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deux Nègres à cette chaflè. Ils ont foin
de tendre leurs attrapes fur le foir & de
les mettre en diflfercns endroits, non
feulement au bord, mais auifi dans le
milieu des cannes ^ "Se pour reconnoitre
les lieux où ils en ont mis, ils font un
noeud à la tige de la canne, au pied de
laquelle ils ont mis le panier. Il eit dn
devoir du Commandeur de voir fouvent
fi les noeuiJs qui font aux cannes font
garnis d'attrapes, fi les panniers font en
bon état & foui-nis d'amorce} & d'averrir
les chaileurs dis endroits où il a remarqué
que les rats font du dommage,
fur tout au lizieres des bois, aux endroits
qui font proche des cafes des Negres
ou des ravines, 6c â côté des pieces
de cannes que l'on a brûlées dans l'habitation,
ou chez les voifîns. Comme ces
chaileurs font exempts de tout autre travail,
on les oblige de fe pourvoir de
crabes pour amorcer leurs attrapes, Sc
lianncs pour entretenir leurs paniers
pour accommoder les barrieres conjointement
avecles cabrouettiers, quand
ils en ont le tems. Surquoi il ne faut
pas toûjours les en croire à leur parole,
mais veiller foigneufement fur leur travail
& fiir l'emploi qu'ils font de leur
tems.
L e nombre des paniers fe regie
felon la quantité de rats dont on eft
incommodé , non feulement dans les
cannes, mais encore dans le manioc,
dans le mil, dans les cacaoyeres êc
en d'autres endroits , oil il ne faut
pas négliger de mettre des attrapes,
f a r c e que ces animaux multiplient infiniment
; & ils ont cela d'incommode
à la Martinique qu'ils attirent
les ferpens dans les lieux oii ils s'aflemblent,
parce que les ferpens s'en nourriiTent,
& imitent même leur cri pour
les faire venir: mais cela n'efl: pas capable
de les détruire , parce que le
ferpent ne digérant ce qu'il a avalé Kjit
que par la corruption Se par la diiTolution
de l'animal même, il eft affez
long-tems fans avoir befoin de nourriture
quand il a deux ou trois rats dans
le corps.
On s'étonnera peut-être pourquoi on l'ulm
n'entretient pas des chats pour détruire "i'"'''®
les rats: furquoi il faut fçavoir que les Ne- T ""
grès font autant ennemis des chats que ''
les chats le font des rats. Il n'y a rien
qu'ils ne falTent pour les attraper & pour
les manger. D'ailleurs il femble que les
fchats fe fententdela douceur du climat,
qui porte à l'indolence 8c à la faineantife :
comme ils trouvent aiTez d'anolis pour
fe nourrir & pour fe divertir à leur
chafle, ils s'en contentent 8c ne touchent
point aux rats. On éleve en leur place
des chiens qui font merveille à pourfuivre
& à prendre les rats. Au refteles
cannes ratées , c'eft-à-dire celles qui
ont été entamées par les rats, s'aigriffent
prefque auiîî-tôt ; le dedans devient
noirâtre i elles font abfolument
inutiles à faire du fucre, êcne peuvent
fervir tout au plus qu'à faire de l'eau-devie.
On voit par ce que je viens de dire
ci-devant, l'attention qu'on doit avoir
pour la culture des cannes, & combien
il importe de les garantir des rats j mais
il faut encore avoir un très-grand foin
qu'elles ne foient pas ravagées par les
chevaux, les boeufs, les moutons, les
cabrittesSc parles cochons, 6c même par
lesNegres qui y font fouvent de grands
degats, foit pour eux, foit pour donner
à eurs cochons quand on eur permet
d'en nourrir.
A propos des Negres & des cochons,
je me fouviens de deux avantures, qui
m'arriverent, l'une à la Martinique, &
i ' a u t r é à la Guadeloupe, oîi les cannes
de nos habitations étoient en proye
de-
F R A N C O I S E S DE L'AMERIQ^UE. z^ p
ces de cannes qui étoit à côté de la ca-
Mje,
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liijiî. depuis plufieurs années aux Negres ôc
aux cochons, avec un dommage fi confiderable
qu'on trouvoit fouvent des
pieces de cannes abfolument ruinées.
¡¡¡¡luire Nous avions une trop proche voifine
iiln au fond Saint Jacques, qui nourriiToit
tïKJ'e/'î quantité de cochons à nos dépens. Elle
ne fe contentoil pas d'un canton de
cannes qu'on lui avoit abandonné par
3ure honnêteté, 6c des têtes qu'on lui
ailîbit prendre à difcretion, quand on
faifoit du fucre : elle avoit la malice
de faire fortir la nuit fes cochons du
parc où ils étoient enfermez, d'où ils
alloient dans nos cannes qui étoient à
la liziere de fa iîxvanne; ils y paiToient
toute la nuit, & le matin ils revenoient
c h e i elle au fon d'un cors ou d'un lambis
avec quoi on les rappelloit. Mes predecefleurs
avoient fait tout leur poiîible
pour reprimer cette licence, fans en pouvoir
venir à bout. Je ne manquai pas de
faire la mêmechofe dès que je fus Syndic,
pour l'obliger à retenir fes cochons.
Je la preflai du côté de la confcience, Sc
voyant que cela ne produifoit aucun effet
, je me fervis du droit commun
qu'ont tous les habitans de faire tuer
les cochons de leurs voifîns qulils trouvent
dans leurs terres, & prennent pour
eux la tête pour le prix de la poudre Se
du plomb que l'on a employé à les tuer.
Le remède fit fon-efïet pendant quelques
jours; elle retint fes cochons ; mais
voyant qu'ils maigriffbient dans fon
parc, parce que ces animaux aiment fort
à courir, elle recommença à les laiiîer
aller dans nos cannes. Je recommençaià
faire tuer & fur tout les ti'uyes, afin
dé me délivrer au plutôt de ces fâcheux
voifins. Ce manege dura un an; à la fin
je me misencolere, 6c je refolus d'employer
un remede plus violent. Je défiflai
de faire tuer les cochons ; mais je
fis faire un chemin dans une de noi pieeaotiere
de cette bonne voifine : 6c
quand on m'aveitiflbit qu'il y avoit des
cochons dans les cannes, je les faifois
compter, & aufli-tôt j'envoyois autant
de boeufs par le chemin que j'avois fait
faire dans fa cacaotiere. On peut aifcment
s'imaginer le dommage qu'ils
y faifoient. Nôtre voifine ne manquoit
pas de venir s'en plaindre, 6c le faifoit
quelquefois avec beaucoup d'cmporteraent.
Je ne manquois pas auffi de lui
faire des excufes de la negligence de
mes gens, 6c la payant de mêmes paroles
dont elle m'avoit fouvent payé, je lui
dîfois qu'entre voifins il ne fiilloit pas regarder
de fi près, 6c qu'il falloir fouiFrir
quelque chofe les uns des autres. A la fin
elle Comprit que mes boeufs fe trouvant
toûjours en nombre égal à celui de fes
cochons, cen'étoit pas le hazard qui les
conduifoit, 6c que fi cela duroit, faca-.
caotiere ièroit bien-tôt ruinée. Elle vint
enfin me demander la paix, 6c me promit
de retenir fes cochons, 6c moi je
l'aflurai que nos bcéufs n'entreroient jamais
chez elle que par les chemins que
fes cochons leur ou vriroient. Cefutainfi
que je me délivrai de ces vifites ruineufes.
L'autre avanture m'arriva à la Gua- ^¡^¡rt
deloupe. Je remarquai dès que je fus h i f t oh- e
chargé du fom de nos biens, que les f"'', ^^
cannes que nous avions auprès du chemin
par où les Negres alloient à la '
montagne des diables, étoient entièrement
ruinées par le paiTage de ces
chaileurs, qui ne manquoient pas d'emporter
avec eux leur provifion de cannes
, 5c d'en manger à difcretion à leur
retour. Je les avertis de ne plus toucher
aux cannes, ou que je leur interdirois le
chemin. Mais comme je fçavois que
ç'auroit été un procès que j'aurois eu
peine à gagner, parceque lachalle étant
libre
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