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348 NOUVEAUX VOY
K^pû. qu'ils en font aflez pour leurs befoins, ou
fe
pour fai>e rouler leur Commerce. Voilà
le cas où nousfommes. Il eft certain que
nos Ifles peuvent fournir plus le Coton;
que le Royaume, & les Etats voifins o a
éloignez, où nous pouvons porternôtre: .
Commerce n'en peuvent confommer.;
Pourquoi donc en allerchercherchezles:
Turcs? Il n'y auroit pour fàire fleurir,
ce Commerce, qu'à défendre l'entrée du
Coton étranger dans le Royaume , 6c.
l'on verroit bien:tôt quel profit confiderable
il en reviendroit au Roi & à la Nation.
Mais nos Ameriquains pourroient
encore porter plus loin l'avantage qu'ils
retirent de leur Coton. Ils devroient le.
travail 1er chez eux, ôcpuifqu'ils ont des
métiers pour faire des hamacs , pour-
Toilesde q«oi n'en ont-ils pas pour faire des toiles?
Ils y réiiffiroient aufli-bien qu'aux
Indes Orientales, ils ne manquent pas
de couleurs pour les teindre, ny d'induftrie
pour égaler, & même pour furpaiTer
les Afiaciques. Ce travail occuperoit
bien des femmes oifives, bien des
Negresencore trop jeunes pour le travail
de la terre, &bicn des Negres furâgez,
& quantité de petits Habitans & d'Ouvriers
qu'on feroit venir de France. Qiie
s'il y avoit des raifons pour ne pas faire
des toiles fines,' du moins il n'y auroit
sucun inconvenient à établir des Manufaftures
de groife Cotonine pareille à celle
dont on fe fert dans la Mediterranée
pour les voiles des VaiiTeaux & des Galères
j ôc comme on y employe le Coton du
Levant, on pourroit y employer celui
desliles, & donner ces toilesà meilleur
marché. Cet article eil d'unegrande confequence,
& feroit le fond d'un Commerce
qui occuperoit , & enrichiroit
bien du monde.
Nos filles & femmes Creolles font des
bas de Coton à l'aiguille, qui font d'une
A G E S AUX: I S L E S
fineiîe, & d'une beauté furprenante. ifxjd.
Ceux de Coton blanc, que l'on fait teindre
en écarlatte font honte à la foye, 6c
ceux de Coton de Siam naturellement
de couleur de mufc font d'une fineFe 6c
d'une douceur qu'on ne peut exprimer.
Mais x e travail eft Igng, & rend l'ouvrage
fort cher. On pourroit l'abreger,
6c le donner à beaucoup meilleur marché,
en introduifant dans les Ifles les
métiers dont on fe fert fi utilement en
Europe. : 'î
J'ai iait la defcription du : Fromager:
êc' d^u Coton qu^^i l' porte. J-u f-q u'à• prefent
on ne l'a employé que pour garnir des
robes de chambre , : ou pour faire des
oreillers.. On dit même qu'il n'eft pas cmö» «'î
permis d'en faire entrer dans le Royau- rromame,
parce qu'on le pourroit mêler avec -
le Caftor dans la Fabrique des Chapeaux,
( ^ e l danger y auroit-il quand cela arriveroit,
pourvû que les Chapeaux fuffent
également bons, l'inconvenient ne
feroit pas grand, il porteroit peut-être
un peu de préjudice à la Compagnie de
Canada, & les Chapeauxferoient à meilleur
marché. •• Mais fans entrer dans ce
détail, on pourroit le filer: car quoiqu'il
foit cour t , £c extraordinairement fin, il
eft plus long que le poil de Caftor, &
puifqu'on file biencelui-ci, il me femble
qu'on pourroit filer l'autre, 6c en faire
des bas, des gands, des chauffons , ôc
autres hardes qui feroient d'une chaleur,
d'une legereté, 6c d'une délicatefl'e admirable.
Je parlerai dans un autre Ouvrage
delà Lana Sucida, qui croît dans
certains coquillages que l'on trouve dans
l'Etang de Tarente en Calabre, que l'on
nelaiffe pas de filer, 6c de mettre en
oeuvre, quoi qu'elle foit bien plus court
e , 6c qu'elle paroiffe bien plus difficile
à s'unir} c'eft fa chaleur qui la fait
eftimer. Je fuis fûr que le Coton de
Fromager feroit le même effet, 6c quo
k s
tfigft.
Laine.
F R A N C O I S E S DE L'A M E R I Q^U E. 349
les ouvrages qui en feroient compofez du- eft négligé auiTi bien que leurs peaux. Il
reroient davantage, 6c feroient à meil- ; me femble que nos compatroites deleur
compte. vroient bien une fois en leur vie, revenir
Il ne s'ëtoit trouvé encore perfonne de l'affoupiffement où ils font fur leurs
aux Ifles, du moins jufqu'à mon départ, • intérêts, 6c profiter des moyens que
qui fe fût avifé de faire tondre les mou- ' Dieu leur prefente de faire leurs affaires,
tons, 6c de profiter de leur laine.'On laif- Pourquoi laiffer perdre le poil de leurs
foit ce foin aux halliers 6c aux épines, chevres? On le va chercher bien loin pour
où ces animaux attachoient leurs toifons, faire des étoffes, pourquoi ne le ramaf-
6i les y laiffoient. Quoique ces laines ne ient-ilspas? Et fi leur induftrie ou leur
foient pas des laines d'Efpagne, elles ne ; pareffe ne leur permet pas de le mettre '
laifferoient pas de. valoir quelque chofe, en oeuvre, du moins nedevroient-ilspas •
fi on fe donnoit l'a peine de les amaffer, lé-laiffer perdre. .Car ils doivent tous,
6c de les employer. On en employe qui aiant la plijpart des familles nombreu- -
ne valent pas mieux, 6c peut-être beau-- fes, fe bien inculquer ce principe d'écocoup
moins. Mais fi on vouloit avoir nomie, rechercheiMesgros profits, 6c ne
des aines excellentes, quel païs au mon-- pas négliger les petits. Ce queje propofe
de eft plus propre pour élever les bêtes à ici n'eft pas fi peu confiderable, - qu'on
laine? Les pâturages font admirables,: ne doive pas y faire attention.-^
6c fi on vouloit s'en donner la peine, 6c • - Les peaux de chevres, des bouCs, 6c des
porter aux Mes des brebis de race d'Ef^r chevreaux ou cabrittons pourroient être
pagne, nous aurions avant qu'il fût dix paffées dans le pais, ou envoyées vertes
ans, tous nos troupeaux de moutons Ef- en France. Cependant on les neglige, 6c
pagnols, dontleslaines fines 6c douces, j'ai vû le tems qu'on negligeoit même
celle des boeufs. Je parle' des ifles - du
Vent : car les Boucaniers deS'. Diamin- ^
gue en ufoient autrement, puifqu'ils ne
tuoient les boeufs fiiuvages que pour en
avoir les cuirs. Il eft vrai qu'à prefent
qu'on a établi des Boucheries dans bien
des endroits des Ifles du V e n t , les Boufourniroient
nos Manufaétures de France,
fuppofé qu'il ne fe trouvât perfonne
dans le païs qui voulût établir quelque
Draperie. Je fçai que les Efpagnolsfont
affezattentifs fur la fortie de leurs moutons
5 mais je fçai auflî que chez eux,
comme par toutailleurs, l'argent eft une t -J - » . W. . I . 1 W ^ ^ w Vi t - O J
clef qui ouvre toutes fortes de ferrures ; chers ont foin de ne pas laiflcr perdre les
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de qu'on fe l'imagine. , Nos Vaiffeaux
qui trafiquent en Efpagne en apportent
tous les jours des moutons mâles & fe-.
melles. Je le répété encore, aprèsyavoir
bien penfé, je ne connois point de terrain
plus femblable à celui d'Efpagne, 6c
grands cuirs. Qu'on faffe un peu d'attention
fur les peaux 6c fur les laines 6c les
Doils, 6c on verra que ces trois chofes
meuvent être d'un débit confiderable, 6c
e fond d'un très-bon Commerce.
L ' I f l e de Sainte Croix, celles de Saint
Martin ôc de Saint Barthélémy, laGran-
Feaux&
poils de
Chevres.
par confequent plus propre à élever des de terre de la Guadeloupe, 6c les monmoutons,
6c produire de belle laine, que tagnes qui font au centre de la Guadenos
Ifles. loupe 6c de la Martinique, la Grenade,
Nous avons des chevres en quantité 6c la terre ferme de Cayenne, font remdans
toutes nos Ifles, elles y viennent à plis de bois précieux que l'on neglige, 6c
merveille, 6cleur poil qui eft très-beau que l'on brûle fans difcretion, 6c fans
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