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48 N O U V E A U X VOYAGES AUX ISLES
ti^ij.- des racines auprès' de fa vieille peau, a
tous fes membres, fans qu'il lui en manque
aucun. Quand les Crabes font dans
cet état 3 on les appelle Crabes bourfieresj
leur écaille n'eft pas plus dure alors
que du parchemin moiiillé -, elles
font extrêmement foibles; elles ne peuvent
fouftrir l'air, jufqu'à ce que leur
nouvelle peau ait acquis la dureté de
J'écaille; le repos, le bain qu'elles ont
• pris à la mer , 8c la nourriture dont elles
ont fait provifion avant de feretirer dans
leur trou, les engraifle extrêmement:
Dife- Les Tourlouroux & les Crabes mârencedcs
les fe diftingucnt des femelles par la figure
de kùr queue. Les uns & les auiZll's.
l'ont repliflee fous le ventre.' Elle
eil compofée de plufieurs rangs de petites
écailles attachées fur une membra-
_ nepeuépailTe, forte comme du parchemin,
oil l'on rem.arque pJuiîeurs petits
"nerfs qui la partagent dans fa largeur,
êc qui fervent à faciliter le mouvement
des écailles qui font fur la partie extérieure
de a membrane ; fa partie
Interieure eft garnie de plufieurs poils
ou barbes longues & raboteufes. Cette
queue aux mâles va toûjours en diminuant,
depuis l'endroit ¿11 £lle enjointe
au corps, jufqu'à la naiffance des premieres
jambes de derriere où elle finit
en pointe. Celle des femelles eft également
large dans toute fa longueur, &
fe termine en arc de cercle. La femelle
abefoin de cette large queue pour couvrir
& pour'conferver fes oeufs, à mefure
qu'elle les met hors de fon ventre,
ris s'attachent en fortant à ces poils,
dont je viens de parler , & la largeur de
,1a queue les founent, les enveloppe 8c
empêche qu'ils ne tombent, & que les
pierres, le fable, les herbes ou auties
inegalitez fur lefquelles la Crabe pafle,
n'é'les puifle détacher. L'une & l'autre
de ces queues, c'eft-à-dire, celle du mâle
6c celle de la femelle, quand elle
n'eft pas chargée d'oeufs, s'emboitent ,c Mok
û jufte dans une cavité qui eft dans l'é- P
caille du ventre, qu'elles ne paroiilent î
preftjue pas.
C'eft une regie générale que tous les
animaux que je vais nommer, fçavoir
les Tourlouroux, les Crabes, les Ecrcviiîès,
les Serpens, les Lézards & les
Soldats (iefcendent tous les ans à la mer
pour fe baigner, & changer de peau ou
de coquille. Les Crabes, les Tourlouroux
& les Ciriques y vont encore pour
faire leurs oeufs, ce qui leur eft foitaif
é , car comme ils font déjà hors de leurs
corps attachez feulement aux poils de
leur queue, ils ne font que la fecoiicr
dans l'eau où i Is fe baignent &ces oeufs,
un peu plus petits que ceux des Carpes,
fe détachent des poils qui les retenoient,
tombent dans la mer où ils s'éclofent
& s'attachent auiîî-tôt aux rochers,
Se quelque tems après ibrtent
de l'eau, fe retirent fous les premieres
herbes qu'ils trouvent, 8c montent enfuite
de compagnie avec leurs meres à
la montagne.
Les Crabes Scies Tourlouroux s'étant
baignez & aïant fait leurs oeufs, quittent
leur vieille écaille. Ils en fortent fi adroitement,
qu'il eft comme impolTible
de voir comment ils ont pû fe tirer decy
tant de jointures fans en rompre aucu- ''
ne, car on trouve les dépouilles toutes
entieres. J'ai eu beaucoup de peine aky 0
découvrir : à la fin j e trouvai que l'é-»
caille s'ouvroit fous le ventre, entre les
naifiances des jambes, & comme cetrpy-, ii.
ouverture ne fe peut apercevoir fans/MÎfaire
un peu de violence pour éloigner
les deux parties l'une de l'autre, je_vis ^.j,,
qu'elles retournoient comme un relïbrt.
dans leur fituation naturelle, dès que je
ceiTois de les tenir écartées , d°où je conclus
qu'il fepaflbit la même chofe quand
le corps de l'animal en fortoit. 11 paroit
p usde difficultez à concevoir comment
F R A N Ç O I S E S DE L'AMERICLUE. 49
m e n t lesjariibes ont pûfortir de leur étui, tes feulement d'une petite peau rouge. ï6QS'
£c fe debaraifer de tant de jointures, fic
fur tout les mordans qui font beaucoup
plus gros à leur extrémité ^ue dans le
milieu. Mais cette difficulté cciTera des
qu'on prendra garde que les jointures ne
font formées que de cartilages & de
peaux comme du parchemin, qui s'élargiflènt,
s'étendent ou fe retreciflènt,
felon le befoin de l'animal. Il peut encore
bien arriver que le bain que ces animaux
prennent dans la mer, es atténué
en même tems qu'il les affoiblit, Se
qu'en cet état leur chair étant diminuée
de volume, elle ne remplit plus fi exaâement
qu'auparavant fon écaille; ou
qu'étant devenue plus molle, elle a acquis
plus de facilité à s'allonger ou à fe
comprimer, ce qui fuffiroit pour leur
donner le moyen de fortir auifi facilement
qu'ils font.
Lorfqu'ils quittent leurs écailles, il
ne faut pas s'imaginer qu'ils rentrent
dans une autre, comme je le dirai ciaprès
de certains animaux qu'on aptendre
Se mince comme du parchemin
moiiillé, elles font bien plus délicates
qu'en tout autre tems ; on les appelle
alors crabes bourfîeres. Elles font
ordinairement près de fix femaines depuis
qu'elles font defcenduës des montagnes
pour fe baigner à la mer, faire
leurs oeufs, Se changer de peau, avant
qu'elles y remontent avec les petits
qu'elles ont fait. Quand j e dis qu'elles,
remontent avec leurs petits, il ne faut
pas s'imaginer que chaque mere conduife
les fiens comme une poule conduit
fes pouiGns ; point du tout : elles
ne les connoiifent feulement pas. J'entends
feulement par ce terme les petites
crabes ou tourlouroux nez depuis
peu qui fuivent les vieux à la montagne.
Leurs oeufs comme ceux des écreviiTes
Se des poiifons, font fort petits
Se attachez les uns aux autres. Ils font
rouges lorfqu'ils font cuits Se de fort
bon goût. Lorfqu'ils ne font pas enîeu
pelle Soldats j c'eft leur peau interieu- core fortis du corps Se attachez à ces
re qui étoit fous l'éc^lle qui fe durcit barbes qui font fous la quelle , on les
à peu, Sc qui acquiert enfin la foidiré
neceffaire pour conferver leur
chair des injures de l'air. Se des morfures
des autres animaux.
Les crabes Sc les tourlouroux avant
trouve dans le corps comme deux pelottons
feparez l'un de l'autre par une
petite membrane, Sc cantonnez d'une
matiere épaifle de la même couleur que
Jes oeufs font alors, mais qui devient
oe quitter leur écaille, ont foin de fe blanche quand elle eft cuite. Les mâ- Taumacreufer
un trou en terre ou dans quel- les, outre cette matiere blanche qui eft P"
que fouche pourrie, ou entre des pier- leur graifle, ont .au lieu d'oeufs une au- jf.f^^ares
ou des racines, elles y apportent tre matiere verdâtre qu'on appelle Tau- èes.Ma'
des feiiilles pour leur fervir de nourri- malin. C'eft la faulce avec laquelle on "iereJe
ture, Se dès qu'elles ont quitté leur les mange. Pour cet efFet on enleve ^'vfir^
écaille, elles s'y retirent Se y demeu- l'écaillé du dos, en la feparant de celle
rent jufqu'à ce que leur peau fe lôit du ventre où les pieds Se les mordans
'Changée Se endurcie comme l'écaillé font attachez: on amafle dans une équ
elles ont quittée. LereposSclanour- cuelle tout le taumalin des mâles avec
la graifle, on y mêle un peu d'eau &
de jus de citron pour les délayer, Sc on
met du fcl Se du piment écrafé.
Penriture
qu'elles prennent dans ce temsja,
les engraiffent extrêmement. Si on
les prend alors, on les trouve couver-
Tom.Il h
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