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141 NOUVEAUX VOY
1^94. bout de fix femaines voir l'arbre qu'on
a entaillé. On le fend dans toute fa
longueur, 5c on trouve ces vers dans fii
nioele. Quand on néglige d'y aller environ
cetems-là, on ne trouve plus de
vers, il faut qu'i Is ayent changé de figure
comme les vers à foy e , & qu'ilsfoient
devenus des mouches.
J e n'ai vû de ces vers qu'à la Martinique,
qaoiqu'il y ait des palmiftes à choux
dans toutes les autres Ifles} j'en ai fiiit
entailler à la Guadeloupe poiir tâcher d'y
attirer des vei;?, mais je n'ai pû réuffir.
I l efl: vrai que je n'y ai point vu de cette
eipece de mouches.
L e Chou des palmiftes épineux, eft
plus tendre &plus délicat que le blanc.
Les arbres qui portent les noix d'Indes
que l'on appelle Cocos, 6c lés dattiers,
ont des choux. J'ai mangé des uns
& des autres, ils font fort bons, leur
goût approche toûjoursun peu de celui
de leur fruit.
L e fécond ufage auquel on employe
^"P^lînjftes, eft pour bâtir des maifons
'nspôJr ^ couvrir. Pour cet effet on coupe
faire en- le troHc par tronçons de la longueur
donner aux grandes Se aux
u/e petites fourches que l'on met en terre
niiifon. d'une profondeur proportionnée à leur
hauteur & à la qualité du terrein. On a
foin d'en faire brûler la partie-que l'on
veut mettre enterre, parce qu'autrement
elle fe pouriroit bien-tôt. On le
fend en deux pour faire les fnblieres ,
les foies, le faîtage, & les chevrons ,
& en huit ou dix pour faire les lattes
& la paliflade qui regne autour de la
maifon, & qui lui fert de mur ou de
planche. On attache toutes ces pieces
avec des chevilles du même bois, après
quoi on étend les coifcs ou branches
de toute leur longueur avec leurs feuilles
fur les lattes -, on les y attache avec
les mêmes feuilles, & enfuke on trèfle
A G E S AUX ISLES
On/f
fert
OU natte les feiiillcsd'un côtéd'urte coiTe
avec, celle d'une coiTe qui eft auprès
d'elle} on les met ainfi par étage les
unes fur les autres jufqu'au faite, ou on
les plie les unes fur es autres. Cette
efpece de couverture eft bien meilleure
que celle" que l'on fait avec des têtes
de cannes ou de rofeaux, & peut durer
huit ou dix ans. Les pieces de palmiftes
dont on fe fert pour paliffkder le
tour de la maifon, après avoir été coupées
de la hauteur necelTaire, c'eft-àdire
depuis la foie jufqu'à la fabliere ,
doivent être fendues en fept ou huit
parties felon la groffeur de l'arbre, pour
en faire comme de petites douves de
quatre, cinq ou fix pouces de large } on
dole le dedans qui eft mol , & on laiiTe
le deifus qui eft dur. On arrange ces
douves les unes auprès des autres le
plus ferré que l'on peut, on en met
quelques-unes plus longues que les autres
en travers pour foûtenir celles qui
font debout, que l'on cheville dans les
wteaux comme on cloue les autres fur
es foies & les fiblieres. La plûpart des
maifons, jufqu'aux magafins, l'hôpital
& même l'Eglife du Cap François de S,
Domingue, étoient bâtis de cette maniere
en 1701. comme je le dirai en fon
lieu.
Letroifiéme ufage qu'on fait du pal* Tm[,i.
mifte, eft d'employer le dedans qui eft
comme un tiifu de gros filets & aflèz &
durs à faire de l'étoupe pour calhtrer, ?a "
& même des cordages} on le bat bien
pour dépoüiller les filets} & les rendre
3lus fouples ficplus maniables. NosFIiîuftiers
& nos Forbans qui ont couru
la mer du Sud & d'autres lieux aux
environs des deux Amériques, entendent
à merveille ce travail. On fefert
des feiiilles pour faire des corbeilles ,
des balais , des hamacs en forme de
rets, des nattes, des facs, & mille autres
F R A N C O I S E S DE
,(594, très uftenciles de ménage, OnlespaiTe
auparavant fur le feu pour les amortir,
& fuivant l'ouvrage qu'on veut feire, on
les tille. Les Sauvages font fort adroits
pour tous ces ouvrages.
unique. Ce font deux arbres excellens
pour les bâtiments} ils viennent trèsgrands,
très-gros & très-forts. Il a plû
à nos ouvriers de les diftinguer en mâle
& femelle: en ef fet, on remarque quelque
difference dans la couleur de leur
bois, le mâle eft affez rouge, on l'ap-
)elle auflî Angelin. La femelle eft plus
)lanche & conferve fon nom. Je parerai
de ces deux aîbres dans un autre
L » A M E R I Q ^ U E . 137
quent pas de répondre, 6c de s'appro- ^(''J^
cher delà lumiere du flambeau. Quand
elles font à portée, le chaflêur leur
donne on coup de bâton fur le corps
qui les empêched'aller plus loin. Com-
Outre ces deux efpeces de palmiftes, il me les Negres fçavoient que j'aimois
y a deux autres arbres à qui on don- cette viande, 6c que j e lespayois bien,
ne le même nom, du moins à la Mar- ils m'enapportoient fouvent. Les Ser- ^•l'»-'"'
pens 6c les Couleuvres leur font
guerre continuelle , aufli bien qu'aux bois.
Rats 6c aux Piloris : ces derniers font
une efpece de rats de bois deux ou trois
fois plus gros que les rats ordinaires}
ils font prefque blancs, leur queiie eft
fort courte , 6c ils ientent le mufc
extraordinairemcnt. Les Negres les
cherchent 6c les mangent avec plaifir,
car ils font gras} mais ils font obligez
endroit. de les faire boiiillir en grande eau, avec
On trouve à la Martinique 6c en quel- des feiiilles 6c des oranges coupées par
ques autres Jfles, les plus belles Gre- quartiers pour leur ôter cette odeurqui
•w CM-,noüilles du monde, on les appelle Cra- eft fi forte qu'elle fait mal â la tête ,
'^Ma^ qu'elles font vêtues comme leur peau étant feche la garde encore.
(miijmi les crapauds d'Europe, c'eft-à-dire de Etant un jour dans le bois, j'enten-
'ileur gris avec des taches ou rayes jaunes 6c dis une Grenoiiille qui crioit de tounoires}
elles ne fe tiennent pas dans tes fes forces} les Negres que j'avois
l'eau, mais dans les bois où elles croaf- avec moi me dirent qu'affûrement elle
fent très-fort, fur tout la nuit. J'en étoit pourfuivie par un ferpent. Coraai
vû dont le corps avoit plus d'un pied me la voix 6c le bruit que ces animaux
de long, fans compter les cuiffes qui faifoient fur les broffailles s'approetoient
groffes 6c fort charnues} leur choit toujours de nous , je préparai
chair eft blanche, tendre 6c délicate, mon fufil pour tuer le ferpent mais,
on ne jette que la tête , tout le refte nous reconnûmes un inftant après que
Cft fort charnu, on les accommode c'étoit une Couleuvre qui pourfuivoit
comme une fricaffée de poulets} 6cceux la grenoiiille, qui la prit à fix ou fept
qui arrivent aux Ifles y font fouvent pas de nous. Je n'eus garde de tirer mp.
trompez, s'imaginant qu'on leur fert de fur la Couleuvre, outre qu'elle n'a point renceda
la viande, quand on leur donne unefri - de venin, elle eft ennemie du ferpent, '
Gaffée de grenouilles oude lézards. Les lui fait la guerre, 6c le mange, ^pouvcoíhí
Negres vont la nuit à cette chaffe dans cette railon on ne lui fiit jamais de
les bois avec des flambeaux debagaces,. mal. Pour peu qu'on foit fait au pais
ç'eft-à-dire de cannes feches après qu'el- on diftingué aifément la codeuvre d'ales
ont paffé au moul in, ou de bois de vec le ferpent, parce que la couleuvre
chandelle. Ils imitent le croaffement a la tête longue 6c ronde comme une
«es grenoüilles auquel elles ne man- anguille, 6c que le ferpent l'a plate,.
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