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 1  ii'iivif.:i  
 i f 4  NOUVEAUX  VOY  
 croire qu'il  n'y  a nî  flux  ni  reflux  entre  
 les  deux Tropiques  6c dans  la mer  Mediterranée, 
   ou  du moins  qu'ily eftprefque 
 infcnfible.  J'ai  été  aiTez  crédule  
 pour  le  foutenir  Sc  l'enfeigner  quand  
 j'étois  ProfeiTeur  dePhilofophie j  mais  
 j'ai connu  par une  experience  de plus  de  
 douze  années  que j'ai  demeuré  &  voïagé  
 en  diiFerens  endroits  de  l'Amerique  
 entre  les deux  Tropiques,  qu'il y a flux  
 &  reflux reglez comme en Europe,  qui  
 fuivcnt  les  différentes  fituations  de  la  
 Lune,  & tellement fenfibles, qu'ils vont  
 à  plus  de  trois  pieds  dans  les  Sizigies  ,  
 Se paflent  toûjoursunpied  &  demi  dans  
 les Qiiadratures.  J'ai  fait  les mêmes  remarques  
 à  Civitavechia  en  Italie  ,  ou  
 j'ai  demeuré  plus  de  fix  ans  après  mon  
 retour  des Mes.  Mais  ce n'eil  pas  l'unique  
 erreur  dont  on  fe charge  l'elprit  
 mal-à-propos  quand  on  fuit  aveuglément  
 les  fentimens  de  certains  écrivains. 
   
 Nous  avons  vû  dans  le  huitième  fiecle  
 que Vigilius  Evêque  de  Salzbourg,  
 ayant  avancé  qu'il  y  avoit  des  Antipodes, 
   toute  l'Allemagne s'éleva contre  
 AGES  AUX  ISLES  
 lui :  il  fut  défcré  au  Pape  Zacharie  
 comme  un  Heretique  dangereux  ,  &  
 malgré  toutes  fes  raifons  il  fut  déclaré  
 tel  par  l'Archevêque  -  Elefteur  de  
 Mayence,  &  enfuite par  la  Cour  de  
 Rome.  Nous  voyons  encore  aujourd'hui  
 que  des  Ecoles  célébrés  foutiennent  
 fort  ferieufement  que  la  Zone  
 Torride  eft  inhabitable  à  caufe des chaleurs  
 continuelles  Sc  excefllves qui y régnent. 
   Celaétoit  pardonnable avant les  
 voïages  de  Chrillophle  Colomb,  d'Americ  
 Vefpuce,  SebafbienCano,  François  
 Drac,  &  une  infinité  d'autres qui  
 ont  demeuré  dans  la  Zone Torride,  &  
 qui  ont  fait le  tour  du  monde j  mais de  
 le  dire  encore  à  prefent,  il  me  femble  
 qu'il y a de î'entêcement & du  ridicule.  
 Je  fçai  que  les  deffenfeurs  de  cette  iCj^  
 opinion  difent,  que  la  Zone  Torride  
 eft abfolument  inhabitable  par  elle-même, 
   ex fe,  quoique  par  accident  elle  
 puiffe devenir  habitable  ,  c'eft-à-dire,  
 par  le fecours des  vents qui s'y font fent 
 i r ,  qui  la  rafraichiiTent  6ctempcrentfa  
 chaleur  infuportable.  Mais  cette  réponfe  
 n'eft-elle pas pitoyable,  car fi les  
 vents  alifez  qui  regnent  dans  la  Zone  
 Torride  n'y  étoient  que  par  accident,  
 il s'enfuivroit qu'ils n'y feroient  pas  toujours, 
   comme  en effet il  y  afouventdc  
 très-longs  calmes,  &  qu'ainfi  leur  abfence  
 ou  leur  défaut  rendroit  le  pays  
 inhabitable pendant  ce tems-là,  & qu'il  
 faudroit  que  les  hommes  qui  l'habitent  
 mouruffent  ou  allaflent  demeurer  dans  
 les  Zones  temperées,  en  attendant  le  
 retour  de  ces vents  rafraichiiTans :  mais  
 ils  fe  trompent  lourdement.  Premièrement, 
   ces  vents  ne  font  point  dans  
 la  Zone  Torride  par  accident  :  En  
 fécond  lieu,  quand  ils  y manqueroient,  
 elle  ne  laiiTeroit  pas  d'être  trés-habitable. 
   
 J e  dis  en  premier  lieu  que  les  vents ûi/i  
 wg»|  
 La  Zorte  
 Torride  
 ned  }as  
 inhabitable. 
   
 Keftitalion  
 du  
 fentimsnt  
 alifez  ne font  point  dans  la  Zone  Torride  
 par  accident,  parce  qiie  la  caufe  
 qui  les  produit  eft très-neceflaire,  trèsfeure  
 6c  très-continuelle,  puifqu'ilsj*  
 viennent  ou  du  mouvement  de  la  terre  
 autour  du  Soleil,  ou  du  mouvement  
 du  Soleil  autour  de la  terre.  Que  l'un  
 ou  l'autre  de  ces deux  grands  corps  fe  
 meuvent,  il  eft  toujours  conftant  que  
 la  chaleur  du  Soleil  fait  rarefier  trèsconfiderablement  
 la  partie  de  l'air  qui  
 s'y  trouve  oppofée,  &  que l'impreffion  
 ou  l'aftion  de  cette  chajkir venant  à diminuer  
 par l'éloigneme^de la caufe qui  
 la  produifoit,  ce même  air  retourne  à  
 fa place,  comme  un  reffort  retourne  à  
 la  fienne  quand  on  ceffe de  le  comprimer. 
   Or  cette compreffion 6c rarefaction  
 F R A N C O I S E S  DE  
 fji;94.  tion  de  l'air  eft  la  caufe du  vent,  c'eft  
 ^ l e  vent  même  dont  la  caufe ne  fçauroit  
 être plus  neceiTaire,  plus certaine,  plus  
 reglée,  plus naturellcj Se par  conféquent  
 les vents alifez qui fout dans la Zone  Tor - 
 ride  n'y  font pas par  accident,  ce  n'eft  
 donc pas par accident  qu'ils la rafraichiflent, 
   ni  par  accident  qu'elle  eft  habitable. 
   
 ; 1  D'ailleurs quand ces vents n'y feroient  
 pas,  ne  fuffiroit-il  pas  pour  la  rendre  
 habitable  cette  égalité  continuelle  des  
 jours  6c des nuits  qui  fait  que  la  terre  
 quelque  chaleur  qu'elle  ait  contraftée  
 pendant que le Soleil  étoit  fur l'horifon,  
 a du  tems  de  refte  pour  fe  rafraîchir  
 pendant  qu'il  fe trouve  fous  l'horifon  j  
 car tout  le monde  doit  convenir  que  la  
 chaleur  confifte dans le mouvement  des  
 parties,  6c la froideur dans  leur  repos,  
 & c'eft à la  prefence  du foleil  qu'on  doit  
 le mouvement,  6c le repos à fon abfence:  
 or ces deux tems ét ant égaux,  n'eft-il pas  
 vifîble que la terre ne contraftejamais tant  
 de chaleur  en  douze  heures  qu'elle  eft  
 expofée aufoleil,  qu'ellenes'en  décharge  
 en  douze  autres  heures  qu'elle lui eil  
 oppofée.  
 C'eft cette viciffitude qui produit  ces  
 rofées  journalières  6c  abondantes  qui  
 l'humeftent,  la rafraichiiTent 6c la  rendent  
 fi fécondé.  C'eft de-là  que vient un  
 vent  de  terre  quel'onne  manque jamais  
 de  fentir  la  nuit  fi  froid  6c fi piquant  ,  
 fur tout  deux  ou trois heures avant le retour  
 du  foleil, qu'on eft obligé de fe couvrir  
 fous peine  de  contrafter de  violens  
 maux  de  poitrine}  6c c'eft encore à caufe  
 de  cela  qu'on  fent  toûjours  du  frais  
 dès  qu'on  eft  à l'ombre,  ou pour  peu  
 qu'on  foit  expofé  au  vent.  Tous  ces  
 avantages  me  paroilTent  plus  que  fuffifans  
 pour  prouver  que  la  Zone  Torride  
 eft habitable  par  elle même,  â  quoi  je  
 dois ajouter qu'elle cft encore plus agréa- 
 L ' A M E R i a U E .  If f  
 ble  6c plus feconde  que les autres parties  
 du  monde.  Il  eft plusaifé  de  fe garantir  
 du  chaud  quand il  ne  faut  pour cela que  
 fe mettre  à  l'ombre 6c au  vent,  que de  
 fe  préferver  du  froid  à  force  d'habits,  
 de  maifons bien  clofes 6c de  feu.  Je fçai  
 qu'on  pourroit  me  faire quelques objections  
 fur  ce que je  viens  de  dire,  mais  
 il  eft  fi  facile  d'y  répondre,  que  je  ne  
 croi  pas devoir  quitter  mon  fujet  pour  
 cela quant  à  prefent,  il fe trouvera  aflez  
 d'occafions de  le  faire dans la fuite dece  
 Journal.  
 La  riviere  des  Gallions  de  quelque  
 maniere  qu'on la pafle,  eft toûjours trèsdangereufe. 
   Elle  eft  large  de  trente  à /«» fa[- 
 trente-cinqtoifes. Sa profondeur eft  c o n - e f l  
 fiderable  depuis  le  banc de fable qui eft à  
 fon  embouchure,  jufqu'àunbontiersde  
 lieuë dans les terres,  où  elle  diminue 6c  
 devient  enfin  un  torrent  comme  les  autres  
 rivieres qui  ont  beaucoup de  pente,  
 6c  par  conféquent  peu  d'eau,  excepté  
 dans les baffins ou creux qu'on  trouve affez  
 fouvent dans leur  cours.  Ce qui  rend  
 fon paffage dangereux  outre  fa  profondeur  
 6c le refoulement  des eaux de la mer  
 rendant le  flux,  ce  font  les Requiens 6c  
 es  Becunes  qui  s'y  trouvent  très-fréquemment. 
   J'ai  parlé cy-devant du  Requien. 
   
 Pour  la Becune,  c'eft  une  efpece de -De/  
 brochet  de  mer,  vif,  gourmand,  vorace, 
   hardi  au  de-là  de  l'imagination.  
 Les  Efpagnols l'appellent  Paricotas-,  je  felli  
 croi  que les Anglois  lui  donnent  le même  
 nom.  On  en  a  vû  dans  cette  riviere  
 de  dix-huit  à  vingt  pieds  de  longueur, 
   6c  de  la  groiTeur  d'un  cheval.  
 Quand  la  Becunc  eft de cette taille,  elle  
 a  deux  rangs  de  dents  longues,  fortes  
 6c tranchantes,  6c comme  elle  n'eft  
 point  obligée  de  fe tourner  fur  le  côté  
 comi-pe  le  Requien  ,  quand  elle  veut  
 mordre,  elle eft infiniment  plus  dange- 
 V  z  reufe.  
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