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8 NOUVEAUX VOYAGES AUX ISLES
. faitement que dans leur plus tendre
jeunefle ils chaflent aux petits oifeaux
fans prefque jamais manquer leur coup.
Les colliers, les bracelets, le camila
6c les brodequins font les ajuftemens
des femmes} les hommes ont auffi les
leurs, ce font leur caracolis 8c leurs
plumes
Lecaracoli eft tout enfemblele nom
de la chofe & celui du métal dont elle
eftcompofée.
C e métal vient de la terre ferme,
on prétend que c'eft un mélange d'ar-
' ^ Comme les
Indiens de ces païs-là ont ces métaux
wfBirfeff^s-purs, le mé ange qui en refultc eft
c^raï- fi parfait que la couleur ne s'en ternit
jamais quelque long-tems qu''il demeure
dans la mer ou dans la terre. Ma
pçnfée eft que c'eft un métal, fimple.
Il eft aigre, graineux ¿c caiTant, &ceux
^ qui le veulent employer font obligez
de le mélanger avec un peu d'or pour
le rendre plus doux & plus traitable.
Les Orfèvres François &Anglois qui
font aux liles ont fait quantité d experiences
pour imiter ce métal. On dit
;que ceux qui en ont- approché le plus
près ont gardé cette proportion dans
i Î f p - ^ " ' ^ alliage. Sur fix parties d'argent
r"7-/fT- parties de cuivre l ou-
- g e purifié & une d'or. On fait des bagues,
des boucles, des poignées de cannes
& autres ouvrages de ce métal qui
ont une grande beauté, quoique felon
mon goût elle foit bien au deiîbus de
celle du caracoli des Indiens qui paroit
comme de l'argent furdoré legerement
avce^ quelque chofe d'éclatant
comme s'il étoit un peu enflammé.
Les caracolis que les Sauvages portent
font faits comme des croiilans de
grandeur différente felon le lieu où ils
doivent icrvir. Ils en portent d'ordinaire
un a chaque oreille, dont la dif-
Wnpe d'une cornç à l'aytre eft d'environ
deux pouces & demi, une pe^
tite chaîne avec un crochet le tient
attaché à l'oreille, au defFaut de chaî-iuo
ne ( car tous n'en ont pas) on les at-'"'"
tache avec un fil de cotton qui eftpaílé¿'
au centre du croiffant, dont l'épaifl'eur «i
eft comme celle d'une piece de quinze
fols. Ils en portent un autre de la oeême
grandeur attaché à l'entre-deux des
narrines qui leur bat fur la bouche.
L e deflbus de la levre inferieïire cft
encore percé, 6c on y attache un quatrième
caracoli qui eft un tiers, plus
grand que les precedens, 8c qui tombe
à moitié fous le menton. Enfin ils
en ont un cinquième qui a fix à fept
pouces d'ouverture, qui eft enchaffé
dans une petite planche de bois noir
cintrée en croiifant, qui leur tombe
furia poitrine, étant attaché avec une
petite corde au col. Je kiiTe à penfer
qu'elle beauté tous ces croiifans donnent
a la tête d'un homme, Si s'ils ne le
font pas reffembler à un mulet orné de
fes plaques. Lorfqu'ils ne portent point
leurs caracolis, ils ont foin de remplir
les trous qu'ils ont aux oreilles, au nez
& à la levre, avec de petits bâtons
pour les empêcher de fe boucher: ils
reflèmblent pour lors aux cochons à
qui on a mis des broches pour les empêcher
de foiiiller la terre. Qiielquefois
ils portent des pierres vertes aux
oreilles 8c à la levrej 8c quand ils n'y
ont ni pierres vertes, ni petits bâtons,
ni caracolis, ils y mettent des plumes
de perroquets ou d'Aras rouges, bleiies
8c jaunes qui leur font des mouftaches
de dix à douze pouces de long de chaque
côté au defliis 8c au deiîbus de la
bouche, fans compter ce qu'ils ont aux
oreilles ; ce qui leur donne la plus
plaifante figure du monde.
J'ai vû de leurs enfans qui avoient 4»/
quantité de plumes de différentes cou-^*¡
leurs dans leurs cheveux, ellesyétoient
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F R A N Ç O I S E S DE
attachées d'une maniéré qui les y tetoutes
droites :
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Huniiur
Cajioit
toutes tout naturel 5c tout fimple qu'il étoit,
leur donnoit un bon air.
Ils fçavent prefque tous, particulièrement
ceux de la Dominique, aftez de
mauvais François pour fe faire entendre,
8c pour comprendre ce qu'on leur
dit. II y en avoit un dans cette troupe
qui parloit François fort correétement.
Cela m'étonna 8c me donna lieu d'entrer
encouverfationavecluij c'étoitiin homme
deplusde cinquanteans, jefçûs qu'il
avoit été élevé par Monfieur Chateau-
Dubois, il avoit été baptifé 8c très-bien
inilruit, il fçavoit lire 8c écrire. Mais
il avoit quitté la Religion Chrétienne
dès qu'on l'avoit ramené à la Dominique
qui étoit fon pais, où on efperoit qu'il
aideroit aux Miiîionnaires que nous y
avions alors, ¿convertir fes compatriotes.
Je ne manquai pas de lui faire des
reproches de fon apoftafie ; à quoi il me
répondit que s'il fût né de parens Chrétiens
, ou qu'il eiJt toujours demeuré
avec des François, il auroit continué de
vivre en Chrétien ; mais qu'étant retourjné
en fon pais, il n'avoit pû fe refoudre
àne pas vivre comme les autres, 8c à effuyer
les injures 8c les mépris de fes parens.
Je lui offris de l'établira la Martinique,
8c de lui faire donner de la terre
pourlui 8c pour fa famille j à peine écouta
t-il mes offres. Je connus que je parlois
à un fourd, 8c que le libertinage oi:i il vivoit,
jointàl'indifterence naturelle que
les Caraïbes ont pour là Rel igion, l'avoit
rendu incapable de penfer à fon faint.
II.n'y a que trois chofes dans lefquelles
on ne remarque point que les Caraïbes
foient indifterens. C'eft dans ce qui
regarde leurs femmes} ils en font fi jaloux,
qu'ils les tuent fur le moindre
foupçon. Ils font vindicatifs, 8c fur cet
^om.IL ' • -
L » A M E R I C i . U E . 9
article^il n'y a gueres de gens au monde 1^94.
plus vifs 8c plus aftifs à chercher les occafîons
de fe vanger dès qu'ils ont été
une fois offenfez. Et en troifiéme lieu,
ils ont une pafïïon extrême pour l'eau-dev.
ie 8c les autres liqueurs fortes} ils donnent
tout ce qu'ils ont pour en avoir, 8c
en boivent jufqu'à l'exces. Hors ces trois
points tout le refte du monde n'eft pas
capable de les émouvoir.
Tout ce qu'on a fait jufqu'à prefent
pour les inftruire 8c leur faire embraifer
la Religion Chrétienne, a été
inutile. Nôtre Ordre y a entretenu Xîia?«}-
pendant plus de trente ans des Miffion->»»«-
naires qui avoient étudié leur langue ,
qui vivoient avec eux , qui leur avoient
enfeignéle Catéchifme 8c les Prieres, ¿»«"V«-
8c qui ne négligeoient rien de tout ce
qui pouvoir les gagner à Dieu, 8c tout Z Z '
cela fans aucun fruit. Les Peres Raymond
Breton , 8c Philippes de Beaumont,
Religieux de nôtre Ordre de la
Province de S. Louis, ont demeuré plus
de vin^t-cinq ans à la Dominique fans
avoir pu faire autre chofe que de baptifer
quelques enfans qui étoient à l'article de
la mort, 8c des malades qu'ils étoient moralement
fiârs de voir mourir dans quelques
momens. Ce n'eft pas qu'ils n'euffent
pû en baptifer un grand nombre} mais
comme ils connoiifoieiit leur mauvais
naturel, leur inconftatice 8c leur indifference
qui leur fait regarder comme des
jeux les aftions les plus ferieufes, ils ne
vouloient point exppfer à une prophanation
certaine le Sacrement que plufieurs
leur demandoient avec inftance ,
fachant bien qu'ils ne le demandoient
qu'en vûe des prefens que les'pareins
qu'on leur procuroit ne manquoient jamais
de leur faire, mais toujours difpofcz
à retourner à leur vomifiément, 8c
à recevoir dé nouveau lé Baptême, fi ce
Sacrement pouvoit fe reiterer autant dô
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