66 N O U V E A U X VOYAGES AUX ISLES
liîyj. juile entre deux eaux, aux endroits où
rentes
msmitres
de
l'aùrêitr.
ils voyent fourmiller une plus grande
quantité de ces poillbns, & l'élevant en
l'air ils en prennent des meilleurs. Lorsqu'ils
fe tiennent au fond de l'eau, il
n'y a qu'à marcher dans la rivière pour
les faire lever, 8c pafler le linceui par
. delTous.
Il eft encore plus facile de prendre
-ceux qui s'attachent au roches, où j'en
-ai yû quelquefois de l'épaiiTeurd'un pou>-
ce; car on,n'a qu'à les faire tomber avec
la main dans un coiiy que l'on tient
. delTous.
L'abondance 6c la délicateiîe . de ce
poiflbn, fairquetout le mondeen mange
j & il n'efl: pas befoin de grands
,appreils pour le rendre de bon goût.
On fe contente fouvent de le faire cuire
dans l'eau avec du fel, du piment, &
un bouquet de .fines herbes. Il n'y a
ni écailles à ôter ,ni arrêtes à craindre,
il poi te fon beurre avec foi, cai' quoiqu'il
foit petit » il ne laiiTe pas d'être
gras.
. , On le met auffi entre deux plats
avec un peu de beurre frais,, des herbes
fines, du poivre, du fel & des éeorces
d'orange, 8c quand on eft prêt
de fervir on T ' a r r o f e d'une faulce liée
avec un jaune d'oeuf 8c du vinaigre,
6c on rappe deiTus un peu de mufcade.
Quelquefois on l'accommode en bignets.
On prépare une pâte claire pendant
qu'on le trempe dans l'eau boiiillance,
& qu'on le laiiTe égoûter. Après
quoi on en prend avec une cueiller à
peu près autant qu'on prendroit d'une
pomme coupée en ruelles. Onle.trempe
dans la pâte, 8c on le jette dans le beurr
e , huile ou faindoux boiiillant, où on
acheve de le cuire. Quelques pcrfonnes
lé contentent quand il elt forti de l'aâu
boiiiilante& égoûlé, de le rouUerdam
la fleur de farine, Se de le frire. Il fg
met en petites boulettes que l'on mange
avec le jus d'orange. Enfin de quelque
maniéré qu'on l'accommode il eft toû'
jours trés-bon, très-delicatôctrès-nourriiTant.
Comme k faifon des pluyes ell: le Cmjî,
vrai tems du jardinage, j'envoyai à la
Baflé-terre chercher quelques pieds de S
cerifiers pour les planter dans mon/«"
jardin que j'avois foin de remplir de
toutes fortes d'arbres & de plantes.
Cet arbriiîéau reiTemble allez au Gi'enadier,
le bois eft gris, il jette beaucoup
de branches bien chargées de feiiilles,
prefque de même figure Se couleur
que celles du Grenadier, mais un peu
plus grandes Se moins épaiffes. Il fleurit
deux fois chaque année. Ses fleurs
viennent par bouquets, elles fontcotnpofées
de cinq petites feuilles blanches,
qui font une efpece de calice, dont k
capacité eft toute remplie de petits filets
ou étamines blanches, douces ¡k
deliées comme de la foye ; d'une odeur
aprochante de celle de jafmin. Le
fruit qui fuccede à la fleur eft un peu.
plus gros que les cerifes qu'on appelle
à Paris des griottes, Se de même couleur.
Sa queiie eft courte; le côté qui
lui eft oppofé n'eft pas rond, mais un
peu plat, avec un petit enfoncement
dans le milieu. Ce fruit n'a point de
noyau , mais il a en fa place une efpece
de cartilage comme le zeft d'une noix
compofé de fix petits aîletons d'une
ligne & demie de largeur fur trois,
lignes de hauteur, qui n'a pas plus de
durété Se de iblidité que les zefts des
noix quand elles font meures SC fraîche^
ment cueillies. Le goût de ces cerifcs
approche ivlTez ' de celui des griottes,
iaais il faut pour cek qu'elles foient
bien meures, ^car quand cette quahté
kuE banque, j. ellesi font- i o r t 'àcrdes. '
On
•tipî.
F R A N C O I S E S DE
On les confit comme les cerifes
d'Europe,
L ' A M E R I O ^ U E .
Se on en fait de la gelée
criies ou cuites elles font toûjours fort
bonnes 8c fort faines.
Cet arbrifleau que l'on peut tailler
67
orefque comme le boiiis, vient de
îouturc ou de graine : depuis que la
graine eft levée, ou que la bouture eft
reprife, il ne faut que huit à neuf mois
pour le voir rapporter dufruit.
C H A P I T R E XII.
Vefcription à'un ouragan. Maniere de mariner les Ramiers.
[ L . y eût cette année dans nos
ifles un ouragan qui fut de
plus extraordinaires. J'ai déjà
remarqué qu'ils n'arrivent
que depuis le vingtième de
Juillet jufqu'au quinzième d'Oétobre. Je
croi pourtant que cette regie n'eft pas
fi générale ni fi bien établie , qu'il n'y
puiiîè avoir quelque exception Se quelque
changement ; car elle n'eft fondée
que fur la remarque qu'on a faite
depuis que le païs eft habité par les
François qu'il n'en eft jamais arrivé avant
le vingtième de Juillet, ni après le
quinze d'Oétobre-, de forte qu'avant Se
après ces deux termes on fe croit dans
une entiere feureté.
Timfi/s On entend par le mot d'ouragan une
«(fiilie tempête ou vent impétueux qui fait
tout le tour du compas ; c'eft-à-dire
qui parcourt Se qui fouffle de tous les
points de l'horifon les uns après les
autres; de forte que ce qui a été ébranlé
quand il fouffloifd'un c ô t é , eft emporté
, arraché ou démoli quand il
fouffle de la partie oppofée. Il ne dure
pour l'ordinaire que vingt-quatre heures;
Se fa plus grande force ne fe fait
reiTentir que pendant douze ou quinze
heures au plus , ce qui n'eft que trop fuffifant
pour faire de très-grands defordres.
Il eft ordinairement précédé par un
grand calme, un ciel ferein & un tems
fort doux. Peu à peu l'horifon fo charge
de nuages, 6c devient gras, comme
on parle dans le païs > on voit cnfuite
la mer brifer fans qu'on fente le
moindre vent. On voit les oifeaux
dans une efpece d'inquiétude qui volent
de tous côtez , qui s'approchent
des maifons 8c des falaifes comme
s'i Is cherchoient des endroits pour fe mettre
en feureté. Les bêtes à quatre pieds
s'aiTemblent Se fe mettent en troupes
comme j'ai dit qu'elles font quand elles
fentent Íes approches d'un tremblement
de terre, elles frappent des pieds Se meuglent
avec quelque forte d'effroi. Le
tent fe leve peu à peu, 8c fouflîe enfin
avec une impetuofité extrordinaire.
Quand il eft accompagné de pluye, on
a fujetde craindre davantage, parce que
l'eau humcftant la terre qui foûtient les
arbres, les cannes, le manioc Se les autres
chofes qui font fur la terre, la rend
molle, 8c donne par confequeht plus de
facilité au vent de les arracher, que quand
leterreineft fec. Se par confequent plus
ferme. On avoit prétendu jufqu'alors
que quand il fait de grands coups de
tonnerre j il diiTîpoit le yent, Se faifoit
ceiTer l'orage ; cependant on remarqua
tout le contraire cette année.
La faifon des pluyes étoit venue de
fort bonne heure, il avoit plû à outrance
, 6c il avoit tonné effroyablement
quantité de fois, de forte qu'on
fe croyoit exempt d'un ouragan. Mais
la pluye recommença avec plus de force
que de-coûtonoe le Dimanche deuxié-
K z me
r
n i
Ê' •i-i't.iar
i
î*
; ..fi,