l'horizon. Cela
m’a prouvé qu’ il ne faut pas prononcer légèrement,
& fur un premier coup-d’oe il , fur l’incli-
naifon des couches , furtout lorfqu’on ne les voit
que fur la pente d’un coteau. En defcendant encore
plus bas, & environ à mi-côte , je fus très-
furpris de rencontrer de l’ardoife aufli bleue &
aufli bien feuilletée, au eoup-d’oeil, que celle d’Angers,
mais, à la différence de celle-c i, feuilletée
par des lames parallèles à l’horizon. J’en détachai
quelquès.échantillons : les feuilles les mieux dif-
tinguées étoient de pure argile feuilletée, comme-
on en trouve aufli dans l’Anjou , dans les cantons
qui environnent les ardoiflères. Cette argile étoit
un peu ondtueufe : il n’y en a que dans ce petit
coin.
En examinant cette ardoife en place, j’ai été
frappé d’ une circonftance fur laquelle je dois in~
lifter. L’argile feuilletée, & l’ardoife qui ne paroît
être
être que cette argile confoliJée par rîr.filtration ;
d’une efpèce de fpath, étoient coupées, comme
je l’ai dit ci-deffus, de la lave, 8c la fedtion étoit
oblique à la direction des feuilles qui çtoient pa- :
rallèles à l’horizon. La fedtion étoit aufli très-
nette, ou comme celle d’un gâteau feuilleté, coupé
très-proprement. Je me rappelai à cette oçcafion,
que l’ardoife d’Angers étoit aufli coupée par des
fedions obliques à la diredion de fes feuilles, ce
qui donne à une maffe quelconque d'ardoife dont
la figure n’a point été altérée, une forme rhom-
boidale.
Maintenant fuppofons qu’une maffe quelconque
d’ardoife ou d’argile feuilletée ait été formée
comme celle de Saint-Seine j enfuite, que fes feuilles
foient parallèles à l ’horizon, & que ta maffe
entière ait été coupée , comme elle l’eft à Saint-
Seine, par plufieurs fedtions en différens fens,
toutes obliques à la direction des feuilles , 8c cela
par la caufe, quelle qu’ elle fo it, qui a ainfi coupé
tous les bancs de pierres de la haute Bourgogne j
qu’enfuite, par quelque grand événement, quelque
grande révolution , la maffe entière ait été
renverféè toute enfemble, en forte que les feuilles
qui étoient parallèles à l’horizon fe trouvaffent
faire, avec ce plan, un angle de 70 degrés à peu
près, n’eft-il pas évident que l’on auroit une malle
entièrement femblable à celle des ardoifières d’Angers
? Je ne m’étendrai pas fur les conféquences -,
mais je ne puis m’empêcher de faire remarquer
que cette explication nous difpenfe de recourir,
pour rendre raifon de la forme rkomboïdale des
maffes d’ardoife, à une criftallifation à grande
mafle inexplicab’e en elle-même, 8c incompatible
d’ailleurs avec la molieffe primitive de l’ardoife
dans fon premier état d’argile, où elle paroît avoir
reçu fa forme. Le problème feroit donc réduit à
cet autre beaucoup plus (impie : découvrir la caufe
ou la circonftance qui a pu couper, par des fec-
tions obliques ou en différens fens , des bançs
horizontaux. Il paroîtroit aufli que l’ancienne terre
lie différeroit de la nouvelle /quant à l’inclinaifon
des couches , qu’en ce que celle-ci n'auroit pas
effuyé d’aufli grandes révolutions.
Après avoir remonté dans la plaine, il faut redescendre
dans la vallée ou plutôt dans le précipice
du Val-Su^on. C ’eft un vallon étroit & profond
, dans lequel ferpente un ruiffeau. Les bords
en font très-efearpés, couverts.de bois, entre lef-
quels on voit s’élever de grandes maffes de rochers
de m?rbre qui feroient croire qu’on eft au
milieu de l'ancienne terre. Plufieurs vallons latéraux
viennent fe rendre dans le vallon principal ,
dont ils augmentent l’horreur. Leurs pointes &
celles des finuolîtés du vallon femblent des montagnes
d’une très-grande élévation, & c'eft dans
de pareils lieux que l’on a adopté la théorie des
angles faillans & rentrans des montagnes. Cependant
il nous paroît qu’ il auroit fallu décider, avant
de rien conclure à ce fujet, fi c’ étoit la côte qui
Gcograpkie-Phyfîque. Tome III,
étoit une montagne, ou bien le vallon qui étoit
un trou. Je doute que la correfpondance des angles
ait lieu hors ce dernier cas.
Je fufpends ici l’extrait de mon voyage en Bourgogne,
& me propofe de le continuer dans les
articles de Dijon , Ma ç o n , &c.
C H A T O U , village fitué à deux lieues & demie
à l’oueft de Paris, fur la troifième ofcillation de la
Seine , & vis-à-vis d’une grande île baffe qui doit
fa formation à des troncs d’arbres qui ont retenu
les terres.
C H A V A N G E , bourg du département de
l’ Aube , arrondiffement d'Arcis-fur-Aube, à fept
lieues de cette ville , & à trois lieues de Brienne-
le-Château. Chavange eft lin point remarquable de
la limite de la craie apparente de la Champagne ,
qui paffe à i’ouéft de ce bourg, 8c qui , par les
villages de Courcelles, Bétignicourt, Ville-Har-
douin & Brantigny , fe rend à l’ occident de Piney.
Je pourrois fuivre la marche de cette limite de la
craie qui traverfe la vallée de la Seine à quelques
; lieues au deffus de Tro y e s , pour aller rejoindre
là Champagne pouilleufe. On voit que cette craie
apparente fe prolonge dans une grande partie du
departement de l ’Aube. Les détails qui précèdent
le prouvent, en attendant qu’on indique tout la
contour de la majfe crayeufe dont je m'occuperai à
; cet article.
CHAUDES-AIGUES, petite ville du département
du Cantal, remarquable par fes eaux minérales,
tellement chaudes , qu’on peut s’en fervif
pour faire durcir les oeufs.
Ces eaux font affez abondantes pour que chaque
maifon de la ville ait fa conduite d’eau particulière.
CHAUMONT EN V E X IN , petite ville du,
département de l’O ife , fituée au pied d’une colline
affez é le vé e , entièrement formée de.débrij/ 4e eoquiilés analogues à celles des dépôts de Grignon
& de Courtagnon.
CHAUSSÉE- DE S -G È AN S : on appelle ainfi
un aflemblage immenfe de bafaltes prifma tiques ,
dont le plus grand nombre eft articulé affez régulièrement,
& qui fe-trouve fur le bord.de la mer
en Irlande, dans le comté d’Antrim.
La Chauffée-des-Géans eft à un peu plus de huit
milles au nord-eft de la ville de Colrain, & à trois
milles de Bushmills, prefque directement au nord.
Elle s’ étend depuis la partie inférieure d'une haute
montagne jufque dans la mer. On ne peut d é te r miner
à quel éloignement elle fe termine ; mais-
lorfque la marée eft baffe, fa longueur eft d’environ
fix cents pieds, fa plus grande largeur de
deux ccnt quarante, & elle en a cent vingt dans
les endroits où elle a trente-fix pieds de hauteur
au niveau du rivage, Sc dans d’autres endroits
elle n’a que quinze pieds de largeur. Nous allons